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[FB 1898] Au bon souvenir de la Brume

[FB 1898] Au bon souvenir de la Brume Brandw10
Mer 1 Nov - 15:24

Il n’était pas rare que les Patrouilleurs fussent envoyés dans la Brume quérir quelconque artéfact lorsque pareille demande ne justifiait pas une expédition. Cependant, il n’était pas de coutume que ces derniers réalisent aussi la livraison des objets collectés. Ainsi Ryker trouva assez cavalier la façon dont les administrateurs de la Guilde lui avaient révélé ce petit détail alors qu’il revenait, crasseux, d’une expédition mouvementée dans la Brume. Il y avait eu des exulos, et pas mal d’événements impromptus durant le périple et il n’avait rêvé que d’un bain chaud et d’un repas copieux durant son retour. Quitte à prendre un ou deux jours, il avait décidé de se les octroyer et avait mandé une diligence pour le trajet jusqu’à Epistopoli. Une ville qu’il avait en horreur, ce qui était certainement dû à sa passagère clandestine qui n’appréciait pas de s’éloigner tant de la Brume. Encore mieux, il devait aller dans la Haute Ville, dans un certain hôtel ‘Le Marquis’. Un endroit plutôt bien famé, à la réputation de luxe et de dorures. Un endroit parfait pour un Patrouilleur comme lui.

Le trajet se passa plutôt avec confort, jusqu’à arriver aux portes de la cité où Ryker fut inspecté avec peu de ménagement. Les Morts Gris n’étaient pas très bien vus de la populace et la crainte qu’ils inspiraient allait de pair avec la méconnaissance de leurs fonctions réelles au sein de la Guilde. Touchés par la Brume, maudits par la Malice. Les rumeurs allaient bon train et nul doute que son passage par la grande porte susciterait quelques émois. Le Patrouilleur, quant à lui, frémit en voyant les aberrations mécaniques qui l’entouraient. Il sentit sa Nebula pester de rage et cracher à l’attention de toutes les horreurs qu’il apercevait et il eut bien vite l’impression de ne pas être à sa place en pareille cité. Tout ici criait technologie et vice. Cela le renvoyait bien des années en arrière, à un temps qui lui semblait être une autre vie. Peut-être que c’était là que prenait racine son malaise. Epistopoli ne lui était pas inconnue, ses parents y avaient autrefois noué de nombreuses connaissances selon ce qu’on lui avait conté. Ils étaient scientifiques, après tout. Lui n’était que peu versé dans ces arts, il savait juste qu’ils étudiaient quelque chose lors que la Brume avait pris Dainsbourg.

Il soupira en passant les autres enceintes de la cité, lorsqu’il montra une fois de plus son habilitation et que son colis fit tiquer la douane. Une fois de plus. Il perçut la méfiance lorsqu’il leur révéla son métier, mais peut-être savaient-ils, automates ou augmentés qu’ils étaient, le sort que leur réserverait la Brume si elle les découvrait. Il ne leur offrit qu’un sourire gêné, leur monde et le sien n’étaient pas faits pour se côtoyer. Le Patrouilleur se fit indiquer la suite par les contrôleurs et put admirer la différence notable entre les quartiers. Pas de doute, il était dans la Haute Ville. Tout semblait si … vide et froid. Loin de la crasse et de la chaleur des autres quartiers. Comme toujours, la civilisation était source de ségrégation. Il finit, après plusieurs dizaines de minutes de marche où il fit se retourner les passants, par arriver devant sa destination. En effet, l’endroit était grand. En effet, l’endroit était prestigieux.

- Pas vraiment le genre de taverne que je fréquente … ça c'est clair.
se murmura le Patrouilleur, dans son armure de cuir usée et avec son épée qui dépassait de son dos.

Il posa la main sur le pommeau de son épée courte, se lissa un peu ses cheveux ondulés et sa barbe. Il se sentait mal à l’aise, comme une sorte de furoncle sur un visage de porcelaine. Ryker poussa la porte et entra dans l’hôtel où tout sentait bon, à part lui. Il se dégageait de l’aventurier une odeur âcre de cuir et de transpiration. Ces fragrances avaient depuis longtemps marqué son armure et sa cape et on pouvait aussi y percevoir un soupçon de terre mêlée d’hémoglobine. Il était rare que ses expéditions ne se passent sans verser le sang.  Il s’approcha, dans un fracas métallique, du comptoir. Personne, c’était bien sa veine. Une clochette trônait devant lui, mais il se demanda bien à quoi cela pouvait bien servir. Il se posa au comptoir, comme il l’aurait fait dans une auberge du bord de la mer de Brume, puis observa les clefs et tout le fatras de décoration. Tout cela était bien trop aseptisé. Il manquait les chants du fond de taverne, ainsi que l’odeur de pot-au-feu qui cuisait au fond dans une marmite. La bière, les rires. Ici, il n’y avait qu’un bourdonnement incessant propre à la ville qui ne semblait incommoder personne.

Après quelques secondes à attendre sans âme qui vive, mis à part les clients au nez retroussé sur les banquettes immaculées de l’entrée, le Patrouilleur se racla la gorge. Une fois, deux fois. Puis il laissa ses doigts courir sur le comptoir. Ses gants de cuir restèrent intacts : pas la moindre trace de poussière. Bon sang, cet endroit ne vivait donc pas ? Il commença à jouer avec l’espèce de petite sonnette et l’activa par hasard. Le son ricocha dans le hall d’accueil et fit émerger du tréfonds des bureaux une créature guindée dans un accoutrement … inhabituel.

