Mer 20 Déc - 21:54
Maltraitance à la chaîne
FT. Val'Ihem Karmine
Le tremblement de terre des attentats d’Opale et de l’échec de la mission à Yfe donnaient encore lieu à des répliques dans les nations d’Urh. Mais on n’en était plus à laisser la poussière retomber. Et, malgré un futur incertain, la vie continuait.
Sauf que toute cette histoire avec considérablement écorné le crédit d’Epistopoli. Avoir conservé plus de trente ans au sommet du pouvoir l’ennemi suprême suffisait pour inspirer une méfiance durable aux autres nations. Le Grand Sapiarque n’avait de cesse de multiplier les manœuvres pour tenter de blanchir la ville du Savoir des manigances du XIIIème Cercle en menant la traque contre lui. Il déchaînait une tempête médiatique.
Mais toutes les petites malversations établies depuis longtemps passaient plus mal maintenant. L’exemplarité promise était raillée ouvertement à la radio et dans les troquets. Car la situation sanitaire et sociale dégradée de la Basse-Ville ne faisait qu’aller de mal en pis. La gronde menaçait.
Quand les élites se réfugiaient dans des tours étincelantes de modernité, les classes populaires succombaient à la dissentrie, à la sous-alimentation, à la pneumonie ou encore la rouille qui rongeait la peau des ferrailleurs. Keshâ’rem n’échappait pas à cette culpabilité.
Il vivait lui aussi au sommet de l’une de ces tours éclatantes, après avoir fui sa condition. Qu’avait-il fait pour ses pairs ? Rien. Il se contentait de chanter au Marquis et de vivre une vie d’aventure. Même si sa transformation récente en portebrume l’avait forcée à redescendre de son nuage. La rapacité du monde lui revenait en pleine face.
Il avait voulu aller trop haut, oubliant sa place. A présent, c’est à peine s’il osait sortir de chez lui. Quand Seraphah, son protecteur, lui parla des scandales industriels qui secouaient la basse-ville, il ne savait pas trop quoi penser. Certes, il avait ses entrées chez les prolétaires et ne se ferait pas remarquer en se faisant passer pour un ouvrier d’usine payé à la journée. Mais… allait-il encore tout foirer ? Allait-il encore enchaîner les mauvaises décisions et se mettre en danger inutilement ? Plus que jamais, il doutait de lui. Il doutait de sa capacité de jugement. Et il devait bien admettre qu’il avait peur.
Mais le sapiarque était un homme puissant et un humaniste. Être ses yeux et ses oreilles, c’était avoir enfin une chance de faire la différence. Si les maltraitances étaient avérées – il était sûr qu’elles l’étaient, ce serait l’occasion de rendre justice.
Alors il y est allé, dans cette aciérie dirigée par le magnat Hans de Tiersen. C’est sa deuxième journée près des hauts fourneaux. Le moins que l’on puisse dire est que la concurrence est féroce entre les ouvriers et les conditions de sécurité absentes. Keshâ a déjà vu un grand brûlé et une personne perdre deux doigts en 24 heures. Les contremaîtres n’hésitent pas à se répandre en insultes et en coup de pied au derrière de ceux qu’ils considèrent comme des tire-au-flanc. Héritant d’une claque derrière la tête, Keshâ ramasse son bandeau et essuie la transpiration au milieu d’un visage noirci par la fumée.
Le constat est déjà accablant, mais c’est sans doute le cas dans la plupart des usines epistotes. Les pauvres se crèvent à la tâche pour des rendements minables et les riches s’engraissent en se gargarisant de leurs succès méritoires. Bon. C’est insuffisant pour justifier l’ampleur des rumeurs.
Il en est encore à se demander comment creuser plus quand quelque chose attire son attention…
Dernière édition par Keshâ'rem Evangelisto le Mar 25 Juin - 14:54, édité 1 fois
Lun 1 Avr - 22:49
Maltraitance à la chaîne
FT. Keshâ'rem Evangelisto
- Val ? Tu m’entends ?
- Hum ?
Cette journée était d’un ennui total… Levé aux aurores, inspections des troupes, entraînement dans la boue, déjeuner fade… Le reste de la journée promettait… Entre la plus constante, une réunion de commandement inintéressante, le stand de tir avec mes hommes, et probablement un autre repas sans goût, je risquais de mourir d’ennui avant que cette journée ne soit finie. J’aurais volontiers troqué toute cette tranquillité pour la brume hostile d’une expédition. Mais pas de mission en vue. Les troupes n’étaient pas prêtes. Et je devais jouer mon rôle de commandant. C’était ce qui était attendu de moi. Et si je voulais encore progresser au sein de l’armée, je devais montrer que je pouvais mener toutes ces tâches à bien. Mais qu’est-ce que je pouvais m'ennuyer…
- Désolé Samy. J’avais la tête ailleurs. Cette journée m’épuise déjà.
- Dis-toi que le plus vite les hommes seront prêts et le plus vite on repartira en expédition.
- Vivement que ce soit le cas.
Je savais que les troupes n’étaient pas prêtes. Et je savais que Samy bouillait de la même envie que moi de partir en expédition. Mon second faisait des pieds et des mains pour accélérer la formation. Je pouvais compter sur lui. Son enthousiasme me fit sourire. Tout ce que nous faisions n’était pas en vain. L’épreuve du feu pour les nouvelles recrues ne tarderait plus. J’avais la chance d’avoir cet ami à mes côtés. Il savait toujours quoi dire. Mais il savait aussi comment plomber l’ambiance.
- Allez, on devrait y aller. Les autres gradés vont nous attendre pour la réunion.
- Hum… Allons y alors.
Je préférais encore le stand de tir à ces réunions barbantes. Mais je ne pouvais pas y échapper. Surtout dernièrement. Tout doit être parfait. C’était devenu le moto de la nation dans les hautes sphères. Et l’armée n’y échappait pas. Un pli de travers sur la couverture de son lit lors de l’inspection matinale, et la police militaire pouvait être envoyé pour réprimander ce comportement insouciant. Il fallait bien que je me plie à ces règles moi aussi. Alors je prenais place dans la salle circulaire, m’enfonçant dans le même siège qu’à l’accoutumée, attendant que notre chef de faction nous fasse son débriefe, nous demande les nôtres et nous laisse repartir. Pendant ce temps, je pouvais écouter d’une oreille lointaine et rêver d’une expédition à venir. Ça ne se passa pas exactement comme ça.
- Commandant Karmine c’est vous qui serez envoyé en inspection à l’usine.
Tout à coup, mon cerveau se réactiva. Je repassais en revue ce qui avait été dit juste avant, essayant de me souvenir de choses que j’avais à moitié écoutées. Il avait parlé d’une usine et d’une inspection. Ils soupçonnaient des activités illicites de prendre place dans l’usine. Et il fallait y mettre un terme. Ce n’était pas très passionnant, mais plus que d’aller au stand de tir. Mais pourquoi moi ? Cette assignation sortait de mes attributions habituelles. Bon, je ne pouvais de toute façon pas me désister. J’acceptais la mission et laissais le briefing se poursuivre, n’écoutant absolument plus le reste de la réunion et parcourant le dossier qui m’avait été tendu concernant ma nouvelle mission.
Ils n’avaient pas beaucoup d’informations à me fournir. L’usine était dans la basse ville. Nous savions déjà que les ouvriers y étaient maltraités. Enfin… Pas plus qu’autre part. Les mauvaises conditions de travail, une mauvaise paie, pas d’assurance perte de membre, mais tous ces problèmes étaient moins importants que ceux des employés en dehors de l’usine et leur travail. Il n’avait pas le choix de s’y rendre tous les jours. Pour moi, c’était déjà une raison suffisante pour faire fermer l’usine. Mais je n’étais pas dupe. Une usine ne changerait rien et que deviendrait ces travailleurs si on leur retirait leur seule rémunération.
Ce qui était une raison pour mes supérieurs d’aller investiguer, c’était tout ce qu’il se passait dans l’arrière-boutique. Ou plutôt tout ce qu’il pensait qu’il s’y passait. Il y avait eu trop de disparitions dernièrement. Et la fumée s’était faite de plus en plus visible. Les rares indices ne laissaient rien présager de bon : trafic d’être humain, expériences scientifiques, vol d'organes, ventes aux enchères illégales, blanchiment d’argent… La liste continuait. En fait, il n’avait aucune idée exacte de ce qu’il s’y passait. Et c’était pour ça qu’il fallait y envoyer quelqu’un. Mais pourquoi moi ? J’attendais que la réunion soit finie pour me lever et aller parler à mon supérieur.
- Monsieur, pourquoi m’avoir choisi pour cette mission ? Je ne suis ni un espion, ni un inspecteur.
- Karmine… Il ne faut parfois pas chercher très loin. Combien de fois m'avez-vous demandé d’en faire plus ? Je sais que vous avez de l’ambition. C’est l'occasion de nous prouver que vous êtes plus qu’un simple soldat.
Les paroles résonnèrent gaiement à mes oreilles. Je ne pouvais pas en demander plus. Et je n’avais pas besoin d’autres explications. Il était temps de se mettre au travail. J’ouvrais le dossier et cherchais plus d’informations. Il devait bien y avoir un indice sur comment j’allais faire pour infiltrer les lieux. Ce n’était pas comme si j’allais pouvoir sonner à la porte dans mon uniforme de soldat et demander d'aller inspecter les lieux. Et l’information était bien là, encore noir sur papier blanc. Est ce qu’ils se fout*nt de moi ?
- Hum ?
Cette journée était d’un ennui total… Levé aux aurores, inspections des troupes, entraînement dans la boue, déjeuner fade… Le reste de la journée promettait… Entre la plus constante, une réunion de commandement inintéressante, le stand de tir avec mes hommes, et probablement un autre repas sans goût, je risquais de mourir d’ennui avant que cette journée ne soit finie. J’aurais volontiers troqué toute cette tranquillité pour la brume hostile d’une expédition. Mais pas de mission en vue. Les troupes n’étaient pas prêtes. Et je devais jouer mon rôle de commandant. C’était ce qui était attendu de moi. Et si je voulais encore progresser au sein de l’armée, je devais montrer que je pouvais mener toutes ces tâches à bien. Mais qu’est-ce que je pouvais m'ennuyer…
- Désolé Samy. J’avais la tête ailleurs. Cette journée m’épuise déjà.
- Dis-toi que le plus vite les hommes seront prêts et le plus vite on repartira en expédition.
- Vivement que ce soit le cas.
Je savais que les troupes n’étaient pas prêtes. Et je savais que Samy bouillait de la même envie que moi de partir en expédition. Mon second faisait des pieds et des mains pour accélérer la formation. Je pouvais compter sur lui. Son enthousiasme me fit sourire. Tout ce que nous faisions n’était pas en vain. L’épreuve du feu pour les nouvelles recrues ne tarderait plus. J’avais la chance d’avoir cet ami à mes côtés. Il savait toujours quoi dire. Mais il savait aussi comment plomber l’ambiance.
- Allez, on devrait y aller. Les autres gradés vont nous attendre pour la réunion.
- Hum… Allons y alors.
Je préférais encore le stand de tir à ces réunions barbantes. Mais je ne pouvais pas y échapper. Surtout dernièrement. Tout doit être parfait. C’était devenu le moto de la nation dans les hautes sphères. Et l’armée n’y échappait pas. Un pli de travers sur la couverture de son lit lors de l’inspection matinale, et la police militaire pouvait être envoyé pour réprimander ce comportement insouciant. Il fallait bien que je me plie à ces règles moi aussi. Alors je prenais place dans la salle circulaire, m’enfonçant dans le même siège qu’à l’accoutumée, attendant que notre chef de faction nous fasse son débriefe, nous demande les nôtres et nous laisse repartir. Pendant ce temps, je pouvais écouter d’une oreille lointaine et rêver d’une expédition à venir. Ça ne se passa pas exactement comme ça.
- Commandant Karmine c’est vous qui serez envoyé en inspection à l’usine.
Tout à coup, mon cerveau se réactiva. Je repassais en revue ce qui avait été dit juste avant, essayant de me souvenir de choses que j’avais à moitié écoutées. Il avait parlé d’une usine et d’une inspection. Ils soupçonnaient des activités illicites de prendre place dans l’usine. Et il fallait y mettre un terme. Ce n’était pas très passionnant, mais plus que d’aller au stand de tir. Mais pourquoi moi ? Cette assignation sortait de mes attributions habituelles. Bon, je ne pouvais de toute façon pas me désister. J’acceptais la mission et laissais le briefing se poursuivre, n’écoutant absolument plus le reste de la réunion et parcourant le dossier qui m’avait été tendu concernant ma nouvelle mission.
Ils n’avaient pas beaucoup d’informations à me fournir. L’usine était dans la basse ville. Nous savions déjà que les ouvriers y étaient maltraités. Enfin… Pas plus qu’autre part. Les mauvaises conditions de travail, une mauvaise paie, pas d’assurance perte de membre, mais tous ces problèmes étaient moins importants que ceux des employés en dehors de l’usine et leur travail. Il n’avait pas le choix de s’y rendre tous les jours. Pour moi, c’était déjà une raison suffisante pour faire fermer l’usine. Mais je n’étais pas dupe. Une usine ne changerait rien et que deviendrait ces travailleurs si on leur retirait leur seule rémunération.
Ce qui était une raison pour mes supérieurs d’aller investiguer, c’était tout ce qu’il se passait dans l’arrière-boutique. Ou plutôt tout ce qu’il pensait qu’il s’y passait. Il y avait eu trop de disparitions dernièrement. Et la fumée s’était faite de plus en plus visible. Les rares indices ne laissaient rien présager de bon : trafic d’être humain, expériences scientifiques, vol d'organes, ventes aux enchères illégales, blanchiment d’argent… La liste continuait. En fait, il n’avait aucune idée exacte de ce qu’il s’y passait. Et c’était pour ça qu’il fallait y envoyer quelqu’un. Mais pourquoi moi ? J’attendais que la réunion soit finie pour me lever et aller parler à mon supérieur.
- Monsieur, pourquoi m’avoir choisi pour cette mission ? Je ne suis ni un espion, ni un inspecteur.
- Karmine… Il ne faut parfois pas chercher très loin. Combien de fois m'avez-vous demandé d’en faire plus ? Je sais que vous avez de l’ambition. C’est l'occasion de nous prouver que vous êtes plus qu’un simple soldat.
Les paroles résonnèrent gaiement à mes oreilles. Je ne pouvais pas en demander plus. Et je n’avais pas besoin d’autres explications. Il était temps de se mettre au travail. J’ouvrais le dossier et cherchais plus d’informations. Il devait bien y avoir un indice sur comment j’allais faire pour infiltrer les lieux. Ce n’était pas comme si j’allais pouvoir sonner à la porte dans mon uniforme de soldat et demander d'aller inspecter les lieux. Et l’information était bien là, encore noir sur papier blanc. Est ce qu’ils se fout*nt de moi ?
**********
4 mois plus tard
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J’ouvrais la porte de la voiture dont le moteur était encore chaud. Un gros bonhomme s’extirpa tant bien que mal de la voiture et posa un pied lourd au sol. Le collectionneur me répugnait. Certes, ce n’était pas la pire des crapules. Il ne trempait pas dans les pires escroqueries, ni les pires crimes qu’on pouvait imaginer dans la basse ville. Mais il avait de l’argent dans un monde où tout le monde en manquait. Il le savait et il se sentait bien supérieur aux communs des mortels comme nous. Je m’étais dit que devenir son garde du corps serait plutôt simple et qu’il m’ouvrirait les portes de l’usine. C’était vrai. Mais j’avais également appris à le détester. Bon sang ce que Samy pouvait me manquer.
Je suivais l’homme en retrait, assurant ma position de garde à la perfection. Il me faisait confiance maintenant. Suffisamment, pour que je suive ses moindres faits et gestes avec sa garde rapprochée. Suffisamment, pour que je l’accompagne enfin lors de ses sorties à droite à gauche plutôt que de rester dans son manoir grandiloquent au milieu des ruines des habitations pauvres. L’homme se targuait de collectionner ce que personne d’autre ne pouvait espérer toucher ici-bas. Il avait même quelques artefacts qui auraient fait pâlir d’envie les gens de la haute ville. Et qui en aurait probablement fait rire plus d’un également. C’était la raison pour laquelle il préférait être le roi parmi les mécréants.
Il entra dans l’usine qui tournait à pleins régimes. La soirée avait beau approcher et pourtant, les ouvriers ne chômaient pas. Ils n’avaient pas vraiment le choix… Je suivais mon maître sans rien dire, jetant un coup d'œil aux alentours. C’était la deuxième fois que je venais ici. La deuxième fois et je n’avais encore rien appris. J’avais pourtant fait mes devoirs. J’avais pris le temps de recenser hommes et femmes qui travaillaient ici. Évidemment, avec le risque de blessure, le turnover était important. Et mes informateurs étaient précis. Je savais presque qui était le prochain remplaçant des travailleurs qui ne s’étaient même pas encore blessé ou pire. Et je n’avais encore trouvé aucune faille.
Alors qui était-il ? Un jeune homme aux cheveux entièrement blanc nous fixait étrangement alors que nous étions entrés dans l’usine. Son regard dévoilait une curiosité que les autres travailleurs gardaient pour eux. La peur des représailles était trop grande. Personne ne se risquait à être trop curieux, surtout quand cela concernait les sous-sols de l’usine. C’est justement là que nous allions.
Je dus reporter mon attention sur mon employeur qui était arrivé à une porte sécurisée au bout de l’usine. Il échangea quelques mots avec un homme qui lui ouvrit la porte. Je me dépêchai de le rejoindre pour descendre les escaliers avec les deux autres gardes qui nous accompagnaient. Ces derniers débouchaient sur une autre porte qu’un autre homme nous ouvrit. Alors le son des machines et l’odeur de l’alcool se rependirent dans l’escalier. Je détestais ce lieu.
Je suivais l’homme en retrait, assurant ma position de garde à la perfection. Il me faisait confiance maintenant. Suffisamment, pour que je suive ses moindres faits et gestes avec sa garde rapprochée. Suffisamment, pour que je l’accompagne enfin lors de ses sorties à droite à gauche plutôt que de rester dans son manoir grandiloquent au milieu des ruines des habitations pauvres. L’homme se targuait de collectionner ce que personne d’autre ne pouvait espérer toucher ici-bas. Il avait même quelques artefacts qui auraient fait pâlir d’envie les gens de la haute ville. Et qui en aurait probablement fait rire plus d’un également. C’était la raison pour laquelle il préférait être le roi parmi les mécréants.
Il entra dans l’usine qui tournait à pleins régimes. La soirée avait beau approcher et pourtant, les ouvriers ne chômaient pas. Ils n’avaient pas vraiment le choix… Je suivais mon maître sans rien dire, jetant un coup d'œil aux alentours. C’était la deuxième fois que je venais ici. La deuxième fois et je n’avais encore rien appris. J’avais pourtant fait mes devoirs. J’avais pris le temps de recenser hommes et femmes qui travaillaient ici. Évidemment, avec le risque de blessure, le turnover était important. Et mes informateurs étaient précis. Je savais presque qui était le prochain remplaçant des travailleurs qui ne s’étaient même pas encore blessé ou pire. Et je n’avais encore trouvé aucune faille.
Alors qui était-il ? Un jeune homme aux cheveux entièrement blanc nous fixait étrangement alors que nous étions entrés dans l’usine. Son regard dévoilait une curiosité que les autres travailleurs gardaient pour eux. La peur des représailles était trop grande. Personne ne se risquait à être trop curieux, surtout quand cela concernait les sous-sols de l’usine. C’est justement là que nous allions.
Je dus reporter mon attention sur mon employeur qui était arrivé à une porte sécurisée au bout de l’usine. Il échangea quelques mots avec un homme qui lui ouvrit la porte. Je me dépêchai de le rejoindre pour descendre les escaliers avec les deux autres gardes qui nous accompagnaient. Ces derniers débouchaient sur une autre porte qu’un autre homme nous ouvrit. Alors le son des machines et l’odeur de l’alcool se rependirent dans l’escalier. Je détestais ce lieu.
Mar 2 Avr - 17:30
Maltraitance à la chaîne
FT. Val'Ihem Karmine
Keshâ’rem ne se sentait pas en droit de trouver la cadence de travail insupportable. Pas après toutes les largesses et la santé dont il avait bénéficié ces derniers mois. Mais il était inutile d’être un génie pour comparer sa carrure à celles des hommes bien bâtis. Un freluquet comme lui ne ferait pas long feu dans un travail aussi endurant.
Il avait essayé de faire du charme à Mars, d’une œillade discrète à la pause. Le contremaître était aussi appréciable qu’un Fledermaus. Cependant, derrière sa rudesse, Keshâ croyait deviner un attrait. Son expérience le trompait rarement. Cette fois il avait un peu trop bien vu, car Mars n’assumait pas ses inclinations. Il réagissait par une violence disproportionnée. Matraque sous le menton, écrasé contre le mur, le jeune homme était partiellement soulevé par son tablier gris informe, aussi gris et informe que le ciel pollué au-dessus de l’usine.
-« T’as cru que j’étais un inverti minable ? T’avise plus de m’approcher ou je te casse les dents ! »
Et il le rejeta abruptement plus loin, avant de lui asséner un violent coup au derrière de ses semelles cranteés. Son séant encore douloureux, il s’en allait avec rancœur pour cette brute. Mais il ne fallait pas faire de vague. Dommage, il avait espéré le faire parler sur des activités inhabituelles. Les ouvriers, bavards comme des tombeaux, semblaient le suggérer dans leurs attitudes.
Il tenta de retrouver l’attitude soumise qui le caractérisait avant que Seraphah ne vienne le chercher dans la basse-ville. Menton baissé, épaules rentrées, pas chancelant, allure de fantôme, yeux inexpressifs, sauf une pointe de mélancolie. L’exercice était un peu trop immersif et régressif pour son propre bien.
Il en était à se demander par quel angle attaquer pour trouver une piste en ce début de soirée. C’était sa dixième heure de travail, quand il vit entrer un homme. A son habit, tout ce qu’on pouvait prédire est qu’il était important. Avec de l’embonpoint, une chaîne pendant de la poche de son veston, un grand cigare entre les dents jaunies, un visage suffisant et empâté. Les ouvriers s’écartaient instinctivement de son passage. Son regard planait au-dessus d’eux comme s’ils surplombaient une vermine nauséabonde. Il leur faisait grâce de son mépris.
Plus loin, ce qui ressemblait à un garde du corps le talonnait. Il baissa prestement ses yeux lavande pour se dérober à la scrutation du protecteur, avec l’espoir que sa curiosité serait mise sur le front de la jeunesse. De son bandeau, il essuya son visage de suie au mieux et rajusta ses cheveux cendrés, toujours un peu humides d’effort, avant de se diriger vers un endroit discret en contournant le pont de coulée d’acier en fusion. Il avait toujours peur de passer à côté de ces installations et frémit à côté du tourniquet à l’idée des accidents qui pourraient survenir à tout instant.
De son poste derrière les machines, il croyait n’être visible de personne et pouvait observer la progression de l’homme au cigare et de son garde-du-corps vers le fond de l’usine. Ils se dirigeaient vers une porte sécurisée qu’il n’avait pas eu le loisir de remarquer jusqu’ici. "On dirait que les choses bougent enfin", se dit-il. Keshâ se rendit compte que l’escorte incluait un nombre plus important d’hommes armés. Ils étaient quatre en comptant l’homme au cigare.
Lorsque le dernier s’engagea dans l’escalier vers le sous-sol, le battant de la porte resta en suspend une seconde. Dans un battement de cœur, il se figea. C’était le moment ou jamais de mettre à profit son entraînement. Son regard d’améthyste fixa intensément la porte. Juste le temps d’une rapide inspiration et il se téléporta contre elle avant qu’elle ne claque. Un regard en arrière, tout le monde était trop affairé, on ne l’avait pas vu. Sans un bruit, il avait seulement cessé d'être à un endroit pour être ailleurs, comme l'on plie une feuille de papier, l'espace était pour lui un origami.
Mais c’était la première fois qu’il réussissait aussi proprement un déplacement à plus de cent mètres.
Il enleva une chaussure pour la placer dans l’entrebâillement et se hâta de rejoindre le bureau de Mars avant qu’on ne le remarque. Avant d’entrer, il tenta d’écouter pour voir si quelqu’un d’autre était avec lui. Il avait l’air de faire des papiers. Nouvelle concentration. Il laissa monter en lui l’air de piano que jouait Seraphah durant leur dernier spectacle au Marquis, donnant tout l’espace aux notes dans sa sensibilité. Les pensées étaient souvent associées aux mots, mais elles étaient avant tout notes de musique. C’est cette mélodie qu’il transmit par l’esprit au contremaître interloqué.
-« C’est quoi ce bordel ?! »
Keshâ accrut la pression de son cristal d’inertie pour insuffler des vertus somnifères à sa mélodie. Mars n’était pas doté d’une volonté de fer. Son front tapa rapidement le bureau. Fermant la porte derrière lui, il se dépêcha de retirer les vêtements de Mars. Il continuait à fredonner entre ses lèvres pour le maintenir dans un sommeil profond. Un réveil accidentel à la manipulation n'était pas une variable acceptable. Malgré une peur sourde qui brouillait son champ de vision, il était assez fier de la finesse de son utilisation de ses cristaux. Avant il devait élever la voix et chanter pour parvenir au même résultat. Il avait appris à combiner ce pouvoir à la télépathie pour passer inaperçu. Substituer sa voix à un souvenir auditif prégnant était une innovation récente. Encore un fruit de l’entraînement draconien prodigué par Maëlstrom.
Dépouillé de sa casquette et de son uniforme, Mars fut abandonné en sous-vêtement, dans son fauteuil. Ni attaché, ni bâillonné. Passé le ridicule, on le chercherait. Il voulait qu'il ait trop honte pour expliquer cette situation loufoque et alerter la sécurité en passant pour un pochtron s'étant fait berner par une pute au travail. Keshâ lui vola sa clef pour l’enfermer dans le bureau, une fois revêtu de l’uniforme de contremaître, un peu trop grand pour lui. Il avait maintenant la boule au ventre, car il y avait quelque chose de définitif dans son effraction. S’il était repéré, il ne pourrait plus feindre l’innocence et tous les dangers de l’usine viendraient à sa rencontre.
Il cacha ses vêtements sous un tuyau fumant avant de marcher de la démarche la plus assurée possible vers la porte sécurisée. Par chance, personne n’était passé par ici en cinq minutes. La porte n’avait pas claqué, sans quoi, il serait resté bête face au digicode.
Son cœur battait tellement fort, qu’il croyait qu’il allait perdre connaissance. La lumière blafarde le giflait avec une redoutable acuité. Le boom boom de son cœur continuait à frapper dans ses tempes, quand il claqua la porte sécurisée. Il remit sa chaussure en tremblant. Les escaliers dévalaient devant lui. Son pied s’engagea sur la première marche, redoutant d’apercevoir une silhouette en sens inverse. S’il s’était doté de la carte d’accès et de la matraque de Mars, il doutait que les hommes ne se connaissent pas tous. Baisser le regard sous la casquette dans la pénombre était une option assez limitée. Mieux valait ne rencontrer personne du tout.
