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Les épices sacrées de Tohorâ [PW Arno]

Les épices sacrées de Tohorâ [PW Arno] Brandw10
Dim 19 Nov - 17:54

Les épices sacrées de Tohorâ

Atahara et Arno

Dans le silence serein du temple de Tohorâ, Atahara se plongeait dans les textes anciens, des parchemins jaunis par le temps, héritage précieux de ses ancêtres d'Améthyste. Ces écrits renfermaient des secrets, des récits, mais surtout, des recettes sacrées d'encens. Elle parcourait avec dévotion chaque ligne, absorbant les connaissances millénaires qui se dévoilaient à elle.

Parmi ces parchemins, un rouleau attira particulièrement son attention. Les caractères gravés dans le papier usé semblaient briller sous la lueur tamisée du temple. Il décrivait des mélanges d'épices spécifiques, capables de purifier les offrandes destinées à Tohorâ, la déesse baleine vénérée par son culte. Une révélation inattendue, un don inestimable de sagesse offert par ses ancêtres.

Mais les noms des épices mentionnées étaient obscurs, des appellations inconnues dans la région aride d'Aramila. Atahara chercha dans ses souvenirs, dans les marchés et les échoppes, mais en vain. Ces ingrédients mystérieux semblaient échapper aux connaissances communes.

Une pensée s'imposa alors à elle, comme un éclair dans l'obscurité. Arno, ce marchand d'épices qu'elle avait croisé autrefois, serait peut-être la clé pour dénicher ces ingrédients rares. Ses souvenirs se dessinèrent clairement : la force de caractère d'Arno, son expertise évidente dans le commerce des épices. Elle se rappela de sa promesse, celle de l'aider si le besoin se présentait.

Décidée à obtenir ces précieuses épices pour honorer Tohorâ, Atahara se leva d'un mouvement fluide et ajusta sa tenue. Le tissu léger des étoffes effleura le sol du temple alors qu'elle se dirigeait vers la sortie. Le soleil éclatant du désert l'accueillit, ses rayons caressant les murs chauds de la ville d'Aramila.

Le grand marché d'Aramila, un lieu animé, vibrant d'énergie commerciale, était son prochain but. Atahara marcha avec détermination dans les rues poussiéreuses, laissant derrière elle le calme du temple pour l'agitation de la cité. Elle gravit les marches usées qui menaient à la porte des halles couvertes.

Une fois à l'intérieur, elle observa les allées bondées, les marchandises étalées, les voix qui s'élevaient dans un brouhaha continu. Malgré le tumulte, elle avança d'un pas assuré, cherchant des yeux un visage familier parmi les marchands affairés. Son regard se posa sur un homme affairé, en train de superviser le chargement de sacs d'épices.

Elle s'approcha sans hésitation et, d'une voix claire, mais empreinte de respect, s'adressa à lui, évoquant leur rencontre passée et son besoin présent.

"Excusez-moi, noble marchand. Vous ne me connaissez peut-être plus, mais je suis Atahara, prêtresse de Tohorâ. Il y a quelque temps, nos chemins se sont croisés lors d'une aventure. Aujourd'hui, je sollicite humblement votre aide. Dans ces écrits anciens, j'ai découvert des recettes d'encens pour purifier nos offrandes à Tohorâ, mais les épices mentionnées me sont inconnues ici. Je me demandais si votre connaissance des marchandises pourrait m'aider à trouver ces ingrédients rares."

Car si elle se souvenait très bien d’Arno, il était largement envisageable que le marchand ne gardait aucune trace d’Atahara dans sa mémoire. Après tout, leur première rencontre avait été vraiment un désastre total, le genre de choses que l’on préfère balayer pour toujours de son esprit. Néanmoins, la prêtresse avançait un nouvel argument.

"Je comprends que votre temps est précieux, mais je suis prête à rémunérer généreusement votre aide dans cette quête. Ce geste ne serait pas seulement pour moi, mais pour honorer notre déesse Tohorâ."


Dernière édition par Atahara le Dim 14 Jan - 16:01, édité 1 fois
Mar 19 Déc - 18:13

Les épices sacrées

Atahara et Arno


Une nouvelle journée, un nouvel ennui. Combien de temps l’échec du Concile allait m’être reproché ? Je tuais le temps plus qu’autre chose, oui du monde passait dans cette halle, oui il y avait de quoi être heureux et les bourses pleines. J’échangeais des banalités de commerçants avec mes voisins, voyant ce qu’ils pouvaient savoir, donner un peu, prenant beaucoup. Rien à se mettre sous la dent, on était sur un marché trop central, les marins ne venaient pas, les caravanes partaient des portes de la ville. C’est là que les informations du monde arrivaient et repartaient, c’est là que je voyais les choses. Par les Douze, je pense qu’on pouvait apprendre plus de choses en donnant un astra à la bonne personne dans un bordel qu’au milieu de ces vieux croulants. 

Tenez madame, merci d’être passé… Oui je transmettrai le bonjour à ma mère.

Voilà à quoi ça ressemblait, quand je ne tapais pas mes doigts sur la planche supportant la balance et les poids ou que je ne souriais pas à un passant qui approchait des étals. Je me retenais de leur adresser une grimace quand ils passaient finalement leurs chemins. Perte de temps du début à la fin. J’encaissais ma punition en silence. On m’appelle de l’arrière, un chargement qui doit partir prochainement. Soit, ça me dégourdira les jambes. Je me redressais approchant les caisses et les sacs chargés d'épices et de baies. Il y en avait pour une somme importante, mais seulement si ça quittait Aramila, tout ce qui vient de loin est rare, tout ce qui est rare est cher. Je m’assure de la qualité du grain, soupèse, croque, inspecte avant d’adresser un signe d’approbation. Ça c’est bon, ça, c’est ta camelote habituelle, tu la fileras à plus crédule. 

Une voix arrive dans mon dos, mon premier réflexe aurait été de me retourner subitement, mais il fallait parfois se réfréner, quelle menace il pourrait y avoir par ici ? À part raviver un mauvais souvenir…

Je me souviens prêtresse, comment allez-vous depuis cette… aventure ?

J’essaye d’être aussi poli que possible, mais il est difficile de voir autre chose que le reflet de mon échec dans les yeux de la tritonne. Je serrais les dents en essayant d’étirer un sourire las sur mon visage. Je lui avais enjoint de fuir la place où se tenait l’automate et je devrais l’aider ? Allons, elle ne devait pas avoir quelqu’un d’autre à qui s’adresser… Des épices rares ? À voir ça, peut-être que le nom me dirait quelque chose et si je pouvais porter assistance j’aurai forcément de quoi asseoir une petite influence sur le culte de la baleine. En plus d’une gratification intéressante apparemment. Il n’en faut pas plus, la situation de la ferme est un peu meilleure, mais on crache pas sur un travail propre et bien fait.

"Dans ce cas, dites-m’en plus. Vous avez le nom des plantes que vous recherchez ?

Je doute de pouvoir répondre à toutes les demandes d’Atahara, surtout si on parlait de plantes rares voir introuvables, Aramila n’est pas le lieu idéal… Mais j’ai déjà une idée de où je pourrai aller m’approvisionner si mon intuition est bonne.


Dernière édition par Arno Dalmesca le Sam 5 Oct - 19:53, édité 2 fois
Dim 14 Jan - 16:11

Les épices sacrées de Tohorâ

Atahara et Arno


Le cœur d'Atahara battait avec une intensité croissante alors qu'elle attendait la réaction d'Arno, le marchand d'épices qu'elle avait approché dans le tumulte des grandes halles marchandes animées. Les yeux d'Arno s'étaient levés soudainement, et un éclair de reconnaissance traversa son regard. Un sourire subtil se dessina sur ses lèvres.

Atahara inclina légèrement la tête, reconnaissante pour la courtoisie d'Arno. "Je vous remercie pour votre prévenance, noble Arno. Je me porte bien, et j'espère sincèrement que le marchand d'épices a également connu des jours prospères depuis notre dernière rencontre."

Atahara observa Arno avec une curiosité mêlée de respect. Son visage était éclairé par la lumière tamisée des halles, accentuant la sérénité de la prêtresse. Atahara ressentit une connexion subtile, une compréhension tacite entre eux, forgée lors de l'aventure passée.

"Si je me permets de revenir vers vous aujourd'hui, noble marchand, c'est pour solliciter votre expertise dans un domaine qui vous est familier," déclara Atahara, sa voix empreinte de respect.

Arno, désormais toute ouïe (du moins, c’est ce qu’espérait notre prêtresse), attendait la suite avec une attention particulière. Atahara exposa son besoin, décrivant la découverte des recettes ancestrales, de l'énigme des épices sacrées pour purifier les offrandes à Tohorâ.

"Je ne possède malheureusement pas tous les noms des plantes mentionnées dans ces textes antiques. Notre peuple d'Améthyste, d'où proviennent ces écrits, utilisait des appellations différentes pour les plantes communes ici à Aramila. Cependant, dans les descriptions, je peux reconnaître les Arbres du désert et les Perces-Gel, des plantes familières de ces terres arides."

Le regard d'Atahara parcourait la recette antique manuscrite sur un vieux parchemin, étincelant légèrement, comme si elle cherchait à faire le lien entre les descriptions et les grandes jarres d’épices du commerce.

"La recette mentionne également une plante qui se nourrit de l'âme des morts pour alimenter les vivants," poursuivit Atahara, ses yeux empreints d'une lueur mystique. "C'est une notion particulière, mais peut-être avez-vous déjà entendu parler d'une telle plante au cours de vos voyages et transactions ?"

Atahara attendit, son regard fixé sur Arno, espérant qu'une étincelle de reconnaissance ou de compréhension traverserait les yeux du marchand d'épices. Elle se demandait si les descriptions énigmatiques des plantes évoquaient des souvenirs ou des connaissances cachées dans le monde mystérieux des marchands nomades.

Le calme persista un moment, ponctué par le murmure continu de l'activité autour d'eux. Atahara était consciente que sa requête était complexe, liée à des mystères anciens, mais elle croyait en la possibilité d'une réponse salvatrice dans les paroles d'Arno.

Atahara déposa délicatement la recette manuscrite devant Arno, une offrande humble mais pleine de mystère. "Voici ce que j'ai découvert dans les annales d'Améthyste. J'espère que ces écrits vous parleront d'une manière ou d'une autre."