- Bonjour monsieur. Bienvenue au Marquis, monsieur. En quoi puis-je vous aider à vous repérer dans la ville ou vous indiquer un tailleur, monsieur ? minauda l’hôte, tout en fronçant aussi son nez.

Ryker laissa passer l’insulte en se redressant. Toujours cette image de rustaud, comme si les gens qui n’appartenaient pas à leur strate sociale étaient tous de parfaits idiots. Leur monde était bien éloigné du sien, où la mort était la seule égalisatrice.

- Bonjour. Non, je suis là pour affaire. Je dois livrer ceci… fit-il en posant un paquet assez large sur le comptoir, qui déversa une quantité anormale de poussière sur ce dernier. En main propre à votre patron. On m’a dit de mander un certain ‘Maëlstrom’, lui saurait me guider. J’ai fait tout le trajet depuis les Terres Brûlées jusqu’ici : je peux encore attendre un peu.

L’hôte d’accueil haussa un sourcil puis, comme si cela venait de faire connecter deux informations dans son cerveau, s’excusa un instant avant de s’éloigner et de se saisir d’un combiné pour y parler dedans d’une voix préoccupée.
Mer 8 Nov - 3:18



Au Bon souvenir de la Brume

Ft. Ryker Lestat




Maelström arqua un sourcil. Sonnerie. Encore. Lui qui venait à peine de s’installer à son bureau n’avait pas la moindre envie de répondre. Il venait de gérer une dispute aux cuisines que le majordome ne parvenait pas à calmer. Juste avant, il avait rencontré des aventuriers pour la prochaine expéditions que Seraphah payait, et s’était assuré de leurs compétences, sortant même son sabre pour l’occasion. Sans compter sur cette sonnerie qui retentissait, ou encore ces télégrammes qui devenaient de plus en plus menaçant à force de venir grignoter le moindre bout de bois de la surface qui lui servait initialement à déployer les plans d’Uhr sous différentes coutures.

Il se saisit se l’appareil, et écouta. Une livraison. À remettre spécifiquement à Seraphah. Il sut que cela devait être un artefact, si rare, qu’il fallait absolument que ce soit celui qui l’a mandé, qui le reçoive en main propre. Il demanda à Hector, qui t’avait si négligemment reçu, de te faire monter au petit jardin. « Mais monsieur... » Maelström tendit l’oreille alors même qu’il venait de se lever pour venir à ta rencontre. « Qu’y a-t-il Hector? » Sa voix était sensiblement tranchante...l’agent d’accueil n’y était pour rien s’il avait envie de vaquer à d’autres occupations. « Je crains que le petit jardin ne soit pas approprié en terme de parfum justement... » Malgré lui, le porte-brume eu un immense sourire. « Ne vous en inquiétez vous pas, faîtes surtout ce que je vous ai demandé. » S’il fallait donner une douche et de nouveaux habits aux aventuriers qui venaient au Marquis, certain que le lieu deviendrait rapidement un endroit pour se détendre avec des bains chauds comme il en existait à Aramila. Seraphah tout comme lui avaient une façon de s’habiller jugée classieuse, et pourtant quand il fallait aller dans la brume, ils n’étaient pas réticents. C’était maintenant la brume qui venait à eux via ta personne.

Il alla à grands pas dans le couloir, tapant à la porte de Seraphah qui répondit assez rapidement. « Une livraison pour toi. Exclusivement pour toi. Tu nous rejoints dans le Petit Jardin dans quinze minutes? Le temps que je vérifie que tout est bon...mais je crois me souvenir que tu attends plusieurs objets rares dernièrement? » Seraphah inclina de la tête. Il semblait très intéressé par sa lecture, mais l’absence de réactions plus flagrantes dans un tel cas, n’était pas inhabituel pour celui qui vivait à ses côtés depuis maintenant dix ans.

Quand il arriva dans le Petit Jardin qui se situait 12 étages plus bas, tu étais déjà là. Hector semblait heureux de pouvoir enfin partir à ses occupations. Maelström s’approcha vers toi d’un pas franc, sa main se levant pour te saluer dignement, vu qu’il s’agissait ici d’un contrat qui allait être scellé d’un moment à l’autre. Tandis que tu pouvais à la fois remarquer la cicatrice qui barrait son œil droit, mais aussi sa tenue implacable faite d’une chemise d’un rouge foncé, d’une veste en cuir et d’un pantalon du même acabit, son regard opalin sembla te pénétrer. Comme s’il essayait de capter ton essence. À dire vrai, il observait scrupuleusement ta tenue, ton odeur, le moindre détail qui lui révélerait assez rapidement qui tu étais. Un patrouilleur de la Guilde...Voilà qui plairait à l’élémentaire. « Je présume que la Guilde vous a donné l’ordre d’uniquement présenter cet artefact à Monsieur Von Arendt. Il ne va pas tarder. »

C’est ainsi que vous étiez tous les deux debout dans cet endroit dont on comprenait sans mal le nom en raison des nombreuses plantes présentes et de la petitesse de l’endroit...par rapport aux autres pièces que le Marquis détenait. Maelström n’était pas du genre à faire la discussion, plus préoccupé à ce que l’échange se passe au mieux et vite, et qu’il puisse repartir à ses différentes tâches.

C’est ainsi qu’au bout de quelques minutes, que la porte s’ouvrit sur le prince de cet endroit, sa chevelure reconnaissable entre toutes, habillé de soie comme il en avait l’habitude depuis fort longtemps. En effet, c’était l’unique tissu qui ne lui pesait pas sur le corps, lui donnant la sensation d’être toujours le feu follet qu’il avait été. Son arrivée dans ce cadre bucolique, avec les murs de couleur verte, les plantes qui vous entouraient, et les divans en velours d’un bleu nuit, était totalement appropriée.