Plus bas, il crut discerner des éclats de voix indistincts. Impossible de savoir ce qui était dit. Ni combien de personnes se trouvaient là. Ni quelle était la disposition des lieux d’où émanaient les sons. Il s’efforçait de retrouver son sang-froid car il avait l’impression que tout le monde pourrait entendre sa respiration sifflante à cinquante mètres s’il ne se calmait pas. En se faisant violence, il finit par reprendre sa course, en rasant les murs, et jeta un œil par l’entrebâillement d’une porte restée ouverte. Un rai de lumière lui barrait le visage à la verticale, pour le frapper d’une scène choquante…
Dernière édition par Keshâ'rem Evangelisto le Mar 25 Juin - 15:38, édité 5 fois
Mar 2 Avr - 19:33
Maltraitance à la chaîne
FT. Keshâ'rem Evangelisto
Entre la fumée de cigare et l’odeur de l'alcool, le salon empestait. Comment pouvaient-ils abriter un lieu pareil sous une usine aussi miteuse ? Le décor tranchait considérablement avec le reste de l’établissement. Un parterre en velours rouge immaculé, de larges fauteuils capitonnés, des tables en verre soigneusement nettoyées, des chandeliers pendants au plafond, et ce grand bar en zinc paré d’un miroir gigantesque… Bon sang… Même dans la haute ville, je ne fréquentais pas ce genre d’établissement. Tout ici transpirai l’argent. Mais rien ne laissait transpirer l'honnêteté. Riche mafieux, homme de la haute cherchant son nouveau kink, riche homme d'affaires en recherche d’organe tombeau du camion… Un rassemblant de joyeux lurons jouant avec l'illégalité pour assouvir leur domination sur les mendiants et orphelins. Ou parce qu’ils en avaient tout simplement les moyens.
- Je dois parler affaires.
Radovic Burton, mon patron ventripotent, ne nous adressa pas même un regard. Il s’éloigna vers une large table tapissée de vert autour de laquelle étaient assis quatre individus qui m’étaient inconnus. J’essayais de passer en revue mes notes, mais ce lieu n’était pas le même qu’à la surface. Ici les serveurs, croupier et majordome étaient toujours les mêmes et nous n’avions aucun intels les concernant. Quant aux clients, ils n’étaient jamais les mêmes à priori. Il était trop difficile d’en faire une liste précise. Bien sûr, bien que je ne sois venu que deux fois, je reconnaissais quelques têtes et nous avions nos soupçons concernant certains réguliers. Mais nous avions très vite compris qu’aucun d’entre eux ne nous auraient aidé à faire tomber cet endroit infâme. Ce n’était pas pour rien qu’il m’avait fallu quatre mois pour gagner la confiance de Radovic.
Milo nous fit un signe de la tête. Milo ne parlait jamais. Il n’était pas mué non. Mais il était soit silencieux, soit tonitruant. Il n’y avait pas d'entre-deux. Et il aimait donner ses ordres sans avoir à les prononcer. Le grand colosse qui semblait toujours porter un costume trop petit n’était pas bien bavard. Mais il me tenait en respect. Heureusement… Les gardes qui ne lui revenaient pas ne restaient jamais bien longtemps. Et son seul autre moyen d’expression connu était une méthode plus traditionnelle à coup de matraque dans les dents. Nous avions tous compris son ordre. Il allait suivre le boss. Il ne lâchait jamais Radovic d’une semelle. Et Vald et moi, nous allions nous séparer et garder un oeil attentif.
Vald était plus bavard. Il avait du venin à revendre. Je le soupçonnais d’être un tueur en série à ses heures perdues. Il fallait bien des hobbies dans la vie… C’était ce qui avait plus à Milo. Vald était fin, petit, fragile, avec une peau terne et de long cheveux gras et épars… À première vue, il ne faisait pas bien peur. Mais il était prêt à tout et ne s’arrêtait que lorsque son supérieur se mettait sur son chemin. Fou comme il était, j’étais surpris que notre chef n’ait pas déjà eu un couteau planté entre les côtes pendant la nuit. Mais il semblait avoir du respect pour le colosse chauve. Et il n’en avait pas pour moi. En fait, Vlad ne faisait confiance à personne. Et il m’avait mis dans l'embarras plus d’une fois. Il fallait que je me méfie de lui. Découvrir ce qu’il se tramait ici avec une sangsue collée à la peau n’allait pas être simple.
Le plus loin je pouvais être, le mieux c’était. Je prenais donc des escaliers sur la droite qui montaient vers un balcon qui faisait le tour de la pièce et surplombait le salon. Milo et Radovic arrivaient à la table de jeu. Mais j’avais déjà perdu de vue le fou qui savait étrangement bien se mêler à une foule considérant son aspect rebutant. Je me positionnais juste au-dessus de mon employeur et regardais rapidement autour de nous.
Il y avait des salles privées à cet étage. J’avais assisté à un rendez-vous lors de ma première visite. Mais il n’y avait rien d’autre de bien intéressant si ce n’étaient quelques chambres dans lesquelles j’avais cru voir se diriger de jeunes femmes qui semblaient sous l’emprise de l’épice. Cela pouvait être un point d’entrée pour en connaître un peu plus. Au-delà de vouloir dénoncer leurs macros, l’une d’elles parlerait sûrement contre une dose ou quelques crédits supplémentaires.
Derrière le bar, une porte menait vers la cuisine. Mais les allées et venues des serveurs transportant de grands chariots opaques me laissait penser qu’il s’y tramait quelque chose. Les plats qui sortaient de la cuisine étaient rarement cachés. Et ils se dirigeaient rarement vers la porte de l'ascenseur à l’entrée de la pièce sous les escaliers. Je ne savais pas où ces derniers conduisaient. Mais je savais qu’il y avait plus d’un étage sous l’usine. Nous n’étions que dans le lobby. Ce n’était que la réception avant les autres activités proposées par l’établissement. Et je n’en connaissais qu’une.
C’était la principale raison pour laquelle nous étions ici. Je reconnaissais d’ailleurs le faussaire de Radovic, jouant au poker avec lui à la table en contrebas. Je n’y avais pas encore eu accès. Mais il y avait une pièce réservée aux expositions et aux enchères. Un genre de petit musée clandestin destiné aux riches de la ville peu regardant sur la provenance. J’avais entendu dire que plus d’une fois, le même artefact avait été vendu dans ses lieux. Il n’était pas rare qu’un criminel en besoin suive l’acheteur et le libère de son bien nouvellement acquis dans l’espoir de se faire quelques crédits.
À part cela, c’était tout ce que j’avais. Une activité étrange en cuisine, la rumeur d’une clinique secrète et un potentiel trafic de prostitution et une vente aux enchères illégale. Mais il y en avait plus que ça. Je le sentais. Ou était-ce tout simplement l’espoir de me faire remarquer par mes supérieurs qui parlait ? Je secouais la tête, chassant ces pensées. Je devais être attentif et faire mon travail. En parlant de ça, je ne pouvais pas délaisser Radovic. S'il se passait quoi que ce soit, je risquais de perdre ma place. Je regardais attentivement les lieux. Je ne savais toujours pas où était Vald. Milo était derrière le gros bonhomme. Il ne risquait pas de se passer grand-chose de toute façon. J’avais vu plus d’un garde surveiller ces lieux. On n'ouvrait pas un tel établissement sans se protéger un minimum.
- Je dois parler affaires.
Radovic Burton, mon patron ventripotent, ne nous adressa pas même un regard. Il s’éloigna vers une large table tapissée de vert autour de laquelle étaient assis quatre individus qui m’étaient inconnus. J’essayais de passer en revue mes notes, mais ce lieu n’était pas le même qu’à la surface. Ici les serveurs, croupier et majordome étaient toujours les mêmes et nous n’avions aucun intels les concernant. Quant aux clients, ils n’étaient jamais les mêmes à priori. Il était trop difficile d’en faire une liste précise. Bien sûr, bien que je ne sois venu que deux fois, je reconnaissais quelques têtes et nous avions nos soupçons concernant certains réguliers. Mais nous avions très vite compris qu’aucun d’entre eux ne nous auraient aidé à faire tomber cet endroit infâme. Ce n’était pas pour rien qu’il m’avait fallu quatre mois pour gagner la confiance de Radovic.
Milo nous fit un signe de la tête. Milo ne parlait jamais. Il n’était pas mué non. Mais il était soit silencieux, soit tonitruant. Il n’y avait pas d'entre-deux. Et il aimait donner ses ordres sans avoir à les prononcer. Le grand colosse qui semblait toujours porter un costume trop petit n’était pas bien bavard. Mais il me tenait en respect. Heureusement… Les gardes qui ne lui revenaient pas ne restaient jamais bien longtemps. Et son seul autre moyen d’expression connu était une méthode plus traditionnelle à coup de matraque dans les dents. Nous avions tous compris son ordre. Il allait suivre le boss. Il ne lâchait jamais Radovic d’une semelle. Et Vald et moi, nous allions nous séparer et garder un oeil attentif.
Vald était plus bavard. Il avait du venin à revendre. Je le soupçonnais d’être un tueur en série à ses heures perdues. Il fallait bien des hobbies dans la vie… C’était ce qui avait plus à Milo. Vald était fin, petit, fragile, avec une peau terne et de long cheveux gras et épars… À première vue, il ne faisait pas bien peur. Mais il était prêt à tout et ne s’arrêtait que lorsque son supérieur se mettait sur son chemin. Fou comme il était, j’étais surpris que notre chef n’ait pas déjà eu un couteau planté entre les côtes pendant la nuit. Mais il semblait avoir du respect pour le colosse chauve. Et il n’en avait pas pour moi. En fait, Vlad ne faisait confiance à personne. Et il m’avait mis dans l'embarras plus d’une fois. Il fallait que je me méfie de lui. Découvrir ce qu’il se tramait ici avec une sangsue collée à la peau n’allait pas être simple.
Le plus loin je pouvais être, le mieux c’était. Je prenais donc des escaliers sur la droite qui montaient vers un balcon qui faisait le tour de la pièce et surplombait le salon. Milo et Radovic arrivaient à la table de jeu. Mais j’avais déjà perdu de vue le fou qui savait étrangement bien se mêler à une foule considérant son aspect rebutant. Je me positionnais juste au-dessus de mon employeur et regardais rapidement autour de nous.
Il y avait des salles privées à cet étage. J’avais assisté à un rendez-vous lors de ma première visite. Mais il n’y avait rien d’autre de bien intéressant si ce n’étaient quelques chambres dans lesquelles j’avais cru voir se diriger de jeunes femmes qui semblaient sous l’emprise de l’épice. Cela pouvait être un point d’entrée pour en connaître un peu plus. Au-delà de vouloir dénoncer leurs macros, l’une d’elles parlerait sûrement contre une dose ou quelques crédits supplémentaires.
Derrière le bar, une porte menait vers la cuisine. Mais les allées et venues des serveurs transportant de grands chariots opaques me laissait penser qu’il s’y tramait quelque chose. Les plats qui sortaient de la cuisine étaient rarement cachés. Et ils se dirigeaient rarement vers la porte de l'ascenseur à l’entrée de la pièce sous les escaliers. Je ne savais pas où ces derniers conduisaient. Mais je savais qu’il y avait plus d’un étage sous l’usine. Nous n’étions que dans le lobby. Ce n’était que la réception avant les autres activités proposées par l’établissement. Et je n’en connaissais qu’une.
C’était la principale raison pour laquelle nous étions ici. Je reconnaissais d’ailleurs le faussaire de Radovic, jouant au poker avec lui à la table en contrebas. Je n’y avais pas encore eu accès. Mais il y avait une pièce réservée aux expositions et aux enchères. Un genre de petit musée clandestin destiné aux riches de la ville peu regardant sur la provenance. J’avais entendu dire que plus d’une fois, le même artefact avait été vendu dans ses lieux. Il n’était pas rare qu’un criminel en besoin suive l’acheteur et le libère de son bien nouvellement acquis dans l’espoir de se faire quelques crédits.
À part cela, c’était tout ce que j’avais. Une activité étrange en cuisine, la rumeur d’une clinique secrète et un potentiel trafic de prostitution et une vente aux enchères illégale. Mais il y en avait plus que ça. Je le sentais. Ou était-ce tout simplement l’espoir de me faire remarquer par mes supérieurs qui parlait ? Je secouais la tête, chassant ces pensées. Je devais être attentif et faire mon travail. En parlant de ça, je ne pouvais pas délaisser Radovic. S'il se passait quoi que ce soit, je risquais de perdre ma place. Je regardais attentivement les lieux. Je ne savais toujours pas où était Vald. Milo était derrière le gros bonhomme. Il ne risquait pas de se passer grand-chose de toute façon. J’avais vu plus d’un garde surveiller ces lieux. On n'ouvrait pas un tel établissement sans se protéger un minimum.
Jeu 4 Avr - 6:25
Maltraitance à la chaîne
FT. Val'Ihem Karmine
Le luxe et le lucre se mêlaient dans une ambiance qui n’aurait pas rougi du Marquis. Les puissants du monde souterrain se délassaient en buvant du cognac et en fumant le cigare autour de tables de jeux. C’était forcément dans cet improbable casino clandestin qu’avaient disparu les soldats et l’homme au cigare.
Mais Keshâ ne pouvait faire irruption dans ce lieu ainsi vêtu sans se faire démasquer. D’où il était, il n’entendait pas grand-chose. Il aurait été étonnant qu’un lieu aussi décadent renferme seulement quelques secrets sur des paris, de la prostitution. Mais ça suffirait à faire tomber un ou deux têtes, dont la sienne, s’il ne trouvait pas un plan.
Il décida de continuer à remonter le couloir, jusqu’aux cuisines. Avisant le hublot, il vit un chef très concentré, dont le visage se perdait dans les vapeurs de ses casseroles. Il lui tournait le dos. Un commis à sa droite était en train de… de se livrer à une tâche étrange qu’il ne comprit pas tout de suite. Il utilisait une boîte de conserve pour vider leur contenu dans un seau. Puis, le commis séchait soigneusement le revêtement métallique avec un chiffon, appliquait du désinfectant et à nouveau une peau de chamois. Il introduisait ensuite une poudre blanche à l’intérieur, avant de re sceller les boîtes de conserves à l'aide d'une machine industrielle.
Trafic de drogue. Un visage de profil surgit devant le hublot. Un serveur qu’il n’avait pas vu. Keshâ’rem tenta de courir sur la moquette pour s’éloigner au plus vite, mais il était trop tard. La porte à battant rebondit derrière lui.
-« Eyh, toi, qu’est-ce que tu fais là ? »
-« L’chef m’a demandé de lui faire un rapport s’il y avait du grabuge là-haut… il y a du grabuge là-haut. »
C’était tout ce que Keshâ avait trouvé en restant le plus évasif pour ne pas être contredit.
-« Les gars de l’usine n’ont pas le droit de descendre. Tu dois le savoir. »
Le serveur ne devait pas être gradé dans l’organisation souterraine, mais la suspicion était lisible sur ses traits. Seuls son uniforme de contremaître avait du le dissuader d’alerter immédiatement la sécurité. Mais il n’allait pas en rester là. Des sanctions allaient suivre.
-« Je… j’ai merdé… Mais la ligne était bousillée. »
Haussant le menton le serveur se dirigea vers le salon de jeu. Tout son être lui criait qu'il était fini si ce jeune premier rejoignait les malfaiteurs du casino. Sans réfléchir, Keshâ lui sauta sur le dos en plaquant ses deux mains sur la bouche. Comme il était aussi menu que lui, ils basculèrent à terre en deux temps. L’homme se débattit, lui mordit la main et lui administra un coup dans les côtes, sans qu’il lâche prise. En lutte de force brute, il commençait à s’épuiser, le serveur ne cessant de se tortiller pour se dégager et sonner l’alarme. Il n’avait pas le temps de l’endormir proprement et devait tout donner. Le combat était sale et pas très glorieux.
Alors que l’homme lui tirait les cheveux, son corps puisa instinctivement dans le cristal d’absorption énergétique pour avaler goulument la force vitale de sa victime. Une fois dans les vapes, il cessa la ponction, en espérant qu’il se remettrait, car il avait le teint grisâtre. Bientôt, Keshâ traînait l’inconscient dans un réduit et se livrait à sa nouvelle habitude : mettre un homme inanimé en sous-vêtement et lui voler son habit. Sauf que, celui-ci, il l’attacha et le bâillonna. Le veston noir et le pantalon du serveur lui allaient à merveille. Quant à la pile de vêtements de Mars, elle finit cachée en haut d’une étagère .
Keshâ fit son entrée dans le salon revêtu de son nouveau costume. Sur la moquette, ses pas ne faisaient pas de bruit. Il était tel un fantôme au service des invités et se dirigea vers le bar pour se donner le temps de réfléchir à ce qu’il devait faire. Il voyait bien une autre porte mais doutait de pouvoir l’emprunter directement sans attirer l’attention. Ses côtes et son crâne le cuisaient toujours, bien qu’il soit débordant d’énergie volée.
-« Eyh, moustique. T’es qui ? Où est passé Allan ? Ca fait une demi-heure que je fais tout tout seul. »
-«… Je suis Caldwell. Allan s’est coupé à la plonge. Un truc vraiment sale et vraiment con… je suis commis, mais comme je faisais la même taille, il m’a envoyé pour aider en attendant. »
Le barman avait l’air hésitant mais content que la situation reste sous contrôle.
-« Bon. Voilà ce qu’on va faire. Les invités n'aiment pas les trous dans le service, alors tu es embauché... Moi c’est Rick. Chui ton boss. Tu fais ce que je dis, quand je le dis, comme jte l'dis. Et ça va rouler… tu vois la table de jeu là-bas ? »
Caldwell opina fermement de la tête.
-« Va leur servir le whisky. Et ne fait rien tomber. Tais-toi et tout ira bien. »
Keshâ se saisit du plateau rond pourvu de verres en cristal et de la précieuse carafe. Son pas lent finit par le mener auprès des joueurs de poker, sous le tintement du cristal qu’il s’efforçait de ne pas faire trembler. Trop de ses pensées se concentraient sur ce qui lui arriverait s'il renversait son plateau sur quelqu'un par accident, quand bien même il ne serait pas un espion.
-« Ca par exemple, Krüger ! Je suis sur que tu bluffes, c’est pas possible que tu puisses suivre après ta main précédente… » ricana le parvenu portant un costume à rayures.
« Bon alors, minot, il vient ce whisky ? »
De son mieux, il servit l’alcool, mais la tâche lui paraissait on ne peut plus périlleuse. Comme si tout ce qu’il contenait d’adresse s’était évaporé. Il parvint néanmoins à servir les malfrats. Une dame portant un boa rouge l’attira près d’elle par la hanche. Elle n’était pas banale, car c'était la seule femme assise à la table. Bien qu’élégante, ses épaules et sa gorge était complètement dénudées et que ses bras étaient recouverts de gants en dentelles noire. Accessoirement, elle devait avoir plus de 65 ans. Le maquillage nacré paressait criard sur elle.
-« Alors, c’est qu’on les recrute de plus en plus craquant, maintenant. Avec des yeux pareils, on aurait envie de l’ajouter à sa collection. » dit-elle langoureusement en remuant ses doigts alourdis de nombreuses bagues ornées de pierres précieuses.
Les yeux de Keshâ se perdirent un instant en hauteur. Il tressaillit en reconnaissant le garde du corps blond dont il avait croisé le regard à l’aciérie. Il était presque sûr qu’il pourrait le reconnaître s’il l’examinait.
-« Ce que je dis te dérange, peut-être ? »
Il secoua la tête négativement, n’osant pas parler sur les consignes de Rick.
-« Regarde, j’ai gagné tous ces cristaux de pouvoirs en truandant chacun de ses grands dadets trop sûrs d’eux au fil des ans. Les hommes ne savent jamais s’arrêter. »
-« Eyh… « Duchesse » !, quand tu auras fini de jouer avec la nourriture, tu pourras peut-être parier."
Duchesse ouvrit un éventail en plume d’oie dans un claquement et s’abrita derrière en minaudant à l’adresse de Caldwell.
-« Alors, petit. Dis-moi. On suit ou on se couche ? »
C’était vraiment sa veine de tomber sur une veille succube qui blaguait en parlant de se faire un bracelet de ses globes oculaires. Et maintenant il était impliqué dans sa partie. Comment refuser sans se mettre dans l’embarras. Rick lui jetait au loin un regard désapprobateur.
-« On suit. »
-« Bien. Biennnn… Et je relance, les amis, ahahahaha… »
-« Rho nooon, c’est pas vrai… » se plaignit un autre.
Dernière édition par Keshâ'rem Evangelisto le Mar 25 Juin - 15:59, édité 3 fois
Ven 5 Avr - 16:05
Maltraitance à la chaîne
FT. Keshâ'rem Evangelisto
Je ne l’avais pas remarqué directement. L’homme se déplaçait aisément dans la foule. Mais sa tenue faisait tache dans cet espace luxueux. C’était la première fois que je voyais un superviseur de la surface descendre ici. S'il le faisait, ce n’était certainement pas sans raison. Ou peut-être y avait-il une autre raison à sa présence. C’était comme si une alarme s’était déclenchée dans mon esprit. Quelque chose essayait de me mettre en garde. Mais je ne parvenais pas à mettre le doigt sur quoi… Et l’homme disparu de mon champ de vision avant que je ne puisse résoudre ce mystère.
Je restais donc sans réponse, interrogateur, alors que la vie continuait dans le salon de jeu. Mon patron venait de nouveau de lancer ses jetons sur la table comme s’il ne s’agissait que d’une dizaine de crédits. Ces jetons auraient pu payer ma solde d’une année entière. Et le reste des parieurs n’avaient rien à lui envier. La seule femme présente à la table suivait tous les coups… En fait, cette partie était inintéressante. Elle ne m’apprenait rien. Ils n’échangeaient que des banalités et ne me laissaient pas grand-chose à me mettre sous la dent.
Le jeune homme aux cheveux blancs en revanche était une piste plus prometteuse. C’est à cette pensée que cela me frappa. Je l’avais vu par trois fois et par trois fois, il avait porté une tenue différente. La première fois, il était en tenue d’ouvrier. La seconde, il était devenu contre-maître. Et maintenant, il était dans son élégante tenue de serveur. Je doutais que les promotions se fassent aussi simplement dans l’usine. Qui était-il ?
- Intéressant…
Je sursautais en entendant la voix de serpent à côté de moi. Vald se tenait là, appuyé à la balustrade du balcon. J’aurais été incapable de dire depuis combien de temps il se tenait à mes côtés. Un frisson parcourut mon échine. Je n’étais jamais à l’aise en sa présence. Je fis mine de l’ignorer, mais je voyais bien son regard qui se portait sur le jeune homme. Il allait poser problème.
- Il est temps de s’amuser un petit peu. Rejoins-moi en bas quand il aura quitté la table du boss.
Mon regard se posa en contrebas, là où les paris continuaient. Le nouveau serveur était devenu la mascotte de la vielle femme. De toute évidence, il ne semblait pas à l’aise, mais ne pouvait pas quitter son étreinte. Aucun des serveurs n’aurait osé dire non dans un tel lieu. Même s’il n’en était probablement pas un, il l’avait très bien compris.
- À ce rythme-là, il…
Mais je parlais dans le vent. Comme il était apparu, Vald n’était plus là. Où était-il passé et comment faisait-il cela ? Mon regard voyageait partout dans la salle et je ne voyais pas de trace de l’assassin. Mais quelques indices par ci et par là commençaient à me donner une idée des atouts de Vald. Je voyais les marques de son passage alors qu’un courant d’air semblait soulever les vêtements et cheveux sur son passage ou bien quand la porte de la cuisine s’était ouverte seule à deux reprises, ou encore quand un verre s’était renversé de lui-même sur la Duchesse qui tenait encore fermement le jeune homme.
- Oh ! Que je suis maladroite !
- Toi ! Le maître de salle qui n’avait pas lâché son nouveau serveur des yeux accourus. Va chercher de quoi essuyer tout ça ! Je suis vraiment désolé Duchesse…
Je n’écoutais déjà plus les paroles de l’homme. Mes yeux étaient portés sur le jeune homme qui avait enfin pu se détacher de la prédatrice. C’était le signe pour que je le rejoigne. Je devais jouer le jeu de Vald et surtout, c’était l’occasion d’en savoir plus sur ce prétendu serveur. Je me dépêchais de descendre les marches et de me diriger vers lui. Il marchait vers la cuisine. En me rapprochant, je découvrais une porte que je n’avais pas vue jusque-là et dont je ne connaissais pas la destination. J’allais rattraper le serveur alors qu’il se trouvait au niveau de la porte. Mais le serpent surgit de nulle part, apparaissant devant lui, attrapa son bras en pointant une lame dans son dos, entre ses côtes et le poussa vers la porte.
Aussi vite qu’il était apparu, il avait emporté le jeune aux cheveux cendrés, disparaissant tous deux de mon champ de vision. Je pressais le pas, essayant de ne pas attirer les regards par mon agitation soudaine. J’ouvrais la porte pour y voir un long couloir au même tapis en velours rouge que le salon. Ce n’était qu’une extension des lieux qui menaient vers d’autres portes un peu plus loin. Le serpent et son prisonnier n’avaient pas ralenti. Je n’entendais pas bien ce qu’ils disaient. Mais je croyais reconnaître des menaces de la part de l’assassin. Une seconde plus tard, ils avaient, de nouveau, disparu de mon champ de vision. L’homme avait été attiré dans l’une des pièces du couloir. Cette fois, je me mettais à courir pour les rejoindre et me précipitais dans la pièce.
Une grande table rectangulaire en marbre entouré de larges fauteuils prenais l’espace central. Quelques meubles simples habillaient les murs. Une salle de réunion plutôt banale en somme. Vald avait repoussé le jeune homme et le pointait de son couteau en le tenant en joue. Il avait un sourire pervers en travers de son visage. Je remarquais seulement maintenant que sa main libre était tachée de sang. Pourtant, le jeune homme semblait être bien portant. Instinctivement, je refermai la porte derrière moi, m’assurant que personne ne pourrait venir nous déranger. Vald ne m’adressa pas un regard, mais c’était à moi qu’il parlait.
- Il est tout à toi. Tus le.
- Pardon ? La surprise était lisible sur mon visage. De quoi tu parles ?
- Allons allons… Tu l’as vu comme moi. Il n’a rien à faire ici. Je me fiche de qui il s’agit. Il pourrait être un espion, un assassin, un simple voleur… Il n’a rien à faire ici. Et personne ne nous en voudra. Après tout, ils le prendront tous pour un assassin. Le serpent leva sa main rouge de sang encore chaud et dévoila ce qu’il tenait dans son poing : une oreille arrachée au corps qu’il avait probablement tué lui-même. Quand on en aura fini ici, il suffira de montrer le corps sans vie du serveur à qui il a volé les vêtements. Nous aurons fait une bonne action. Et je suis curieux de savoir comment tu comptes t’y prendre.
- Et si je refuse ?
- Je ne te fais pas confiance Ba’rek. Je ne t’ai jamais fait confiance. Il est temps que tu prouves que je peux te respecter. Sinon tu ne nous sers à rien et Milo sera content d’être débarrassé d’un poids mort tel que toi. Alors fais-le, ou tu subiras le même sort.
Cette fois, le couteau était pointé vers moi. Je n’avais pas le choix. Je devais jouer le jeu. Ma main glissa dans ma veste et j’en tirai un couteau de combat pas plus long que mon avant-bras. Je reconnaissais le manche prenant parfaitement place dans le creux de ma main et son contact réconfortant. J’en appréciais la froideur. Mais je n’étais pas un assassin. Et il fallait que je garde l’intrus en vie. Je fis un pas vers lui, ignorant tous les autres sons qui ne provenaient pas de Vald. J’entendais sa respiration sifflante et pouvais presque sentir sa présence dans mon angle mort. Je devais agir vite et efficacement. Je fis le vide, et dans un mouvement bref et fluide, je me retournai vers lui, prêt à frapper. Mais il n’était plus là. Il avait, de nouveau, disparu.