Pendant qu'Arno s'attelait peut-être à la tâche, Atahara se dirigea vers les grandes jarres d'épices en vente. Les senteurs puissantes et envoûtantes envahissaient l'air. Elle observa chaque étiquette, passant ses doigts sur les grains et les feuilles, cherchant une correspondance avec les descriptions mystérieuses de la recette.

Certaines épices captivaient son attention, évoquant des souvenirs d'Améthyste. Cependant, malgré ses efforts, une ombre de déception voila ses traits. Les noms énigmatiques de la recette semblaient échapper aux réalités des jarres et des étagères.

Elle leva le regard vers Arno, espérant qu'il pourrait éclairer le mystère qui se cachait derrière ces épices sacrées. Les halles marchandes, d'ordinaire bruyante, semblaient soudainement suspendues dans un moment où le passé et le présent s'entrelaçaient autour de la recherche des arômes oubliés.
Sam 24 Fév - 8:38

Les épices sacrées

Atahara et Arno

Ça faisait quelque chose tant de considération de la part d’une religieuse, aussi annexe que soit son culte. S’entendre donner du noble et du vouvoiement, ça pose son homme là. Restons quand même concentrer et revenons au cœur du sujet et à sa forme : c’est une transaction. Et ça, c’est par chance mon domaine. Alors j’écoute. J’écoute et les mots de la tritonne m’amènent à d’obscures connexions entre les plantes. Ma principale crainte étant que les écrits sur lesquels elle se base ne mélangent tout ou ne parle que de plantes disparues aujourd’hui.

Elle avait raison en certains points, des noms qu’elle donnait m’était familiers. Pas tant par leur difficulté à trouver que par le fait qu’ils ne poussaient pas à même le desert. Déjà mes yeux allaient sur mes étals et dans mon palais d’épices. Qui n’avait de palais que le nom, vous voyez, c’est ça que ça fait quand on vous considère autant si vite, vous prenez vite la grosse tête. Je devais avoir quelques fleurs d’Arbres du désert ramenés des contreforts, pour les Perce Gel, ça allait être plus difficile, surtout sous nos latitudes. Néanmoins je pourrai toujours conseiller une connaissance à la prêtresse si son chemin l’amené plus au nord. A moins que ce diable de Gustefal n’ait encore réussi le tour de force de ramener quelques folies clandestines dans son étrange coffre glacé. Ça valait le coût d’aller le voir, j’y prendrai ma commission d’intermédiaire.

La suite me fit un peu plus déchanter, je continuais à écouter notre amie, mais les mots, comme je le craignais, ne font pas directement sens. Alors je grogne, je fais la moue, je cogite. Lorsqu’elle pose le manuscrit, je fais mine de le regarder avec attention, l’écriture est difficile à lire, je ne suis pas un grand lecteur, trop de circonvolution, trop d’allusions. Ces mots peuvent-ils cacher un autre message ? Difficile à croire, leur but n’était pas de cacher des informations, mais de raconter une histoire, de l’enregistrer et de la faire vivre au-delà de leurs auteurs.

Mon regard se redresse sur la halle où la rumeur de la foule commence à se faire entendre, la procession des habitués va commencer, faisons vite pour ce qu’on peut faire ici. Atahara en train de papillonner, l’originaire d’Améthyste semblait également perdu dans ce monde terrestre, comme sur un autre plan, comme sur d’autres souvenirs. Subtil décalage que j’avais pu observer par le passé. Candeur religieuse de penser que tout irait bien car le destin est déjà tracé pour tous et que les Douze ou autres panthéons nous accompagnent et nous guide sur le bon chemin.

«J’ai récemment fait l’acquisition de quelques fleurs d’Arbres du désert, souriais-je, je peux vous en céder pour votre préparation, j’imagine que mon client ne verra pas trop de différence… »

Toujours jouer la carte du sacrifice fait pour aider une connaissance, le dit client n’existait pour l’instant que dans ma tête. On met en confiance comme ça pour la suite, ça me penait mais il allait falloir se rendre à l’évidence.

« Pour les Perce Gels par contre… La plante est trop fragile pour supporter le voyage dans le désert, lui indiquais-je. J’ai peut-être un contact, mais c’est un véritable arracheur de dents, j’ai peur qu’il vous détrousse simplement pour une plante qu’on peut trouver facilement dans le nord. Je m’en occuperai ! »

Rendre un service facile, montrer qu’on veut vraiment aider et se rendre indispensable. La somme avait intérêt à être coquette et l’odieux marchand avoir déjà arnaqué quelques badauds pour être de bonne humeur. Nous avions une entente cordiale avec l’arnaqueur, de là à dire qu’un certain lien obscur nous reliait par quelque entremises… Vous laisserez bien à votre serviteur le bénéfice du doute ? Je ne vais pas vous lâcher tous mes contacts et amis.

Enfin, le plat de résistance, cette mystérieuse plante qui n’avait pas de description et de nom précis au moment de la rédaction du manuscrit. Dans ce genre de situation, il y avait plusieurs solutions. La plus sûre était ailleurs et aller nécessiter un voyage bienvenu. N’allez pas croire que je ne veux pas montrer patte blanche à Aramila pour revenir dans les bonnes grâces, mais ça me démange de voir disparaitre les sourires de pitiés de certains. J’ai encore besoin de temps pour m’y faire et le reste de la famille pourra toujours assurer le minimum pendant que je suis en déplacement.

Je plantais mon regard dans celui de la religieuse, il faudrait se préparer, sans doute partir demain ou le jour d’après avec le prochain convoi traçant dans le désert.

« Pour la suite… Connaissez-vous le bazar ? » murmurai-je.

Le nom était connu, mais pas pour autant apprécié, c’était un secret de polichinelle que les marchands de ces halles s’approvisionnaient en partie dans ce marché trouble. Une fois qu’on avait croqué dans le fruit, difficile de faire marche arrière tant ce qu’on trouvait au cœur du désert rivalisait avec les plus luxueuses échoppes de la cité.

« Si vous êtes disponible, je peux nous arranger le voyage. »



Dernière édition par Arno Dalmesca le Sam 5 Oct - 19:54, édité 1 fois
Dim 3 Mar - 11:15

Les épices sacrées de Tohorâ

Atahara et Arno


Les mots d'Arno résonnèrent dans l'esprit d'Atahara, réchauffant son cœur de prêtresse avec l'espoir d'une réussite imminente dans sa quête des épices sacrées. L'offre généreuse de partager les fleurs d'Arbres du désert la remplit d'une gratitude sincère envers le marchand d'épices. Elle accepta avec un sourire, laissant échapper un soupir de soulagement intérieur.

"Je vous suis profondément reconnaissante pour cette offre, noble marchand. Quel serait le prix que vous attendez en échange de ces fleurs précieuses ?" demanda-t-elle, son regard brillant d'anticipation.

Arno lui donna le prix, et Atahara s'empressa de sortir la somme convenue de sa bourse, se sentant impatiente de tenir entre ses mains les clés de son succès. Elle prit les fleurs avec délicatesse, les observant avec émerveillement. Leurs pétales délicats ressemblaient à des ailes de papillon, symboles de la beauté fragile de la nature dans le désert aride.

Cependant, l'optimisme d'Atahara fut tempéré lorsque Arno aborda le sujet des Perces-Gels. Elle ne put réprimer un soupçon de déception alors qu'il expliquait les difficultés pour obtenir ces plantes fragiles. Elle savait que cette tâche serait ardue, mais elle espérait néanmoins un miracle.

"Je comprends. Les Perces-Gels sont des trésors du nord, et il est compréhensible qu'ils soient difficiles à obtenir dans ces terres arides," répondit-elle avec résignation teintée de tristesse.

Elle exprima une nouvelle fois sa gratitude pour les efforts d'Arno, reconnaissant le sacrifice qu'il faisait pour lui venir en aide. Elle renouvela son offre afin de les obtenir sous forme de poudre, sachant que c'était peut-être la meilleure solution dans les circonstances.

"C'est une idée que je vous propose, noble Arno. Je vous fais entièrement confiance pour prendre les meilleures décisions concernant ces précieuses plantes," déclara-t-elle avec un léger sourire.

Puis, Arno murmura les mots "le bazar", et Atahara tressaillit légèrement. Le marché noir de Qadsak, un lieu empreint de dangers et de mystères. Elle savait que s'aventurer seule dans un tel endroit était imprudent, voire suicidaire.

"C'est un endroit que je connais. Mais je sais qu'il est imprudent de s'y aventurer en solitaire," répondit-elle d'une voix empreinte de prudence.

L'offre d'Arno de l'accompagner dans cette aventure inquiétante la remplit à la fois d'appréhension et d'un sentiment de sécurité. Elle accepta immédiatement, admirative de la valeur de son soutien dans cette quête périlleuse.

"Je vous suis reconnaissante de votre proposition, mon cher Arno. Quand pourrions-nous entreprendre ce voyage ensemble ?" demanda-t-elle, son cœur palpitant d'excitation mêlée à une pointe de nervosité.

Atahara visualisa le voyage jusqu'à Qadsak, imaginant les dangers et les défis qui les attendaient dans les dunes de Saleek. Elle se prépara mentalement, rassemblant sa détermination et sa sagesse pour affronter l'inconnu. Dans son esprit, elle récita des prières silencieuses à Tohorâ, demandant sa protection et sa guidance pour cette entreprise audacieuse. Elle se promit de se préparer adéquatement, tant physiquement que spirituellement, pour mener à bien cette expédition vers le bazar obscur de Qadsak.
Sam 30 Mar - 11:56

Les épices sacrées

Atahara et Arno


Bien, quelques espèces sonnantes et trébuchantes dans ma paume, c’était toujours ça de pris. Je comptais rapidement les pièces avant de les faire disparaître dans ma poche. J’avais toute confiance en la prêtresse, elle ne se serait pas amusé à m’arnaquer dans tous les cas. Pas dans son tempérament, mais c’était un réflexe, une habitude. Trop souvent dans ce genre de marché, on priait les Douze sans suivre leurs enseignements… Facile de se cacher derrière des préceptes et d’apparaitre blanc comme neige.