« Bonjour monsieur…? » Son regard ambré perçu d’emblée tes traits tirés et il ne put s’empêcher de glisser : « Vous venez de loin d’après ce que l’on m’a dit...sachez qu’une chambre se prépare pour vous, si ma décoration ne vous déplaît pas bien sûr. » Tu n’étais pas le premier de la Guilde qui venait au Marquis, et il savait que la majorité des aventuriers préféraient mille fois les bas quartiers que son hôtel. Mais en souvenir de sa propre appartenance à la Guilde il y a des siècles, il faisait toujours preuve d’une grande hospitalité.


Sam 9 Déc - 12:57
Un jardinet. On l’avait souvent fait patienter mais rarement dans des endroits aussi agréables. Le Patrouilleur se moquait un peu des bonnes manières et jouait de son image de Mort Gris pour se permettre d’agir comme ses envies lui dictait. Il fit donc le tour des plantes et se surprit à apprécier leur parfum et le havre de paix qu’elles décoraient. Il avait déjà vu des restes de tels domaines dans la Brume et s’était toujours demandé à quoi cela pouvait-il ressembler durant l’époque du glorieux Empire d’Yfe. Il y trouvât là un brin de réponse. Il explora donc l’endroit sans trouver à redire aux habitudes des nobles de faire patienter les gens de basse extraction. Ryker savait qu’il n’avait rien à prouver à ces gens et qu’il n’appartenait pas au même monde. Mais sa curiosité et son étonnement sur les merveilles de cette cour végétale mettait le serviteur mal à l’aise. Il ne restait pas au dépourvu pour autant car lorsque Maëlstrom s’engouffra dans la cour, il pivota aussi tôt. Il vit le regard de ce dernier glisser sur sa main posée sur le pommeau de son arme et leurs yeux se crochetèrent. Chacun pu juger l’autre. Chacun pu admirer le palmarès de l’autre au travers de menus détails. Cicatrices, gestes, posture. Nul doute, ce type n’était pas n’importe qui. L’autre serviteur en profita pour prendre la poudre d’escampette.

- Pas vraiment, je ne fraie pas avec les Von Arendt en général.
répondit-il, assez étonné qu’une telle famille ait mandé la Guilde pour quelconque affaire. On m’a dit qu’un certain Maëlstrom me guiderait. J’en juge qu’il s’agit de vous.

Cela signifiait donc que cet artefact allait finir dans les mains d’un Von Arendt. Qui était-il pour juger de cela si la Guilde avait approuvé la démarche. Il haussa les épaules et entreprit d’attendre. C’était assez curieux de penser qu’il se sentait mal à l’aise ici alors que nul danger ne l’attendait. Que des hommes, que des choses tangibles. Mais il n’était pas fait pour la ville, il n’était fait que pour les chemins. Depuis tout jeune, depuis qu’il avait eu en tête cette idée de retrouver ses parents. Quand bien même son oncle Jarod avait tout fait pour le pousser à entrer sur le droit chemin. Un vieil agriculteur mais qui avait des connaissances un peu partout. Il se remémora avec tendresse ces instants et cette vie qu’il aurait pu avoir mais qui ne lui avait jamais allé. Ils attendirent dans le silence, sans qu’aucune gêne ne soit palpable. Les deux hommes semblaient apprécier le silence. Un bon point pour ce Maëlstrom. Le Patrouilleur releva la tête quelques secondes avant que le maître des lieux ne se fasse une place dans leur cercle intimiste et soupira d’aise en pensant qu’il allait bientôt pouvoir se libérer de ce paquet. Il marqua un temps d’arrêt et laissa un léger silence s’installer à la question de l’être sibyllin qui se dressa devant eux.

- Heu … Hm. Pardon. Ryker. Ryker Lestat. repondit-il tandis que ses mains farfouillaient dans son sac.

Il fronça les sourcils et scruta un peu trop le visage du maître de maison. Il l’avait déjà vu, il en était sûr. Quelque chose de trop familier dans ce timbre de voix, dans cette façon de se déplacer. Dans cette diction … Et ce visage … Les traits fins, une chaleur qui émanait de lui et embrasait sa proximité immédiate.

- Voici l’artefact. La pierre semble reliée à Zénobie mais est encore impossible à traduire à ce jour. Peut-être en vieil urhois. Elle était contenue au milieu de jiangshis, reliée à une sorte de culte. manifesta-t-il, tirant un lourd paquet enrobé dans un tissu rêche.

Le Patrouilleur révéla l’objet nimbé de mystères, dont une aura étrange se dégageait puis la masqua de nouveau.

- Merci bien pour votre offre mais …
répondit le Patrouilleur avant de marquer un nouveau temps d’arrêt. Attendez, on s’est pas déjà vu quelque part ?

De gêné il devint méfiant car ce visage ne lui était pas inconnu. Or, toute sa vie il l’avait passée dans la Brume, ou presque. Quelques seize années loin des traumatismes et … Oh ! Mais oui. C’était LUI. Bien sûr.

- Mestre Seraphah ? Bon sang, mais oui c’est vous. s’exclama-t-il, entre la joie et la méfiance toujours. Vous n’avez pas changé d’un poil, alors que moi … reprit-il, les sourcils froncés. Vous ne devez pas vous souvenir, mais mon oncle m’avait envoyé chez vous … pour voir si vous arriveriez à faire de moi un scientifique …

Il avala sa salive avec un peu de difficulté. Le souvenir amer de ce qui l’avait poussé sur cette voie pernicieuse où la Malice l’avait marqué de sa main.