Mon instinct de soldat prit le dessus et je me mis en position défensive. La porte était toujours fermée. Au moins, j’avais la certitude que le tueur était encore avec nous. Tous mes sens étaient aux aguets. Je ne l’entendais pas marcher sur le sol pourtant fait de bois lustré. Une autre de ses prouesses potentielles. Mais je l’entendais respirer. Il était là, quelque part devant moi. Mais le son était trop faible pour savoir où. Tout le reste n’avait pas d’importance pour l’instant. Je devais savoir où il se trouvait. Et mes yeux n’allaient pas m’aider. Je les fermais, essayant de me concentrer sur tous les autres indices potentiels. Ce fut la douleur qui se fit sentir en premier.
Mon entraînement sauva la main qui tenait mon couteau. Je reconnaissais le contact froid du métal froid qui s’enfonçait doucement dans mon poignet. Dans un réflexe, je reculai de quelques pas, tournai ma main et tordais mon poignet par instinct. Le choc du métal contre le métal se fit entendre. Mon entraînement de soldat n’avait pas été vain. Mais je pouvais sentir un filet chaud couler sur ma main. La plaie était désagréable tout au plus. Ma vitesse plus grande que celle de mon adversaire m’avait sauvée. Et c’était là la réponse. Je me remettais en position et attendais. Laissant volontairement une ouverture vers mon visage. Je misais sur son audace. Et il mordit à l'hameçon.
J’entendis son souffle disparaître. Il passait à l’attaque. Alors toute ma concentration se tourna vers ma peau et le contact froid du métal. Une piqûre se fit ressentir juste sous mon œil. Mais il était trop tard pour Vald. Puisant dans cette force que je ne comprenais pas, mon corps bougea à une vitesse que peu de gens pouvaient atteindre. Mon visage disparut de la trajectoire de sa lame invisible et ma main libre se saisit de son bras dont je devinais la présence. Ma lame se planta parfaitement et sans résistance dans son articulation. Un cri se fit entendre et dans un geste brusque, il se dégagea, arrachant une bonne partie de ses nerfs et ligaments au passage. Sa lame était visible, immobile au sol et lui se tenait face à moi, le bras pendant et inutilisable. Il n’en aurait jamais plus l’usage.
Une rage folle était lisible sur son visage. Il serrait les dents, incapable de parler. En représailles, il dirigea sa main valide à l’intérieur de sa veste et voulut se saisir d’une autre arme. Je devinais la présence d’un pistolet sous ses vêtements. Mais encore une fois, il était trop tard. Puisant dans la même énergie qui m’habitait, je réduisis l'espace qui nous séparait en un dixième de seconde et plongeait ma lame entre ses côtes. Je sentis un souffle court expulser l’air qu’il avait dans ses poumons et son corps se raidit tout à coup, devenant incroyablement lourd contre le mien.
- J’aurais dû te planter un couteau dans le dos quand tu nous as rejoints…
Mais il était trop tard. Et il avait été trop lent. Il s'effondra au sol dans un soupir ultime. Ce n’était qu’alors que je reprenais conscience de mon environnement et de moi-même. J’étais en nage et ma respiration était saccadée. Ma main était douloureuse et j’avais peur de regarder la plaie. Par réflexe, je touchais d’abord mon visage. Ce n’était qu’une petite fissure dans ma peau. Je baissais enfin les yeux. La plaie était plus profonde sur ma main. Je me baissais. Mais je devais d’abord m’occuper de l’inconnu. Je contournais le corps et me mettais entre lui et la porte. Et me baissais pour arracher un morceau de vêtement du serpent. Mon regard ne quittait plus le jeune homme et j’essayais de devenir qui il pouvait être et ce qu’il allait bien pouvoir me répondre. Je réfléchissais à mes questions tout en serrant le bandage improvisé sur mon poignet. Mais une seule me venait à l’esprit alors que je peinais à reprendre le contrôle sur mon corps.
- Qui es-tu ?
Je restais donc sans réponse, interrogateur, alors que la vie continuait dans le salon de jeu. Mon patron venait de nouveau de lancer ses jetons sur la table comme s’il ne s’agissait que d’une dizaine de crédits. Ces jetons auraient pu payer ma solde d’une année entière. Et le reste des parieurs n’avaient rien à lui envier. La seule femme présente à la table suivait tous les coups… En fait, cette partie était inintéressante. Elle ne m’apprenait rien. Ils n’échangeaient que des banalités et ne me laissaient pas grand-chose à me mettre sous la dent.
Le jeune homme aux cheveux blancs en revanche était une piste plus prometteuse. C’est à cette pensée que cela me frappa. Je l’avais vu par trois fois et par trois fois, il avait porté une tenue différente. La première fois, il était en tenue d’ouvrier. La seconde, il était devenu contre-maître. Et maintenant, il était dans son élégante tenue de serveur. Je doutais que les promotions se fassent aussi simplement dans l’usine. Qui était-il ?
- Intéressant…
Je sursautais en entendant la voix de serpent à côté de moi. Vald se tenait là, appuyé à la balustrade du balcon. J’aurais été incapable de dire depuis combien de temps il se tenait à mes côtés. Un frisson parcourut mon échine. Je n’étais jamais à l’aise en sa présence. Je fis mine de l’ignorer, mais je voyais bien son regard qui se portait sur le jeune homme. Il allait poser problème.
- Il est temps de s’amuser un petit peu. Rejoins-moi en bas quand il aura quitté la table du boss.
Mon regard se posa en contrebas, là où les paris continuaient. Le nouveau serveur était devenu la mascotte de la vielle femme. De toute évidence, il ne semblait pas à l’aise, mais ne pouvait pas quitter son étreinte. Aucun des serveurs n’aurait osé dire non dans un tel lieu. Même s’il n’en était probablement pas un, il l’avait très bien compris.
- À ce rythme-là, il…
Mais je parlais dans le vent. Comme il était apparu, Vald n’était plus là. Où était-il passé et comment faisait-il cela ? Mon regard voyageait partout dans la salle et je ne voyais pas de trace de l’assassin. Mais quelques indices par ci et par là commençaient à me donner une idée des atouts de Vald. Je voyais les marques de son passage alors qu’un courant d’air semblait soulever les vêtements et cheveux sur son passage ou bien quand la porte de la cuisine s’était ouverte seule à deux reprises, ou encore quand un verre s’était renversé de lui-même sur la Duchesse qui tenait encore fermement le jeune homme.
- Oh ! Que je suis maladroite !
- Toi ! Le maître de salle qui n’avait pas lâché son nouveau serveur des yeux accourus. Va chercher de quoi essuyer tout ça ! Je suis vraiment désolé Duchesse…
Je n’écoutais déjà plus les paroles de l’homme. Mes yeux étaient portés sur le jeune homme qui avait enfin pu se détacher de la prédatrice. C’était le signe pour que je le rejoigne. Je devais jouer le jeu de Vald et surtout, c’était l’occasion d’en savoir plus sur ce prétendu serveur. Je me dépêchais de descendre les marches et de me diriger vers lui. Il marchait vers la cuisine. En me rapprochant, je découvrais une porte que je n’avais pas vue jusque-là et dont je ne connaissais pas la destination. J’allais rattraper le serveur alors qu’il se trouvait au niveau de la porte. Mais le serpent surgit de nulle part, apparaissant devant lui, attrapa son bras en pointant une lame dans son dos, entre ses côtes et le poussa vers la porte.
Aussi vite qu’il était apparu, il avait emporté le jeune aux cheveux cendrés, disparaissant tous deux de mon champ de vision. Je pressais le pas, essayant de ne pas attirer les regards par mon agitation soudaine. J’ouvrais la porte pour y voir un long couloir au même tapis en velours rouge que le salon. Ce n’était qu’une extension des lieux qui menaient vers d’autres portes un peu plus loin. Le serpent et son prisonnier n’avaient pas ralenti. Je n’entendais pas bien ce qu’ils disaient. Mais je croyais reconnaître des menaces de la part de l’assassin. Une seconde plus tard, ils avaient, de nouveau, disparu de mon champ de vision. L’homme avait été attiré dans l’une des pièces du couloir. Cette fois, je me mettais à courir pour les rejoindre et me précipitais dans la pièce.
Une grande table rectangulaire en marbre entouré de larges fauteuils prenais l’espace central. Quelques meubles simples habillaient les murs. Une salle de réunion plutôt banale en somme. Vald avait repoussé le jeune homme et le pointait de son couteau en le tenant en joue. Il avait un sourire pervers en travers de son visage. Je remarquais seulement maintenant que sa main libre était tachée de sang. Pourtant, le jeune homme semblait être bien portant. Instinctivement, je refermai la porte derrière moi, m’assurant que personne ne pourrait venir nous déranger. Vald ne m’adressa pas un regard, mais c’était à moi qu’il parlait.
- Il est tout à toi. Tus le.
- Pardon ? La surprise était lisible sur mon visage. De quoi tu parles ?
- Allons allons… Tu l’as vu comme moi. Il n’a rien à faire ici. Je me fiche de qui il s’agit. Il pourrait être un espion, un assassin, un simple voleur… Il n’a rien à faire ici. Et personne ne nous en voudra. Après tout, ils le prendront tous pour un assassin. Le serpent leva sa main rouge de sang encore chaud et dévoila ce qu’il tenait dans son poing : une oreille arrachée au corps qu’il avait probablement tué lui-même. Quand on en aura fini ici, il suffira de montrer le corps sans vie du serveur à qui il a volé les vêtements. Nous aurons fait une bonne action. Et je suis curieux de savoir comment tu comptes t’y prendre.
- Et si je refuse ?
- Je ne te fais pas confiance Ba’rek. Je ne t’ai jamais fait confiance. Il est temps que tu prouves que je peux te respecter. Sinon tu ne nous sers à rien et Milo sera content d’être débarrassé d’un poids mort tel que toi. Alors fais-le, ou tu subiras le même sort.
Cette fois, le couteau était pointé vers moi. Je n’avais pas le choix. Je devais jouer le jeu. Ma main glissa dans ma veste et j’en tirai un couteau de combat pas plus long que mon avant-bras. Je reconnaissais le manche prenant parfaitement place dans le creux de ma main et son contact réconfortant. J’en appréciais la froideur. Mais je n’étais pas un assassin. Et il fallait que je garde l’intrus en vie. Je fis un pas vers lui, ignorant tous les autres sons qui ne provenaient pas de Vald. J’entendais sa respiration sifflante et pouvais presque sentir sa présence dans mon angle mort. Je devais agir vite et efficacement. Je fis le vide, et dans un mouvement bref et fluide, je me retournai vers lui, prêt à frapper. Mais il n’était plus là. Il avait, de nouveau, disparu.
Mon instinct de soldat prit le dessus et je me mis en position défensive. La porte était toujours fermée. Au moins, j’avais la certitude que le tueur était encore avec nous. Tous mes sens étaient aux aguets. Je ne l’entendais pas marcher sur le sol pourtant fait de bois lustré. Une autre de ses prouesses potentielles. Mais je l’entendais respirer. Il était là, quelque part devant moi. Mais le son était trop faible pour savoir où. Tout le reste n’avait pas d’importance pour l’instant. Je devais savoir où il se trouvait. Et mes yeux n’allaient pas m’aider. Je les fermais, essayant de me concentrer sur tous les autres indices potentiels. Ce fut la douleur qui se fit sentir en premier.
Mon entraînement sauva la main qui tenait mon couteau. Je reconnaissais le contact froid du métal froid qui s’enfonçait doucement dans mon poignet. Dans un réflexe, je reculai de quelques pas, tournai ma main et tordais mon poignet par instinct. Le choc du métal contre le métal se fit entendre. Mon entraînement de soldat n’avait pas été vain. Mais je pouvais sentir un filet chaud couler sur ma main. La plaie était désagréable tout au plus. Ma vitesse plus grande que celle de mon adversaire m’avait sauvée. Et c’était là la réponse. Je me remettais en position et attendais. Laissant volontairement une ouverture vers mon visage. Je misais sur son audace. Et il mordit à l'hameçon.
J’entendis son souffle disparaître. Il passait à l’attaque. Alors toute ma concentration se tourna vers ma peau et le contact froid du métal. Une piqûre se fit ressentir juste sous mon œil. Mais il était trop tard pour Vald. Puisant dans cette force que je ne comprenais pas, mon corps bougea à une vitesse que peu de gens pouvaient atteindre. Mon visage disparut de la trajectoire de sa lame invisible et ma main libre se saisit de son bras dont je devinais la présence. Ma lame se planta parfaitement et sans résistance dans son articulation. Un cri se fit entendre et dans un geste brusque, il se dégagea, arrachant une bonne partie de ses nerfs et ligaments au passage. Sa lame était visible, immobile au sol et lui se tenait face à moi, le bras pendant et inutilisable. Il n’en aurait jamais plus l’usage.
Une rage folle était lisible sur son visage. Il serrait les dents, incapable de parler. En représailles, il dirigea sa main valide à l’intérieur de sa veste et voulut se saisir d’une autre arme. Je devinais la présence d’un pistolet sous ses vêtements. Mais encore une fois, il était trop tard. Puisant dans la même énergie qui m’habitait, je réduisis l'espace qui nous séparait en un dixième de seconde et plongeait ma lame entre ses côtes. Je sentis un souffle court expulser l’air qu’il avait dans ses poumons et son corps se raidit tout à coup, devenant incroyablement lourd contre le mien.
- J’aurais dû te planter un couteau dans le dos quand tu nous as rejoints…
Mais il était trop tard. Et il avait été trop lent. Il s'effondra au sol dans un soupir ultime. Ce n’était qu’alors que je reprenais conscience de mon environnement et de moi-même. J’étais en nage et ma respiration était saccadée. Ma main était douloureuse et j’avais peur de regarder la plaie. Par réflexe, je touchais d’abord mon visage. Ce n’était qu’une petite fissure dans ma peau. Je baissais enfin les yeux. La plaie était plus profonde sur ma main. Je me baissais. Mais je devais d’abord m’occuper de l’inconnu. Je contournais le corps et me mettais entre lui et la porte. Et me baissais pour arracher un morceau de vêtement du serpent. Mon regard ne quittait plus le jeune homme et j’essayais de devenir qui il pouvait être et ce qu’il allait bien pouvoir me répondre. Je réfléchissais à mes questions tout en serrant le bandage improvisé sur mon poignet. Mais une seule me venait à l’esprit alors que je peinais à reprendre le contrôle sur mon corps.
- Qui es-tu ?
Lun 8 Avr - 7:21
Maltraitance à la chaîne
FT. Val'Ihem Karmine
Les choses ne se passaient jamais comme on le souhaitait dans une infiltration. La première fois, il avait été assez stupide pour tenter de monter à bord d’un vaisseau pirate. Sans armes. Sans entraînement ni allié. Juste à la seule force de l’audace et de l’observation. Le pire est qu’il aurait sans doute réussi. N’était ce léger grain de sable. Mathieu.
Mathieu s’était senti obligé de le suivre. De le dénoncer. Puis avait tenté de le planter en duel judiciaire. Leçon apprise. L’imprévu est le principal amour de l’espion. Aujourd’hui encore plus qu’hier, il se sentait mal préparé à recevoir son étreinte.
D’abord Duchesse. Malgré l’aspect anodin de la situation, il savait que tout pouvait dégénérer en un instant chez les puissants. La vie humaine n’a pas de valeur pour eux. Puis, cet incident. Il s’était déjà trop fait remarquer. Peut-être était-ce le signal de la retraite. Mieux valait reculer un jour que perdre pour toujours.
Dans un éclair blanc, il eut le temps de voir apparaître un sourire vicieux se passant de présentation. Décidément, les Invisibles étaient toujours les plus perfides ! La preuve. Violette en était. Mais qu’avait-il pu rater à ce point ? Tout ce qu’il sentait était le baiser de la mort, entre ses côtes, la poigne de l’homme qui lui serrait fortement le poignet. Sa vie toute entière s’était condensée pour tenir sur la pointe d’une tête d’épingle, à l’endroit précis où le poignard menaçait de percer ses vêtements.
À tout moment il sentirait la lame s’enfoncer dans son flanc pour causer une hémorragie létale. Cet homme savait comment tuer. Il saurait aussi comment le faire souffrir sans causer sa fin.
-« Bonsoir, jeune papillon. Je te présente Avide, une jolie lame de 21cm. Pas bien grande. Juste ce qu’il faut pour accrocher le cœur… » susurra-t-il d’une voix languide à lui glacer les sangs.
Le regard pétrifié, Keshâ’rem était saisi et se laissa pousser par la porte dans le couloir. Il aurait pu tenter de se téléporter. C’était à peu près la seule de ses techniques qui soit assez rapide pour faire mouche. Mais s’il ratait, c’en était terminé. Et ce pouvoir était encore nouveau pour lui. L’homme ne l’avait pas tué. Il devait avoir une raison. Et lui devait à tout prix gagner du temps, saisir Le moment, car il n’aurait peut-être qu’une seule chance de s’en sortir.
Respire Keshâ’rem. Garde tes esprits. Mon cœur bat si fort que j’en ai mal aux oreilles.
-« Maintenant qu’on est seuls, l’Ephémère, grouille-toi de me dire où tu l’as mis ! »
Il n’essaya même pas de feindre l’ignorance et indiqua la porte du réduit où il avait enfermé le serveur. Pensant le voir libéré, c’est à sa stupeur que l’homme le jeta à travers la pièce par-dessus le serveur, qui se débattait. La pauvre erre pensait voir la cavalerie arrivée.
Peut-être que Keshâ allait enfin pouvoir s’échapper. Mais la porte venait de claquer. Il ne pouvait s’éclipser s’il ne voyait pas le point de chute. Un spectacle atroce le pétrifia de nouveau, quand l’Invisible planta sa lame de 21cm de toute ses forces au milieu du plexus du serveur aux yeux arrondis. Alors qu’il vivait encore, le tueur se délecta de lui découper une oreille.
Il n’y avait plus de mots, plus de prière. Juste de l’horreur pure. De tout ce qu’il avait pu voir dans la Brume, ou même dans les bas-quartiers, ce qu’il venait de voir dépassait de loin toute la méchanceté gratuite qu’il croyait connaître.
-« Je vais y aller doucement. Comme ça tu auras tout le loisir de m’expliquer dans quel nid tu te caches et où tu croyais batifoler… »
Ils entrèrent dans une grande salle meublée d’une grande table en marbre. L’heure de la confrontation. Le moment de montrer à quel point il était prêt à vivre arrivait. S’il s’était cru incapable de tuer quelqu’un par choix conscient, cette personne ne laissait aucune marge au doute. Il fallait le tuer.
L’irruption du soldat qu’il avait reconnu tout à l’heure le surprit. L’échange entre les deux complices lui laissait le temps de fomenter un plan. Deux fois plus d’ennemis. Sans doute d’un haut niveau de danger. Il rassemblait toute sa volonté pour être prêt à faire apparaître le totem de gargouille de ténèbres dans sa main et faire volte-face par-dessus la table en marbre. A son avantage, ses adversaires ignoraient qu’il pouvait disposer de pareilles armes, quand l’autre avait au moins dévoilé l’une des siennes.
L’enfoiré voulait lui coller le meurtre du serveur sur le dos ! Et demandait à l’autre de finir le sale travail ! Mais il semblait y avoir de la dissension dans le binôme. Celui qui s’appelait Ba’rek n’avait pas l’air de tuer de sang froid aussi facilement que l’autre. Il recula vivement quand Ba’rek fit un pas en avant. Rien ne le préparait à les voir s’affronter.
Et rien ne l’inquiétait plus que de savoir le psychopathe à nouveau invisible. Il allait faire apparaître une poudre blanche pulvérulente de sa dimension de poche, mais les deux semblaient engager le combat entre eux. Son occasion de fuir venait sans doute de lui passer sous le nez alors qu’il ne pouvait détourner les yeux de l’incroyable vélocité du deuxième combattant. Il avait déjà vu cette capacité à l’œuvre et ce n’était pas naturelle.
S’il devait affronter celui-là, il faudrait d’abord lui flanquer une invocation sur le dos. La mort horrible du serpent lui fit serrer les dents. Il méritait sans doute au moins ça, ne serait-ce que pour lui avoir réservé une mort de vermine et prévu de lui faire porter le chapeau pour ses crimes. Son seul regret est que l’autre l’a achevé avant qu’il ait eu le temps d’absorber ce qui lui restait de vie.
- Qui es-tu ?
Question simple. Enjeux compliqués. Pour sûr, sa couverture est grillée. Mais suivant ce qu’il répond, il peut se compromettre davantage. On lit l’hésitation sur ses traits. Il hésite entre se sentir soulagé ou menacé par ce redoutable électron libre et ne sait tout simplement pas quoi dire.
-« Apparemment, celui qui a tué le serveur… Ouvrier métallurgiste, commis, quelqu’un de très polyvalent… Et toi, es-tu celui qui va dire que je viens de tuer aussi celui-là ?... on aura du mal à te croire, vu le bras en moins et mon gabarit. »
Faire des mystères peut être agaçant. Cela dit, l’autre aurait pu commencer par se présenter, histoire de planter le décor. Compte tenu de l’hypervélocité du larron, même fatigué et légèrement blessé, il se tient sur le qui-vive. Exit la mission, sauver sa vie repasse au premier plan. Keshâ’rem tente d’analyser des bribes de réactions pour voir s’il est le prochain à passer à la casserole ou s’il y a une ouverture pour qu’il choisisse de le laisser partir.
-« Il se passe des choses immondes par ici. J’espérais savoir quoi… pourquoi as-tu choisi de te retourner contre ton allié au lieu de t’en prendre à moi ? »
Dernière édition par Keshâ'rem Evangelisto le Mar 25 Juin - 16:19, édité 7 fois
Lun 8 Avr - 14:36
Maltraitance à la chaîne
FT. Keshâ'rem Evangelisto
Mon cerveau était encore en alerte. Je sentais encore mes tempes battre et mon coeur ne s’était pas encore calmé. Une goutte de sueur tomba de mon visage alors que je ne quittais pas le jeune homme des yeux. Je devais me reprendre. Je ne savais pas à qui j’avais à faire. Il pouvait avoir plus d’un tour dans son sac. Il ne s’était certainement pas infiltré dans un tel lieu sans savoir ce qu’il faisait. À sa posture, il ne me faisait évidemment pas confiance. Et je ne lui avais pas donné grand-chose pour que ce soit le cas. Je ne pouvais pas risquer de le perdre. Alors pourquoi avais-je posé une question aussi banale ?
Ça n’allait pas vraiment l’aider à me suivre sans poser de question. Et sa réponse allait dans ce sens. Sur la défensive, il ne me donnait pas vraiment une réponse franche. Il ne me donnait que ce que je savais déjà. J’avais vu juste. Il avait travaillé plus haut, réussi à prendre les vêtements d’un contremaître puis d’un serveur. Mais pourquoi ? Me mettre un meurtre sur le dos ne me paraissait pas une si mauvaise réponse après tout. Contrairement à moi, sa capacité d'analyse était encore présente. J’essayais de faire le calme dans mon esprit. Je devais choisir les bons mots, ne pas le pousser dans ses retranchements.
Mais pouvais-je être honnête avec lui ? J’avais tenu ma fausse identité tout ce temps. Et ce n’était que la seconde fois que j’étais dans l’usine. Je n’avais pas fait tout ça pour rien. Mais que pouvais-je lui donner en contrepartie ? L’assurance que je ne lui ferais pas de mal ? Après ce qu’il venait de voir, je doutais qu’il me croie sur parole.
- J’ai tout intérêt à ce que personne ne découvre ces corps. Au mieux, ils se rendront compte de leurs absences trop tard. Au pire… Mieux vaut ne pas y penser… Il y a des chances qu’ils comprennent tout seul que Vald a tué le serveur. Mais tu as ses vêtements et je n’avais pas ces blessures avant. On est tous les deux foutus si on en vient là.
Sur ce point, j’étais assez persuadé d’avoir raison. J’avais peut-être agi trop vite. Milo ne réfléchirait pas trop longtemps avant de me coller ça sur le dos. Si Vald ne me faisait pas confiance, aussi torturé soit-il, il y avait des chances pour que Milo ait des doutes aussi. J’étais le petit nouveau. Et je doutais que cet établissement voie d’un bon oeil le meurtre d’un serveur et d’un garde du corps. Ils avaient un standing à conserver. Qui allait venir ici si l’on savait que la clientèle était potentiellement en danger. La suite de l’enquête allait être délicate.
- Mais je ne réponds pas vraiment à ta question… Je ne compte pas te dénoncer. Partons tous les deux du principe qu’on ne se fait pas confiance. Je ne te connais pas et toi non plus. Mais je n’aurais aucun intérêt à te faire porter le chapeau. J’ai plus de risques à le faire qu’autre chose. Maintenant qu’on est tous les deux sûr que ça ne peut que mal tourner… Essayons de ne pas nous entretuer. Ok ?
J’avais fini de nettoyer ma lame sur les vêtements de Vald et je la rangeais dans mon veston. Les tremblements avaient fini par disparaître et ma respiration était de nouveau régulière. Je voyais plus clair. Et j’étais d’autant plus aux aguets. J’espérais qu’il le voyait aussi et qu’il prenait mon geste comme une offrande. Je ne souhaitais pas me battre. Et je ne souhaitais pas non plus le voir partir. C’est une branche d’olivier et j’espérais qu’elle ouvrirait les portes vers les secrets de l’usine. Je ne pouvais pas avoir fait tout ça pour rien. Et je ne savais pas si ma stratégie avait marché, mais le jeune homme laissa entendre qu’il savait ce qu’il se passait ici.
En tout cas, s’il disait vrai, il était là pour les mêmes raisons que moi. Mais pouvais-je le croire sur parole ? Il allait falloir que je fasse un pas avant si je voulais espérer qu’il en fasse autant. Mais comment lui dire pourquoi j’avais agi ainsi sans trahir mon identité ? Est-ce que je pouvais tout lui dire ?
- Je… Je ne suis pas un tueur. C’était à moitié vrai. Mon statut de soldat m’avait formé a donné la mort. Rien ne justifiait de te tuer. Et même si je regrette d’en être arrivé là avec ce monstre, je referai probablement le même choix. Cela me rassurerait de le dire. J’avais besoin de me conforter dans mes propres décisions. Et ce qui était fait, était fait. Et nous sommes deux à vouloir des réponses. En fait, je t’ai aussi sauvé parce que je pensais que tu savais quelque chose. Que peut-être, tu pourrais m’aider à comprendre ce qu’il se passe ici.
Au moins, cette partie était vraie. Je ne pouvais pas lui mentir sur tout. Mais j’avais l’impression que si je ne lui en disais pas plus, il ne s'ouvrirait pas à moi. Je pouvais peut-être lui mentir… Ou bien l’obliger à m’aider ? Une vive douleur se fit ressentir à cette pensée. Un flashback apparu dans mon esprit. Dans un flash, un visage rond, des yeux bleus et des touffes de cheveux noirs passèrent devant mes yeux. Une voix parlait. Elle était mécontente. *Quand tu as un doute, dis la vérité. En tout cas, ça a toujours marché pour moi.* Non, il n’avait pas de cheveux noirs. Ils étaient blonds. Je… J’avais dit ça à l’un des hommes de mon bataillon. La douleur disparut aussi vite qu’elle était apparue. L’instant n’avait duré qu’une dixième de seconde.
- Je cherche simplement à savoir ce qu’il se passe ici. Il y a quelque chose de malsain et je dois savoir ce qu’il se cache derrière. Peut-être qu’on peut s’entraider si nous avons le même but. Après tout, nous sommes tous les deux dans cette histoire. Je me redressais et pointais le corps du doigt. D’ailleurs, il faudrait peut-être commencer par cacher les corps. Si tu veux bien me donner un coup de main ?