La suite par contre, aller m’amener dans les pattes de quelqu’un qui n’en avait que faire des masques et qui affichait clairement son côté ripoux. Une telle canaille qui tenait tout un coin de la ville par le cou. J’avais une admiration non feinte pour le bonhomme, d’abord, le plan, le départ. La journée était encore longue, je ne doutais pas de pouvoir nous mettre en route rapidement.

Demain.” Annonçais-je à la tritonne. “Il faudra prévoir des affaires pour le voyage, dans l’idéal si vous avez déjà une monture et le nécessaire c’est bien, sinon je verrai avec le convoi, c’est juste que ça vous coûtera plus cher et mieux vaut garder vos sous pour… là-bas.

J’avais bien vu que le nom l’avait tendu, pour qui n’avait pas l’habitude des lieux, ils restaient nimbés de mystères, les toiles chatoyantes cachant une réalité plus sombre et secrète. Même pour moi qui y avait mes habitudes, ça restait le genre de lieux où il fallait être sur le qui-vive malgré la présence de certains confrères.

Retrouvons-vous à la porte Est avant le levé de soleil pour nous greffer au convoi, je nous aurais trouvé le bon d’ici là, promis-je à la prêtresse. D’ici là, préparez vous, la route sera longue…

Et de mon côté, je n’allais pas devoir chômer pour autant. Sur ces mots, j’adressais mes salutations à Atahara, lui souhaitant la réussite sur la voie que lui trace sa déesse et je m'éclipsais déjà vers ma réserve. Tout le long, j’avais refais mes calculs, j’allais pas y gagner beaucoup dans l’affaire. Par contre, entretenir des bonnes relations avec les tritons était toujours un plus et il était évident que la fidèle de Tohorâ avait une certaine influence. Oui, ça valait le coup d’aller le voir et de jouer une nouvelle partie sur un équilibre précaire.

Quittant mon étal, je quittais aussi les chemins pavés et tracés de la ville, l’homme appréciant bien plus l’ombre et le voile opaque des bas quartiers que celui des marchés comme celui où j’étais campé. Une façon comme une autre pour moi de déjà me réhabituer au sable du désert qui me couverait dans les prochains jours. Le teint gris de l’homme ne trompait pas, pas plus que sa façon d’évoluer dans son joyeux souk de façon silencieuse. Celui qui avait permis à Eustache de trouver une couverture à Opale était penché au-dessus du cou d’une jouvencelle qui s’extasiait devant la richesse des étoffes. Lui, il inspirait à pleine narine l’odeur de la chair fraîche. C’était là son apéritif, une tentation et une gourmandise qu’il se permettait. Pas sûr que cette petite sorte de là indemne, mais jamais le gros Strigoï n’avait été pris. Son sourire carnassier n’en finit pas de s’agrandir quand ses yeux se posèrent sur moi. Il continuait de conseiller les dames présentent, semblant presque voler autour d’elles.

Mon doux, minauda-t’il en s’approchant, quel bon vent t’amène ?” Le terrifiant sourire ne partait pas, mais Eustache n’en avait cure, le sous humain le dégoutait proprement et, si ce n’est pour leur relation d’intérêt mutuel, il en serait resté là. Je n’avais pourtant pas le choix, ramenant mes mèches folles de façon plus élégante, redressant mon torse de toute ma hauteur, moi aussi je pouvais marché à pas de loup au milieu des tapis et des sifflements charmés des dames. “J’ai besoin de ton aide, dis-je avec le même ton emprunté et un accent opalien certain. Je cherche des colorants spéciaux pour mon maître de passage ici, il vous envoie ses salutations.

Message passé avec succès, le gros Cassandre n’aurait pas pu découvrir plus ses dents au risque d’en décrocher sa mâchoire. Que de bonnes nouvelles pour ce monstre. Nous évoluions sans hésitation à travers les étals, les tapis, la foule, s’arrêtant par instant pour contempler une étoffe que le gris me déconseillait avant de s'attarder sur une autre plus recommandée pour mon ouvrage. Ainsi, dans cette danse lente de chair et de légèreté, nous nous retrouvions dans le fond de la boutique sans que personne ne se soit inquiété de ma présence ou de l’absence du maître des lieux. Les employés donnaient le change alors qu’il ouvrait la porte de sa réserve obscure. Fini les masques, place à la pénombre, il s’avait y faire pour garder l’avantage, mais je savais aussi qu’il n’en ferait rien. D’autres de l’Ordre le tenaient en laisse et j’avais déjà suffisamment réussit à distillé le doute dans son esprit sur ma vraie place dans l’échiquier aramilan. On ne donne pas le nom de Cassandre si facilement après tout.

Qu’est-ce que tu cherches exactement ? éructa-t’il, reprenant finalement sa vraie voix. J’ai des arrivages de certaines toxines de nos amis de l’ouest, quelques drogues de la Flatterie.” On sentait que se débarrasser enfin de son attitude cajoleuse lui faisait du bien. Un échange plus franc et brutal le changeait de ses habitudes. Au lieu de se caresser les mains et de se courber devant quelques nobliaudes qui se croyaient reines ou quelques gueuses qui se souhaitaient princesse, il était là dans l’attitude où je l’avais connu. Les mains sur les hanches larges, le menton haut et fier, il aurait pu attendre un coup avec l’assurance de pouvoir en amener un plus fort. Je n’irais pas le chercher sur ce terrain. “J’ai besoin de Perce-Gels, qu’importe la forme, dis-je pour couper court, j’aimais très peu le lieu. J’ai mémoire que tu avais un certain coffre qui pouvait en contenir, coffre qui aurait tôt fait de te mettre à mal auprès de nos amis de la Garde… Mais je suis prêt à payer.

Une petite menace, mais une main tendue. Tout le monde pouvait en sortir gagnant facilement, moi plus que tous les autres. Je vous passe des négociations plus ou moins scabreuses, le résultat fut une poignée de main à la surprenante délicatesse. Je reviendrai d’ici une semaine récupérer ma commande déjà payée. Je quittais la pièce sombre, mes yeux se réhabituant au chatoiement et à la douceur des étoffes avant de quitter les lieux. Je m’en étais mieux sorti que ce que je pensais. On s'améliore Arno.



Le lendemain matin, à une heure entre chien et loup, j’attendais la prêtresse près du convoi qui allait nous mener jusqu’au bazar. Un groupe frais, qui avait eu le temps de se reposer depuis une longue traversée de retour de Xandrie. Un groupe expérimenté avec lequel j’avais déjà pu voyager à quelques reprises. Ils étaient tout à fait capables, leur seul défaut étant leur grande prudence, trop grande. Nous allions sans doute mettre un jour de plus pour arriver à destination. Néanmoins avec cette lenteur, on s’assurait un voyage confortable et sûr à travers les dangers du désert, surtout quand c’était le culte de la baleine qui payait pour notre traversée. J’avais quelques affaires à mener au bazar depuis longtemps, c’était l’occasion de les mener à bien.



Dernière édition par Arno Dalmesca le Sam 5 Oct - 19:54, édité 1 fois
Mar 18 Juin - 18:40

Les épices sacrées de Tohorâ

Atahara et Arno


Au lever du soleil, les dunes dorées d'Aramila scintillent sous la lumière naissante. Atahara, vêtue de ses habits de voyage, se tient prête à partir pour l'expédition vers Qadsak. Son dromadaire, chargé de provisions et de monnaies d'échange, attend patiemment à ses côtés. Habituée aux rigueurs du désert, elle se sent confiante dans ses préparatifs. Les vastes étendues de sable et les oasis ponctuées de verdure sont des paysages familiers pour elle.

À ses côtés, se trouve Qadirah, sa fidèle amie et protectrice, une change-peau tortue au regard sage et au corps robuste, parfaitement adapté aux défis du désert. Avec sa carapace ornée de motifs ancestraux et ses mouvements mesurés, Qadirah incarne la force tranquille. Sa présence rassurante donne à Atahara une sécurité supplémentaire pour ce voyage périlleux.

Quand Arno arrive, elle l'accueille avec un sourire chaleureux. "Bonjour, noble marchand. Permettez-moi de vous présenter Qadirah, ma compagne de voyage. Sa sagesse et sa force seront des atouts précieux pour nous."

Elle pose doucement sa main sur la carapace de Qadirah, qui émet un léger grondement, comme un salut silencieux à Arno. La tortue observe le marchand avec ses yeux perçants, évaluant discrètement cet allié potentiel.

Le groupe se met en route, quittant les rues animées d'Aramila pour se diriger vers les étendues infinies du désert. Le silence du matin est seulement interrompu par le doux grincement des selles et le léger bruissement du sable sous les pieds de leurs montures. Atahara se tourne vers Arno, profitant de l'occasion pour en savoir plus sur lui.

"Arno, je suis curieuse de connaître vos ambitions dans cette ville et au-delà. En tant que marchand d'épices, vous devez avoir parcouru de nombreuses contrées et rencontré des personnes fascinantes. Que cherchez-vous vraiment à accomplir à Aramila ?"

Elle écoute attentivement, absorbant ses réponses comme elle le ferait pour les paroles d'un ancien manuscrit. La route se déroule devant eux, une ligne sinueuse de sable, et Atahara continue de questionner avec un intérêt sincère.

"Votre métier vous offre certainement des opportunités uniques. Mais avez-vous aussi un chemin spirituel que vous suivez ? Je me demande si vous ressentez une connexion particulière avec une ou plusieurs divinités. Il y a plusieurs temples dans cette région dédiés aux dieux du commerce. Peut-être que l'un d'eux vous parle plus que les autres ?"

Elle se tait un moment, laissant Arno partager ses pensées. Sa propre vie est profondément ancrée dans la spiritualité, et elle se demande souvent comment les autres perçoivent le divin, surtout ceux qui sont enracinés dans le monde matériel du commerce.

Atahara continue de réfléchir à voix haute, partageant ses propres expériences. "La déesse Tohorâ guide chaque pas de ma vie. Sa sagesse et sa paix sont des phares dans l'obscurité pour moi. Je trouve une grande sérénité dans les rituels et les prières qui honorent sa mémoire. C'est pourquoi cette quête des épices sacrées est si importante pour moi."

Elle se tourne vers les dunes devant elle, sentant la chaleur croissante du soleil sur sa peau. Les défis de la journée à venir s'imposent à elle, mais elle se sent prête à les affronter avec Arno à ses côtés. Le voyage vers Qadsak est long, mais Atahara est déterminée à le mener à bien.