- Comme mes parents.
Lun 5 Fév - 0:15



Au Bon souvenir de la Brume

Ft. Ryker Lestat




Compréhension. Ce geste vers ton pommeau. Cette prétention au combat que seul des environnements menaçants expliquaient. Il y avait dans vos postures respectives un effet de miroitement dont toute la saveur ne put arriver jusqu'à vous. C'est que les mots prenaient la suite des regards et des mains tendues.

Ainsi tu ne savais pas à qui était destiné ce que tu transportais. Sans aucun doute ne savais-tu pas ce que tu transportais? À moins que ce ne soit toi qui l'avait trouvé bien sûr...Ta remarque sur les Von Arendt se comprenait sans mal. Seraphah lui-même ne les fréquentait pas, ou alors juste une branche de cette famille qui était à l'image de sa défunte femme...il y a bien trop longtemps pour que quiconque ne s'en souvienne.

«En effet. Je suis votre guide...pour patienter.» Un léger sourire orna ses lèvres avant de garder le silence. Son regard se porta sur des orchidées d'un mauve frappant, tandis qu'il nota à quel point tu n'étais pas bavard. Après tout, la démarche était de ne pas te laisser seul, sans pour autant d'importuner ou vouloir à tout prix connecter.

Les portes s'ouvrirent pour laisser passer l'élémentaire qui était toujours d'une humeur virevoltante. Il se posta face à toi, remarquant ton hésitation autant dans tes mots qui tardaient à venir que dans ton corps tout entier. À l'énonciation de ton nom, rien ne lui vint de particulier de son côté. Il t'observa fouiller dans le sac et en sortir l'objet dont on lui avait vanté l'émanescence qu'il ressentit alors même que tu ne faisais que le révéler quelques secondes. Seraphah la prit entre tes mains, la donnant dans un même mouvement à Maelström, qui te salua sans tarder et disparut avec le précieux. Il n'avait aucune raison de voir en toi une menace...d'autant plus que l'élémentaire saurait très bien se défendre au besoin.

Alors même que le porte brume disparaissait, tu te mis à avoir des soupçons concernant Seraphah. Ce dernier ne marqua aucune expression particulière, se demandant en son fort intérieur à quelle occasion auriez-vous pu vous croiser, vu que tu semblais persuadé de ce point. Il allait proposer l'éventualité d'une excursion en commun, quand tu le devanças et que ses yeux exprimèrent une surprise des plus innocente. Bien sûr qu'il se souvenait de toi, bien que comme tout humain, les années t'avaient métamorphosé! «Ryker...Ryker le fripon!» Cela avait été un échec. Les sciences n'avaient pas su te donner la moindre onction, mais heureusement votre relation n'avait pas pour autant été tumultueuse. L'élémentaire ne forçait personne à quoi que ce soit...et il gardait de cette époque une certaine tendresse.

«Comment ne pas se souvenir du plus débonnaire des fripons...Les sciences n'ont pas su vous charmer, mais je vois que d'autres voies sont venues à vous...» En espérant que cette voie-ci en particulier ne soit pas venue agripper ton âme au fur et à mesure des expéditions. «Toutefois je n'aurai su vous reconnaitre cher Ryker...Si je puis me permettre?» Son regard était comme autrefois: vif et taquin, comme si vous ne vous étiez jamais quitté. Mensonges. Mais les liens avec ceux qu'on a su aimer ne peuvent se tarir n'est-ce pas?

«Et appelez-moi Seraphah...Aujourd'hui je ne suis plus votre mestre...et je doute que mes enseignements vous ont beaucoup apporté.» Il ne savait pas réellement quel effet a eu ce temps ensemble sur ta personne. «Mais dîtes moi...Vous étiez prêt à refuser mon hospitalité...Mais cela n'est plus d'actualité n'est-ce pas? Je ne le permettrais pas! J'ai tellement de questions pour vous.» Et sans aucun doute en auras-tu pour lui vu qu'il est manifeste que ce n'est pas naturel que de ne pas avoir changé de son côté.

Il s'approcha d'un téléphone qui se trouvait sur l'une des colonnes après t'avoir fait un léger clin d'oeil. La réception répondit et il commanda: «Merci de m'apporter dans le petit jardin votre meilleur plat du jour. J'ai un ami qui mérite tous les honneurs.» Il raccrocha et s'installa sur une chaise, te montrant celle face à lui de la main: «Alors dîtes moi...comment vous êtes-vous retrouvé à la solde de la Guilde des aventuriers?» Sa voix se fit immédiatement plus basse quand il ajouta: «Et avez-vous trouver réponses à vos questions». La perte de ses parents étaient quelque chose qui bouleversait la vie des mortels. Il en avait eu conscience, ne connaissant pour sa part que l'absence de tout géniteur à proprement parlé.




Sam 17 Fév - 14:42
Le … fripon ? Le Patrouilleur haussa un sourcil, ne se rappelant pas avoir été si cabochard. Enfin si, peut-être un peu. Si trouver la moindre raison pour s’échapper à ses devoirs était mal vu de la part d’un précepteur. Tout comme sa propension à vouloir aller explorer la cité, davantage que de s’enfoncer dans des ouvrages. Ou encore prendre plaisir à braver les endroits interdits ? Hm, certes. Seraphah, quant à lui, n’avait pas changé un brin. A tel point qu’il avait presque eu du mal à le reconnaître. C’était quelqu’un d’un naturel si affable qu’il n’avait toujours pas associé sa personne à sa famille mal réputée. Le Patrouilleur éprouva un doux picotement au creux de l’estomac, réminiscence d’un temps plus serein.