Ça n’allait pas vraiment l’aider à me suivre sans poser de question. Et sa réponse allait dans ce sens. Sur la défensive, il ne me donnait pas vraiment une réponse franche. Il ne me donnait que ce que je savais déjà. J’avais vu juste. Il avait travaillé plus haut, réussi à prendre les vêtements d’un contremaître puis d’un serveur. Mais pourquoi ? Me mettre un meurtre sur le dos ne me paraissait pas une si mauvaise réponse après tout. Contrairement à moi, sa capacité d'analyse était encore présente. J’essayais de faire le calme dans mon esprit. Je devais choisir les bons mots, ne pas le pousser dans ses retranchements.
Mais pouvais-je être honnête avec lui ? J’avais tenu ma fausse identité tout ce temps. Et ce n’était que la seconde fois que j’étais dans l’usine. Je n’avais pas fait tout ça pour rien. Mais que pouvais-je lui donner en contrepartie ? L’assurance que je ne lui ferais pas de mal ? Après ce qu’il venait de voir, je doutais qu’il me croie sur parole.
- J’ai tout intérêt à ce que personne ne découvre ces corps. Au mieux, ils se rendront compte de leurs absences trop tard. Au pire… Mieux vaut ne pas y penser… Il y a des chances qu’ils comprennent tout seul que Vald a tué le serveur. Mais tu as ses vêtements et je n’avais pas ces blessures avant. On est tous les deux foutus si on en vient là.
Sur ce point, j’étais assez persuadé d’avoir raison. J’avais peut-être agi trop vite. Milo ne réfléchirait pas trop longtemps avant de me coller ça sur le dos. Si Vald ne me faisait pas confiance, aussi torturé soit-il, il y avait des chances pour que Milo ait des doutes aussi. J’étais le petit nouveau. Et je doutais que cet établissement voie d’un bon oeil le meurtre d’un serveur et d’un garde du corps. Ils avaient un standing à conserver. Qui allait venir ici si l’on savait que la clientèle était potentiellement en danger. La suite de l’enquête allait être délicate.
- Mais je ne réponds pas vraiment à ta question… Je ne compte pas te dénoncer. Partons tous les deux du principe qu’on ne se fait pas confiance. Je ne te connais pas et toi non plus. Mais je n’aurais aucun intérêt à te faire porter le chapeau. J’ai plus de risques à le faire qu’autre chose. Maintenant qu’on est tous les deux sûr que ça ne peut que mal tourner… Essayons de ne pas nous entretuer. Ok ?
J’avais fini de nettoyer ma lame sur les vêtements de Vald et je la rangeais dans mon veston. Les tremblements avaient fini par disparaître et ma respiration était de nouveau régulière. Je voyais plus clair. Et j’étais d’autant plus aux aguets. J’espérais qu’il le voyait aussi et qu’il prenait mon geste comme une offrande. Je ne souhaitais pas me battre. Et je ne souhaitais pas non plus le voir partir. C’est une branche d’olivier et j’espérais qu’elle ouvrirait les portes vers les secrets de l’usine. Je ne pouvais pas avoir fait tout ça pour rien. Et je ne savais pas si ma stratégie avait marché, mais le jeune homme laissa entendre qu’il savait ce qu’il se passait ici.
En tout cas, s’il disait vrai, il était là pour les mêmes raisons que moi. Mais pouvais-je le croire sur parole ? Il allait falloir que je fasse un pas avant si je voulais espérer qu’il en fasse autant. Mais comment lui dire pourquoi j’avais agi ainsi sans trahir mon identité ? Est-ce que je pouvais tout lui dire ?
- Je… Je ne suis pas un tueur. C’était à moitié vrai. Mon statut de soldat m’avait formé a donné la mort. Rien ne justifiait de te tuer. Et même si je regrette d’en être arrivé là avec ce monstre, je referai probablement le même choix. Cela me rassurerait de le dire. J’avais besoin de me conforter dans mes propres décisions. Et ce qui était fait, était fait. Et nous sommes deux à vouloir des réponses. En fait, je t’ai aussi sauvé parce que je pensais que tu savais quelque chose. Que peut-être, tu pourrais m’aider à comprendre ce qu’il se passe ici.
Au moins, cette partie était vraie. Je ne pouvais pas lui mentir sur tout. Mais j’avais l’impression que si je ne lui en disais pas plus, il ne s'ouvrirait pas à moi. Je pouvais peut-être lui mentir… Ou bien l’obliger à m’aider ? Une vive douleur se fit ressentir à cette pensée. Un flashback apparu dans mon esprit. Dans un flash, un visage rond, des yeux bleus et des touffes de cheveux noirs passèrent devant mes yeux. Une voix parlait. Elle était mécontente. *Quand tu as un doute, dis la vérité. En tout cas, ça a toujours marché pour moi.* Non, il n’avait pas de cheveux noirs. Ils étaient blonds. Je… J’avais dit ça à l’un des hommes de mon bataillon. La douleur disparut aussi vite qu’elle était apparue. L’instant n’avait duré qu’une dixième de seconde.
- Je cherche simplement à savoir ce qu’il se passe ici. Il y a quelque chose de malsain et je dois savoir ce qu’il se cache derrière. Peut-être qu’on peut s’entraider si nous avons le même but. Après tout, nous sommes tous les deux dans cette histoire. Je me redressais et pointais le corps du doigt. D’ailleurs, il faudrait peut-être commencer par cacher les corps. Si tu veux bien me donner un coup de main ?
Lun 8 Avr - 17:55
Maltraitance à la chaîne
FT. Val'Ihem Karmine
A ce moment précis, il était très difficile de deviner ce qui tramait derrière ses iris d’améthyste. Un léger pli marquait l’un de ses sourcils de perplexité et les muscles autour de ses yeux s’étaient figés, leur donnant un air à la fois perçant et arrondi.
-« Je comprends que tu n’as pas l’intention de me tuer ou d’appeler les gardes. » résuma-t-il.
Le comportement du soldat était ambigu. Il se demandait encore qui il pouvait bien-être pour en venir aux mains et aux lames avec un associés. Ce dernier disait ne jamais lui avoir fait confiance. Sans doute avait-il des intérêts divergeant d’avec son boss et son organisation. Cela n’écartait pas de lui le fait d’être une menace pour le portebrume.
Depuis qu’il en était habité, malgré la médication prodiguée par Seraphah pour tenter de l’émousser, il pouvait ressentir un cri primal en situation de danger. Devait-il lui imputer cet appétit vorace en énergie et le peu de scrupules qu’il avait eu à en vider le serveur ? Ou bien n’était-ce que le résultat d’une mise en parenthèse de la morale dans un contexte violent où n’évoluaient que des gens pas très nets ?
Le blond reprit ses explications de plus belles. En disant « tous les deux », il essayait de les inclure dans le même groupe. Et Keshâ se demandait si ce n’était pas un vil stratagème pour lui faire baisser sa garde. Il n’oubliait pas que du serpent Invisible et du blond, c’était le blond qui avait triomphé au combat. De loin.
Les gens pensaient toujours qu’avec son allure juvénile et ses airs proprets, il était faible. Certes, il n’arrivait pas à s’enorgueillir de faculté au combat et était un être très sensible. Mais cela ne signifiait pas qu’on pouvait le balader et le manipuler si facilement. De ses émotions il faisait une force. Dans ces bas-fonds, pour lire les gens. Décrypter leurs intentions et leurs allégeances. Avec une certaine marge d’erreur. Et quand il était dépassé par la force et la sournoiserie de gens malveillants, il se laissait envahir par la rage pour s’oblitérer et créer la surprise.
Le jeune homme regardait le soldat essuyer le sang visqueux sur les vêtements du cadavre. Avant, ce genre de vision aurait suffit à le troubler profondément. Il ne ressentait aujourd’hui qu’un vague sentiment de dégoût mêlé à une sensation de justice et se demandait ce que cela disait de lui.
D’un hochement de tête, il partagea son assentiment. Ne pas s’entre-tuer semblait une riche idée. C’était déjà bien assez le merdier. Toujours en forte vigilance, il parlait peu, son système nerveux ouvert à la moindre alarme sensorielle, où même à la vibration la plus ténue dans l’intention du soldat. Ce dernier semblait se remettre peu à peu de l’affrontement, après s’être bandé sommairement.
-« Alliés de circonstance alors ? … … d’accord… mais j’ai quand même besoin de connaître ton objectif et ta motivation principale dans cette situation. »
Cela lui demandait de puiser un grand contrôle de lui-même pour empêcher sa gorge de se serrer, mais il ne voulait pas laisser sa voix trembler d’inquiétude face à une personne aussi redoutable. Il préférait laisser ses mots infuser et s’offrir une pause respiratoire.
-« Et quand même, pourquoi as-tu choisi de m’épargner ? Si tu avais été dans le sens de ton collègue, ta couverture aurait été préservée. »
Loin d’être à ce niveau de cynisme, Keshâ’rem était depuis longtemps décillé sur le fait que bien d’autres y étaient. Comme les pirates de l’airs, la Cour des Miracles ou Violette pour ne penser qu’à eux dans une farandole éclair de souvenirs. Enfin la dague était rangée, ce qui abaissait d’un cran le niveau de menace. Son système nerveux lui lâcha partiellement la bride.
Le soldat se justifiait de ne pas être un meurtrier. Il avait envie de le croire. Son visage sans expression l’embrassait d’un regard de néant.
-« J’y vois plus clair, maintenant. Peut-être pouvons-nous nous entraider finalement. Il y a beaucoup de secrets et de sécurité pour les garder. C’est toujours bon d’avoir un équipier pour faire diversion ou avoir ses arrières. »
Quand bien même il ne faisait aucun doute que la confiance n’avançait pas les yeux fermés. Trop de maraudeurs, de scientifiques du Magistères et de prétendus gentils Aramalians avaient tenté de la lui faire à l’envers dernièrement.
-« Essaye de ne pas me mentir. Je risque de le sentir. »
La proposition du soldat faisait sens. Après avoir un peu transpiré dans la lutte et palabrer, le temps avait passé et ils risquaient d’être inutilement découverts en fâcheuse posture. Au prix d’une très lente inspiration, à peine tremblante, il parvint à revenir à lui et à sortir de son immobilité. Seulement alors, il réalisa l’état de tension accrue dans les muscles de ses jambes et dans ses mains.
-« Je vais t’aider à effacer les traces… l’avantage de cette moquette cramoisie, c’est qu’elle cache bien les tâches de sang… c’est peut-être même pour ça qu’ils ont arrêté leur choix sur cette couleur. » conclue-t-il en se trouvant lui-même d’une humeur bien ténébreuse.
L’humeur parfaite pour traîner des cadavres et se livrer à un ménage hâtif en compagnie d’un inconnu interlope. Bien loin le temps des missions de coursiers ou des ajustements de prothèses de bras bon marché pour les rachetés du pénitencier, reconvertis dans une deuxième chance à la guilde des aventuriers. Sa nouvelle vie semblait se résumer aux mots secrets, sang et mort.
Sans avoir besoin de trop communiquer, les deux hommes s’organisèrent. Keshâ’rem laissa Val’Ihem prendre le serpent par les aisselles, parce qu’il était plus baraqué que lui. Aussi parce que c’était un peu dégueulasse avec son bras à moitié disloqué. De con côté il agrippa ses chevilles. Et ils entreprirent de le porter d’une démarche sinueuse vers le centre de la pièce pour le faire rouler sous la grande table de marbre. On ne parlait pas de le faire disparaître de la surface de la terre, seulement de leur faire gagner quelques heures d’immunité pour passer la nuit.
Le serveur était un cas plus compliqué, car il fallait prendre le risque de porter son corps dans le long couloir desservant le casino et les cuisines. Les allées et venues entre les deux étaient relativement fréquents. Par chance, tout deux parvinrent à éviter les ennuis. La moquette rougeâtre était bien pratique pour absorber l’hémoglobine, même si une flaque poisseuse s’était formée là où le corps du serveur gisait. Ils parvinrent à la dissimuler en empilant des caisses par-dessus. L’illusion durerait le temps qu’il faudrait. Une fois la victime empilée par-dessus son assassin sous la table, il ne restait plus qu’à déguerpir le plus vite possible.
-« As-tu une idée de la manière de descendre à l’étage inférieur ? J’ai vu qu’il y avait une porte après le bar. Mais le barman, Rick, va sans doute me passer un savon si j’apparais et essayer de m’envoyer faire autre chose. Il y a sans doute ton patron, qui risque aussi de t’apercevoir. »
En se projetant dans les ailes habitées du complexe, le jeune homme voyait d’autres failles à son plan.
-« Tu es censé t’appeler Ba’rek, c’est ça ?... si jamais on te demande, je m’appelle Caldwell. » ajouta-t-il après réflexion pour exhumer le nom qu’il avait sorti au hasard face au barman.
-« Je comprends que tu n’as pas l’intention de me tuer ou d’appeler les gardes. » résuma-t-il.
Le comportement du soldat était ambigu. Il se demandait encore qui il pouvait bien-être pour en venir aux mains et aux lames avec un associés. Ce dernier disait ne jamais lui avoir fait confiance. Sans doute avait-il des intérêts divergeant d’avec son boss et son organisation. Cela n’écartait pas de lui le fait d’être une menace pour le portebrume.
Depuis qu’il en était habité, malgré la médication prodiguée par Seraphah pour tenter de l’émousser, il pouvait ressentir un cri primal en situation de danger. Devait-il lui imputer cet appétit vorace en énergie et le peu de scrupules qu’il avait eu à en vider le serveur ? Ou bien n’était-ce que le résultat d’une mise en parenthèse de la morale dans un contexte violent où n’évoluaient que des gens pas très nets ?
Le blond reprit ses explications de plus belles. En disant « tous les deux », il essayait de les inclure dans le même groupe. Et Keshâ se demandait si ce n’était pas un vil stratagème pour lui faire baisser sa garde. Il n’oubliait pas que du serpent Invisible et du blond, c’était le blond qui avait triomphé au combat. De loin.
Les gens pensaient toujours qu’avec son allure juvénile et ses airs proprets, il était faible. Certes, il n’arrivait pas à s’enorgueillir de faculté au combat et était un être très sensible. Mais cela ne signifiait pas qu’on pouvait le balader et le manipuler si facilement. De ses émotions il faisait une force. Dans ces bas-fonds, pour lire les gens. Décrypter leurs intentions et leurs allégeances. Avec une certaine marge d’erreur. Et quand il était dépassé par la force et la sournoiserie de gens malveillants, il se laissait envahir par la rage pour s’oblitérer et créer la surprise.
Le jeune homme regardait le soldat essuyer le sang visqueux sur les vêtements du cadavre. Avant, ce genre de vision aurait suffit à le troubler profondément. Il ne ressentait aujourd’hui qu’un vague sentiment de dégoût mêlé à une sensation de justice et se demandait ce que cela disait de lui.
D’un hochement de tête, il partagea son assentiment. Ne pas s’entre-tuer semblait une riche idée. C’était déjà bien assez le merdier. Toujours en forte vigilance, il parlait peu, son système nerveux ouvert à la moindre alarme sensorielle, où même à la vibration la plus ténue dans l’intention du soldat. Ce dernier semblait se remettre peu à peu de l’affrontement, après s’être bandé sommairement.
-« Alliés de circonstance alors ? … … d’accord… mais j’ai quand même besoin de connaître ton objectif et ta motivation principale dans cette situation. »
Cela lui demandait de puiser un grand contrôle de lui-même pour empêcher sa gorge de se serrer, mais il ne voulait pas laisser sa voix trembler d’inquiétude face à une personne aussi redoutable. Il préférait laisser ses mots infuser et s’offrir une pause respiratoire.
-« Et quand même, pourquoi as-tu choisi de m’épargner ? Si tu avais été dans le sens de ton collègue, ta couverture aurait été préservée. »
Loin d’être à ce niveau de cynisme, Keshâ’rem était depuis longtemps décillé sur le fait que bien d’autres y étaient. Comme les pirates de l’airs, la Cour des Miracles ou Violette pour ne penser qu’à eux dans une farandole éclair de souvenirs. Enfin la dague était rangée, ce qui abaissait d’un cran le niveau de menace. Son système nerveux lui lâcha partiellement la bride.
Le soldat se justifiait de ne pas être un meurtrier. Il avait envie de le croire. Son visage sans expression l’embrassait d’un regard de néant.
-« J’y vois plus clair, maintenant. Peut-être pouvons-nous nous entraider finalement. Il y a beaucoup de secrets et de sécurité pour les garder. C’est toujours bon d’avoir un équipier pour faire diversion ou avoir ses arrières. »
Quand bien même il ne faisait aucun doute que la confiance n’avançait pas les yeux fermés. Trop de maraudeurs, de scientifiques du Magistères et de prétendus gentils Aramalians avaient tenté de la lui faire à l’envers dernièrement.
-« Essaye de ne pas me mentir. Je risque de le sentir. »
La proposition du soldat faisait sens. Après avoir un peu transpiré dans la lutte et palabrer, le temps avait passé et ils risquaient d’être inutilement découverts en fâcheuse posture. Au prix d’une très lente inspiration, à peine tremblante, il parvint à revenir à lui et à sortir de son immobilité. Seulement alors, il réalisa l’état de tension accrue dans les muscles de ses jambes et dans ses mains.
-« Je vais t’aider à effacer les traces… l’avantage de cette moquette cramoisie, c’est qu’elle cache bien les tâches de sang… c’est peut-être même pour ça qu’ils ont arrêté leur choix sur cette couleur. » conclue-t-il en se trouvant lui-même d’une humeur bien ténébreuse.
L’humeur parfaite pour traîner des cadavres et se livrer à un ménage hâtif en compagnie d’un inconnu interlope. Bien loin le temps des missions de coursiers ou des ajustements de prothèses de bras bon marché pour les rachetés du pénitencier, reconvertis dans une deuxième chance à la guilde des aventuriers. Sa nouvelle vie semblait se résumer aux mots secrets, sang et mort.
Sans avoir besoin de trop communiquer, les deux hommes s’organisèrent. Keshâ’rem laissa Val’Ihem prendre le serpent par les aisselles, parce qu’il était plus baraqué que lui. Aussi parce que c’était un peu dégueulasse avec son bras à moitié disloqué. De con côté il agrippa ses chevilles. Et ils entreprirent de le porter d’une démarche sinueuse vers le centre de la pièce pour le faire rouler sous la grande table de marbre. On ne parlait pas de le faire disparaître de la surface de la terre, seulement de leur faire gagner quelques heures d’immunité pour passer la nuit.
Le serveur était un cas plus compliqué, car il fallait prendre le risque de porter son corps dans le long couloir desservant le casino et les cuisines. Les allées et venues entre les deux étaient relativement fréquents. Par chance, tout deux parvinrent à éviter les ennuis. La moquette rougeâtre était bien pratique pour absorber l’hémoglobine, même si une flaque poisseuse s’était formée là où le corps du serveur gisait. Ils parvinrent à la dissimuler en empilant des caisses par-dessus. L’illusion durerait le temps qu’il faudrait. Une fois la victime empilée par-dessus son assassin sous la table, il ne restait plus qu’à déguerpir le plus vite possible.
-« As-tu une idée de la manière de descendre à l’étage inférieur ? J’ai vu qu’il y avait une porte après le bar. Mais le barman, Rick, va sans doute me passer un savon si j’apparais et essayer de m’envoyer faire autre chose. Il y a sans doute ton patron, qui risque aussi de t’apercevoir. »
En se projetant dans les ailes habitées du complexe, le jeune homme voyait d’autres failles à son plan.
-« Tu es censé t’appeler Ba’rek, c’est ça ?... si jamais on te demande, je m’appelle Caldwell. » ajouta-t-il après réflexion pour exhumer le nom qu’il avait sorti au hasard face au barman.
Dernière édition par Keshâ'rem Evangelisto le Mar 25 Juin - 16:36, édité 5 fois
Jeu 25 Avr - 16:02
Maltraitance à la chaîne
FT. Keshâ'rem Evangelisto
Au moins nous nous comprenions sur ce principe simple. Pas besoin de faire couler plus de sang. Il y en avait assez eu pour la journée. Et cela laissait assez de traces pour potentiellement nous poser des problèmes. Deux corps allaient être recherchés aujourd’hui. Avec un peu de chance, le serveur passerait inaperçu. Après tout, les disparitions devaient être plus fréquentes que dans n’importe quel autre établissement ici. Mais Vald allait manquer à l’appel. Et je ne voyais pas le chef de la sécurité ne pas remarquer son absence. Et dans mon état actuel, je faisais un coupable tout désigné. Peut être pouvais-je dissimuler mon avant bras. Mais mon visage… Les regards se tourneraient rapidement vers moi.
Mais chaque chose en son temps. Pour l’instant, c’était le jeune homme que je venais de sauver qui avait des questions. Il n’avait pas tort… J’avais peut être agi hâtivement. Mais cela avait été plus fort que moi. Vald était un élément incontrôlable et maintenant qu’il n’était plus dans l’équation, c’était un souci en moins quoi qu’il arrive. Et je n’allais pas laisser cet assassin faire plus de victime. Encore moins quand mon allié de fortune semblait en savoir plus que moi sur ce lieu de débauche.
Au moins, je n’étais plus seul dans cette galère. Nous avions un accord. Et l’entraide me semblait également la meilleure des options. Peut-être qu’à deux, nous serions capable de découvrir les secrets de l’usine. Il y avait beaucoup à faire et séparément nous avions causé plus de problèmes que nous ne pouvions espérer. Il n’était pas dit, qu’à deux, nous ne fassions bien pire. Mais avec un peu de chance, nous pouvions aussi être plus efficaces.
- Merci pour ton aide. Je pense en effet que le mieux c’est de faire équipe.
Mais pour ce qui était de la confiance, sa demande était déjà rompue. Et je doutais qu’il ai lui aussi joué franc jeu avec moi dès le début. Je ne m'appelais pas Ba’rek. Et je n’étais pas qu’un simple garde du corps. Si il devait le deviner, tel qu’il le suggérait, soit. Mais je ne pouvais pas le lui dire d'emblée. Cette information devait rester secrète aussi longtemps que possible. Cela pourrait être utile plus tard. Et puis je ne savais pas exactement qui il était non plus. Un ouvrier ? Un contremaître ? Ou un serveur ? Je doutais que nous soyons deux soldats. Tout ce que je savais, c’était qu’il avait plus l’habitude de ce genre de ruse que moi. Alors j’hochais simplement la tête en acceptant.
- Bon… Eh bien au travail.
Cela fut plus long que je ne l’aurais souhaité. Entre les allez et venu, et le temps pour déplacer les cadavres, ce fut un miracle que personne ne nous repère ou encore que Milo ne vienne pas me chercher. A ce train là, il fallait peut être mieux que je disparaisse après ce soir. Il risquait de ne pas apprécier mon absence si il l’avait déjà remarqué. Alors autant se dépêcher. Je finissais de camoufler notre passage et réajuster mon costume, cachant un bandage plus discret sous ma manche et nettoyant la plaie sur mon visage. La marque était nette mais peu profonde. On ne pouvait pas passer à côté. Mais elle n’attirait pas trop l’attention. Je devrais pouvoir me déplacer librement. Je retournais auprès du faux serveur qui lui aussi semblait prêt à y aller.
- Du moment que mon boss ne me voit pas disparaître derrière une porte, ça devrait aller. Si ils avaient remarqué mon absence, quelqu’un serait déjà venu me chercher je pense. Je n’ai pas de soucis à me faire pour l’instant. En revanche, je n’ai aucune idée d’où nous devrions chercher. Du côté de la porte derrière le bar, il y a aussi les cuisines. je sais qu’il s’y passe quelque chose de pas net. Mais je ne sais pas quoi. Des livraisons sont régulièrement acheminées de la cuisine à l’ascenseur de l’autre côté de la pièce. Et je doute que ce soit de la nourriture. Je ne sais pas ce qu’il y a d’autre derrière cette porte. Mais l’avantage c’est qu’elle ne semble pas utiliser de carte d’accès ou de code. En revanche, l'ascenseur si. Ça ne nous laisse pas beaucoup de choix… Mais je devrais pouvoir faire diversion pour que tu passes la porte et que le barman ne te voit pas. Attends que le barman ne soit plus derrière le bar et rejoins moi.
Sur un dernier regard, je franchissais la porte qui nous ramenait à la salle centrale. Ici peu de choses avaient changé. Personne n’avait la moindre idée que deux cadavres étaient cachés si proches d’eux. Tant mieux. Je me dirigeais vers le bar d’un pas décidé, gardant dans un coin de ma vision le grand Milo qui ne m’avait pas encore vu. Je m’arretai au bar et m'adressai directement au barman.
- Un brandy flip pour la table de jeu.
- Très bien monsieur. Sur quelle ardoise ?
- Celle de Radovic.
Et instantanément le barman se mit à l’action. Il se déplaçait instinctivement derrière le bar, récupérant les oeufs, le sucre, la crème et le brandy. Le seul problème était que dans son agitation, il ne me regardait plus vraiment, et que la coriandre était à portée de main. C’était une herbe intéressante, la coriandre. D’un goût raffiné pour beaucoup, elle pouvait être intolérable pour d'autres. Une simple pincée dans le shaker laissé sans surveillance, le temps d’infuser dans l’alcool, et mon boss allait passer un très mauvais moment. Mais peut-être un peu moins que le barman. Après tout c’était son cocktail préféré mixé avec ce qu’il aimait le moins.
- Mais où est passé ce serveur… Bon sang. Eh toi ! Amène ça à la table de jeu numéro 4. C’est pour Radovic.
Je m'éloignai en gardant les yeux sur le serveur qui avait pris le cocktail. De toute évidence, le barman avait fait allusion à Caldwell. Moins non plus je ne savais pas où il était. Mais ce n’était pas bien grave. Je ne doutais pas qu’il attendait le bon moment et celà ne tarda pas. Radovic cracha le contenu de son verre sur les autres joueurs de poker et la pauvre Duchesse. Rouge de colère, il fustigeait le malheureux et innocent serveur qui courru chercher le barman qui s’éloigna du bar tout pénaux.
C’était le moment. Je franchissais la porte laissée sans surveillance pour me retrouver dans un nouveau couloir. Je pouvais voir la porte des cuisines un tout petit peu plus loin et d'autres portes à gauche et à droite. Mais Caldwell n’était pas encore là.
Mais chaque chose en son temps. Pour l’instant, c’était le jeune homme que je venais de sauver qui avait des questions. Il n’avait pas tort… J’avais peut être agi hâtivement. Mais cela avait été plus fort que moi. Vald était un élément incontrôlable et maintenant qu’il n’était plus dans l’équation, c’était un souci en moins quoi qu’il arrive. Et je n’allais pas laisser cet assassin faire plus de victime. Encore moins quand mon allié de fortune semblait en savoir plus que moi sur ce lieu de débauche.
Au moins, je n’étais plus seul dans cette galère. Nous avions un accord. Et l’entraide me semblait également la meilleure des options. Peut-être qu’à deux, nous serions capable de découvrir les secrets de l’usine. Il y avait beaucoup à faire et séparément nous avions causé plus de problèmes que nous ne pouvions espérer. Il n’était pas dit, qu’à deux, nous ne fassions bien pire. Mais avec un peu de chance, nous pouvions aussi être plus efficaces.
- Merci pour ton aide. Je pense en effet que le mieux c’est de faire équipe.
Mais pour ce qui était de la confiance, sa demande était déjà rompue. Et je doutais qu’il ai lui aussi joué franc jeu avec moi dès le début. Je ne m'appelais pas Ba’rek. Et je n’étais pas qu’un simple garde du corps. Si il devait le deviner, tel qu’il le suggérait, soit. Mais je ne pouvais pas le lui dire d'emblée. Cette information devait rester secrète aussi longtemps que possible. Cela pourrait être utile plus tard. Et puis je ne savais pas exactement qui il était non plus. Un ouvrier ? Un contremaître ? Ou un serveur ? Je doutais que nous soyons deux soldats. Tout ce que je savais, c’était qu’il avait plus l’habitude de ce genre de ruse que moi. Alors j’hochais simplement la tête en acceptant.