Le temps passe, et le désert dévoile ses secrets à chaque pas. Les discussions avec Arno apportent à Atahara une perspective nouvelle, enrichissant sa compréhension du monde et de ses habitants. Chaque mot échangé est une pierre posée sur le chemin de leur collaboration naissante.

Alors qu'ils approchent de la première oasis, Atahara se sent confiante et optimiste. Le voyage se poursuit, chaque dune franchie les rapprochant un peu plus de leur destination mystérieuse. Les promesses d'aventure et de découverte guident leurs pas vers le bazar de Qadsak, où les réponses aux énigmes des épices sacrées pourraient enfin être trouvées.

Dim 21 Juil - 14:00

Les épices sacrées

Atahara et Arno

Le retour d'une caravane est toujours synonyme de nouvelles, bonnes, mauvaises, utiles, dispensables. Il n'y avait jamais vraiment de règles et on ne savait jamais si on pouvait tomber sur une pépite, une information clé. Alors avec un zèle tout caravanier, je prenais les temps d'écouter tout ce que pouvait dire les marchands sur le retour et les convoyeurs eux-mêmes. Ils étaient lents certes, mais ça voulait aussi dire qu'ils avaient le temps de tout observer et tout entendre. Mon maître m'avait appris quelques uns de ses tours. Être un marchand avant du bon sur ce point que j'arrivais facilement à ce que les gens se confient à moi. Pour le coup, c'était chou blanc, certains continuaient de se lamenter de la lenteur du projet de ligne ferroviaire entre Xandrie et Opale, mais globalement nos chers marchands du désert, eux, y voyaient un intérêt certain. Tant que cette ligne n'existerait pas, il y aurait toujours des marchandises qui passeraient en direct depuis Aramila et la Contade. Trop cher de passer par les dirigeables opalins ou même nos propres ballons.

Sourire entendu avec eux, il fallait savoir accepter la lenteur et apprécier l'attente pour vraiment acquérir la rareté. Rareté à laquelle il était facile de mettre un prix plus élevé.

La prêtresse de la baleine se présenta peu après, accompagnée. Je haussais un sourcil en voyant la carapace couverte de motifs. "Bonjour dame Qadirah. Vous ne m'aviez pas parlé d'une invitée en plus, murmurais-je à la tritonne, vous avez prévu de quoi se débrouiller pour elle durant le voyage ?" On peut imaginer qu'une personne de plus ou de moins dans une telle expédition n'est pas vraiment un problème. La deuxième est plus vraie, surtout avec cette troupe. C'était une mécanique bien huilée, des quantités calculées au kilogramme près pour assurer le trajet sans s’alourdir inutilement.  "Dans le doute, je vais prévenir le transporteur, mais j'ai peur que ça vous coûte cher de faire ça en urgence si c'est le cas..." Les astras sont bien le nerf de la guerre.

La ligne de charrettes se mit en branle, s’étirant en avançant dans les premières dunes. La ville dans le dos, le soleil dans les yeux qui aplatissait les courbes du traitre désert. La forme était toujours la même avec les Flèches des sables, qui portaient très mal leurs noms vu l'avancée tranquille de leur tracé. Une tête en diamant avec trois caravanes du groupe de convoyeur, un placement des plus gros attelages sur la gauche, de là où venait le vent, et des plus légers voir uniquement des montures rapides sur la droite qui assurait la liaison du tout et faisaient des rondes. Au milieu de ça, nous, marchands et voyageurs, évoluions dans une bulle de relatif répit. Une sorte d'oasis mobile en sommes, ça pouvait coûter plus cher certes, mais je me disais qu'une tritonne devait apprécier de pouvoir s'hydrater et se mettre au frais, si t'en est qu'on pouvait appeler ça comme ça, à l'ombre d'une caravane richement ornée.

Mül était également à lui-même, le Tamanain avançant à un rythme tranquille, sa tête se tournant parfois vers quelques points à l'horizon, sans doute des plantes du désert qui pouvaient l'intéresser. Je lui ramenais la bride vers l'avant pour qu'il ne s'éloigne pas du chemin tout en conversant avec la prêtresse. Je m'attendais à ce genre de discussion, mais il était toujours bon de faire un peu d'introspection, surtout quand on a du temps à tuer. Oui, c'était plutôt une distraction qu'une vraie remise en question, mais on fait ce qu'on peut. "Hum, lançais-je, hésitant. Je n'irai pas jusqu'à dire que j'ai de l'ambition, la ferme appartient en réalité à mon frère qui m'en laisse la gestion. J'ai une mère et un petit frère et une sœur à nourrir pendant que j'assure une rente à l'ainé. J'imagine que je veux surtout qu'ils puissent vivre dignement de leur labeur donc je travaille à ça sur les marchés."

Ça vous semble un peu plat ? C'est pourtant ça qui m'avait toujours motivé, en dehors de mes activités qui prennent aujourd'hui le dessus. Sans doute que sans ce genre d'élément perturbateur, ce serait la vie d'Arno aujourd'hui. Aurait-elle value la peine d'être raconter ? Certainement que oui. Je me l'imagine parfois, ce qu'elle aurait été. Un père moins double, un frère moins ambitieux. Avec des moins on aurait fait des plus et notre chemin aurait été bien différent. A quoi bon penser à des chemins qui n'existent plus ? S'ils ont jamais existé...

Passons, balayons. Aramilans nous étions et les questions sur la foi arrivaient forcément rapidement. "Je dois me confesser sur ce point, avouais-je. J'ai une pratique assez erratique malheureusement. Comme vous le dites, les déplacements, les calendriers changeant n'aident pas. Oh, je ne me cherche pas d'excuse soyez en sûre... Superstitieusement je continue à faire bruler des cierges pour que Fanthret veille sur la ferme et ma famille quand je ne suis pas là. À côté de ça, j'adresse le plus souvent mes prières à Lugrilen, mais c'est un peu égoïste... Et vous ? Vous avez mentionné la déesse Tohorâ c'est bien ça ?"

J'écoutais les envolées de la prêtresse sur sa foi, chevillée au corps. Je ne comprenais pas toujours très bien l'utilité des épices, mais si c'était important pour elle, alors je ferai en sorte que sa vision se concrétise. Si on peut apporter un peu de sérénité en y trouvant un intérêt.

Première oasis du soir, le campement devait se mettre en place avant qu'il fasse nuit noire. Nous aurions pu déjà être à la prochaine si les Flèches n'avaient pas préférer louvoyer à un moment pour éviter une meute de Yearrk. Dans ces oasis, même si quelques bâtisses en dur subsistent, l'essentiel est comme nous, des groupes de voyageurs qui viennent chercher refuge et de l'eau. Tout ce beau monde se mélangeait joyeusement au coin du feu pour écouter les histoires des uns et des autres. Les conducteurs s'entretenant de ce qui les attendaient sur la suite de la route.

Je me retrouvais avec la prêtresse et son amie, Mül accroché pas loin se sustentait de quelque plante qui poussait en bord d'eau. Nos échanges avaient émaillés la journée et l'avancée. "Vous avez parlé de Tohorâ et c'était déjà le cas lors de notre dernière rencontre, me rappelais-je. Je connais très peu vos dieux et légendes, même si j'ai quelques amis tritons à Doulek, ce n'étaient pas les plus finots quand il s'agissait de parler de vos idoles personnelles... Je suis curieux moi aussi, votre peuple suit-il majoritairement ses préceptes ? Je crois que certains ont fait le choix de se rattacher au panthéisme, mais peut-être est-ce plus par commodité ou difficulté à trouver des lieux pour entretenir leur foi."

Candidement, je voulais en savoir plus sur les tritons, autant par curiosité que par intérêt pour la culture nos alliés des mers.



Dernière édition par Arno Dalmesca le Sam 5 Oct - 19:55, édité 1 fois
Ven 2 Aoû - 23:24

Les épices sacrées de Tohorâ

Atahara et Arno


Le soleil monte lentement à l'horizon, inondant le désert de ses premières lueurs dorées. Atahara et Qadirah, sa fidèle change-peau tortue, attendent avec calme le départ pour Qadsak. Lorsque Arno arrive, il salue Qadirah avec une pointe d'humour. Atahara sourit en entendant sa remarque et répond avec douceur :

"Je n'avais pas mentionné Qadirah, c'est vrai. Mais en tant que change-peau tortue, elle a des besoins très limités pour voyager. Nous avons apporté ce qu'il nous faut en provisions d'eau et de nourriture, et nous avons déjà confié cela au transporteur. Ne vous inquiétez pas pour les coûts supplémentaires."

Le marchand d'épices acquiesce, et bientôt, ils se mettent en route, laissant derrière eux les bruits et l'agitation d'Aramila. Le désert, avec ses étendues de sable infini, les enveloppe d'une tranquillité presque mystique. La prêtresse, habituée aux voyages dans ce paysage aride, marche avec assurance, le regard tourné vers l'horizon.

Alors qu'ils avancent, Arno commence à parler de ses responsabilités et de sa famille. Atahara écoute avec attention, touchée par la sincérité de ses paroles.

"Vous êtes un homme de grand cœur, Arno," dit-elle après un moment de réflexion. "Il est noble de subvenir aux besoins de votre famille et de travailler si dur pour leur assurer une vie digne. Votre frère a de la chance de vous avoir à ses côtés."

Le voyage continue, et la conversation se tourne vers les pratiques spirituelles. Arno évoque ses prières à Fanthret et Lugrilen, admettant une certaine irrégularité dans ses pratiques.

"Il n'est jamais facile de maintenir une vie spirituelle constante, surtout avec un métier aussi exigeant que le vôtre," répond Atahara avec compréhension. "Votre dévotion, même irrégulière, montre votre sincérité. Quant à moi, en effet, je suis dévouée à Tohorâ, la déesse baleine de la sagesse et de la paix. Elle guide mes pas et éclaire mes décisions. Tohorâ représente la sagesse infinie des océans et la paix intérieure que nous devons tous chercher à atteindre."

Alors qu'ils atteignent la première oasis, un lieu de repos et de répit, la tritonne se réjouit de l'ombre des palmiers et de l'eau rafraîchissante. Le groupe installe son campement pour la soirée et la nuit. La discussion entre Atahara et Arno reprend à la lumière des étoiles.