- Disons que si la quête de réponses et de savoirs sont l’apanage d’un scientifique, alors vous avez parfaitement réussi. répondit-il avec un sourire assez triste en comparaison de l’étincelle qui l’animait.

Il se retrouva coincé par la proposition de son vieux mentor, mais n’osa, en effet, plus trouver prétexte pour prendre la poudre d’escampette. Il opina du chef et soupira, se détendit. Il y avait chez cet homme une espèce de chaleur qui le ramena vingt années plus tôt. Comme si rien n’avait changé, comme s’ils s’étaient quittés hier. Ce décalage fit une désagréable impression au Patrouilleur qui avait déjà eu son lot de bizarreries dans la Brume. La nostalgie calma vite ses craintes : il était en sécurité ici. Il se raccrocha aux souvenirs adolescents d’un temps heureux.

- Et bien en effet, vous comprendrez cher mes… Seraphah, que les habitudes d’un Patrouilleur ne sont pas à la civilisation. Mais bien entendu, j’accepte avec joie votre hospitalité. se résigna-t-il, prenant place sur la chaise désignée.

Il lui offrit un sourire un peu plus chaleureux cette-fois ci. Il entreprit de défaire un peu les liens de son armure et laissa tomber un peu de sa carapace de Patrouilleur pour révéler un hommes plus las qu’on ne l’aurait cru face à Seraphah. Il dégrafa son arme et la posa de côté, ainsi que les autres. Il les posa sans réel soin, sous l’œil mesuré de Maëlstrom.

- Comment j’en suis arrivé là ? Ah ça … Je crois que ça peut se résumer à une seule phrase : j’ai survécu. fit-il en tapotant son insigne de Patrouilleur. Depuis presque dix années.

Un poids supplémentaire accabla ses épaules, qu’il chassa d’un geste de la tête.

- Et vous ? Cela fait vingt ans … et vous n’avez pas changé d’un poil : l’air de la cité doit être plus sain que celui des terres grises ! Je ne savais pas que vous étiez un collectionneur, ni que vous vous intéressiez à la Brume … reprit-il, avec un sourire en coin.

De nouveau, il chassa quelque chose d’imaginaire d’un geste. Cette fois-ci de la main. Il avait pris l’habitude de ces gestes anodins dans son ennui et sa vie solitaire. Il faisait des efforts pour ne pas laisser ses travers d’aventurier bougon reprendre le dessus et ses doutes surgir en face d’un des figures de son passé. Il savait que Seraphah n’avait toujours voulu que son bien. Tout comme il savait qu’il aurait dû l’écouter, et qu’il aurait ainsi évité beaucoup de souffrances. De nombreuses morts … et d’autres événements encore moins sympathiques.

- J’ai, de mon côté, beaucoup voyagé dans Uhr. Que ce fut dans la Brume ou non. J’ai rejoint la guilde … et bien attendez que je compte … Oh. Il y a quatorze ans maintenant. Et Patrouilleur depuis dix-douze ans. Pour … hum … et bien trouver ce que je cherchais.
continua-t-il, une main dans les cheveux.

De nombreux tics de nervosité l’animaient. Il n’était pas nécessaire d’être devin pour se rendre compte que la vie l’avait profondément marqué.

- Je n’ai encore rien trouvé. Mais le monde est vaste. poursuivit le Patrouilleur en haussant des épaules. A moins que vous ayez des choses à m’apprendre sur Dainsbourg, je gage que ça ne soit pas demain la veille que le je trouve satisfaction.

Il s’apprêtait à relancer, lorsque le plat arriva. Une table fut dressée pour lui permettre de se repaître avec un décorum dont il n’avait pas l’habitude et on emporta ses armes. Il fit un signe pour s’opposer mais se ravisa. Il était en sécurité ici. Il était avec Seraphah non ? Et puis il avait encore des armes dissimulées.

- Et vous, mes … Seraphah, qu’êtes-vous devenu avec tout ce temps ? Vous avez trouvé le secret de l’élixir de jouvence ? plaisanta-t-il, sans savoir qu’il mettait le doigt sur un épineux et précis problème.
Sam 24 Fév - 4:12



Au Bon souvenir de la Brume

Ft. Ryker Lestat




Est-ce qu'il passait à travers? Le temps qui s'inscrit sur le visage de ceux qu'il avait connu à la rosée de leur vie? Est-ce qu'une part de lui se flétrissait à la vue du vieillissement inéluctable de ceux qu'il avait aimé un jour? C'était une question qui ne trouvait pas de réponse. L'élémentaire était toujours affable, toujours plein d'une légèreté et chaleur qui donnait l'impression à chacun, que le monde n'avait pas changé. Alors même qu'il voyait qu'il avait changé. Que tu avais changé. Tes gestes étaient las. Ton regard fatigué. Ce n'était pas dû uniquement à l'âge, il ne pouvait imaginer toutes les expériences qui ont été les tiennes jusqu'ici. Et en même temps, il les imaginait très bien parce qu'il y en a eu d'autres des âmes perdus en quête de vérités. Des vérités que la Brume grignotait. Que la Brume cachait. Comment construire ses racines quand l'ignorance était l'unique flamme qui guidait nos pas?