- Bon… Eh bien au travail.
Cela fut plus long que je ne l’aurais souhaité. Entre les allez et venu, et le temps pour déplacer les cadavres, ce fut un miracle que personne ne nous repère ou encore que Milo ne vienne pas me chercher. A ce train là, il fallait peut être mieux que je disparaisse après ce soir. Il risquait de ne pas apprécier mon absence si il l’avait déjà remarqué. Alors autant se dépêcher. Je finissais de camoufler notre passage et réajuster mon costume, cachant un bandage plus discret sous ma manche et nettoyant la plaie sur mon visage. La marque était nette mais peu profonde. On ne pouvait pas passer à côté. Mais elle n’attirait pas trop l’attention. Je devrais pouvoir me déplacer librement. Je retournais auprès du faux serveur qui lui aussi semblait prêt à y aller.
- Du moment que mon boss ne me voit pas disparaître derrière une porte, ça devrait aller. Si ils avaient remarqué mon absence, quelqu’un serait déjà venu me chercher je pense. Je n’ai pas de soucis à me faire pour l’instant. En revanche, je n’ai aucune idée d’où nous devrions chercher. Du côté de la porte derrière le bar, il y a aussi les cuisines. je sais qu’il s’y passe quelque chose de pas net. Mais je ne sais pas quoi. Des livraisons sont régulièrement acheminées de la cuisine à l’ascenseur de l’autre côté de la pièce. Et je doute que ce soit de la nourriture. Je ne sais pas ce qu’il y a d’autre derrière cette porte. Mais l’avantage c’est qu’elle ne semble pas utiliser de carte d’accès ou de code. En revanche, l'ascenseur si. Ça ne nous laisse pas beaucoup de choix… Mais je devrais pouvoir faire diversion pour que tu passes la porte et que le barman ne te voit pas. Attends que le barman ne soit plus derrière le bar et rejoins moi.
Sur un dernier regard, je franchissais la porte qui nous ramenait à la salle centrale. Ici peu de choses avaient changé. Personne n’avait la moindre idée que deux cadavres étaient cachés si proches d’eux. Tant mieux. Je me dirigeais vers le bar d’un pas décidé, gardant dans un coin de ma vision le grand Milo qui ne m’avait pas encore vu. Je m’arretai au bar et m'adressai directement au barman.
- Un brandy flip pour la table de jeu.
- Très bien monsieur. Sur quelle ardoise ?
- Celle de Radovic.
Et instantanément le barman se mit à l’action. Il se déplaçait instinctivement derrière le bar, récupérant les oeufs, le sucre, la crème et le brandy. Le seul problème était que dans son agitation, il ne me regardait plus vraiment, et que la coriandre était à portée de main. C’était une herbe intéressante, la coriandre. D’un goût raffiné pour beaucoup, elle pouvait être intolérable pour d'autres. Une simple pincée dans le shaker laissé sans surveillance, le temps d’infuser dans l’alcool, et mon boss allait passer un très mauvais moment. Mais peut-être un peu moins que le barman. Après tout c’était son cocktail préféré mixé avec ce qu’il aimait le moins.
- Mais où est passé ce serveur… Bon sang. Eh toi ! Amène ça à la table de jeu numéro 4. C’est pour Radovic.
Je m'éloignai en gardant les yeux sur le serveur qui avait pris le cocktail. De toute évidence, le barman avait fait allusion à Caldwell. Moins non plus je ne savais pas où il était. Mais ce n’était pas bien grave. Je ne doutais pas qu’il attendait le bon moment et celà ne tarda pas. Radovic cracha le contenu de son verre sur les autres joueurs de poker et la pauvre Duchesse. Rouge de colère, il fustigeait le malheureux et innocent serveur qui courru chercher le barman qui s’éloigna du bar tout pénaux.
C’était le moment. Je franchissais la porte laissée sans surveillance pour me retrouver dans un nouveau couloir. Je pouvais voir la porte des cuisines un tout petit peu plus loin et d'autres portes à gauche et à droite. Mais Caldwell n’était pas encore là.
Sam 27 Avr - 0:38
Maltraitance à la chaîne
FT. Val'Ihem Karmine
Plus il repensait à ses expériences passées, plus il faisait face à l’amer constat de sa solitude. Toutes les fois où il avait tenté de s’en remettre à quelqu’un, il avait été trompé, volé, molesté. Seuls Maëlstrom et Seraphah faisaient exception à cette règle d’or de ne jamais accorder sa confiance à personne.
Pourtant, les circonstances ne lui donnaient pas d’autre choix que d’agir de facto comme s’il ressentait cette confiance envers Ba’rek.
Ce n’était pas facile d’exécuter leur opération de camouflage macabre. A plusieurs reprises, les sueurs froides furent au rendez-vous. Ils y parvinrent néanmoins. Forfait accompli. Sans preuve. Sans mobile. Sans laisser de traces. L’orphelin se jugeait un peu trop doué à son goût pour disposer de corps et nettoyer une scène de crime. C’était sans doute ce que d’aucuns le jugeant trop épris de sa pureté lui disaient en l’invitant à se salir les mains.
Pourtant, il n’avait souhaité aucune de ces morts. Toutes deux étaient évitables. Pourquoi fallait-il toujours que tout se termine de cette manière ? Au moins, ils avaient la chance de ne pas être à la place desdits macchabées.
Pendant que Ba’rek s’occupait de dissimuler son bandage, Caldwell s’avança vers lui. Il tendit timidement une main vers son cou pour gratter une gouttelette de sang séchée.
-« Ça aurait pu soulever des questions. »
Par chance, le sens du détail vestimentaire faisait partie de ses qualités.
-« Ton plan a l’air risqué. Mais effectivement, nous n’avons pas cinquante options. Si on s’organise bien et qu’on y va sans hésiter, cela peut marcher… concernant les cuisines, j’ai eu l’occasion d’espionner. C’est de là que venait le serveur que l’autre a… bref. J’ai vu qu’il y avait un trafic de drogue au sein de l’établissement : ils nettoient des conserves de haricots et les remplissent de poudre blanche avant de les refermer. »
Une voix pressante en lui demandait sans cesse à qui ce Ba’rek pouvait bien rendre compte et s’il ne se mettait pas – encore plus – en danger en collaborant avec lui. Tire-toi de là… mais tire-toi de là !! -maugréait sa voix intérieure comme l’on pourrait le faire devant un film d’horreur.
Revenu dans le couloir cramoisi, Keshâ espionnait par l’entrebâillement Ba’rek en train d’évoluer vers le bar. Rick jetait des regards hâtifs en sa direction, attendant de pied ferme son retour pour l’engueuler. De loin, il vit le garde du corps ajouter un ingrédient dans la décoction que Rick préparait. Le petit manège préparé par Ba’rek se déroula. Le serveur de substitution partit du bar vers la table de son patron. Ce dernier éclaboussa toute la tablée de manière spectaculaire avant de traiter le serveur comme du poisson pourri. Celui-ci, désolé, appelait à l’aide son supérieur.
Dès que Rick délaissa son poste d’observation, Ba’rek s’éclipsa. Keshâ comprit que c’était à lui de jouer. Ses joues brûlaient de chaleur, sa gorge devint si sèche, si vite ! Elle en colla son palais. Chaque pas dans le salon lui donnait l’impression de s’enfoncer plus profond dans un abîme. Ne déconne pas ! Tu ne pas vas pas perdre connaissance ! Aller, un peu de nerfs.
Arrivé au niveau du comptoir désert, il glissa à genoux. Radovic beuglait en jetant sa serviette au visage de Rick. Le barman devait avoir oublié toute idée de son existence sur le coup. De son côté, Keshâ était si stressé. C’était comme si son front portait écrit en lettres de sang qu’il venait de cacher deux corps dans le réduit et que c’était un espion.
Après une grande inspiration, il se reprit. D’un mouvement incertain, il avança à quatre pattes derrière le comptoir, entre des vestiges de glaçons et de marc de café. Il ne lui restait plus qu’à atteindre la porte derrière laquelle devait -peut-être – l’attendre Ba’rek. Son corps était pris d'un tremblement intérieur qui devenait de plus en plus important.
Plus temps de lanterner. La diversion allait s’estomper. Aller ! Du nerf !
Après un bref coup d’œil dans le reflet chromé de la machine à café, il put voir que l’attention de la salle était toujours sur Rick et le serveur. Comme il portait la même tenue que lui, cela ne le rassurait qu’à demi. Il n’y avait que trois pas à faire.
Tel en employé en fuite, il s’empara d’un plateau vide et fonça sur la porte sans se retourner.
-« Je suis presque surpris de te trouver là… ne restons pas ici. »
Il s’avança dans le couloir, sans savoir quelle direction suivre.
-« Bon. Pour tout te dire, je suis venu sur les traces de maltraitances particulièrement abusives signalées sur les ouvriers… mais je vois que tout ceci dépasse l’histoire d’origine, avec l’existence même de cet endroit et le trafic de drogue. »
Il hésita un moment…
« Selon tes informations, y aurait-il autre chose ? »
C’était une façon de tâter le terrain et lui tirer les vers du nez. On ne se jette pas dans la gueule du loup sans savoir qui est le larron d’à côté.
-« D’après toi, on prend quelle porte ? On peut tomber sur toute une bande, mieux vaut ne pas se tromper. » ajouta-t-il au cas où l’euphorie de leur fuite réussie du salon mafieux leur ferait oublier que d’autres congrégations de malfrats pourraient les attendre à chaque tournant.
Cette fois-ci, il dégaina une arme.
Il était sûr qu’aucune couverture de façade ne pourrait tenir à ce niveau du bâtiment. Aucun d’eux n’aurait de solides arguments pour justifier sa présence si loin des convives dans le dédale de ces corridors illicites. La moquette était toujours en velours cramoisi et sentait un peu le pinard. Mais plus personne ne s’y tromperait. Ce n’était pas un joyeux casino pour richards trompant l’ennui.
La main de Keshâ se posa sur la poignée de porte que lui désignait Ba ‘rek. Doucement, il colla son oreille contre le bois, laissant ses cheveux cendrés s’y presser à leur tour.
-« Je crois qu’il n’y a personne. » murmurait-il.
Pourtant, les circonstances ne lui donnaient pas d’autre choix que d’agir de facto comme s’il ressentait cette confiance envers Ba’rek.
Ce n’était pas facile d’exécuter leur opération de camouflage macabre. A plusieurs reprises, les sueurs froides furent au rendez-vous. Ils y parvinrent néanmoins. Forfait accompli. Sans preuve. Sans mobile. Sans laisser de traces. L’orphelin se jugeait un peu trop doué à son goût pour disposer de corps et nettoyer une scène de crime. C’était sans doute ce que d’aucuns le jugeant trop épris de sa pureté lui disaient en l’invitant à se salir les mains.
Pourtant, il n’avait souhaité aucune de ces morts. Toutes deux étaient évitables. Pourquoi fallait-il toujours que tout se termine de cette manière ? Au moins, ils avaient la chance de ne pas être à la place desdits macchabées.
Pendant que Ba’rek s’occupait de dissimuler son bandage, Caldwell s’avança vers lui. Il tendit timidement une main vers son cou pour gratter une gouttelette de sang séchée.
-« Ça aurait pu soulever des questions. »
Par chance, le sens du détail vestimentaire faisait partie de ses qualités.
-« Ton plan a l’air risqué. Mais effectivement, nous n’avons pas cinquante options. Si on s’organise bien et qu’on y va sans hésiter, cela peut marcher… concernant les cuisines, j’ai eu l’occasion d’espionner. C’est de là que venait le serveur que l’autre a… bref. J’ai vu qu’il y avait un trafic de drogue au sein de l’établissement : ils nettoient des conserves de haricots et les remplissent de poudre blanche avant de les refermer. »
Une voix pressante en lui demandait sans cesse à qui ce Ba’rek pouvait bien rendre compte et s’il ne se mettait pas – encore plus – en danger en collaborant avec lui. Tire-toi de là… mais tire-toi de là !! -maugréait sa voix intérieure comme l’on pourrait le faire devant un film d’horreur.
Revenu dans le couloir cramoisi, Keshâ espionnait par l’entrebâillement Ba’rek en train d’évoluer vers le bar. Rick jetait des regards hâtifs en sa direction, attendant de pied ferme son retour pour l’engueuler. De loin, il vit le garde du corps ajouter un ingrédient dans la décoction que Rick préparait. Le petit manège préparé par Ba’rek se déroula. Le serveur de substitution partit du bar vers la table de son patron. Ce dernier éclaboussa toute la tablée de manière spectaculaire avant de traiter le serveur comme du poisson pourri. Celui-ci, désolé, appelait à l’aide son supérieur.
Dès que Rick délaissa son poste d’observation, Ba’rek s’éclipsa. Keshâ comprit que c’était à lui de jouer. Ses joues brûlaient de chaleur, sa gorge devint si sèche, si vite ! Elle en colla son palais. Chaque pas dans le salon lui donnait l’impression de s’enfoncer plus profond dans un abîme. Ne déconne pas ! Tu ne pas vas pas perdre connaissance ! Aller, un peu de nerfs.
Arrivé au niveau du comptoir désert, il glissa à genoux. Radovic beuglait en jetant sa serviette au visage de Rick. Le barman devait avoir oublié toute idée de son existence sur le coup. De son côté, Keshâ était si stressé. C’était comme si son front portait écrit en lettres de sang qu’il venait de cacher deux corps dans le réduit et que c’était un espion.
Après une grande inspiration, il se reprit. D’un mouvement incertain, il avança à quatre pattes derrière le comptoir, entre des vestiges de glaçons et de marc de café. Il ne lui restait plus qu’à atteindre la porte derrière laquelle devait -peut-être – l’attendre Ba’rek. Son corps était pris d'un tremblement intérieur qui devenait de plus en plus important.
Plus temps de lanterner. La diversion allait s’estomper. Aller ! Du nerf !
Après un bref coup d’œil dans le reflet chromé de la machine à café, il put voir que l’attention de la salle était toujours sur Rick et le serveur. Comme il portait la même tenue que lui, cela ne le rassurait qu’à demi. Il n’y avait que trois pas à faire.
Tel en employé en fuite, il s’empara d’un plateau vide et fonça sur la porte sans se retourner.
-« Je suis presque surpris de te trouver là… ne restons pas ici. »
Il s’avança dans le couloir, sans savoir quelle direction suivre.
-« Bon. Pour tout te dire, je suis venu sur les traces de maltraitances particulièrement abusives signalées sur les ouvriers… mais je vois que tout ceci dépasse l’histoire d’origine, avec l’existence même de cet endroit et le trafic de drogue. »
Il hésita un moment…
« Selon tes informations, y aurait-il autre chose ? »
C’était une façon de tâter le terrain et lui tirer les vers du nez. On ne se jette pas dans la gueule du loup sans savoir qui est le larron d’à côté.
-« D’après toi, on prend quelle porte ? On peut tomber sur toute une bande, mieux vaut ne pas se tromper. » ajouta-t-il au cas où l’euphorie de leur fuite réussie du salon mafieux leur ferait oublier que d’autres congrégations de malfrats pourraient les attendre à chaque tournant.
Cette fois-ci, il dégaina une arme.
Il était sûr qu’aucune couverture de façade ne pourrait tenir à ce niveau du bâtiment. Aucun d’eux n’aurait de solides arguments pour justifier sa présence si loin des convives dans le dédale de ces corridors illicites. La moquette était toujours en velours cramoisi et sentait un peu le pinard. Mais plus personne ne s’y tromperait. Ce n’était pas un joyeux casino pour richards trompant l’ennui.
La main de Keshâ se posa sur la poignée de porte que lui désignait Ba ‘rek. Doucement, il colla son oreille contre le bois, laissant ses cheveux cendrés s’y presser à leur tour.
-« Je crois qu’il n’y a personne. » murmurait-il.
Dernière édition par Keshâ'rem Evangelisto le Mar 25 Juin - 16:49, édité 4 fois
Ven 7 Juin - 1:24
Maltraitance à la chaîne
FT. Val'Ihem Karmine
Ba’rek était assez jaloux de ses sources. Il pouvait comprendre ses scrupules. D’ailleurs, comme il le lui fit gentiment remarquer : « ils avaient d’autres chats à fouetter ». Si aucun des deux ne se faisait crever dans les quinze minutes, peut-être alors serait-il temps de décider de la suite. Sinon, autant garder son énergie à rester furtifs.
La salle qu’ils ont investi est emplie d’une lueur blafarde et clignotante. Tous les murs couverts de carreaux blancs empestent l’ammoniaque. Et de nombreux réfrigérateurs industriels s’alignent autour d’un immense plan de travail en acier inoxydable.
-« C’est bizarre d’avoir une autre cuisine juste à côté du bar et de l’autre cuisine… » rumina Caldwell.
Futé, le militaire s’accroupit en trempant son doigt dans un liquide durci de couleur marron, qu’il porta à ses narines.
-« Hm, je ne pense pas qu’il s’agisse vraiment d’une cuisine… »
Pris par une collection d’hypothèses néfastes, Keshâ finit par s’approcher des immenses frigos, pour abaisser sa poignée coriace de 90 degrés vers le bas. Face à l’étalage de bocaux, il émit une inspiration hachée.
-« Ya quoi là-dedans ? »
C’était pire qu’un autre macchabée. C’était… c’était… une boucherie. Des hectolitres de sangs mis en poche. Des morceaux de corps disposés comme une garniture pour un banquet, d’autres glacières rouges et blanches plus bas, avec une poignée robuste pour les déplacer facilement. A l’intérieur, se trouvait une masse imposante de tissus écarlate.
-« Bordel Caldwell ! Même dans d’excellentes conditions, un organe prélevé n’est bon pour la greffe que durant quelques heures ! Il faut qu’on sorte de là tout de suite. »
Dans un écho évident aux craintes de Ba’rek, des voix se firent entendre à quelques pas dans le couloir. Mu par un instinct reptilien, il referma la glacière à toute vitesse et la replaça sans son compartiment au fond du frigo sans faire tomber de bocaux – immondices emplis de matières organiques.
Il venait tout juste de refermer la porte du frigo, quand deux bras l’attrapèrent par la taille. Manquant de glapir, il se sentit soulevé à toute allure et jeté sur un plateau d’acier coulissant. Il n’avait pas eu le temps de comprendre ce qui venait de se passer, que la porte carrée d’un compartiment mortuaire se refermait sur eux.
Il comprit que Ba’rek venait de faire usage de son hypervélocité pour se cacher avec lui avant que les mafieux n’investissent les lieux. Le corps chaud du garde du corps était plaqué contre lui. C’était à peine s’ils tenaient à deux dans cette niche. En entrant, il n’avait même pas remarqué que la « cuisine » renfermait de tels casiers.
-« Est-ce qu’ils nous cherchent ? » murmura Keshâ le plus bas possible.
-« Chhh ! » lui siffla fermement Ba’rek, l’air mécontent.
Dans le noir, il ne pouvait pas voir son expression, mais il l’imaginait bien froncer les sourcils.
Les mafieux parlaient d’une livraison. Mais il était impossible d’en comprendre davantage à travers la cloison de métal. Keshâ avait du mal à respirer. En partie parce que Ba’rek était couché sur lui. En partie parce que l’air ne circulait pas et qu’il faisait très froid dans ce caisson. Bientôt, ils viendraient à manquer d’oxygène. Et il en comprenait encore mieux la nécessité d’économiser leurs réserves.
Cependant, la peur et l’exiguïté lui serraient la gorge et il peinait à réduire son souffle à un simple filet d’air. Plus il se retenait, plus il avait l’impression d’agoniser et son corps voulait hyperventiler.
-« Calme-toi… Caldwell. » soufflait Ba’rek, les dents serrés.
-« Je… ne peux pas. »
Le manque total de stimulation sensorielle ne l’aidait pas. Il ne voyait rien. Y avait-il seulement une séparation latérale avec les autres caissons. Ceux-ci renfermaient peut-être des corps atrocement mutilés. Il voulait sortir. Il devait sortir. Son esprit convoqua des visions acérées : les marées de Jiangshi déferlant dans les couloirs de la tour d’Yfe. Sans issue possible. Sans victoire possible. Les Jiangshis de son enfance, partout autour de sa cachette dans la brume, ses parents morts, ses poursuivants qui se faisaient arracher les intestins à vifs. Leurs cris insoutenables.
Seule sa propension à la tétanie l’empêchait de se débattre et de hurler. La porte. Peut-être qu’elle ne s’ouvrait pas de l’intérieur. Ils ne pourraient jamais sortir. Ils allaient mourir ici. Pourrir ici. Devenir des Jiangshi.
-« Eyh ! » souffla Ba’rek.
« Tu vas faire une crise de panique… »
En temps normal, il l’aurait sans doute fait asseoir, en le regardant dans les yeux. Ou peut-être aurait-il simplement abandonné ce poids lourd derrière lui pour sauver sa mission. Mais ils étaient dans le même bateau. Ou plutôt, dans le même caveau. Si l’un se faisait repérer maintenant, l’autre tombait avec.
Quoi qu’il en soit, Ba’rek enserra Caldwell et lui murmura à l’oreille.
-« Je suis là. Respire doucement par le nez… doucement… respire avec moi. Ressens mon ventre se rentrer et se soulever… suis mon rythme. » se força-t-il à susurrer le plus lentement et le plus bas possible. Lui aussi aurait du mal à se contrôler si ça continuait.
A travers ce contact charnel et cette boucle de consignes simples qui exigeaient toute son attention, Keshâ parvint à arrêter la séquence traumatique de ses cauchemars. Il ignorait plus ou moins l’odeur, la moiteur et le froid, tandis que les médecins disposaient des ustensiles avec méthode dans des plateaux chirurgicaux. On le comprenait sans mal au cliquetis si caractéristique.
Une porte battante s’ouvrit dans un coup de pied et des hommes arrivèrent avec quelqu’un d’autre. Au grincement régulier, on aurait presque dit qu’ils poussaient un charriot ou un fauteuil roulant.
-« Par pitié ! Laissez-moi partir… je ne dirai rien à personne. Je suis maman de trois enfants !! » cria-t-elle d’une voie hystérique qui leur parvint.
-« Sachez, madame Espadla, que cela n’a rien de personnel… nous avons un client fortuné qui a besoin d’un cœur… son sang est d’un groupe rare… qui se trouve être compatible avec le vôtre. » répliqua la voix grondante avec méthode. Le même ton sociopathe que ce connard de Vladimir.
La salle qu’ils ont investi est emplie d’une lueur blafarde et clignotante. Tous les murs couverts de carreaux blancs empestent l’ammoniaque. Et de nombreux réfrigérateurs industriels s’alignent autour d’un immense plan de travail en acier inoxydable.
-« C’est bizarre d’avoir une autre cuisine juste à côté du bar et de l’autre cuisine… » rumina Caldwell.
Futé, le militaire s’accroupit en trempant son doigt dans un liquide durci de couleur marron, qu’il porta à ses narines.
-« Hm, je ne pense pas qu’il s’agisse vraiment d’une cuisine… »
Pris par une collection d’hypothèses néfastes, Keshâ finit par s’approcher des immenses frigos, pour abaisser sa poignée coriace de 90 degrés vers le bas. Face à l’étalage de bocaux, il émit une inspiration hachée.
-« Ya quoi là-dedans ? »
C’était pire qu’un autre macchabée. C’était… c’était… une boucherie. Des hectolitres de sangs mis en poche. Des morceaux de corps disposés comme une garniture pour un banquet, d’autres glacières rouges et blanches plus bas, avec une poignée robuste pour les déplacer facilement. A l’intérieur, se trouvait une masse imposante de tissus écarlate.
-« Un foie… »
Keshâ’rem manqua de rendre son dernier repas sur les chaussures de Ba’rek.-« Bordel Caldwell ! Même dans d’excellentes conditions, un organe prélevé n’est bon pour la greffe que durant quelques heures ! Il faut qu’on sorte de là tout de suite. »
Dans un écho évident aux craintes de Ba’rek, des voix se firent entendre à quelques pas dans le couloir. Mu par un instinct reptilien, il referma la glacière à toute vitesse et la replaça sans son compartiment au fond du frigo sans faire tomber de bocaux – immondices emplis de matières organiques.
Il venait tout juste de refermer la porte du frigo, quand deux bras l’attrapèrent par la taille. Manquant de glapir, il se sentit soulevé à toute allure et jeté sur un plateau d’acier coulissant. Il n’avait pas eu le temps de comprendre ce qui venait de se passer, que la porte carrée d’un compartiment mortuaire se refermait sur eux.
Il comprit que Ba’rek venait de faire usage de son hypervélocité pour se cacher avec lui avant que les mafieux n’investissent les lieux. Le corps chaud du garde du corps était plaqué contre lui. C’était à peine s’ils tenaient à deux dans cette niche. En entrant, il n’avait même pas remarqué que la « cuisine » renfermait de tels casiers.
-« Est-ce qu’ils nous cherchent ? » murmura Keshâ le plus bas possible.
-« Chhh ! » lui siffla fermement Ba’rek, l’air mécontent.
Dans le noir, il ne pouvait pas voir son expression, mais il l’imaginait bien froncer les sourcils.
Les mafieux parlaient d’une livraison. Mais il était impossible d’en comprendre davantage à travers la cloison de métal. Keshâ avait du mal à respirer. En partie parce que Ba’rek était couché sur lui. En partie parce que l’air ne circulait pas et qu’il faisait très froid dans ce caisson. Bientôt, ils viendraient à manquer d’oxygène. Et il en comprenait encore mieux la nécessité d’économiser leurs réserves.
Cependant, la peur et l’exiguïté lui serraient la gorge et il peinait à réduire son souffle à un simple filet d’air. Plus il se retenait, plus il avait l’impression d’agoniser et son corps voulait hyperventiler.
-« Calme-toi… Caldwell. » soufflait Ba’rek, les dents serrés.
-« Je… ne peux pas. »
Le manque total de stimulation sensorielle ne l’aidait pas. Il ne voyait rien. Y avait-il seulement une séparation latérale avec les autres caissons. Ceux-ci renfermaient peut-être des corps atrocement mutilés. Il voulait sortir. Il devait sortir. Son esprit convoqua des visions acérées : les marées de Jiangshi déferlant dans les couloirs de la tour d’Yfe. Sans issue possible. Sans victoire possible. Les Jiangshis de son enfance, partout autour de sa cachette dans la brume, ses parents morts, ses poursuivants qui se faisaient arracher les intestins à vifs. Leurs cris insoutenables.
Seule sa propension à la tétanie l’empêchait de se débattre et de hurler. La porte. Peut-être qu’elle ne s’ouvrait pas de l’intérieur. Ils ne pourraient jamais sortir. Ils allaient mourir ici. Pourrir ici. Devenir des Jiangshi.
-« Eyh ! » souffla Ba’rek.
« Tu vas faire une crise de panique… »
En temps normal, il l’aurait sans doute fait asseoir, en le regardant dans les yeux. Ou peut-être aurait-il simplement abandonné ce poids lourd derrière lui pour sauver sa mission. Mais ils étaient dans le même bateau. Ou plutôt, dans le même caveau. Si l’un se faisait repérer maintenant, l’autre tombait avec.
Quoi qu’il en soit, Ba’rek enserra Caldwell et lui murmura à l’oreille.
-« Je suis là. Respire doucement par le nez… doucement… respire avec moi. Ressens mon ventre se rentrer et se soulever… suis mon rythme. » se força-t-il à susurrer le plus lentement et le plus bas possible. Lui aussi aurait du mal à se contrôler si ça continuait.
A travers ce contact charnel et cette boucle de consignes simples qui exigeaient toute son attention, Keshâ parvint à arrêter la séquence traumatique de ses cauchemars. Il ignorait plus ou moins l’odeur, la moiteur et le froid, tandis que les médecins disposaient des ustensiles avec méthode dans des plateaux chirurgicaux. On le comprenait sans mal au cliquetis si caractéristique.