"Tohorâ est l'une des nombreuses divinités vénérées sur mon île natale, Améthyste," commence la prêtresse, une lueur de nostalgie dans les yeux. "Les tritons de différentes régions ont leurs propres croyances et divinités. Sur Améthyste, nous honorons aussi Honu, la tortue géante, Paru Nohu, la rascasse volante, et Te Fee, la pieuvre de nacre. Chacune de ces divinités a ses vertus et ses ombres, mais elles partagent toutes un rôle sacré : celui de psychopompes, guidant les âmes dans leur dernier voyage."

Elle marque une pause, laissant le murmure de l'oasis et le chant des insectes nocturnes emplir le silence. "Il est vrai que certains tritons préfèrent se tourner vers d'autres cultes, souvent par commodité ou par manque de lieux de culte spécifiques. Mais pour moi, et pour beaucoup de ceux de mon peuple, ces divinités restent essentielles à notre identité et à notre spiritualité."

Le lendemain matin, le soleil se lève à nouveau sur le désert. Atahara, Qadirah, et Arno se préparent à reprendre leur voyage. La tortue marche lentement, mais sûrement, fidèle à son habitude. La tritonne, à côté d'Arno, poursuit la conversation avec un intérêt sincère et une curiosité bienveillante.

Leur chemin les mène inexorablement vers Qadsak, chaque pas rapprochant un peu plus le groupe de leur destination. Le désert semble à la fois infini et accueillant, une toile de fond parfaite pour les réflexions profondes et les échanges intimes qui marquent ce voyage.
Dim 15 Sep - 18:43

Les épices sacrées

Atahara et Arno


Si j’aimais autant ces haltes salutaires, c’est aussi parce que la solidarité de l’instant y primait toujours sur les calculs politiques ou les comptes d’apothicaire. Il y avait une part de superstition dans ça, le fait d’aider son prochain ne pouvait qu’attirer le regard d’approbation des Douze. Surtout, je pensais que le désert était déjà autant une toile des possibles que le pire des adversaires envisageables. Les bassesses devaient attendre d’être à l’abri de quelques murs pour ce faire. Dans l’immensité, seul le groupe uni pouvait faire rempart.

C’est en écoutant la tritonne et son amie à carapace qui hochait la tête que je comprenais mieux l’immensité que le peuple marin cherchait aussi à définir par ses propres divinités. La main jouant dans le sable, le feu crépitant devant mes yeux, je sentais plus que je ne voyais Mül dans mon dos. La bête devait être en train de farfouiller dans les broussailles à la recherche de quelques herbes à son goût. Dans ma tête ce sont les images fantasmées des dieux d'Améthyste que je tentais de me figurer.

Ces moments se succédaient jour après jour, si je prenais les informations sur les coutumes tritonnes avant tout pour pouvoir possiblement m’en servir un jour. Je devais leur reconnaître une spiritualité tout aussi riche que la nôtre, dans ses bons comme dans ses mauvais. Chaque halte nous éloignait un peu plus de l’océan, les oasis sur le chemin devenant de plus en plus nécessaire.

Arriva un moment de bascule, celui où nous étions trop loin d’Aramila et assez proche de Qadsak pour que tout autre convoi que celui mené par les Flèches choisisse de presser le pas pour éviter une énième nuit dans le sable. C’est ce matin-là que je l’avais vu. Comme souvent, je me réveillais avant le lever du soleil, histoire d’aller tailler le bout de gras avec quelques soudards en fin de garde. Les feux n’étaient alors plus que des braises éparses et des rires bourrus s'échappaient quand, transis de froid par la rosée, quelques novices venaient quémander une couverture de plus ou s’asseoir près des restes mourant des foyers.

La première traversée du désert est toujours un baptême. Personne n'est jamais réellement prêt avant de se retrouver face à lui. Il n’était pas cruel, il était simplement. Parfois, il pouvait être d’une beauté insolente, ces étendues silencieuses comme aujourd’hui. Nous étions là, seule caravane sur cette petite oasis, sans autre âme qui vive. Un trait d’or se découpa à l’horizon et c’était comme s’il souhaitait me montrer quelque chose.

Étendue d’encre en train de devenir ocre, il y eut cet instant suspendu, cet instant entre lui et moi où le feu solaire fit apparaitre les étoiles au sol. Quelque hérétique savant epistote vous expliquera que c’est la réverbération de l’astre sur la rosée qui recouvrait le sable qui expliquait ce miroitement. Ils ont bon dos en haut de leurs tours d’ivoire.

Ils ne sauraient pourtant être plus loin de la vérité, c’était de la magie. Non pas quelque tour joué par la Malice ou un sortilège, mais une magie de l’image et de l’instant. Un instant de poésie.

Sans doute que je n’étais pas le seul à l’avoir vu dans le campement qui s’éveillait, sans doute d’autres avaient capté l’instant, mais est-ce qu’ils l’avaient saisi ? Est-ce qu’ils s’en étaient rendu compte ou bien la force de l’habitude obscurcissait la magie ? Je me rapprochais du bivouac de mes compagnons de route. Au loin, les premiers mirages des Pyramides apparaissent comme des phares à l'horizon.

Nous arriverons à Qadsak aujourd’hui, annonçais-je. La traversée est bientôt finie.” Je retournais sangler mon tamanain et m’assurer que tout était en ordre avant la dernière étape de la route. Dans quelques heures, nous serons au milieu de la foule compacte, bigarrée et individualiste du bazar, il ne serait alors plus l’heure de l’introspection ou de l’esprit de corps. Le réel devait reprendre le dessus, comme toujours, je sentais ma peau tirer et les crevasses sur mes lèvres n’attendre qu’une inattention, une humectation, pour me rappeler à leur bon souvenir.

Le désert donne, le désert prend. Chaque voyage est un sacrifice de moments où le sable nous polit jusqu’au jour où, nous aussi, nous serons de ses instants brillants.

C’était sans doute ce en quoi je croyais le plus, peut-être même plus qu’en les Douze eux-mêmes, le désert est le lieu où le divin s’exprime.
Dim 22 Sep - 16:22

Les épices sacrées de Tohorâ

Atahara et Arno


Le désert s'étend à perte de vue sous le ciel brûlant, et chaque pas rapproche Atahara de son objectif. Après plusieurs jours de marche, entrecoupés de haltes nocturnes aux oasis, elle sent la fatigue dans ses membres, mais aussi l'excitation croissante à l'idée d'arriver à Qadsak. Le matin est encore frais, et la lumière douce baigne les dunes ondulantes alors qu'Arno annonce enfin la fin du voyage imminent. La prêtresse, d'un geste de tête, exprime sa satisfaction et jette un coup d'œil complice à Dame Qadirah, sa fidèle alliée.

"Nous touchons au but, Dame Qadirah. Bientôt, nous serons dans le cœur du Bazar de Qadsak," murmure-t-elle à voix basse, un sourire discret ornant ses lèvres. La change-peau tortue, lente et imposante, acquiesce avec un profond grognement, comme pour marquer son accord silencieux.

La dernière traversée est éprouvante, mais la vision de Qadsak à l'horizon réchauffe le cœur d'Atahara. La grande oasis surgit, bordée de petites maisons aux toits plats et de tentes multicolores. L'air y est plus frais, chargé de la senteur des palmiers et du bruissement d'une vie commerciale intense. Bien que l'endroit semble modeste, la tritonne sait que cet aspect humble dissimule la véritable nature du lieu. Ses yeux s'émerveillent en silence, tandis qu'elle observe la foule bigarrée, les étals de marchands étendus à perte de vue, et surtout l'agitation qui émane de ce carrefour du désert.

"Nous y sommes enfin," murmure-t-elle pour elle-même, ses yeux suivant le mouvement incessant des gens autour d'elle. "Regarde, Qadirah, c'est ici que tout se trouve, et pourtant... tout n’est pas ce qu’il semble être."

Le bazar de Qadsak est un lieu légendaire, où légalité et illégalité se confondent, un espace où les règles sont floues et les prix variables selon la négociation. Atahara reste pourtant sur ses gardes. Elle sait qu'ici, les plus faibles se font dévorer par les plus rusés. La rumeur des marchandages enflamme l'air, entrecoupée par les voix des vendeurs criant leurs marchandises. Des tapis somptueux, des poteries antiques, des pierres précieuses, tout est à vendre dans ce marché foisonnant, mais la prêtresse sait que ce ne sont pas ces trésors-là qu'elle cherche. Son objectif est plus rare, plus sacré.

Elle se tourne vers Qadirah, son regard se durcissant légèrement. "Nous devons rester vigilantes. Ne montre aucun signe de faiblesse, mais ne soyons pas agressives non plus. Notre but est clair : les épices sacrées. Nous sommes ici pour cela, rien de plus."

Qadirah, dans sa forme imposante, répond d’un hochement lent, les yeux brillants d'une lueur de compréhension. La tortue changeforme est prête. Atahara ressent un lien profond avec son alliée, une protection silencieuse qui l'accompagne, et cela renforce sa détermination à ne pas céder à l'inquiétude.

Le bazar bruisse de vie autour d'eux. La tritonne observe chaque détail : les hommes d'affaires qui passent, leurs visages marqués par l'expérience de nombreuses négociations, les artisans locaux présentant leurs œuvres avec fierté, mais aussi les regards furtifs des marchands plus obscurs, ceux qui dissimulent sous leurs tentes des objets et artefacts d'une nature plus secrète. C'est ici, au milieu de ce tourbillon, qu'elle espère trouver ce qu'elle cherche.

"La route fut longue, mais nous sommes prêtes," murmure Atahara, parlant à la fois pour elle-même et pour Qadirah. Son regard balaye les étals avec une précision méticuleuse. Elle sent que le moment est venu d’agir avec sagesse et de se fier à son instinct.

Le groupe commence à se disperser dans la foule dense de Qadsak. Arno s'occupe de ses affaires, se fondant aisément dans ce chaos organisé. Mais Atahara, elle, reste avec Dame Qadirah. Elle avance lentement, ses pas mesurés, ses yeux cherchant le marchand ou l’étal qui détiendrait la clé de sa quête. Ce n'est pas l'endroit où l'on se précipite, mais plutôt un lieu où chaque décision doit être calculée, chaque échange soigneusement étudié.