Il remarqua la tristesse de ton sourire. Comme s'il s'agissait d'une expression que tu méconnaissais. Qui s'était caché de toi. «Je ne sais pas si je dois réellement m'en ravir. Hâte que vous m'en disiez davantage.» Il t'avait toujours vouvoyé. Autrefois, pour garder sa posture de Mestre. Aujourd'hui, parce que les habitudes ont la dent dure. Alors qu'en réalité, tu étais de ceux qu'il considérait bien volontiers comme sa famille, si tant est il pouvait réellement prétendre à cela avec sa nature.

Un sourire rehaussa les pommettes de Seraphah face à l'acceptation de son hospitalité. «Ceci est une sage décision...Je vais pouvoir prendre soin de vous comme j'ai pu le faire autrefois.» Oui, il y avait de l'agréabilité de retrouver un jeune homme devenu homme et lui offrir une générosité que la Brume ne pouvait apporter. Il revêtit un air plus solennel tandis que tu retirais ton attirail. Après tout, vous étiez seuls désormais, Maelström étant parti avec le précieux objet qui t'avait mené jusqu'ici. Survivre. Du temps où il faisait lui-même partie de la Guilde des aventuriers, il avait pu en voir des hommes et des femmes qui survivaient, alors même que de son côté, seule comptait la Brume et les connaissances qu'elle recelait, quand elle voulait bien les partager. Il n'avait pas réellement connu la survie, sachant qu'à tout instant, quand il sera las, il choisirait de se retirer.

Il sourit à ta demande. «Tout ce qui est ancien est précieux à mes yeux. Encore plus si cela a à voir avec un art quelconque.» Il était facile de trouver ce genre d'informations le concernant. Après tout, n'avait-il pas lui-même son propre réseau de collectionneurs d'art brumeux? Il observa tes gestes, ressentit que cela te demandait un certain effort d'entrer ainsi en connexion avec quelqu'un. D'ailleurs, quand tes derniers mots moururent d'entre tes lèvres, il se permit: «Merci cher Ryker. Je conçois que parler de tout ça n'est pas chose courante parmi les aventuriers. Fut un temps, j'en faisais moi-même partie.» Il n'avait pas envie de se protéger de toi. Sa nature était déjà connue par de nombreuses personnes...et autant quand tu étais gamin, il n'aurait servi à rien de te dévoiler ces détails, autant aujourd'hui, tu avais du voir plus de monstres que la majorité des personnes vivant à Epistopoli.

Le repas arriva à la suite de ton aveu: la Brume ne t'avait rien offerte sur la ville de tes feu parents. Tes armes furent retirées à ce moment-ci. «Rassurez vous, vous les retrouverez dans votre chambre.» Nettoyées comme il se doit bien entendu, mais ce genre de détails n'intéressaient personne n'est-ce pas?

«Je n'ai jamais cherché Jouvence. Elle fait partie de moi l'on va dire...Mais je vous raconterai ce genre de détails suite à votre repas voulez-vous?» La viande était nappée d'une sauve à base de poivre et de gingembre avec une montagne de légumes et pomme de terre. «De quoi vous rassasier je l'espère.»

Il s'adossa davantage dans son siège, avant de venir éclairer à son tour ta lanterne: «Je me suis toujours intéressé à la Brume. Tout comme vous, j'ai mon affaire personnelle avec elle. J'organise des expéditions quand mes devoirs de diplomate me le permettent. J'aime à m'y rendre, l'esprit d'équipe, la vigilance à avoir pour ne pas perdre inutilement des hommes. Parfois je tombe sur des messages qui viennent renforcer le puzzle de la création de notre monde lui-même...mais sans trouver encore du sens à ma propre existence.» Oui c'était avant tout une quête personnelle et égoïste, même si ses trouvailles profitaient à d'autres.

«Comme vous le voyez, je possède le Marquis, j'aime à y organiser des réceptions et rencontrer des personnes aussi intéressantes dans leur savoir que dans leur expérience. Tout comme vous j'en suis sûr. Puis je partage mon temps à étudier la médecine, que ce soit les nouvelles technologies dans le cadre de chirurgie, ou encore en psychiatrie, une nouvelle voie qui souhaite comprendre l'âme du monde...» Après tout, la majorité des personnes qu'il pouvait rencontrer en tant qu'aventurier possédaient tous des traumas qu'ils en aient conscience ou pas. «Pour faire simple, je suis un homme aux multiples intérêts et il faut plus d'une vie pour mener à terme tous ces champs.» Et cela tombait bien vu que c'est ce qu'il avait: plus d'une vie.

«Dois-je en conclure que vous n'avez aucune prétention marital, familial...ou ne serait-ce intime? Trouver un équilibre faute de réponses est une nécessité à ce que l'on dit.» Était-ce trop tôt? À ses yeux, c'était une formalité que d'en parler. Même s'il trouvait que le monde pouvait tourner sans tout ça, il restait persuadé qu'être entouré de personnes soutenantes pouvait faire une différence.


Sam 6 Avr - 13:37
Enigmatique. C’était le terme. Ryker releva quelques questions supplémentaires mais le respect qu’il adressait à Seraphah l’empêchait de les poser. Il comprenait qu’il y avait là quelque chose. Quelque secret suffisamment âpre pour être tu. Il comprenait certaines des aspirations de son ancien mentor, cette soif de connaissances et de réponses. Il ne considérait juste pas la dimension que ça prenait pour Seraphah, tant ces échelles temporelles étaient vastes pour lui. Il le mesurait à l’aune d’une vie humaine aussi éphémère soit-elle. Il releva tout de même un détail croustillant qui expliquait qu’on l’ait mandaté lui, un Patrouilleur, pour lui livrer l’objet. Une certaine solidarité demeurait entre membres de la Guilde même lorsqu’ils la quittaient. Bien souvent, la mort était le seul motif de départ. Ainsi, lorsque cela se passait en bon terme, les individus avaient plutôt tendance à le prendre avec un certain positivisme. Avec une renommée telle que Seraphah … c’était cohérent. Ryker appréciait la cohérence.