Une porte battante s’ouvrit dans un coup de pied et des hommes arrivèrent avec quelqu’un d’autre. Au grincement régulier, on aurait presque dit qu’ils poussaient un charriot ou un fauteuil roulant.
-« Par pitié ! Laissez-moi partir… je ne dirai rien à personne. Je suis maman de trois enfants !! » cria-t-elle d’une voie hystérique qui leur parvint.
-« Sachez, madame Espadla, que cela n’a rien de personnel… nous avons un client fortuné qui a besoin d’un cœur… son sang est d’un groupe rare… qui se trouve être compatible avec le vôtre. » répliqua la voix grondante avec méthode. Le même ton sociopathe que ce connard de Vladimir.
Dernière édition par Keshâ'rem Evangelisto le Mar 25 Juin - 16:53, édité 1 fois
Sam 8 Juin - 5:53
Maltraitance à la chaîne
FT. Val'Ihem Karmine
Les serres du militaire s’enfoncèrent dans la chair de son épaule. Presque jusqu’à lui faire un bleu. Dans une compulsion révoltée, il avait voulu, on ne sait pas. Le caisson ne permettait pas de se redresser. L’inhumanité sans bornes le soulevait de l’intérieur et faisait comprendre à Val’Ihem qu’il n’envisageait pas de laisser la scène suivre son cours.
-« Arrête. On ne peut rien faire. »
Les pleurs de la femme continuaient dehors. Madame Espalada se mit à hurler et à se débattre. Ce qui eut le mérite de leur offrir une couverture.
-« On n’a pas le droit de rester là sans bouger pendant que ces fumiers la charcutent. » haussa-t-il le ton dans un murmure haché.
-« Caldwell, tu vas juste nous faire tuer…s’il te plaît. Baisse d’un ton. »
Les hommes à l’extérieur étaient en train de maîtriser la captive et de préparer la chambre d’intervention en nettoyant tout méticuleusement. Une ventilation se mit en route. Le son d'une radio se fit entendre. Un air d'opéra s'éleva au gramophone. Un sale type se mit à chantonner sur un air de Verdi, rendant la mélodie sordide.
La main de Keshâ passa derrière la nuque de Ba’Rek et l’attira vers lui. De cette façon il lui parlait directement à l’oreille, presque peau à peau.
-« J’ai vu ce que tu sais faire… et toi, tu ignores ce dont je peux être capable. Je sais que c’est dangereux et qu’on est désavantagés par notre position pour sortir rapidement, mais ils ne s’attendront pas à nous voir venir. On a juste à attendre qu’ils l’aient endormi et que les gardes laissent les médecins. »
-« Tu as terminé ? »
Silence. Depuis qu’il était descendu dans les entrailles de l’usine -on aurait dit que c’était il y a des jours – c’était la première fois qu’il était aussi gonflé à bloc.
Dehors, on avait l’impression que les docteurs injectaient la patiente. L’anesthésiste communiquait avec le chirurgien et les bruits émis par mme Espalda s’estompaient.
-« Je comprends ton sentiment d’injustice. L’aider ne ferait que compromettre l’opération. Et nos vies. »
Cette idée était insoutenable. Keshâ’rem comprenait que même si ce type n’avait pas l’air méchant, il était contre lui. Inutile d’argumenter.
-« Dans ce cas, tais-toi. Et écoute. »
Quelques instants. Circonspect. Ba’rek ne sait quoi ajouter.
-« Enfin, docteur Barnet ! »
Grand bruit métallique. Une table d’ustensile s’est répandue sur les carreaux au sol, suivi d’un bruit sourd au sol.
-« C’est toi ? » dit Ba’rek, incrédule.
-« C’est ta diversion. J’irais bien, mais tu bloques le passage. »
Comme il ne bougeait pas…
« Très bien, je m’occupe aussi de l’autre. »
Un chant envoûteur se refléta dans la boîte crânienne du chirurgien. Il aurait pu inspirer les marins sous une lune nostalgique en frôlant l’eau écumeuse sous les falaises déchiquetées de l’archipel du Croc-Argenté. Sa voix douce était pourtant emplie de haine envers le boucher. Berçant, ligotant, il se figurait mutiler son esprit à chaque note, jusqu’à ce que sa résistance ne se brise et qu’un bruit sourd signale sa chute non loin d’eux. Celui-là avait une volonté plus forte que l’autre. Comme l’orphelin s’était abreuvée de la force vitale du serveur, il ne lui avait laissé aucune chance de résister à son inertie.
Grand silence. Personne ne vint. Personne ne remuait, pas même madame Espalda. Ba’rek finit par risquer une sortie en enfonçant la porte du talon. Le plateau coulissa à l’horizontal. Tout deux se défirent de cette promiscuité gênante.
-« Comment tu as fait ça ? »
-« C’est un secret que je garderai pour l’instant. Nous n’avons pas encore atteint ce degré de franchise. »
Ba’rek vérifiait l’état du chirurgien. Alors que Caldwell faisait mine de prendre le pouls de l’anesthésiste en ponctionnant un bon trois quarts de son énergie vitale. Le plaisir s’avérait beaucoup trop addictif. Au fond de son être, la nébula vaporisait de satisfaction. Un tel instinct prédateur n’est pas quelque chose que l’on peut décrire avant de le ressentir.
-« C’est long ! On doit rester en mouvement… que veux-tu faire d’elle maintenant ? »
Bien malin de sauver cette femme, pour se retrouver avec un boulet au pied. Ils firent mine de réfléchir.
-« On n’a qu’à la remettre dans le fauteuil roulant. On ira la cacher quelque part. »
Madame Espalda était reliée à un moniteur. Celui-ci relayait ses constantes vitales. Les bouchers avaient eu le temps de la dénuder et d’installer le champs stérile. Des traits étaient dessinés sur sa poitrine exposée. Le soulagement grandit en constatant qu’ils n’avaient pas du tout eu le temps de l’ouvrir.
Chargée sur le fauteuil roulant, les hommes la sanglèrent au mieux pour l’aider à tenir en place. Des bruits se faisaient entendre dans le couloir.
-« Mince. Où est-ce qu’on va ? » demande Keshâ.
Le militaire désigna la porte battante dans un coin de la salle d’opération. C’était sans doute par là que les mafieux avaient amené la victime. Une voie sans issue ? Ils se hâtèrent de faire rouler le fauteuil le plus rapidement possible sans faire de bruit.
Hélas, une roue buta sur un scalper et le fit valser.
Ils se dépêchèrent de sortir en retenant le battant dans leur dos.
Pas le temps de se concerter. Leurs instincts étaient en accord pour progresser hors d’atteinte.
-« Putain d’merde ! C’est quoi ce bordel ! … Yvan ! Va chercher les autres. Je sais pas c’est quoi l’histoire, mais cette connasse s’est barrée ! »
-« Les médics sont vivants ? »
-« Y z’ont l’air. » conclue le bandit en retournant un corps mou du bout de sa botte et en tirant sur sa clope.
Devant eux s’étendait des pièces en enfilades. Comme un très long couloir latéral, au bord duquel s’étendait des rideaux blancs voletant sur leur passage.
-« GGGnnn aaaaaa, mmmmmm mmmaaaa… »
-« Nnn, nonn, attend… »
La main de Keshâ’rem tira sur le rideau, dont les anneaux produisirent un bruit disgracieux en glissant sur une tige en métal rouillé. Une personne était étendue sur un lit médicalisé, pleine de tubes, de moniteurs et d’appareils. Il y avait même une poche pour hydrater et sédater le patient.
Patient… une pauvre créature qui injuriait la vue. On lui avait prélevé les yeux, un morceau de la peau de la joue… peut-être plusieurs organes vitaux, à en juger par la surabondance de bandages qui lui enserraient l’abdomen. De quoi pouvait-on se passer pour vivre quelques temps ? Un rein ? Un bout de foie ? Un poumon ? C’était pourtant une époque où l’on avait l’air de savoir produire des organes artificiels.
Keshâ’rem et Val’Ihem étaient bouche bée. Le choc paralysait leurs esprits qui ne savaient plus comment traiter l’information, même s’ils savaient qu’ils devaient continuer à avancer rapidement. Ils ne débattirent pas, personne n’en était capable. La pensée même de tuer cette victime était trop bouleversante, malgré sa main tendue vers eux, comme si elle les avait sentis. Ils auraient pu être ses bourreaux, mais elle continuait quand même de supplier pour que la prochaine opération soit la dernière.
Ils n’étaient pas obligés de voir ça. Keshâ comprenait maintenant l’appel de son comparse. Leurs pas les menèrent devant une infinité d’alcôves cliniques où des hommes et des femmes étaient plantés par des tuyaux pour les maintenir en vie sous assistance respiratoire. Tout pour que la bête reste fraîche en attendant le besoin d’une prochaine greffe. C’était trop. Il partit vomir dans un évier.
-« Arrête. On ne peut rien faire. »
Les pleurs de la femme continuaient dehors. Madame Espalada se mit à hurler et à se débattre. Ce qui eut le mérite de leur offrir une couverture.
-« On n’a pas le droit de rester là sans bouger pendant que ces fumiers la charcutent. » haussa-t-il le ton dans un murmure haché.
-« Caldwell, tu vas juste nous faire tuer…s’il te plaît. Baisse d’un ton. »
Les hommes à l’extérieur étaient en train de maîtriser la captive et de préparer la chambre d’intervention en nettoyant tout méticuleusement. Une ventilation se mit en route. Le son d'une radio se fit entendre. Un air d'opéra s'éleva au gramophone. Un sale type se mit à chantonner sur un air de Verdi, rendant la mélodie sordide.
La main de Keshâ passa derrière la nuque de Ba’Rek et l’attira vers lui. De cette façon il lui parlait directement à l’oreille, presque peau à peau.
-« J’ai vu ce que tu sais faire… et toi, tu ignores ce dont je peux être capable. Je sais que c’est dangereux et qu’on est désavantagés par notre position pour sortir rapidement, mais ils ne s’attendront pas à nous voir venir. On a juste à attendre qu’ils l’aient endormi et que les gardes laissent les médecins. »
-« Tu as terminé ? »
Silence. Depuis qu’il était descendu dans les entrailles de l’usine -on aurait dit que c’était il y a des jours – c’était la première fois qu’il était aussi gonflé à bloc.
Dehors, on avait l’impression que les docteurs injectaient la patiente. L’anesthésiste communiquait avec le chirurgien et les bruits émis par mme Espalda s’estompaient.
-« Je comprends ton sentiment d’injustice. L’aider ne ferait que compromettre l’opération. Et nos vies. »
Cette idée était insoutenable. Keshâ’rem comprenait que même si ce type n’avait pas l’air méchant, il était contre lui. Inutile d’argumenter.
-« Dans ce cas, tais-toi. Et écoute. »
Quelques instants. Circonspect. Ba’rek ne sait quoi ajouter.
-« Enfin, docteur Barnet ! »
Grand bruit métallique. Une table d’ustensile s’est répandue sur les carreaux au sol, suivi d’un bruit sourd au sol.
-« C’est toi ? » dit Ba’rek, incrédule.
-« C’est ta diversion. J’irais bien, mais tu bloques le passage. »
Comme il ne bougeait pas…
« Très bien, je m’occupe aussi de l’autre. »
Un chant envoûteur se refléta dans la boîte crânienne du chirurgien. Il aurait pu inspirer les marins sous une lune nostalgique en frôlant l’eau écumeuse sous les falaises déchiquetées de l’archipel du Croc-Argenté. Sa voix douce était pourtant emplie de haine envers le boucher. Berçant, ligotant, il se figurait mutiler son esprit à chaque note, jusqu’à ce que sa résistance ne se brise et qu’un bruit sourd signale sa chute non loin d’eux. Celui-là avait une volonté plus forte que l’autre. Comme l’orphelin s’était abreuvée de la force vitale du serveur, il ne lui avait laissé aucune chance de résister à son inertie.
Grand silence. Personne ne vint. Personne ne remuait, pas même madame Espalda. Ba’rek finit par risquer une sortie en enfonçant la porte du talon. Le plateau coulissa à l’horizontal. Tout deux se défirent de cette promiscuité gênante.
-« Comment tu as fait ça ? »
-« C’est un secret que je garderai pour l’instant. Nous n’avons pas encore atteint ce degré de franchise. »
Ba’rek vérifiait l’état du chirurgien. Alors que Caldwell faisait mine de prendre le pouls de l’anesthésiste en ponctionnant un bon trois quarts de son énergie vitale. Le plaisir s’avérait beaucoup trop addictif. Au fond de son être, la nébula vaporisait de satisfaction. Un tel instinct prédateur n’est pas quelque chose que l’on peut décrire avant de le ressentir.
-« C’est long ! On doit rester en mouvement… que veux-tu faire d’elle maintenant ? »
Bien malin de sauver cette femme, pour se retrouver avec un boulet au pied. Ils firent mine de réfléchir.
-« On n’a qu’à la remettre dans le fauteuil roulant. On ira la cacher quelque part. »
Madame Espalda était reliée à un moniteur. Celui-ci relayait ses constantes vitales. Les bouchers avaient eu le temps de la dénuder et d’installer le champs stérile. Des traits étaient dessinés sur sa poitrine exposée. Le soulagement grandit en constatant qu’ils n’avaient pas du tout eu le temps de l’ouvrir.
Chargée sur le fauteuil roulant, les hommes la sanglèrent au mieux pour l’aider à tenir en place. Des bruits se faisaient entendre dans le couloir.
-« Mince. Où est-ce qu’on va ? » demande Keshâ.
Le militaire désigna la porte battante dans un coin de la salle d’opération. C’était sans doute par là que les mafieux avaient amené la victime. Une voie sans issue ? Ils se hâtèrent de faire rouler le fauteuil le plus rapidement possible sans faire de bruit.
Hélas, une roue buta sur un scalper et le fit valser.
Ils se dépêchèrent de sortir en retenant le battant dans leur dos.
Pas le temps de se concerter. Leurs instincts étaient en accord pour progresser hors d’atteinte.
-« Putain d’merde ! C’est quoi ce bordel ! … Yvan ! Va chercher les autres. Je sais pas c’est quoi l’histoire, mais cette connasse s’est barrée ! »
-« Les médics sont vivants ? »
-« Y z’ont l’air. » conclue le bandit en retournant un corps mou du bout de sa botte et en tirant sur sa clope.
Devant eux s’étendait des pièces en enfilades. Comme un très long couloir latéral, au bord duquel s’étendait des rideaux blancs voletant sur leur passage.
-« GGGnnn aaaaaa, mmmmmm mmmaaaa… »
-« Nnn, nonn, attend… »
La main de Keshâ’rem tira sur le rideau, dont les anneaux produisirent un bruit disgracieux en glissant sur une tige en métal rouillé. Une personne était étendue sur un lit médicalisé, pleine de tubes, de moniteurs et d’appareils. Il y avait même une poche pour hydrater et sédater le patient.
Patient… une pauvre créature qui injuriait la vue. On lui avait prélevé les yeux, un morceau de la peau de la joue… peut-être plusieurs organes vitaux, à en juger par la surabondance de bandages qui lui enserraient l’abdomen. De quoi pouvait-on se passer pour vivre quelques temps ? Un rein ? Un bout de foie ? Un poumon ? C’était pourtant une époque où l’on avait l’air de savoir produire des organes artificiels.
Keshâ’rem et Val’Ihem étaient bouche bée. Le choc paralysait leurs esprits qui ne savaient plus comment traiter l’information, même s’ils savaient qu’ils devaient continuer à avancer rapidement. Ils ne débattirent pas, personne n’en était capable. La pensée même de tuer cette victime était trop bouleversante, malgré sa main tendue vers eux, comme si elle les avait sentis. Ils auraient pu être ses bourreaux, mais elle continuait quand même de supplier pour que la prochaine opération soit la dernière.
Ils n’étaient pas obligés de voir ça. Keshâ comprenait maintenant l’appel de son comparse. Leurs pas les menèrent devant une infinité d’alcôves cliniques où des hommes et des femmes étaient plantés par des tuyaux pour les maintenir en vie sous assistance respiratoire. Tout pour que la bête reste fraîche en attendant le besoin d’une prochaine greffe. C’était trop. Il partit vomir dans un évier.
Dernière édition par Keshâ'rem Evangelisto le Mar 25 Juin - 18:02, édité 8 fois
Lun 10 Juin - 18:45
Maltraitance à la chaîne
FT. Val'Ihem Karmine
Caldwell et Ba’rek déambulaient avec le corps inconscient de madame Espalda.
-« Qu’est-ce qu’on va faire d’elle, maintenant, Caldwell ? » sermonna Ba'rek.
Pour autant qu’ils le sachent, la voie qu’ils suivaient était sans issue. D’un moment à l’autre, les mafieux allaient remonter leur piste après s’être répartis entre les différents corridors. Tout le complexe allait être fouillé. Peut-être même verrouillé.
-« Je ne sais pas ce que tu as fait tout à l’heure pour neutraliser les médecins sans même les voir. Ne crois pas que cela suffira. Tu as pu voir plus tôt avec mon « collègue » que nous ne sommes pas les seuls à tricher avec la réalité. »
Mastiquant cette triste réalité, Keshâ jetait un œil derrière chaque rideau, continuellement occupé par des victimes agonisantes dépiautées de certains organes vitaux. Certaines étaient sédatées, d’autres – infortunées – conscientes. Toutes étaient branchées à des perfusions ou intubées et sanglées. L’inconvénient est qu’elles faisaient un sacré ramdam en se rendant compte que les visiteurs n’étaient pas leurs bourreaux. Dans des appels désespérés, elles appelaient à l’aide d’une voix éraillée.
-« C’est vraiment à fendre l’âme… il y a des lits inoccupés par endroit. Je propose qu’on la cache dans l’un deux… les docs ne sont pas en forme et ils cherchent une fugitive… comme elle ne sera pas à la bonne place cela lui fera gagner du temps avant qu’ils la retrouvent… »
-« Ouais… je crois que ce serait notre meilleure chance de nous en sortir vivants. Si on parvient à s’enfuir, on arrivera peut-être à envoyer des secours à temps pour elle. Et eux… même si, ça a l’air bien trop tard pour la plupart. »
Il avait bien raison. Mieux valait mille morts qu’une vie comme celle-là. Attachés, charcutés, mutilés, en souffrance totale.
-« D’accord… bon… dépêchons-nous. »
Alors que Keshâ la souvelevait par le creux des genoux, Ba’rek la tenait par les aisselles. Ils se débattirent un peu avec le fauteuil roulant, que Val’Ihem envoya dans le box voisin à coup de pied. C’est à ce moment que la porte claqua contre le mur au loin.
-« Aller. Fouillez tout par ici aussi. Elle doit bien être quelque part. L’usine est verrouillée en haut. Cet endroit est une souricière. Elle ne peut pas s’échapper. »
Des bottes claquèrent en nombre. On entendit aussi le bruit de crans de sécurité retirés. Accrochés à leur sang-froid, les deux complices s’évertuèrent à manipuler le corps mou de madame Espalda le plus harmonieusement possible pour ne pas faire de bruit. La mettre sous les draps n’était pas facile, surtout en raison de l’urgence de la situation. C’est là où les trucs les plus cons prennent une ampleur de dingue. Mais si on voyait les dessins sur sa poitrine, on saurait tout de suite que c’était elle qui devait être opérée. Et on se demanderait comment elle était arrivée jusqu’ici en étant droguée.
Plus le temps de fuir. Les rideaux d’à côté vrillèrent alors qu’un gangster rabattait d’un coup les œillets du bout de son fusil. Les deux regards s’entrechoquèrent, interdits. Sans se consulter, Ba’rek régressa sur la pointe des pieds dans le prochain box – celui où il avait envoyé le fauteuil roulant.
Keshâ de son côté s’était accroupi et glissait comme une araignée à plat dos sous le lit d’hôpital. Certes, tous deux étaient armés. Mais combien étaient-ils, eux ? Combien d’autres seraient attirés en cas de détonation ? Il fallait être plus malin. Le temps s’amenuisait avec la distance qui le séparait du gangster. Ses chaussures de cuir élégantes crissèrent sur le carrelage à côté de lui. Il semblait inspecter la malade. Ou guetter.
-« Rien ici non plus. Il en reste combien ? »
-« Une bonne vingtaine plus loin. »
Au nom de la bonne fortune, personne n’avait regardé sous le lit pour vérifier sa cachette. Par contre, Val’Ihem commençait à reculer encore dans le box suivant. Tôt ou tard il serait coincé.
Il fallait prendre l’initiative tant qu’ils le pouvaient. Cela dégénèrerait en baston à un moment. Autant choisir le lieu et les conditions. Keshâ’rem invoqua dans sa main grâce au cristal de spatiokinésie son totem le plus modeste. Le félinimbus était le candidat parfait pour faire diversion. Il le fit flotter le plus doucement possible au plafond et glisser, non plus dans les box mais dans la partie couloir. Aussi transparent que l'air. Quand il fut suffisamment éloigné des mafieux, il le fit souffler dans les dernières chambrettes pour bousculer les rideaux et faire tomber le pied à perfusion. Aussitôt, le félinimbus disparut, de même que son totem dans sa dimension de poche.
Le vacarme attira le gros des troupes et Ba’rek eut la riche idée de profiter de ce détour d’attention pour revenir jusqu’à lui. Il semblait encore plus pressé que Keshâ, car il l’attrapa par le coude et l’extirpa d’un geste de sous le lit avant de l’entraîner vers la salle d’opération. Personne ne la gardait. Donc ils s’y engouffrèrent en hâte.
-« J’ai l’impression que ce couloir était sans issue ! » dit Keshâ.
-« Tu dois avoir raison Caldwell. Si on trouve quelque chose pour bloquer la porte. On sera débarrassés de ceux-là. »
Le seul objet qu’il voyait était la table centrale. Ils se rendirent vite compte qu’elle était boulonnée au sol pour ne jamais basculé durant une opération. Le temps venait à manquer, aussi, il ne leur resta d’autre choix que de déplacer un des frigos.
Cependant, il devait peser deux cent kilos et la distance à parcourir était de deux mètres.
-« Putain !!! Mais c’est pas vrai. Il bouge à peine !. »
Ils avait à grand peine réussi à dégager de quoi se glisser derrière pour mieux manœuvrer. Les pas des bandits se firent entendre, sans compter que d’autres pouvaient les prendre à revers à tout moment.
-« Je ne voulais pas te révéler un de mes secrets. Mais il faut ce qu’il faut. »
Nouveau totem. La gargouille cette fois. Ba’rek avait un air stupéfait, dont il se défit assez vite pour aider la gargouille en chargeant le frigo à l’aide de sa supervitesse. Au même moment un gangster passait un bras armé par l’embrasure de la porte. Un bruit sordide de membre arraché fut nettement perceptible au moment où le frigo propulsé referma la porte battante comme une guillotine.
-« Au moins… c’était efficace. Maintenant, fuyons. Je crois qu’on en a assez vu. Si on s’en sort, on se paye un verre, ok ? »
A pas de loups, ils évoluèrent vers le couloir à la moquette cramoisie.
-« Qu’est-ce qu’on va faire d’elle, maintenant, Caldwell ? » sermonna Ba'rek.
Pour autant qu’ils le sachent, la voie qu’ils suivaient était sans issue. D’un moment à l’autre, les mafieux allaient remonter leur piste après s’être répartis entre les différents corridors. Tout le complexe allait être fouillé. Peut-être même verrouillé.
-« Je ne sais pas ce que tu as fait tout à l’heure pour neutraliser les médecins sans même les voir. Ne crois pas que cela suffira. Tu as pu voir plus tôt avec mon « collègue » que nous ne sommes pas les seuls à tricher avec la réalité. »
Mastiquant cette triste réalité, Keshâ jetait un œil derrière chaque rideau, continuellement occupé par des victimes agonisantes dépiautées de certains organes vitaux. Certaines étaient sédatées, d’autres – infortunées – conscientes. Toutes étaient branchées à des perfusions ou intubées et sanglées. L’inconvénient est qu’elles faisaient un sacré ramdam en se rendant compte que les visiteurs n’étaient pas leurs bourreaux. Dans des appels désespérés, elles appelaient à l’aide d’une voix éraillée.
-« C’est vraiment à fendre l’âme… il y a des lits inoccupés par endroit. Je propose qu’on la cache dans l’un deux… les docs ne sont pas en forme et ils cherchent une fugitive… comme elle ne sera pas à la bonne place cela lui fera gagner du temps avant qu’ils la retrouvent… »
-« Ouais… je crois que ce serait notre meilleure chance de nous en sortir vivants. Si on parvient à s’enfuir, on arrivera peut-être à envoyer des secours à temps pour elle. Et eux… même si, ça a l’air bien trop tard pour la plupart. »
Il avait bien raison. Mieux valait mille morts qu’une vie comme celle-là. Attachés, charcutés, mutilés, en souffrance totale.
-« D’accord… bon… dépêchons-nous. »
Alors que Keshâ la souvelevait par le creux des genoux, Ba’rek la tenait par les aisselles. Ils se débattirent un peu avec le fauteuil roulant, que Val’Ihem envoya dans le box voisin à coup de pied. C’est à ce moment que la porte claqua contre le mur au loin.
-« Aller. Fouillez tout par ici aussi. Elle doit bien être quelque part. L’usine est verrouillée en haut. Cet endroit est une souricière. Elle ne peut pas s’échapper. »
Des bottes claquèrent en nombre. On entendit aussi le bruit de crans de sécurité retirés. Accrochés à leur sang-froid, les deux complices s’évertuèrent à manipuler le corps mou de madame Espalda le plus harmonieusement possible pour ne pas faire de bruit. La mettre sous les draps n’était pas facile, surtout en raison de l’urgence de la situation. C’est là où les trucs les plus cons prennent une ampleur de dingue. Mais si on voyait les dessins sur sa poitrine, on saurait tout de suite que c’était elle qui devait être opérée. Et on se demanderait comment elle était arrivée jusqu’ici en étant droguée.
Plus le temps de fuir. Les rideaux d’à côté vrillèrent alors qu’un gangster rabattait d’un coup les œillets du bout de son fusil. Les deux regards s’entrechoquèrent, interdits. Sans se consulter, Ba’rek régressa sur la pointe des pieds dans le prochain box – celui où il avait envoyé le fauteuil roulant.
Keshâ de son côté s’était accroupi et glissait comme une araignée à plat dos sous le lit d’hôpital. Certes, tous deux étaient armés. Mais combien étaient-ils, eux ? Combien d’autres seraient attirés en cas de détonation ? Il fallait être plus malin. Le temps s’amenuisait avec la distance qui le séparait du gangster. Ses chaussures de cuir élégantes crissèrent sur le carrelage à côté de lui. Il semblait inspecter la malade. Ou guetter.
-« Rien ici non plus. Il en reste combien ? »
-« Une bonne vingtaine plus loin. »
Au nom de la bonne fortune, personne n’avait regardé sous le lit pour vérifier sa cachette. Par contre, Val’Ihem commençait à reculer encore dans le box suivant. Tôt ou tard il serait coincé.
Il fallait prendre l’initiative tant qu’ils le pouvaient. Cela dégénèrerait en baston à un moment. Autant choisir le lieu et les conditions. Keshâ’rem invoqua dans sa main grâce au cristal de spatiokinésie son totem le plus modeste. Le félinimbus était le candidat parfait pour faire diversion. Il le fit flotter le plus doucement possible au plafond et glisser, non plus dans les box mais dans la partie couloir. Aussi transparent que l'air. Quand il fut suffisamment éloigné des mafieux, il le fit souffler dans les dernières chambrettes pour bousculer les rideaux et faire tomber le pied à perfusion. Aussitôt, le félinimbus disparut, de même que son totem dans sa dimension de poche.