Elle inspire profondément, sentant les odeurs d'épices qui flottent dans l'air, un parfum de promesse mêlé au danger latent. "Nous allons trouver ce que nous cherchons, Qadirah," dit-elle d'une voix calme mais résolue, avant de s'enfoncer plus profondément dans le cœur du Bazar, prête à négocier avec les marchands du marché noir.
Mar 24 Sep - 9:42

Les épices sacrées

Atahara et Arno


Je refermais la gourde d’un geste sûr après que Mül a pu boire tout son saoul. Les derniers instants étaient toujours les plus difficiles, pour tout le monde. On voulait arriver vite en cherchant à battre dans sa course le soleil. Sauf que c’était perdu d’avance. Un premier mirage de Qadsak avait surpris les bleus, mais c’était bon signe sur la route qu’on empruntait.

De quelques rares curieux, à d’autres groupes importants en transit, notre solitude s’abandonna aux flots du bazar. Sans réelle cérémonie si ce n’est la finalisation de quelques contrats de travail et serrage de mains, le convoi se disloquait. Je voyais bien que la fin de la route avait été dure pour la tritonne, peut-être que son amie sous sa forme animale parvenait à mieux encaisser.

L’épreuve était finie, la ligne d’arrivée, figurée par diverses petites bâtisses en dur et autres tentes colorées, dépassées. Ne restait que ce qui devait être une promenade de santé, n’est-ce pas ? Nouvelle erreur de novice, le bazar n’hésiterait pas à avaler les candides. Il était bien simple de se retrouver avec une bourse vide en quelques pas, si on ne vous l’avait pas dérobé avant ça.

J’adorais cet endroit.

Certainement que ce côté opaque y jouait, ce n’était même plus un secret de polichinelle. Tout le monde le savait, mais personne n’arrivait vraiment à définir où commençait l’illégalité ici. Chacun était libre de se faire son avis et la Voix du Bazar veillait au grain. Peut-être que c’était ce dédale mouvant de toiles colorées et d’allées obscures, peut-être que c'étaient les odeurs plus ou moins identifiables ou quelques hétéroclites artefacts anciens au milieu des babioles récentes. On pouvait tout trouver et tout pouvait nous trouver.

J’avais peu à faire au bazar, j’étais vraiment venu pour accompagner la prêtresse et récupérer un petit pécule dans l’opération. Une fois la tritonne et son amie reparties, je commençais à dériver au milieu de la foule. Ça me laissait un peu de temps pour prendre la température, voir ce qui se disait. Échanger quelques messages et nouvelles. L’habitude et la pratique. Le désert et ses instants étaient déjà loin. Le bazar et sa furie emplissaient tout l’espace.

Je me laissais submerger et héler à travers la foule par quelques receleurs véreux ou autres brocanteurs droits dans leurs bottes, ils auront sûrement échangé leurs rôles d’ici ma prochaine venue. Je passais devant certains étals que j’avais eu du mal à retrouver, mais jamais je n’affichais un air perdu pour autant. Messes basses et patois marchands, j’en apprenais plus sur ce qu’il pouvait se passer au nord et dans les autres contrées.

Car la plus grande richesse de Qadsak, c’était les informations qui s’y entassaient.

Je n’étais pas le seul à jouer le jeu ici, certainement pas le seul Caravanier ni le seul espion de quelque autre nation. Nous étions dans un véritable nid et nous veillons tous à maintenir une trêve fragile en ces lieux. Ce que j’apprenais sur la situation à Xandrie ou les dernières manigances du Magistère, d’autres pouvaient bien les connaitre. Comme ils auraient pu apprendre quelques secrets aramilans. Il fallait accepter de perdre pour gagner. On perdait beaucoup ici.

Je me perdais volontairement dans les passages de quelques marchands opalins, c’est eux qui avaient les jouets les plus amusants. Bien sûr, je faisais la moue devant ce qu’on me proposait, observant du coin de l'oeil quelques échanges de marchandises sans doute volées. Je rentrais dans quelques tentes obscures pour partager le thé, y trouver des lettres scellées. Rien de bien fou.

Le nez au vent lourd, je retournais vers les convois qui se formaient comme ils se délitaient, fuyant par la même ertains regards qui commençaient à s'arrêter sur votre serviteur. Quelques chefs d’expéditions et leurs troupes attiraient le plus gros des voyageurs, que ce soit par leurs équipements, leurs nombres ou leur renommée. Ne restait que les miettes aux plus petites expéditions, mais les tarifs étaient plus compétitifs. J’essayais de reconnaitre quelques visages. J’en accrochais un, ancien second d’une bonne compagnie, qui avait décidé de prendre son envol avec sa propre troupe. On se mit rapidement d’accord sur un prix pour le trajet retour. Il partirait demain avant l’aube.

Je repartais dans le bazar à la recherche d’Atahara et de son amie pour l’informer de la nouvelle et voir si elle avait trouvé l’objet de sa quête. Je trouvais rapidement le quartier des épices, c’est par ici que j’avais commencé mes premières incursions à Qadsak, fort des produits familiaux. Je me frayais un chemin jusqu'à retrouver les voiles qui entouraient la prêtresse à branchies.

Alors, vous avez trouvé votre bonheur ?


Dernière édition par Arno Dalmesca le Sam 28 Sep - 8:45, édité 1 fois
Sam 28 Sep - 8:33

Les épices sacrées de Tohorâ

Atahara et Arno


Atahara avance prudemment à travers le marché d'épices, où les odeurs entêtantes la submergent. Chaque étal qu'elle croise exhale des senteurs puissantes : des notes sucrées de cannelle, des parfums plus âcres de poivres lointains, et les effluves musqués des herbes médicinales. Ses narines frémissent sous ce déluge olfactif, et elle garde son calme, habituée à discerner l'authenticité dans ce chaos de senteurs et de couleurs vives. Elle sait que derrière la beauté des étals, se cachent aussi des pièges : des contrefaçons, des produits altérés ou inefficaces.

Ses yeux balayent les couleurs chatoyantes des épices empilées avec art. Le rouge éclatant des baies d'Ophrite, le jaune vif du safran des sables, le vert intense des feuilles de Zranthé... chaque teinte semble avoir son propre éclat sous le soleil brûlant de Qadsak. Mais la prêtresse ne se laisse pas distraire par ces apparences éclatantes. Elle sait que la vraie valeur se cache souvent derrière des détails plus subtils.

Près d'un étal, elle remarque une marchande à l'air exubérant. La femme est âgée, ses cheveux blancs éparpillés autour de son visage ridé, et son sourire trop large pour être sincère. Atahara s'arrête, son regard accroché par une jarre contenant une poudre bleutée : la poudre de perce-gel. Elle la reconnaît immédiatement, cette rare fleur qui annonce la température froide, et dont les propriétés purificatrices sont appréciées des herboristes.

"Ah, regardez donc cela !" lance la marchande en direction de la tritonne, d'une voix pleine d'entrain. "La poudre de perce-gel, l'une des plus rares merveilles de ce désert ! Vous en aurez besoin pour vos voyages, surtout si vous vous aventurez dans des terres glacées. C’est bien plus précieux que vous ne le croyez !"

Atahara reste silencieuse un instant, pesant chaque mot. Elle connaît déjà la valeur de cette poudre, et elle n’est pas dupe face aux techniques de vente de la vieille femme. Elle s'approche, un sourire fin aux lèvres, puis elle commence à négocier. Avec calme et précision, elle fait baisser le prix de manière significative, jusqu'à ce que la marchande, après un soupir dramatique, finisse par céder.

"Je sais ce que je tiens entre les mains, et je vous assure que ce prix est le juste,"  déclare la prêtresse avec fermeté, prenant finalement la jarre et la rangeant dans le sac attaché au dos de Dame Qadirah.

La transaction effectuée, elle poursuit ses pérégrinations dans le bazar, ses sens toujours en alerte. Alors qu’elle parcourt un autre étal, une étrange lueur capte son attention. Un pot à l’aspect ordinaire, mais la poudre qu’il contient est tout sauf commune : la poudre de Perséphone. Atahara fronce les sourcils, son instinct lui murmurant la prudence. Elle observe la substance lumineuse avec méfiance, sachant pertinemment à quel point cette plante est dangereuse. Fleur luminescente poussant sur les cadavres, la Perséphone n'est pas une simple curiosité botanique. Elle est porteuse de mort et de folie.

"Une belle fleur, n’est-ce pas ?"  murmure-t-elle pour elle-même, son regard captivé par les reflets étranges émanant de la poudre. "Mais il n'y a pas de beauté sans danger…"

À cet instant, Arno surgit à ses côtés, brisant sa concentration. "Alors, vous avez trouvé votre bonheur ?"

La tritonne hoche la tête, jetant un regard vers lui. Elle baisse légèrement la voix pour que le marchand à l'étal ne puisse l'entendre. "Arno, je suis tombée sur de la poudre de Perséphone,"  murmure-t-elle, sa voix teintée de méfiance. "Mais je ne sais pas si c’est authentique ou une simple contrefaçon. Tu es plus familier de ces produits rares, peux-tu me dire si cette poudre est réelle ou si ce marchand essaie de m’arnaquer ?"

Elle garde son ton bas, préférant ne pas éveiller les soupçons du marchand qui pourrait augmenter ses prix ou se montrer réticent à négocier. Atahara observe attentivement la réaction d'Arno, guettant un signe, un détail qui pourrait l'aider à comprendre si elle doit s'engager dans cette transaction ou non.

Dame Qadirah, impassible, reste à ses côtés, comme une ombre protectrice. Le poids de la poudre de perce-gel dans son sac est un rappel du succès de la première négociation, mais elle sait que la Perséphone est d'une toute autre nature. Elle ne peut pas se permettre une erreur ici, pas avec une plante aussi dangereuse.

La prêtresse attend la réponse d'Arno, espérant que son compagnon de route pourra éclairer sa décision. Le bazar continue de vibrer autour d'eux, bruyant et chaotique, mais pour Atahara, chaque seconde compte. Leur voyage n'est pas encore terminé, et Qadsak, avec ses promesses et ses dangers, ne fait que commencer à dévoiler ses secrets.
Jeu 3 Oct - 20:48

Les épices sacrées

Atahara et Arno


J’écoutais les messes basses d’Atahara en regardant de biais vers l’étal du marchand. Ce n’était pas temps les poudres que j’observais, c’était plutôt le bonhomme. Des chicots manquants sur un sourire torve, les mains qui s’agitent. Quelques bijoux de bonnes factures et d’autres en toc. Il ne restait que deux options.