Le repas était divin. Il ne mangeait pas souvent dans des auberges de qualité et les repas aussi conséquents étaient rares. Mais là, en plus, c’était bon. Vraiment bon. Un sentiment de bien-être l’envahit et il laissa échapper un soupir d’aise en portant un nouveau morceau à sa bouche. Il en aurait presque eu les larmes aux yeux. Le peu de manières qu’il avait fut vite abandonné au profit du repas. Peu à peu, il se fit plus à l’écoute, le choc sensoriel dépassé. Il écoutait Seraphah se livrer, lui révéler des bribes de son existence. Il lui faisait confiance, et c’était un don inestimable. Les années ne semblaient avoir rien égrené de leur relation. Ryker avait changé, au-delà de ce qui était concevable. Il était plus qu’un homme fait, à présent. Une carcasse qui en avait trop vu, des tremblements et des chocs qu’aucun humain ne devrait avoir à porter. Pourtant, il était encore là, faisant preuve d’une résilience et d’une robustesse peu communes.

- J’ignorais cela … vous ne m’en aviez jamais parlé. Vous avez manifestement eu plusieurs vies, ce qui force mon admiration. Je vous pensais scientifique et philanthrope. Mais Aventurier ? Ah, ça, je ne m’y attendais pas … répondit le Mort-Gris, un peu circonspect tout de même.

Il se frappa discrètement l’estomac, encombré d’avoir mangé trop vite. Il s’empara d’un verre pour faire descendre un peu tout ça. Le Marquis était cet endroit dantesque. Il marqua quelques secondes à observer les alentours, comme si cette révélation lui ramenait les pieds sur terre. L’endroit était luxueux et beau, sans conteste. Il était certain qu’il pourrait apprendre beaucoup de Seraphah. Au niveau de la Brume et de ses artefacts. Car technologies et psychiatrie n’étaient pas des choses qui signifiaient grand-chose pour l’heure.

- Plus d’une vie, c’est certain. Je n’ai déjà pas assez de la mienne pour atteindre mon but … ricana-t-il, pathétique tentative de blague.

Une fois de plus il tiqua face au sous-entendu. Et manqua de s’étouffer face au tact inexistant de son interlocuteur. Il avala une longue goulée et toussa pour chasser la surprise la question. Une vie intime ?

Tu m’as moi, tu n’as qu’à céder …

Il chassa la voix qui susurrait dans son crâne d’une chiquenaude mentale.

- Non. Les Mort Gris n’ont que l’apanage du célibat. Difficile de croiser l’âme sœur quand on passe la plupart de sa vie dans la Brume et qu’on n’a pour seule fortune la méfiance de ceux qu’on tire des griffes des monstres qui y rôdent … répondit-il, plus amer qu’il ne l’aurait voulu.

Ryker soupira, les yeux perdus un peu plus loin que Seraphah. Quel intérêt de nouer une relation intime quand chaque journée nous rapprochait du trépas ? Depuis qu’il avait accueilli sa parasite, il connaissait sa fin. Il savait qu’il n’y aurait pas de trépas heureux pour lui. D’autant plus que personne n’irait s’amouracher d’un fou qui risquait sa vie tous les jours, incapable de rester plus de deux jours au même endroit.

- Ahem. Et vous ? Que vous a apporté cette vie trépidante ? De ce dont je me souviens, beaucoup de jeunes personnes gravitaient autour de vous autrefois. Avez-vous fini par laisser l’une d’entre elles vous aborder ? continua-t-il avec un sourire sobre.

Puisqu’on était sur ce terrain-là, autant s’y engouffrer. On aurait dit un aïeul qui s’assurait que son petit protégé ait trouvé son bonheur et l’âme sœur. Qu’il reproduise le schéma propre à ses parents, et ponde quelques marmots pour assurer les générations futures. Car oui, il fallait bien se résoudre à une chose : Ryker n’avait personne. Et encore moins depuis la mort d’Aelys, sa protégée. Il inspira à ce souvenir douloureux. La souffrance rôdait dans ses pas et il restait l’éternel survivant. Mieux valait ne pas se lier …

- Sinon, vous ne m’avez pas dit qu’elles étaient vos activités exactement : vous semblez poursuivre beaucoup d’intérêts mais pour faire tourner tout ça il faut bien des ressources non ? J’ai entendu dire que les Von Arendt étaient très liés au Magistère … poursuivit le Patrouilleur, une petite connexion venant de se faire dans sa cervelle.

Il se recula, fit rouler son épaule endolorie d’avoir porté son sac si longtemps. Peut-être que la question de Seraphah l’avait blessé, après tout …
Dim 14 Avr - 23:57



Au Bon souvenir de la Brume

Ft. Ryker Lestat




Le temps ne semblait pas avoir tari votre relation. Au contraire, cette dernière semblait plus vivace en cet instant, comme si l'ancien n'avait demandé qu'à être arrosé à nouveau. Même si l'énergie qui circulait entre vous était toujours aussi vivante, il n'en restait pas moins que tes traits avaient changé. Tu n'étais plus un adolescent en quête d'expériences. L'élémentaire ne pouvait qu'imaginer qu'au sein de la Guilde tu avais eu ton lot au point de craindre davantage les endroits propres et classieux plutôt que de camper en pleine brume. Au moins savais-tu apprécier et ne pas bouder un bon repas quand il se présentait, et cela suffisait en cet instant à rendre satisfait Seraphah qui avait adoré prendre soin de toi à l'époque, et voyait que son hospitalité pouvait t'être agréable.