Le vacarme attira le gros des troupes et Ba’rek eut la riche idée de profiter de ce détour d’attention pour revenir jusqu’à lui. Il semblait encore plus pressé que Keshâ, car il l’attrapa par le coude et l’extirpa d’un geste de sous le lit avant de l’entraîner vers la salle d’opération. Personne ne la gardait. Donc ils s’y engouffrèrent en hâte.
-« J’ai l’impression que ce couloir était sans issue ! » dit Keshâ.
-« Tu dois avoir raison Caldwell. Si on trouve quelque chose pour bloquer la porte. On sera débarrassés de ceux-là. »
Le seul objet qu’il voyait était la table centrale. Ils se rendirent vite compte qu’elle était boulonnée au sol pour ne jamais basculé durant une opération. Le temps venait à manquer, aussi, il ne leur resta d’autre choix que de déplacer un des frigos.
Cependant, il devait peser deux cent kilos et la distance à parcourir était de deux mètres.
-« Putain !!! Mais c’est pas vrai. Il bouge à peine !. »
Ils avait à grand peine réussi à dégager de quoi se glisser derrière pour mieux manœuvrer. Les pas des bandits se firent entendre, sans compter que d’autres pouvaient les prendre à revers à tout moment.
-« Je ne voulais pas te révéler un de mes secrets. Mais il faut ce qu’il faut. »
Nouveau totem. La gargouille cette fois. Ba’rek avait un air stupéfait, dont il se défit assez vite pour aider la gargouille en chargeant le frigo à l’aide de sa supervitesse. Au même moment un gangster passait un bras armé par l’embrasure de la porte. Un bruit sordide de membre arraché fut nettement perceptible au moment où le frigo propulsé referma la porte battante comme une guillotine.
-« Au moins… c’était efficace. Maintenant, fuyons. Je crois qu’on en a assez vu. Si on s’en sort, on se paye un verre, ok ? »
A pas de loups, ils évoluèrent vers le couloir à la moquette cramoisie.
Dernière édition par Keshâ'rem Evangelisto le Mar 25 Juin - 18:14, édité 6 fois
Mar 11 Juin - 16:38
Maltraitance à la chaîne
FT. Val'Ihem Karmine
C’aurait été trop beau de pouvoir partir sur la pointe des pieds, non ?
Ils se trouvaient au milieu du couloir quand des mafieux déboulèrent en face d’eux sans crier gare. Les molosses prirent l’initiative et tirèrent sur eux. Ba’rek était assez véloce pour pousser Caldwell contre le mur et se jeter lui-même du côté opposé. Sauf qu’avec la vitesse, Keshâ heurta le mur de plein fouet et tomba à terre, pas mal secoué.
Pendant ce temps, Ba’rek fondait dans un saut de léopard sur le premier tireur et le trancha. Sa peau immaculée explosa simultanément en giclures écarlates. Le second tireur n’arrivait pas à le viser et termina le cou brisé.
A grand peine, Keshâ se releva, pour voir un autre mafieux dans le dos de Ba’rek. Il brandit son totem arcanique, prêt à invoquer la gargouille de pierre entre les deux et à combattre. Mais l’homme le visa lui à la place avec un armement électronique qui émit une puissante onde de choc. Soufflé, son épaule heurta un encadrement de porte avant de rebondir et de rouler au sol. Le totem lui avait échappé.
Ses oreilles bourdonnaient. Son corps se tortillait mollement. Et sa tête lui faisait mal. Très mal. Dans sa vulnérabilité, il n’aurait pas su se défendre, ni même se téléporter. Une silhouette s’érigea au-dessus de lui. On l’attrapa.
-« Aller ! Il faut battre en retraite. »
Ne sachant pas ce qui s’était passé, Keshâ’rem s’en remit à cette voix familière et claudiqua à ses côtés en sens inverse dans le couloir. C’était une partie du complexe sous-terrain qu’ils n’avaient pas explorée. Comme sa vision restait brouillée et son esprit confus, il avait du mal à comprendre ce qui se trouvait autour de lui. Les lumières irradiaient de halos envahissants le reste de son champ de vision. Et il avait l’impression que le sol bougeait devant ses yeux.
-« Mon totem. J’ai perdu mon totem… » bafouilla-t-il, paniqué.
-« Tiens Caldwell, il est là. » répondit Ba’rek en lui tendant une main ouverte, où reposait la sculpture d’obsidienne.
Il mit un moment à comprendre qu’il parlait de lui, peinant à rassembler ses souvenirs. Caldwell, et non pas Keshâ. Rapidement, Ba’rek barra la porte. L’endroit semblait encore plus glauque que la salle d’opération. Fini le faste du casino et ses moquettes rouges. Seul Ba'rek restait dans le thème écarlate. Sa chevelure blonde était poisseuse de sang et son visage constellé de tâches rouges récoltées lorsqu'il avait égorgé les mafieux. Cet endroit ressemblait à un débarras rempli de machines à laver et de linges souillés d’excréments et de tâches de sang séché.
-« Il faut qu’on trouve un moyen de remonter par un autre chemin. »
-« C’est ce que je me disais. J’ai eu le dessus sur ceux-là. Mais ce n’est pas passé loin. Et ils ont l’air lourdement armés. Je ne vois pas d’issue. »
-« Il y a les conduits d’aération. Je ne sais pas s’ils montent, mais au moins on pourra changer de section. »
Keshâ’rem réalisait alors que du sang s’écoulait de la veste de Ba’rek.
-« Tu es blessé ! »
-« L’un d’entre eux a presque réussi à me planter. »
Déchirant la manche de sa chemise, il tenta un bandage rapide autour du torse de Ba’rek, avant de mettre la main sur son torse et de lui infuser l’énergie qu’il avait volé à l’anesthésiste.
-« Cette énergie devrait te redonner un peu de forces le temps qu’on réussisse à sortir d’ici. Tiens bon. »
Ba’rek ne dit rien. Il était étonné par ces talents multiples que révélait peu à peu cet inconnu. Il aurait bien tenté une approche pour l’interroger. Mais des coups virulents étaient porté contre la porte en métal. Comme elle ne cédait pas, des coups de feu retentirent aussitôt pour la percer comme du gruyère.
A plat ventre, comme des lapins des garennes, ils attendirent la fin des premières salves.
-« Ils rechargent. Vite. On traverse ! »
Des éclats de hublots de sèche-linges empilés en colonne craquèrent sous leurs pas, pendant qu’ils se hissaient à la diable sur une machine-à-laver. Les nerfs leur permirent d’arracher sans tarder la grille d’aération avec ses attaches au moment où de nouveaux tirs criblaient les murs autour d’eux. Keshâ bondit dans la trappe, et tira pour y aspirer ses jambes. Ba’rek s’introduisait lui aussi, quand un redoutable tir de Gauss 35 commença à défoncer l’armature de la porte.
-« Je ne sais pas où aller! »
-"Bouge! On s'en fou!"
Sans trop réfléchir, ils s’enfoncèrent dans les conduits en rampant. La porte derrière eux céda. Malheureusement, dans leur fuite, ils furent un peu trop bruyant…
Ils se trouvaient au milieu du couloir quand des mafieux déboulèrent en face d’eux sans crier gare. Les molosses prirent l’initiative et tirèrent sur eux. Ba’rek était assez véloce pour pousser Caldwell contre le mur et se jeter lui-même du côté opposé. Sauf qu’avec la vitesse, Keshâ heurta le mur de plein fouet et tomba à terre, pas mal secoué.
Pendant ce temps, Ba’rek fondait dans un saut de léopard sur le premier tireur et le trancha. Sa peau immaculée explosa simultanément en giclures écarlates. Le second tireur n’arrivait pas à le viser et termina le cou brisé.
A grand peine, Keshâ se releva, pour voir un autre mafieux dans le dos de Ba’rek. Il brandit son totem arcanique, prêt à invoquer la gargouille de pierre entre les deux et à combattre. Mais l’homme le visa lui à la place avec un armement électronique qui émit une puissante onde de choc. Soufflé, son épaule heurta un encadrement de porte avant de rebondir et de rouler au sol. Le totem lui avait échappé.
Ses oreilles bourdonnaient. Son corps se tortillait mollement. Et sa tête lui faisait mal. Très mal. Dans sa vulnérabilité, il n’aurait pas su se défendre, ni même se téléporter. Une silhouette s’érigea au-dessus de lui. On l’attrapa.
-« Aller ! Il faut battre en retraite. »
Ne sachant pas ce qui s’était passé, Keshâ’rem s’en remit à cette voix familière et claudiqua à ses côtés en sens inverse dans le couloir. C’était une partie du complexe sous-terrain qu’ils n’avaient pas explorée. Comme sa vision restait brouillée et son esprit confus, il avait du mal à comprendre ce qui se trouvait autour de lui. Les lumières irradiaient de halos envahissants le reste de son champ de vision. Et il avait l’impression que le sol bougeait devant ses yeux.
-« Mon totem. J’ai perdu mon totem… » bafouilla-t-il, paniqué.
-« Tiens Caldwell, il est là. » répondit Ba’rek en lui tendant une main ouverte, où reposait la sculpture d’obsidienne.
Il mit un moment à comprendre qu’il parlait de lui, peinant à rassembler ses souvenirs. Caldwell, et non pas Keshâ. Rapidement, Ba’rek barra la porte. L’endroit semblait encore plus glauque que la salle d’opération. Fini le faste du casino et ses moquettes rouges. Seul Ba'rek restait dans le thème écarlate. Sa chevelure blonde était poisseuse de sang et son visage constellé de tâches rouges récoltées lorsqu'il avait égorgé les mafieux. Cet endroit ressemblait à un débarras rempli de machines à laver et de linges souillés d’excréments et de tâches de sang séché.
-« Il faut qu’on trouve un moyen de remonter par un autre chemin. »
-« C’est ce que je me disais. J’ai eu le dessus sur ceux-là. Mais ce n’est pas passé loin. Et ils ont l’air lourdement armés. Je ne vois pas d’issue. »
-« Il y a les conduits d’aération. Je ne sais pas s’ils montent, mais au moins on pourra changer de section. »
Keshâ’rem réalisait alors que du sang s’écoulait de la veste de Ba’rek.
-« Tu es blessé ! »
-« L’un d’entre eux a presque réussi à me planter. »
Déchirant la manche de sa chemise, il tenta un bandage rapide autour du torse de Ba’rek, avant de mettre la main sur son torse et de lui infuser l’énergie qu’il avait volé à l’anesthésiste.
-« Cette énergie devrait te redonner un peu de forces le temps qu’on réussisse à sortir d’ici. Tiens bon. »
Ba’rek ne dit rien. Il était étonné par ces talents multiples que révélait peu à peu cet inconnu. Il aurait bien tenté une approche pour l’interroger. Mais des coups virulents étaient porté contre la porte en métal. Comme elle ne cédait pas, des coups de feu retentirent aussitôt pour la percer comme du gruyère.
A plat ventre, comme des lapins des garennes, ils attendirent la fin des premières salves.
-« Ils rechargent. Vite. On traverse ! »
Des éclats de hublots de sèche-linges empilés en colonne craquèrent sous leurs pas, pendant qu’ils se hissaient à la diable sur une machine-à-laver. Les nerfs leur permirent d’arracher sans tarder la grille d’aération avec ses attaches au moment où de nouveaux tirs criblaient les murs autour d’eux. Keshâ bondit dans la trappe, et tira pour y aspirer ses jambes. Ba’rek s’introduisait lui aussi, quand un redoutable tir de Gauss 35 commença à défoncer l’armature de la porte.
-« Je ne sais pas où aller! »
-"Bouge! On s'en fou!"
Sans trop réfléchir, ils s’enfoncèrent dans les conduits en rampant. La porte derrière eux céda. Malheureusement, dans leur fuite, ils furent un peu trop bruyant…
Dernière édition par Keshâ'rem Evangelisto le Mar 25 Juin - 18:21, édité 2 fois
Lun 24 Juin - 23:10
Maltraitance à la chaîne
FT. Val'Ihem Karmine
Toute leur concentration allait dans leur avancée. La plus rapide et la plus silencieuse possible. Enfin, les genoux et hanches produisaient souvent un bruit de taule en heurtant le conduit. A peine avaient-t-ils franchi le premier coude à la diable, qu’ils entendirent un bruit d’arme automatique leur vriller les tympans. Sans cérémonie, Ba’rek plaqua ses mains sur son postérieur et le balança vers l’avant.
L’étau de la mort se resserrait autour de leurs cous. Les carottes sont cuites. Mais quand même ! Il y avait des manières. Juste là où il se trouvait, c’est un cran d’arrêt qui passa à travers le métal. Un instant coincé, Ba’rek en profita pour pointer le canon de son arme à la verticale juste en dessous du couteau et tira. Un grognement s’éleva et le protebrume utilisa sa célérité pour éviter une rafale de balles. Keshâ’rem n’avait pas demandé son reste. Il avait compris qu’il était jugé trop lent par son comparse et avait donc pris autant d’avance que possible.
-« C’est pas vrai ! Avec tout ce qu’on sait, on ne peut pas mourir ici ! »
-« Avec tout ce qu’on sait, ils ne peuvent pas nous laisser partir d’ici ! »
-« Tu as quelqu’un là haut ? Un moyen de contacter de l’aide ? »
Un peu déconfit, Ba’rek haleta tout en rampant à une nouvelle bifurcation aléatoire qui grimpait doucement :
-« C’était délicat avec ma couverture. J’avais une radio, mais je l’ai écrasée en me battant tout à l’heure."
Cuites, les carottes. Ou même brûlées.
Après quelques minutes, ils ralentirent. A tenter de glisser à un rythme plus modéré sur le métal, les bruits de pas et les cris semblaient s’être tus. Tout le monde les cherchait, c’était sûr et certain. Mais peut-être que les mafieux avaient perdu leur trace. Ils se trouvaient sans doute dans une section différente de l’usine.
C’était une déduction bien optimiste.
Une main invincible traversa la cloison de métal comme du papier et enserra la cheville de Keshâ’rem avec hargne. Déjà, les cris du jeune homme retentissaient à plein volume alors que les doigts fins serraient. Ba’rek allait répliquer au couteau mais une voix l’avertit.
-« Si vous tentez quoi que ce soit, je le réduits en bouillie. » décrivit une voix calme avec une certaine délectation.
HIDE SCENE VIOLENTE
Keshâ’rem n’arrêtait pas de hurler, jusqu’au moment où il commença à suffoquer, en proie à une vive montée de pression artérielle. Il n’avait jamais eu aussi mal de sa vie. C’était comme si son système nerveux tout entier prenait feu dans sa tête et que ses yeux voulaient sauter hors de ses orbites. D’ailleurs, la main jouait langoureusement d’un doigt à l’autre pour faire rouler doucement les fragments de tibia et de fibula autour de ses nerfs.
-« Putain, c’est bon, arrêtez ! Mais arrêtez ça ! On va se rendre. »
-« Oh ? C’est vrai… je suis presque déçu… je commençais juste à m’amuser de jouer au chat et à la souris avec vous… c’est vrai que cette souris là n’ira plus bien loin de toute façon. »
HIDE SCENE VIOLENTE
-« Je… je vais descendre… d’accord ? »
Les pleurs de Keshâ allaient sans discontinuer. Son corps prit de tremblements semblait échapper à son contrôle. Dans la zone irradiante de douleur sans mélange, il sentait confusément un liquide chaud s’étaler à travers son pantalon.
Ba’rek leva les yeux vers lui. Mais il était trop ravagé pour penser à quelqu’un d’autre qu’à lui-même. Il aurait voulu qu’on le tue, maintenant, pour que ça s’arrête. Tant pis. Il pourrirait comme un rat mort dans ce conduit souterrain.
Il ne comprit rien de l’échange doucereux entre le mafieux et Ba’rek, ses sanglots hachés ressemblant parfois à un rire déplacé.
-« Bon, tu te magnes princesse ! »
Au milieu de l’horreur, il n’avait même pas réalisé que Ba’rek était retourné deux mètres en arrière pour ouvrir une trappe et descendre sous bonne escorte.
-« J’arrive… » bafouilla-t-il lamentablement.
HIDE SCENE CHOQUANTE
A quoi bon, qu’ils le tuent ici. Plutôt que souffrir davantage. Quel espoir restait-il ? Il se traina en glissant sur son propre sang. Son vêtement s’accrocha dans la plaque de métal trouée, d’où dégoutait son sang, sur Ba’rek, juste en dessous.
Il ne voulait pas mourir. Mais comment vivre après ça. Que faire de toute façon. Maëlstrom lui avait dit qu’il avait de la force, mais il n’avait aucune idée de ce qui pourrait les aider.
-« Bon, si t’es pas en bas dans une minute, je met une balle dans chaque articulation de ton pote et après je monte moi-même te chercher pour te balancer en bas ! »
La trappe ouverte laissait entrapercevoir un bout de pièce. De sa vision chancelante, il vit un mur juste à côté. La pièce s’étendait donc derrière lui. La sentence inéluctable arrivait.
Un ultime sursaut. Ça ne peut pas finir comme ça ! Non ! Encore un peu de temps. Gagner du temps.
D’un revers de main, il essuie la bave et les larmes de son visage, geste inutile, qui ne conduit qu’à le barbouiller de sang. Il fait apparaître une potion de vitalité. Face à la chair en bouillie, ses scrupules l’arrêtent, mais le tic tac de l’horloge l’oblige à planter, vite ! Mais où ? Plus proche du cœur ? De manière plus distale ? En plein milieu ? La potion peut-elle seulement avoir raison d’une telle blessure ? Et si les os ne sont pas assez alignés ? Et si ?
Il plante. Douleur infâme. Et injecte. Douleur lancinante. A ce stade, c’est que son corps, empli de merci, le bombarde de drogue autoproduites pour lui offrir une fin un peu moins laborieuse. Une vraie pharmacie ambulante d’opiacés. La douleur induite par la potion est presque aussi violente que la brisure initiale. C’est comme de l’acide qui coule dans ses veines.
-« J’arrive ! » crie-t-il en se traînant vers la trappe.
Il n’a pas fait cela pour rien. Son plan lui paraît totalement désespéré. Mais c’est un plan.
En bas, il entend les hommes singer ses pleurs et se moquer, critiquant sa faiblesse. Tant mieux. Ils pensent tout maîtriser…
L’étau de la mort se resserrait autour de leurs cous. Les carottes sont cuites. Mais quand même ! Il y avait des manières. Juste là où il se trouvait, c’est un cran d’arrêt qui passa à travers le métal. Un instant coincé, Ba’rek en profita pour pointer le canon de son arme à la verticale juste en dessous du couteau et tira. Un grognement s’éleva et le protebrume utilisa sa célérité pour éviter une rafale de balles. Keshâ’rem n’avait pas demandé son reste. Il avait compris qu’il était jugé trop lent par son comparse et avait donc pris autant d’avance que possible.
-« C’est pas vrai ! Avec tout ce qu’on sait, on ne peut pas mourir ici ! »
-« Avec tout ce qu’on sait, ils ne peuvent pas nous laisser partir d’ici ! »
-« Tu as quelqu’un là haut ? Un moyen de contacter de l’aide ? »
Un peu déconfit, Ba’rek haleta tout en rampant à une nouvelle bifurcation aléatoire qui grimpait doucement :
-« C’était délicat avec ma couverture. J’avais une radio, mais je l’ai écrasée en me battant tout à l’heure."
Cuites, les carottes. Ou même brûlées.
Après quelques minutes, ils ralentirent. A tenter de glisser à un rythme plus modéré sur le métal, les bruits de pas et les cris semblaient s’être tus. Tout le monde les cherchait, c’était sûr et certain. Mais peut-être que les mafieux avaient perdu leur trace. Ils se trouvaient sans doute dans une section différente de l’usine.
C’était une déduction bien optimiste.
Une main invincible traversa la cloison de métal comme du papier et enserra la cheville de Keshâ’rem avec hargne. Déjà, les cris du jeune homme retentissaient à plein volume alors que les doigts fins serraient. Ba’rek allait répliquer au couteau mais une voix l’avertit.
-« Si vous tentez quoi que ce soit, je le réduits en bouillie. » décrivit une voix calme avec une certaine délectation.
HIDE SCENE VIOLENTE
Keshâ’rem n’arrêtait pas de hurler, jusqu’au moment où il commença à suffoquer, en proie à une vive montée de pression artérielle. Il n’avait jamais eu aussi mal de sa vie. C’était comme si son système nerveux tout entier prenait feu dans sa tête et que ses yeux voulaient sauter hors de ses orbites. D’ailleurs, la main jouait langoureusement d’un doigt à l’autre pour faire rouler doucement les fragments de tibia et de fibula autour de ses nerfs.
-« Putain, c’est bon, arrêtez ! Mais arrêtez ça ! On va se rendre. »
-« Oh ? C’est vrai… je suis presque déçu… je commençais juste à m’amuser de jouer au chat et à la souris avec vous… c’est vrai que cette souris là n’ira plus bien loin de toute façon. »
HIDE SCENE VIOLENTE
-« Je… je vais descendre… d’accord ? »
Les pleurs de Keshâ allaient sans discontinuer. Son corps prit de tremblements semblait échapper à son contrôle. Dans la zone irradiante de douleur sans mélange, il sentait confusément un liquide chaud s’étaler à travers son pantalon.
Ba’rek leva les yeux vers lui. Mais il était trop ravagé pour penser à quelqu’un d’autre qu’à lui-même. Il aurait voulu qu’on le tue, maintenant, pour que ça s’arrête. Tant pis. Il pourrirait comme un rat mort dans ce conduit souterrain.
Il ne comprit rien de l’échange doucereux entre le mafieux et Ba’rek, ses sanglots hachés ressemblant parfois à un rire déplacé.
-« Bon, tu te magnes princesse ! »
Au milieu de l’horreur, il n’avait même pas réalisé que Ba’rek était retourné deux mètres en arrière pour ouvrir une trappe et descendre sous bonne escorte.
-« J’arrive… » bafouilla-t-il lamentablement.
HIDE SCENE CHOQUANTE
A quoi bon, qu’ils le tuent ici. Plutôt que souffrir davantage. Quel espoir restait-il ? Il se traina en glissant sur son propre sang. Son vêtement s’accrocha dans la plaque de métal trouée, d’où dégoutait son sang, sur Ba’rek, juste en dessous.
Il ne voulait pas mourir. Mais comment vivre après ça. Que faire de toute façon. Maëlstrom lui avait dit qu’il avait de la force, mais il n’avait aucune idée de ce qui pourrait les aider.
-« Bon, si t’es pas en bas dans une minute, je met une balle dans chaque articulation de ton pote et après je monte moi-même te chercher pour te balancer en bas ! »
La trappe ouverte laissait entrapercevoir un bout de pièce. De sa vision chancelante, il vit un mur juste à côté. La pièce s’étendait donc derrière lui. La sentence inéluctable arrivait.
Un ultime sursaut. Ça ne peut pas finir comme ça ! Non ! Encore un peu de temps. Gagner du temps.
D’un revers de main, il essuie la bave et les larmes de son visage, geste inutile, qui ne conduit qu’à le barbouiller de sang. Il fait apparaître une potion de vitalité. Face à la chair en bouillie, ses scrupules l’arrêtent, mais le tic tac de l’horloge l’oblige à planter, vite ! Mais où ? Plus proche du cœur ? De manière plus distale ? En plein milieu ? La potion peut-elle seulement avoir raison d’une telle blessure ? Et si les os ne sont pas assez alignés ? Et si ?
Il plante. Douleur infâme. Et injecte. Douleur lancinante. A ce stade, c’est que son corps, empli de merci, le bombarde de drogue autoproduites pour lui offrir une fin un peu moins laborieuse. Une vraie pharmacie ambulante d’opiacés. La douleur induite par la potion est presque aussi violente que la brisure initiale. C’est comme de l’acide qui coule dans ses veines.
-« J’arrive ! » crie-t-il en se traînant vers la trappe.
Il n’a pas fait cela pour rien. Son plan lui paraît totalement désespéré. Mais c’est un plan.
En bas, il entend les hommes singer ses pleurs et se moquer, critiquant sa faiblesse. Tant mieux. Ils pensent tout maîtriser…
Dernière édition par Keshâ'rem Evangelisto le Mar 25 Juin - 18:29, édité 1 fois
Mar 25 Juin - 7:13
Maltraitance à la chaîne
FT. Val'Ihem Karmine
Il n’était pas fier. Recroquevillé dans son tunnel métallique, avec des mafieux armés jusqu’aux dents qui l’attendent en bas. Et Ba’rek qui avait été capturé par sa faute. Sa jambe était broyée, quoiqu’un début de guérison miraculeuse soit à l’œuvre. Elle n’aurait pas le temps de rêver de courir avant un bon moment, sans même parler de séquelles possibles. Ça, c’était en imaginant qu’il survive jusque-là.
S’il mettait trop de temps à descendre, ils étaient morts. S’il descendait, ils étaient morts. Ou pire. On parle de trafiquants d’organes. Que croyez vous qu’ils vont faire de deux gus enquiquineurs en parfaite santé ? Repensant à leur petit casino clandestin, Keshâ’rem se dit que foutu pour foutu, autant faire tapis et tout miser sur la dernière carte qui lui reste. C’est-à-dire la plus bourrin.
-« On te voit. Tu fais quoi là-haut princesse ? Allez, tortille du cul et descend ! » grogna l’un des malfrats.
-« Lamashtu. »
-« Quoi ? » grimaça-i-il, incrédule.
-« Lamashtu. » annonça fermement Keshâ’rem, le regard fixe.
-« Il est fou. »
Il fallait dire que son visage barré de sang séché et ses yeux en partie écarquillés pouvaient laisser penser qu’il avait perdu la raison.
-« Ca suffit, regarde ton gus se pren… »
Le plafond s’effondra sur la gueule du gangster. Un monceau de plaques d’acier se déchira alors que l’air se voilait d’un épais nuage de poussières et de gravats. Un bloc de néon se décrocha du plafond. Toujours accroché par ses câbles d’un côté, il faucha deux hommes dans un mouvement pendulaire. De son point d’observation, le portebrume pouvait jouir de la scène avec une certaine satisfaction. Certes, le conduit d’aération s’était affaissé vers l’intérieur de la pièce quand il avait invoqué la redoutable Mère-des-Morts - elle avait littéralement explosé cet espace clos. Mais il s’y était préparé et avait eu le temps de se cramponner au rebord de la trappe.
Lamashtu était le nom redoutable qu’il utilisait pour personnifier son invocation et graver ses traits dans sa mémoire.
~° Baisse-toi. °~ intima-t-il mentalement à Val’Ihem.
Le conseil était peu nécessaire, car le soldat expérimenté s’était aplati aux premiers coups de feu tirés sur la masse ombrageuse de l’invocation. Recroquevillée en boule, elle ne dévoilait pas encore sa corpulence ni son visage terrifiant. L’homme sous elle était écrabouillé. Il tentait de se débattre avec un certain talent. C’était sans doute lui le porteur du cristal de force surhumaine.
HIDE SCENE VIOLENTE
Astucieux, certains se ressaisirent. Il s’en trouva même un pour tenter de l’abattre. C’était oublier Ba’rek, qui n’était pas en reste pour profiter de cette diversion de taille. Une nuque brisée. Un genou pété. Un poitrail transpercé avec son propre cran d’arrêt, retourné pour faire bonne mesure.
Toujours, la poussière flottait en rendant l’air irrespirable. Les gangsters mitraillaient la masse informe. C’est alors qu’elle se déploya. Son long cou et son corps tout aussi titanesque, ses oripeaux moisis et son râle obsédant. Même les plus chevronnés se figèrent d’effroi. S’il n’y avait pas de Jiangshis pour la seconder, ils étaient tous coincés avec elle dans un espace confiné à forte densité humaine. Les hommes se gênaient les uns les autres. Leur visibilité était réduite. Quant à l’énergie de Keshâ, malgré son agonie, il avait absorbé assez de prana chez ses hôtes du soir pour se déverser sans réserve dans un joli bouquet final.