Soit c’était un brigand, soit c’était un menteur.

Dans le premier cas, ça pourrait m’aller, dans le second, m’alerter. Je comprenais à présent ce que la prêtresse cherchait comme plante, ou plutôt comme base de son encens. Par les Douze, quel genre de préparation nécessitait pareil danger ? J’évitais de planter mes yeux dans les siens. Peu me chaut de savoir si les différentes plantes de la recette s’additionnaient bien. J’avais déjà eu l’occasion de croiser des Perséphones, je me rappelais même d’une terrible torture où on avait employé la plante.

Voyez-vous, certains tortionnaires trouvent un malin plaisir à briser leurs victimes avant de leur faire passer l’arme à gauche. Ce n’est pas le cas de votre serviteur bien sûr, mais si ça l’avait été… Sans doute que j’aurai trouvé une certaine cruauté à coincer ma victime au milieu d’un champ rempli de la plante bulbeuse. Peut-être que j’aurais forcé ma cible à les éclater une par une avec quelque menace à ses proches. Peut-être que le maximum que j’avais vu c’était cinq bulles éclatées avant que le mort en sursis ne tombe, assailli par le trop-plein des émotions.

J’aurais eu un sacré respect pour la performance, mais comme je vous dis, ce n’est jamais arrivé, bien sûr.

Je regardais aussi la poudre brillante, il y avait un côté hypnotique, mais je ne l’avais jamais vu sous cette forme. “Vous savez, c’est une plante très dangereuse, murmurais-je sur le ton de la prévention. Vous êtes sûr que c’est ce que vous cherchez ?” Drôle de déesse qui s'acoquine de ce genre de plante. Le vendeur regardait à droite et à gauche, par petits coups d'œil, il était tendu malgré un visage qu’il voulait affable. Je saurais pas dire si l’un de ses yeux était mort ou simplement plus clair que l’autre. Un peu d’inquiétude, je sentais qu’on était face à quelque chose officiellement dangereux… et il était en train de se demander si on n’allait pas lui jouer le coup de la Garde Sacrée en visite. En même temps, voir un troisième larron débarqué comme ça, puis les échanges à voix basse et les œillades appuyées, on aurait pu croire quelque mauvais vaudeville.

Y avait bien un coup à jouer, mais je n’étais pas là pour l’arnaque. Autant être franc-jeu. “Si c’est bien la plante, j’avoue ne l’avoir jamais vu sous cette forme de poudre. Soit c’est sur la plante qu’on a réussi à la réduire sous cette forme… Soit on a récupéré des graines par je ne sais quel miracle dans des corps.” Dans tous les cas, c’était franchement sordide, quel sombre personnage irait volontairement inoculer cette plante à sa victime ? Vous n’y pensez pas… Je me tournais vers le boutiquier autoritaire.


Comment tu as obtenu ça ? Si c’est vraiment ce que je crois…
- Exact, mon bon zire à l’oeil, zozotait-il. Ze n’est pas évident, vous zavez bien compris.
- Curieux qu’un gars aussi tremblant que toi ait la main assez sûre pour l’opération.
- Ze ne suis qu’un modeste vendeur, zans tous les détails de fabrication. Ze que ze sais, c’est que z’en aie toujours très peu.
- Arrête ton char, vu la quantité dans ton sac doit y en avoir pour plus d’une vingtaine de plantes. Au bas mot. Je me rapprochais de sa face, au-dessus de l’étal, ça sentait quelque onguent fort onéreux, sans doute qu’au bout d’un moment l’odeur des épices était trop entêtante. Combien pour t’en débarrasser ? Ça serait pas de chance que certaines personnes apprennent qu’il y a quelque profanateur de sépultures ici… Eoline serait si triste....

J’adorais cet endroit.

Il n’y avait vraiment qu’ici que je pouvais jouer à ce point. À Qadsak, celui qui gagnait le plus, c’était celui qui parvenait à faire croire à l’autre qu’il lui rendait presque service. Je le voyais bien froncer les sourcils, calculer et marmonner. Néanmoins, il sentit bien qu’il était sur la corde raide. C’était un de mes rares talents, j’insufflais la vérité dans mon ton, suffisamment pour qu’il sente que je racontais pas des bobards. Il finit par annoncer un prix.

C’est cohérent, annonçais-je à la tritonne. J’espère que ça vous va aussi.
Sam 5 Oct - 10:51

Les épices sacrées de Tohorâ

Atahara et Arno


Atahara fixe intensément le pot de poudre de Perséphone, son esprit en alerte, mais ses émotions en équilibre, comme toujours lorsqu’elle contemple une décision spirituelle d’importance. Arno, à ses côtés, semble mesurer la gravité de la situation, et son avertissement tombe avec un poids palpable.

"Vous savez, c’est une plante très dangereuse, vous êtes sûr que c’est ce que vous cherchez ?"

La prêtresse hoche doucement la tête, ses yeux fixés sur la poudre luminescente. Le danger ne l’effraie pas, car elle sait que la vie spirituelle est souvent bordée d’incertitudes et de risques. Elle respire profondément avant de répondre avec sagesse et calme, comme il sied à une prêtresse de la déesse Tohorâ.

"Oui, Arno, si c’est bien de la poudre de Perséphone, c’est exactement ce qu’il me faut. Cette poudre permet à l’encens que je fabrique d’aider à transcender les limites de l’existence, de voir au-delà des voiles de la vie et de la mort, dans la paix et la sérénité. Elle ne doit pas être utilisée à la légère, bien sûr, mais pour les méditations sacrées, elle est sans égale."

Arno semble toujours méfiant, mais il l’écoute avec respect. "Si c’est bien la plante, j’avoue ne l’avoir jamais vue sous cette forme de poudre. Soit on a réussi à réduire la plante entière en cette poudre… Soit, ce sont des graines récupérées dans des corps."

À ces mots, Atahara fronce légèrement les sourcils. Elle croise les bras devant elle, réfléchissant, mais elle ne laisse pas ses émotions troubler sa tranquillité. En tant que prêtresse, elle connaît les dangers et les mystères de la vie après la mort. Le lien entre cette fleur et les corps des défunts n’est pas anodin, et elle le sait.

"Si c’est le cas,"  dit-elle, son ton empreint de respect pour la vie sacrée, "cela pourrait bien poser des questions d’éthique. Manipuler les restes des défunts sans respecter leurs esprits est un chemin dangereux. Mais... si cela a été fait dans le respect des rituels appropriés, alors cette poudre peut porter en elle des énergies qui ne sont pas forcément malfaisantes. Je dois en être certaine avant de l’utiliser dans mes rituels."

Arno semble hésitant, mais il finit par s'adresser directement au marchand. "Comment tu as obtenu ça ? Si c’est vraiment ce que je crois…"

Le marchand, tremblant légèrement sous le regard perçant d'Arno, zozote sa réponse, visiblement mal à l'aise. Atahara observe la scène avec attention, laissant Arno gérer la situation pour le moment. Elle sent que ses propres mots, pour l'instant, doivent être choisis avec soin.

Après un échange tendu où Arno utilise ses talents de négociateur, le marchand cède. La tritonne n’intervient que lorsque l’accord est finalisé. La poudre, aussi précieuse que dangereuse, est enfin sienne. Sans perdre de temps, elle s’empresse de récupérer le pot et de le dissimuler dans le sac accroché à la large carapace de Dame Qadirah. Son geste est calme, maîtrisé, mais rapide.

"Merci, Arno,"  dit-elle avec sincérité. "Votre aide m’a été précieuse. Cette poudre... Elle portera ses fruits dans mes cérémonies. Tohorâ guide mes pas, et je suis persuadée que c’est pour une raison sacrée que cette rencontre a eu lieu aujourd’hui."

Arno semble satisfait du dénouement, et son dernier commentaire l’amène à poser la question finale : "C’est cohérent, j’espère que ça vous va aussi."

Atahara sourit doucement, la paix rayonnante de son visage, comme une lueur intérieure. "Oui, cela me convient parfaitement. Cette journée a été marquée par des énergies puissantes, mais je ressens que tout est à sa place. Merci encore pour votre soutien. Vous avez été un compagnon fiable, et pour cela, je vous en suis reconnaissante."

Elle se tourne légèrement, son regard embrassant la foule qui continue de fourmiller autour d’eux. "J’aimerais vous offrir un repas en signe de remerciement, Arno. Vous avez sûrement un endroit agréable en tête dans cet endroit curieux. Nous pourrons déjeuner tous les trois, vous, moi et Dame Qadirah, dans la tranquillité que nous avons bien méritée."

La prêtresse attend la réponse d'Arno, les sens toujours en alerte, mais l’âme apaisée, prête à partager un moment de repos avec ses compagnons dans la ville de Qadsak.
Sam 5 Oct - 19:50

Les épices sacrées

Atahara et Arno


Accord déséquilibré, je n’écoutais plus que d’une oreille le zozoteur marmonner et ravaler son fiel. Il devait être content de pouvoir se débarrasser du risque, mais il n’en avait pas tiré la somme qu’il aurait pu espérer obtenir de quelque nigaud du Magistère. Je regardais le pot scellé passer de main en main, et de main en carapace. J’apercevais rapidement de la poudre de Perce-gel, doublant les quantités avec celle qui attendait à Aramila.

Avec une sérénité tranquille qu’elle n’avait jamais quittée, dame Qadirah ne moufta pas et conserva sa superbe. Le chargement sur le dos, elle conservait un équilibre certain dans la foule mouvante du bazar. Je gardais pour moi mon apriori sur l’utilisation de la poudre. Qui étais-je pour juger des pratiques du culte de la baleine et de ses ouailles ? Peut-être même que les tritons n’étaient pas influencés par la plante, ou que, sous cette forme, elle ne présentait pas les mêmes risques. J’en doutais quand même un peu vu l’attitude du marchand.