HIDE SCENE VIOLENTE
Ah… ils aimaient prendre les organes des mères de famille. Ah…ça les faisait rire de le torturer… rire de l’entendre hurler, pleurer et supplier… A demi en transe, avec son cocktail d’adrénaline, d’endomorphines, les effets inconnus de la potion sur son équilibre chimique, il fallait aussi mentionner une invitée de marque en train d’émerger : sa nébula.
S’il mettait trop de temps à descendre, ils étaient morts. S’il descendait, ils étaient morts. Ou pire. On parle de trafiquants d’organes. Que croyez vous qu’ils vont faire de deux gus enquiquineurs en parfaite santé ? Repensant à leur petit casino clandestin, Keshâ’rem se dit que foutu pour foutu, autant faire tapis et tout miser sur la dernière carte qui lui reste. C’est-à-dire la plus bourrin.
-« On te voit. Tu fais quoi là-haut princesse ? Allez, tortille du cul et descend ! » grogna l’un des malfrats.
-« Lamashtu. »
-« Quoi ? » grimaça-i-il, incrédule.
-« Lamashtu. » annonça fermement Keshâ’rem, le regard fixe.
-« Il est fou. »
Il fallait dire que son visage barré de sang séché et ses yeux en partie écarquillés pouvaient laisser penser qu’il avait perdu la raison.
-« Ca suffit, regarde ton gus se pren… »
Le plafond s’effondra sur la gueule du gangster. Un monceau de plaques d’acier se déchira alors que l’air se voilait d’un épais nuage de poussières et de gravats. Un bloc de néon se décrocha du plafond. Toujours accroché par ses câbles d’un côté, il faucha deux hommes dans un mouvement pendulaire. De son point d’observation, le portebrume pouvait jouir de la scène avec une certaine satisfaction. Certes, le conduit d’aération s’était affaissé vers l’intérieur de la pièce quand il avait invoqué la redoutable Mère-des-Morts - elle avait littéralement explosé cet espace clos. Mais il s’y était préparé et avait eu le temps de se cramponner au rebord de la trappe.
Lamashtu était le nom redoutable qu’il utilisait pour personnifier son invocation et graver ses traits dans sa mémoire.
~° Baisse-toi. °~ intima-t-il mentalement à Val’Ihem.
Le conseil était peu nécessaire, car le soldat expérimenté s’était aplati aux premiers coups de feu tirés sur la masse ombrageuse de l’invocation. Recroquevillée en boule, elle ne dévoilait pas encore sa corpulence ni son visage terrifiant. L’homme sous elle était écrabouillé. Il tentait de se débattre avec un certain talent. C’était sans doute lui le porteur du cristal de force surhumaine.
HIDE SCENE VIOLENTE
Astucieux, certains se ressaisirent. Il s’en trouva même un pour tenter de l’abattre. C’était oublier Ba’rek, qui n’était pas en reste pour profiter de cette diversion de taille. Une nuque brisée. Un genou pété. Un poitrail transpercé avec son propre cran d’arrêt, retourné pour faire bonne mesure.
Toujours, la poussière flottait en rendant l’air irrespirable. Les gangsters mitraillaient la masse informe. C’est alors qu’elle se déploya. Son long cou et son corps tout aussi titanesque, ses oripeaux moisis et son râle obsédant. Même les plus chevronnés se figèrent d’effroi. S’il n’y avait pas de Jiangshis pour la seconder, ils étaient tous coincés avec elle dans un espace confiné à forte densité humaine. Les hommes se gênaient les uns les autres. Leur visibilité était réduite. Quant à l’énergie de Keshâ, malgré son agonie, il avait absorbé assez de prana chez ses hôtes du soir pour se déverser sans réserve dans un joli bouquet final.
HIDE SCENE VIOLENTE
Ah… ils aimaient prendre les organes des mères de famille. Ah…ça les faisait rire de le torturer… rire de l’entendre hurler, pleurer et supplier… A demi en transe, avec son cocktail d’adrénaline, d’endomorphines, les effets inconnus de la potion sur son équilibre chimique, il fallait aussi mentionner une invitée de marque en train d’émerger : sa nébula.
Dernière édition par Keshâ'rem Evangelisto le Mar 25 Juin - 18:36, édité 3 fois
Mar 25 Juin - 7:39
Maltraitance à la chaîne
FT. Val'Ihem Karmine
Frétillant de délices, la nébula voyait d’un bon œil cet abandon au déferlement d’énergie primitive. Toute la violence qu’il contenait, il devait la libérer. Comme il devait la libérer… Ouiii… les libérer tous les deux... des chaînes de son humanité. Son hôte devait survivre. Abandonner ses habitudes soumises. Plus que cela, il devait s’ouvrir à elle. Sedna.
La Mère-des-Morts encaissait des blessures à l’arme automatique. La différence entre elle et ses opposants, c’est qu’eux étaient mortels. Elle non. De plus, ils tiraient un peu trop souvent sur leurs copains dans la précipitation. Quand ils tombaient, la rafale continuait dans le tas. Plusieurs balles sifflèrent non loin de Keshâ. Mais il était dans un état second. Et s’interrompre n’aurait conduit qu’à annuler tout le bénéfice de son joker.
Les bras du jeune homme commençaient à trembler sur le rebord de la trappe d’aération, en lutte contre l’inclinaison du conduit. Pendant ce temps, Lamashtu fauchait les pieds des gangsters. Elle moissonnait les âmes, qui dans la nature auraient pu devenir bientôt ses enfants et gonfler les rangs de son armée de morts-vivants. Dévoilant sa vélocité et sa puissance hors-normes, c’était une boucherie. L’un des hommes lui tira dessus à bout portant avec un Gauss-35, sans doute le même qui avait frôlé Keshâ’rem un peu plus tôt.
La charge de la semeuse de mort s’interrompit momentanément, comme un frigo qui serait entré en collision avec un buffle. Puis, attrapant un autre gars par les chevilles, elle le fit tournoyer et le lança rageusement comme une fronde sur celui qui portait l’arme électronique et ses voisins. Agenouillée au-dessus d’eux, elle déploya son sourire odieux et son haleine méphitique. Puis, elle les contamina de sa pestilence noirâtre.
Ceux qui essayaient de refluer en ordre dispersé de la pièce étaient fauchés les uns à la suite des autres par Ba’rek, en embuscade. Le peu qui parvenaient dans le couloir se cognaient aux murs d’eux-mêmes dans la panique. L’un d’entre eux se retourna le genou en tombant. L’ombre sifflante du militaire les termina tous équitablement. Claire et précise.
N’y tenant plus, le jeune homme lâcha son perchoir et glissa le long du conduit jusque dans l’arène. Encore blessé, il faisait une proie facile. Bien peu restaient debout, mais ils étaient galvanisés comme lui l’avait été par l’adrénaline.
HIDE SCENE VIOLENTE
-« Cal… caldwell ! … arrête-ça. »
Il ne se rendait pas compte que son associé le tenait en joue de son arme. Les deux derniers gangsters s’étaient repliés derrière des bureaux et tremblaient comme des feuilles. Keshâ’rem ne percevait rien de la configuration des lieux. Il n’y avait que lui, sa créature et des entités hostiles. Face à face dans un duel sans limite. Ou plutôt, pour une mise à mort.
-« Ramène-les moi. » dit-il d’une voix froide et vide.
Sa main tremblait fortement sur le totem. Il ne le réalisait pas vraiment, mais il le serrait si fort, tellement fort, qu’il en avait mal aux muscles de son pouce. Presque jusqu'à se créer une blessure. Ses doigts étaient si tétanisés qu’il n’aurait pas su les desserrer. Une stupeur hallucinée passa sur ses traits juvéniles ensanglantés. Le rouge teintait si bien ses cheveux cendrés.
Les deux gangsters pendaient devant lui, tête en bas. La sombre silhouette de la Mère-des-Morts restait immuable en les tenant par les pieds.
HIDE SCENE DE VIOLENCE
-« Vous faites tellement de mal à cette ville… » murmura-t-il. Les criminels n’avaient plus la force de hurler. Ils ne faisaient que sangloter.
-« Moi aussi j’ai ressenti cette impuissance de votre main. Cela doit cesser. Il le faut.»
Ba’rek était toujours là, mortifié, sans parvenir à décider que faire.
HIDE SCENE DE VIOLENCE
Il n’en restait plus qu’un. Plus qu’un seul. Son tortionnaire.
Il faisait beaucoup d’efforts pour ne pas respirer, pour ne pas se faire entendre. Mais un spasme dans sa jambe le trahissait. Il n’y pouvait rien. C’était sans doute du à l’activité électrique incontrôlée de sa moelle épinière. Keshâ avait glissé à proximité de son corps. Le bandit avait nerveusement cherché son arme, mais celle-ci lui avait échappé quand la Mère-des-Morts étaint tombée du plafond.
~° J’ai très faim maintenant… °~ dit-il mentalement. Ou alors était-ce la voix de son double, celui qu’il voyait dans le miroir sous les traits de sa nébula.
Le corps du bandit tressaillit et il poussa un hurlement de fillette au moment où l’abomination noire se pencha sur lui en tordant son long cou.
HIDE BEURK BLESSURE
-« Amène-le moi. »
La Mère-des-Morts encaissait des blessures à l’arme automatique. La différence entre elle et ses opposants, c’est qu’eux étaient mortels. Elle non. De plus, ils tiraient un peu trop souvent sur leurs copains dans la précipitation. Quand ils tombaient, la rafale continuait dans le tas. Plusieurs balles sifflèrent non loin de Keshâ. Mais il était dans un état second. Et s’interrompre n’aurait conduit qu’à annuler tout le bénéfice de son joker.
Les bras du jeune homme commençaient à trembler sur le rebord de la trappe d’aération, en lutte contre l’inclinaison du conduit. Pendant ce temps, Lamashtu fauchait les pieds des gangsters. Elle moissonnait les âmes, qui dans la nature auraient pu devenir bientôt ses enfants et gonfler les rangs de son armée de morts-vivants. Dévoilant sa vélocité et sa puissance hors-normes, c’était une boucherie. L’un des hommes lui tira dessus à bout portant avec un Gauss-35, sans doute le même qui avait frôlé Keshâ’rem un peu plus tôt.
La charge de la semeuse de mort s’interrompit momentanément, comme un frigo qui serait entré en collision avec un buffle. Puis, attrapant un autre gars par les chevilles, elle le fit tournoyer et le lança rageusement comme une fronde sur celui qui portait l’arme électronique et ses voisins. Agenouillée au-dessus d’eux, elle déploya son sourire odieux et son haleine méphitique. Puis, elle les contamina de sa pestilence noirâtre.
Ceux qui essayaient de refluer en ordre dispersé de la pièce étaient fauchés les uns à la suite des autres par Ba’rek, en embuscade. Le peu qui parvenaient dans le couloir se cognaient aux murs d’eux-mêmes dans la panique. L’un d’entre eux se retourna le genou en tombant. L’ombre sifflante du militaire les termina tous équitablement. Claire et précise.
N’y tenant plus, le jeune homme lâcha son perchoir et glissa le long du conduit jusque dans l’arène. Encore blessé, il faisait une proie facile. Bien peu restaient debout, mais ils étaient galvanisés comme lui l’avait été par l’adrénaline.
HIDE SCENE VIOLENTE
-« Cal… caldwell ! … arrête-ça. »
Il ne se rendait pas compte que son associé le tenait en joue de son arme. Les deux derniers gangsters s’étaient repliés derrière des bureaux et tremblaient comme des feuilles. Keshâ’rem ne percevait rien de la configuration des lieux. Il n’y avait que lui, sa créature et des entités hostiles. Face à face dans un duel sans limite. Ou plutôt, pour une mise à mort.
-« Ramène-les moi. » dit-il d’une voix froide et vide.
Sa main tremblait fortement sur le totem. Il ne le réalisait pas vraiment, mais il le serrait si fort, tellement fort, qu’il en avait mal aux muscles de son pouce. Presque jusqu'à se créer une blessure. Ses doigts étaient si tétanisés qu’il n’aurait pas su les desserrer. Une stupeur hallucinée passa sur ses traits juvéniles ensanglantés. Le rouge teintait si bien ses cheveux cendrés.
Les deux gangsters pendaient devant lui, tête en bas. La sombre silhouette de la Mère-des-Morts restait immuable en les tenant par les pieds.
HIDE SCENE DE VIOLENCE
-« Vous faites tellement de mal à cette ville… » murmura-t-il. Les criminels n’avaient plus la force de hurler. Ils ne faisaient que sangloter.
-« Moi aussi j’ai ressenti cette impuissance de votre main. Cela doit cesser. Il le faut.»
Ba’rek était toujours là, mortifié, sans parvenir à décider que faire.
HIDE SCENE DE VIOLENCE
Il n’en restait plus qu’un. Plus qu’un seul. Son tortionnaire.
Il faisait beaucoup d’efforts pour ne pas respirer, pour ne pas se faire entendre. Mais un spasme dans sa jambe le trahissait. Il n’y pouvait rien. C’était sans doute du à l’activité électrique incontrôlée de sa moelle épinière. Keshâ avait glissé à proximité de son corps. Le bandit avait nerveusement cherché son arme, mais celle-ci lui avait échappé quand la Mère-des-Morts étaint tombée du plafond.
~° J’ai très faim maintenant… °~ dit-il mentalement. Ou alors était-ce la voix de son double, celui qu’il voyait dans le miroir sous les traits de sa nébula.
Le corps du bandit tressaillit et il poussa un hurlement de fillette au moment où l’abomination noire se pencha sur lui en tordant son long cou.
HIDE BEURK BLESSURE
-« Amène-le moi. »
Dernière édition par Keshâ'rem Evangelisto le Mar 25 Juin - 18:43, édité 2 fois
Mar 25 Juin - 7:56
Maltraitance à la chaîne
FT. Val'Ihem Karmine
Il avait prononcé ces mots plus pour la mise en scène que par nécessité. Le contrôle de son totem n’exigeait que le concours de l’esprit et de ses émotions. Lamashtu traînait le gangster par les chevilles dans une besogne à la loyauté absolue.
-« Ca suffit. Pas plus près… dis-moi… où est le cristal. »
Le gangster avait abandonné sa superbe. Pourtant, il refusait de parler. Son conflit intérieur était profond car une part de lui-même s’accrochait encore à l’idée de sa survie. Pathétique cul-de-jattes. Que serait-il sans ce cristal assurant sa toute puissance ? Même Ba’rek avait renoncé à intervenir. Il braquait toujours Keshâ, mais avait subtilement fait marche arrière vers la porte.
-« Dernière chance. »
La Mère grimaça en montrant ses dents hideuses dans un sifflement. Il avait fallu une année bien remplie : un kidnaping par des bandits, un raid sur Aramila, un Liéchi, des incubes, des marées de Jiangshi et d'élémentaires, un dieu cloué, un Fléau, une camarade traîtresse, une nébula, un spectre sociopathe et des agents du Magistère sans foi ni loi, des innocents gardés vifs et tranchés en lamelles, une mutilation... mais la fêlure était là, bien installée, dans sa gentillesse inaliénable. Elle laissait place à une frénésie consommée. Le gangster désigna une montre à son poignet, qu’il enleva tout seul en voyant la silhouette de l’invocation se mouvoir imperceptiblement pour l’attraper.
-« Tenez, je vous la donne… pitié… non non non non!!»
Personne ne l’écoutait plus. La sentence terminale avait déjà été prononcée. Les images de tous ces citoyens mutilés, à l’étage, dans leurs box insalubres, tournaient dans son esprit ravagé. Un tel degré de cruauté n’était même pas humain. Au-delà de toute raison, il voulait voir ces raclures payer, jusqu’au dernier…
En l’occurrence, il avait faim. La dépense d’énergie pour ce joyeux carnage avait été fastueuse. La Mère balança la montre vers Ba’rek et rapprocha l’ultime victime.
-« Sache que c’est la première fois que je fais ça. »
Avant même de tendre sa main vers le gangster, il se dégoûtait déjà. Mais son trauma était trop violent et ses blessures trop prégnantes. Il lui faudrait de l’énergie, toute son énergie restante.
Son corps se redressa maladroitement pour ramper vers celui que l’invocation plaquait au sol sans défense. Il paraissait si petit à côté d’elle. On aurait dit un jouet. Un jouet tout cassé. Sa main se plaqua sur sa poitrine musculeuse. Doucement, son regard se posa sur le sien. Et il aspira sa vie.
En proie à un choc violent, son cerveau était retourné par la remontée soudaine d’énergie. C’était si bon, si vivifiant. Et aliénant. Addictif. Il en voulait encore. Il se sentait… puissant… jeune. Presque en santé. Il l’espérait, avec l’aide de la potion et des soins. Les traits bleutés du cadavre s’étaient creusés comme s’il était sévèrement déshydraté et ses cheveux avaient blanchi à vue d’œil.
La Mère-des-Morts disparut, comme si elle n’avait jamais existée. Silencieux. Aucun des deux hommes ne parlait. Qu’y avait-il à dire ? L’impiété de la scène était presque palpable. Tandis que la poussière retombait sur les corps, ils découvraient toute l’étendue du carnage. Des giclées de sang encore coulante sur les murs blancs, des trainées d’organes dispersés. Ceux-là, ils ne pourraient les greffer à aucun riche de l’élite.
L’immobilité semblait devenir permanente sur ce corps rigidifié. Esprit placide, presque néant. Il ne restait rien. Plus aucune émotion. Aucun regret. Juste du rouge, partout. Boucherie. Lui qui n’avait jamais tué qu’une seule fois un homme en duel. Et un incube. Il se retrouvait aujourd’hui couvert du sang d’innombrables victimes. Ce long sifflement qui parcourait son esprit semblait ne jamais vouloir faiblir. C'était peut-être le bruit des balles qui l'assourdissait. Ou bien celui de sa porcelaine qui s'ébréchait.
Certains diront que c’étaient des monstres, qu’ils l’avaient bien cherché. Mais le regard atterré de Ba’rek pouvait témoigner de la complète aberration ce qui venait d’arriver. Il était sans voix. Lui, le combattant. Keshâ'rem aussi savait très bien ce qu’il avait fait. Son esprit avait consenti à un déferlement de haine totale pour écraser toute opposition d'une façon si brutale que cela ne pouvait que le transformer en profondeur. Mauvais ou pas, ils restaient des êtres humains. Le sang de certains devaient couler. Mais ils auraient pu en neutraliser d'autres. A moment, il était clair que son choix n'était pas juste de survivre et de fuir, mais de rester pour terrasser. En s’arrogeant le droit de les juger indignes de vivre, il savait qu'il venait de faire un pas dans la direction de la monstruosité.
Il fallait devenir un monstre pour en combattre d’autres. N’était-ce pas ce qu’on lui avait dit. Depuis que cette pollution de brume hantait son âme, il savait déjà qu’il ne serait plus jamais le même. Autant embrasser ce destin. Car, il ne serait plus jamais une victime. Quant aux cicatrices sur son âme, elles étaient profondes. Il reviendrait à ceux qui l’aimaient d’étreindre son humanité encore plus fort et de l’attiser pour la protéger.
Ils émergèrent tout deux des tunnels de l’usine, après un laps de temps incertain. Appuyé sur Ba’rek, ce n’est qu’alors que Keshâ redevint jeune et fragile et se mit à trembler de la tête aux pieds de manière irrépressible, avant de s’affaisser.
Les ouvriers étaient rentrés chez eux depuis longtemps. Bien sûr, ils étaient loin d’avoir dégommé tout le cartel. Les cafards avaient fui en réalisant le massacre. Et ils avaient condamné le site, abandonnant jusqu’au dernier de leurs donneurs non consentis d’organes, encore reliés aux machines qui les maintenaient « en vie ». Bien sûr, le magnat Hans de Tiersen aurait des comptes à rendre. Radovic Burton aussi. Même s'il ne fallait pas sous-estimer les truanderies des avocats. Beaucoup d’éléments permettraient d’élargir les investigations aux autres trafiquants. Pas sûr que les personnalités clientes de la Haute Ville soient éclaboussées, en revanche.
Ils tenteraient de se refaire ailleurs, c’était sûr. Le travail d’enquête ne faisait que commencer. Tandis que Karmine lui donnait son vrai nom et fumait une clope, lui aussi couvert de sang, une colonne des forces spéciales investissait les lieux pour sceller les preuves.
-« Et comment tu t’appelles en fait ? »
-« Keshâ’rem Evangelisto. »
Un collègue de Val-Ihem se pointait avec son carnet, prêt pour l’interrogatoire. L’officier se leva pour lui donner un bref résumé sur la situation. Quand ils se retournèrent pour emmener le jeune homme à l’écart, ils ne rencontrèrent que le vide. Sa silhouette avait tout simplement disparu, n’y laissant qu’une aurore silencieuse.
-« Ca suffit. Pas plus près… dis-moi… où est le cristal. »
Le gangster avait abandonné sa superbe. Pourtant, il refusait de parler. Son conflit intérieur était profond car une part de lui-même s’accrochait encore à l’idée de sa survie. Pathétique cul-de-jattes. Que serait-il sans ce cristal assurant sa toute puissance ? Même Ba’rek avait renoncé à intervenir. Il braquait toujours Keshâ, mais avait subtilement fait marche arrière vers la porte.
-« Dernière chance. »
La Mère grimaça en montrant ses dents hideuses dans un sifflement. Il avait fallu une année bien remplie : un kidnaping par des bandits, un raid sur Aramila, un Liéchi, des incubes, des marées de Jiangshi et d'élémentaires, un dieu cloué, un Fléau, une camarade traîtresse, une nébula, un spectre sociopathe et des agents du Magistère sans foi ni loi, des innocents gardés vifs et tranchés en lamelles, une mutilation... mais la fêlure était là, bien installée, dans sa gentillesse inaliénable. Elle laissait place à une frénésie consommée. Le gangster désigna une montre à son poignet, qu’il enleva tout seul en voyant la silhouette de l’invocation se mouvoir imperceptiblement pour l’attraper.
-« Tenez, je vous la donne… pitié… non non non non!!»
Personne ne l’écoutait plus. La sentence terminale avait déjà été prononcée. Les images de tous ces citoyens mutilés, à l’étage, dans leurs box insalubres, tournaient dans son esprit ravagé. Un tel degré de cruauté n’était même pas humain. Au-delà de toute raison, il voulait voir ces raclures payer, jusqu’au dernier…
En l’occurrence, il avait faim. La dépense d’énergie pour ce joyeux carnage avait été fastueuse. La Mère balança la montre vers Ba’rek et rapprocha l’ultime victime.
-« Sache que c’est la première fois que je fais ça. »
Avant même de tendre sa main vers le gangster, il se dégoûtait déjà. Mais son trauma était trop violent et ses blessures trop prégnantes. Il lui faudrait de l’énergie, toute son énergie restante.
Son corps se redressa maladroitement pour ramper vers celui que l’invocation plaquait au sol sans défense. Il paraissait si petit à côté d’elle. On aurait dit un jouet. Un jouet tout cassé. Sa main se plaqua sur sa poitrine musculeuse. Doucement, son regard se posa sur le sien. Et il aspira sa vie.
En proie à un choc violent, son cerveau était retourné par la remontée soudaine d’énergie. C’était si bon, si vivifiant. Et aliénant. Addictif. Il en voulait encore. Il se sentait… puissant… jeune. Presque en santé. Il l’espérait, avec l’aide de la potion et des soins. Les traits bleutés du cadavre s’étaient creusés comme s’il était sévèrement déshydraté et ses cheveux avaient blanchi à vue d’œil.
La Mère-des-Morts disparut, comme si elle n’avait jamais existée. Silencieux. Aucun des deux hommes ne parlait. Qu’y avait-il à dire ? L’impiété de la scène était presque palpable. Tandis que la poussière retombait sur les corps, ils découvraient toute l’étendue du carnage. Des giclées de sang encore coulante sur les murs blancs, des trainées d’organes dispersés. Ceux-là, ils ne pourraient les greffer à aucun riche de l’élite.
L’immobilité semblait devenir permanente sur ce corps rigidifié. Esprit placide, presque néant. Il ne restait rien. Plus aucune émotion. Aucun regret. Juste du rouge, partout. Boucherie. Lui qui n’avait jamais tué qu’une seule fois un homme en duel. Et un incube. Il se retrouvait aujourd’hui couvert du sang d’innombrables victimes. Ce long sifflement qui parcourait son esprit semblait ne jamais vouloir faiblir. C'était peut-être le bruit des balles qui l'assourdissait. Ou bien celui de sa porcelaine qui s'ébréchait.
Certains diront que c’étaient des monstres, qu’ils l’avaient bien cherché. Mais le regard atterré de Ba’rek pouvait témoigner de la complète aberration ce qui venait d’arriver. Il était sans voix. Lui, le combattant. Keshâ'rem aussi savait très bien ce qu’il avait fait. Son esprit avait consenti à un déferlement de haine totale pour écraser toute opposition d'une façon si brutale que cela ne pouvait que le transformer en profondeur. Mauvais ou pas, ils restaient des êtres humains. Le sang de certains devaient couler. Mais ils auraient pu en neutraliser d'autres. A moment, il était clair que son choix n'était pas juste de survivre et de fuir, mais de rester pour terrasser. En s’arrogeant le droit de les juger indignes de vivre, il savait qu'il venait de faire un pas dans la direction de la monstruosité.
Il fallait devenir un monstre pour en combattre d’autres. N’était-ce pas ce qu’on lui avait dit. Depuis que cette pollution de brume hantait son âme, il savait déjà qu’il ne serait plus jamais le même. Autant embrasser ce destin. Car, il ne serait plus jamais une victime. Quant aux cicatrices sur son âme, elles étaient profondes. Il reviendrait à ceux qui l’aimaient d’étreindre son humanité encore plus fort et de l’attiser pour la protéger.
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Ils émergèrent tout deux des tunnels de l’usine, après un laps de temps incertain. Appuyé sur Ba’rek, ce n’est qu’alors que Keshâ redevint jeune et fragile et se mit à trembler de la tête aux pieds de manière irrépressible, avant de s’affaisser.
Les ouvriers étaient rentrés chez eux depuis longtemps. Bien sûr, ils étaient loin d’avoir dégommé tout le cartel. Les cafards avaient fui en réalisant le massacre. Et ils avaient condamné le site, abandonnant jusqu’au dernier de leurs donneurs non consentis d’organes, encore reliés aux machines qui les maintenaient « en vie ». Bien sûr, le magnat Hans de Tiersen aurait des comptes à rendre. Radovic Burton aussi. Même s'il ne fallait pas sous-estimer les truanderies des avocats. Beaucoup d’éléments permettraient d’élargir les investigations aux autres trafiquants. Pas sûr que les personnalités clientes de la Haute Ville soient éclaboussées, en revanche.
Ils tenteraient de se refaire ailleurs, c’était sûr. Le travail d’enquête ne faisait que commencer. Tandis que Karmine lui donnait son vrai nom et fumait une clope, lui aussi couvert de sang, une colonne des forces spéciales investissait les lieux pour sceller les preuves.
-« Et comment tu t’appelles en fait ? »
-« Keshâ’rem Evangelisto. »
Un collègue de Val-Ihem se pointait avec son carnet, prêt pour l’interrogatoire. L’officier se leva pour lui donner un bref résumé sur la situation. Quand ils se retournèrent pour emmener le jeune homme à l’écart, ils ne rencontrèrent que le vide. Sa silhouette avait tout simplement disparu, n’y laissant qu’une aurore silencieuse.
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