Je ne voulais pas demander mon reste, la journée avançait à un bon rythme dans ce lieu qui ne dormait jamais. Les riches couleurs laissaient place à un mauve nocturne diffus, et quelques lampes de différentes origines permettaient d’éviter de trébucher sur quelque tapis ou vase qu’on nous aurait fait payer très cher. Il n’y avait pas que les couleurs, il y avait aussi l’ambiance. Déjà trouble, la nuit promettait au marché parallèle de fleurir de plus belle. Ce n’était ni un mystère ni une légende : on trouvait de tout à Qadsak, et la nuit, encore plus que ce qu’on pouvait imaginer. "Ravi d’avoir pu aider, et un petit repas ne sera pas de refus. Je connais un endroit."

Avec leur accord, le marchand devenait guide à l’allure tranquille. Après tout, le départ n’était prévu que bien plus tard dans la nuit, si Atahara voulait profiter du prix accordé par la caravane. Dans tous les cas, mon sort était fait. J’allais rester un peu plus longtemps dans le coin, mes cibles n’étaient pas encore parties, et ma couverture n’avait pas été ternie auprès des compagnons de cette chère Violette.

Il fallait que je me mêle à leur groupe pour les Pyramides.

Dire que ce voyage avait été une bonne couverture serait un euphémisme. Il est toujours plus simple de se cacher à la vue de tous, de venir en groupe, plutôt que de voir un quidam solitaire dans un convoi marchand. L’art d’être invisible se cultivait aussi avec celui de se faire voir, sans se faire regarder. Je zigzaguais quelque peu entre les étals et les quelques bâtiments en dur du coin. Au milieu de ceux qui remballaient et de ceux qui se battaient pour prendre leurs places, je zieutais quelques articles intéressants et interdits. L’un va rarement sans l’autre. Finalement, on quittait presque la zone du marché pour quelques bâtiments plus cosy. Je nous faisais atterrir face à une large arche éclairée d’où s’échappait une musique que certains qualifieraient de baroque, mais que je dirais plutôt jouée par des bardes à leur quatrième verre de vin fortifié.

"C’est ici, n’ayez crainte. C’est assez différent de la taverne où nous nous étions rencontrés."

Et pour cause, Au Crin d’Hebai avait tout de l’étape incontournable pour qui est en quête de gloire. Je vous l’ai dit, tout se trouve ici, y compris la reconnaissance. Les lieux attirent tellement que tout ménestrel rêve de monter sur cette scène, de l’enflammer, pour que la rumeur de son talent se répande. Ce soir, c’étaient plutôt les litres de vin qui se répandaient, mais tant pis pour le son. Tant que l’image et les odeurs étaient là. Certains imaginent un ancien temple, avec le comptoir coincé entre quelques colonnes, des cheminées colossales où des bêtes entières tournaient, des draperies riches scintillant au plafond et des serveurs qui semblaient danser entre les tables. J’avais choisi cet endroit sympathique, je n’y venais pas souvent, mais ce n’était pas moi qui payais cette fois-ci. Autant en profiter et en faire profiter, car je n’étais pas sûr que la prêtresse reviendrait ici de sitôt.

On dégage les soulards, et on nous installe à une table propre, pas loin de la scène. Un nouvel acteur monte, sans que je puisse définir son origine ni même son genre. Drapé dans ce qui ressemble à une soie trop fine pour le commun des mortels, le chanteur s’installe et nous enveloppe d’une bulle de calme. C’est bien simple : toutes les discussions s’arrêtent, tous les verres sont posés sur les tables plutôt que de s’entrechoquer, et les aliments attendent interminablement entre les pics des fourchettes et les bouches des convives. Le charme se rompt à la première note : ça caresse l’oreille et ajoute une jolie couche sonore aux discussions des tablées. Nous étions arrivés au bon moment.

"Tout est bon de mon souvenir, et ils n’ont pas uniquement de la viande. Il y a aussi de merveilleux fruits et quelques tourtes aux légumes à se damner. Je leur fournis quelques épices de temps en temps." Je disais cela un peu pour me faire mousser, mais aussi parce que c’était vrai : je bossais surtout avec des bons. J’attendais que tout le monde commande pour prendre la même chose, l’oreille toujours distraite par le chant qui tapissait plus qu’il ne s’imposait. "Je vous donnerai les indications pour retrouver le convoi. Ils partent demain avant l’aube si vous ne souhaitez pas vous attarder. Malheureusement, nos chemins se sépareront après ce soir. Je dois rester encore un peu." Je levais mon verre vers la tritonne et son ami. "Mais cet intermède était plaisant, j’ai été ravi de vous revoir et d'avoir pu être plus utile que dans notre dernière escapade."

"Tant que j’y pense !" J’attrapais un morceau de papier et demandais une huile bon marché au serveur qui s'occupait de nous. Je prenais aussi un bout de charbon. C’était toujours mieux que de devoir payer le prix fort ici. Je continuais la discussion en mélangeant la décoction pendant plusieurs minutes. Ce n’était pas la chose la plus étrange dans cette cantine, si vous voulez savoir. Une fois la bonne consistance obtenue, je taillais une plume et la trempais dans l’encre de fortune. “Si votre poudre de Perce-Gel supporte mal le voyage, allez à cette adresse. Dites que je vous envoie, le gérant reconnaîtra la signature, détaillais-je. Le prix est déjà validé, je vais l’indiquer à nouveau ici pour qu’il essaye pas de vous embobiner.” Je lui glissais la note plié sur son côté de la table. “Faites juste attention, il sait aussi se montrer charmeur, mais ne vous faites pas avoir.” Je m’envoyais une gorgée de mon verre de thé tiède en souriant, les yeux dans le vague.

Après tout, nous, les marchands, on est tous un peu voyous.
Hier à 8:53

Les épices sacrées de Tohorâ

Atahara et Arno


Atahara écoute Arno avec une gratitude silencieuse, hochant la tête lorsqu'il accepte son offre de déjeuner. "Ravi d’avoir pu aider, et un petit repas ne sera pas de refus. Je connais un endroit," dit-il.

Elle lui sourit doucement, une main reposant sur l'épaisse carapace de Dame Qadirah à ses côtés. "Je suis heureuse que vous acceptiez. Un repas partagé est une belle manière de conclure cette journée marquée par tant de mystères et de révélations. Allons-y, je vous fais confiance pour trouver un endroit qui convienne à nos palais."

Arno les conduit à travers les rues de Qadsak, la foule se dispersant lentement à mesure que le soleil commence à descendre à l'horizon. Finalement, ils arrivent devant une taverne pittoresque, dont la façade est marquée par de vieilles pierres usées par le temps. "C’est ici," explique Arno. "N’ayez crainte. C’est assez différent de la taverne où nous nous étions rencontrés."

La prêtresse jette un regard attentif à la bâtisse. Elle reconnaît les vestiges d’un ancien temple dans l’architecture, les colonnes effritées, les arches élégantes. C’est un contraste frappant de voir un tel lieu transformé en taverne. Cela la fascine. "C’est un concept tout à fait... singulier,"  murmure-t-elle. "Transformer un temple en un lieu de rassemblement commun... c’est audacieux. Mais je suppose que même les vieilles pierres peuvent accueillir de nouvelles formes de dévotion, sous une autre lumière."

Une fois à l’intérieur, ils sont conduits à une table près de la scène où jouent des musiciens, une douce mélodie flottant dans l'air. Arno les installe dans une zone où quelques soûlards titubent déjà, mais Atahara ne s’en formalise pas. Elle est bien trop habituée à voir des âmes égarées, même dans les lieux sacrés.

"Tant que la nourriture est bonne, cela conviendra parfaitement,"  déclare-t-elle avec un sourire. Elle observe les lieux avec une curiosité tranquille, écoutant Arno alors qu’il lui parle du menu. "Tout est bon de mon souvenir, et ils n’ont pas uniquement de la viande. Il y a aussi de merveilleux fruits et quelques tourtes aux légumes à se damner. Je leur fournis quelques épices de temps en temps."

La tritonne incline la tête, satisfaite. "C’est parfait pour Dame Qadirah. Elle ne consomme pas de viande, et je dois veiller à ce que ses repas soient en accord avec ses besoins. Quant à moi..."  Elle laisse échapper un léger rire. "Les brochettes d’insectes et de fruits me semblent un choix tout à fait fascinant. Je ne peux résister à la découverte de nouvelles saveurs."

Elle passe commande, demandant des tisanes aux herbes et aux algues pour elle et Dame Qadirah, ainsi qu'une salade composée pour sa fidèle tortue. La nourriture arrive rapidement, et Atahara savoure chaque bouchée avec la lenteur d’une méditation, appréciant chaque texture, chaque goût.

Alors qu’ils mangent, Arno lui parle du convoi. "Je vous donnerai les indications pour retrouver le convoi. Ils partent demain avant l’aube si vous ne souhaitez pas vous attarder. Malheureusement, nos chemins se sépareront après ce soir."

La prêtresse pose ses baguettes avec délicatesse, un sourire paisible sur les lèvres. "Votre compagnie a été un baume sur les incertitudes de cette ville étrange. Bien que nos chemins se séparent, je porte avec moi la gratitude de cette rencontre. Vous m'avez aidée plus que vous ne le pensez. Que Tohorâ vous guide dans vos affaires, Arno."

Puis il mentionne la poudre de Perce-Gel, et Atahara écoute avec attention ses conseils sur le marchand qu’elle pourrait rencontrer si la plante ne supporte pas bien le voyage. Elle hoche la tête, enregistrant mentalement l'adresse qu'il lui donne. "Je vous remercie pour cette précieuse information. Vous avez été une aide inestimable, et votre honnêteté est rafraîchissante dans cet océan d'incertitudes."

"Après tout," plaisante Arno, "nous, les marchands, on est tous un peu voyous."

La tritonne rit doucement, son regard se plongeant dans celui d'Arno. "Peut-être. Mais même parmi les plus rusés, il y a ceux qui savent quand l’honnêteté est la meilleure marchandise à offrir. Vous avez montré cela aujourd’hui, et pour cela, je vous remercie du fond du cœur."

La fin de cette aventure approche pour Atahara. Le repas touche à sa fin, et bien que leurs chemins divergent bientôt, elle se sent remplie de paix. Une nouvelle étape l’attend à l’aube, mais pour l’instant, elle savoure ce moment de quiétude en compagnie de ceux qui l’ont aidée sur son chemin.