Il sourit à entendre ta surprise face à son côté aventurier. Beaucoup de personne se méprenaient sur son compte, bien souvent car il appréciait être bien habillé ou qu'il pouvait avoir le verbe facile au point qu'on occultait sa stature et ses connaissances plus de terrain. Puis il était vrai qu'on ne pouvait comprendre où il avait le temps de s'adonner à tant d'activités différentes...Au moins tu allais pouvoir t'en faire une meilleure compréhension d'ici quelques instants.

Il se saisit d'un verre qu'il emplit d'un vin foncé, le levant à sa bouche tandis qu'il assistait à ta gêne face à sa dernière question. Trop tôt sans doute, pensa-t-il brièvement tout en restant attentif à tes paroles. Il nota ainsi davantage le ton que le sens de tes paroles. Amertume. Y avait-il en toi une ambivalence entre ce que tu aimerais vivre et ce que tu te crois possible de vivre? Certainement. «J'aurai imaginé qu'une autre membre de la Guilde aurait pu croiser votre route...Mais j'entends qu'il n'en est rien.» Une personne qui saurait ce que cela fait d'avoir un but qui guidait nos pas au-delà d'une vie de famille bien rangée.

Il inclina doucement le visage à tes insinuations que les personnes qui lui tournaient autour comme tu le disais. Son sourire se fit plus grand: «J'ai été marié avant que je ne prenne soin de vous...Depuis les personnes continuent de tourner, parfois je danse avec elles, mais rien de bien sérieux.» Était-il volage? Pas vraiment. Il adorait les jeux de l'esprit et à l'occasion d'une soirée pouvait se laisser tenter. Mais il était loin de courir après une quelconque personne...Il avait compris que les sentiments se cultivaient à deux et sur la durée. Comme ceux qu'il cultivait envers la Brume et ses secrets.

«J'investis énormément et cela depuis de nombreuses années. Dans des entreprises, mais également dans l'art...Puis il y a bien entendu cet hôtel.» Il omit de parler de son propre commerce d'arts et artefacts rares. Cela était de l'ordre du détail à ses yeux tout comme ses recherches en science et technologie, même si cela est ce qui est le rendement le plus minime.

Son regard vint chercher tes prunelles. Son expression était désormais plus grave. Tu pouvais être sûr que ce qui allait suivre relevait d'une certaine importance. «Je suis vraiment reconnaissant Ryker que la Brume nous ait permis d'ainsi nous retrouver. J'ose espérer pouvoir rester en contact et vous assurer être le bienvenue en tout temps au sein du Marquis.» Il ne savait pourtant pas l'homme que tu étais aujourd'hui, se basant uniquement sur ton allégeance à la Guilde. «Si je porte le nom de Von Arendt, ce n'est nullement par le lien de sang. Mais bel et bien par alliance il y a de ça, presque un siècle.» Il fit une pause, son regard brillant d'un feu qui paraissait presque vivant. Il voulait s'assurer que l'information s'intègre en toi avant de poursuivre.

«J'ai été torturé par les Von Arendt...et au bout de plusieurs années, l'une d'elle me délivra de sa propre famille...Après d'autres mois, elle me proposa le mariage...un nom, une identité forte, un affront pour les siens. Une vengeance contenue en ce qui me concernait. J'ai tout de même hérité d'une part de leur richesse et aies gardé quelques contacts de ceux qui me voyaient autrement que comme une bête de cirque.»

Il reprit une gorgée du vin, te tendant la bouteille afin de te servir. «J'arpente cette terre depuis beaucoup plus longtemps...Alors oui, je mène plusieurs activités de front parce que je n'ai pas besoin de dormir tout comme vous. Et ces ressources ont été établies depuis comme vous le comprenez bien plus qu'une vie humaine.» Il prenait soin de sonder ton visage, même s'il se doutait que tu devais être coutumier de rencontrer des êtres tels que lui, ou ne serait-ce, plus courant, des porte brume. «Je suis un élémentaire mon cher Ryker.» Un doux sourire accompagna ces dernières paroles.


Mer 17 Avr - 15:41
Ryker conservait de bons souvenirs de son passage ici, même s’il avait passé son temps à resquiller et à tourner son esprit adolescent vers l’extérieur. Il avait un sentiment d’impatience qui s’était gommé avec le temps et cette parenthèse dans sa vie avait été auréolée de la candeur d’une vie plus simple. Sa fugue l’avait mené à vivre tant de souffrances qu’il aurait préféré écouter, rester dans ce cocon. Voilà, la sécurité. Il se sentait en sécurité ici. C’était paradoxal pour un Patrouilleur. Cette relation avec Seraphah était-elle tout ce qui lui restait de son passé ? La seule chose positive qui fut encore présente en Uhr ? Il soupira. Sa vie était bien triste. Depuis que Lestat s’était invitée en lui, tout était allé de mal en pis. Il ne comptait plus le nombre de morts sur son passage, les villages dévastés qu’il avait pu trouver. Il aidait ceux qu’il pouvait, mais ce n’était pas assez. Jamais assez. Tout ça pour que ceux des villes puissent survivre. Ainsi n’avait-il pas envisagé une seule seconde que d’autres aient pu se livrer à pareil combat et aient choisi la protection des murs après cela. Il voyait sa vie comme un sacrifice pour une juste cause. Peut-être qu’il cherchait aussi à s’en convaincre.

Le Patrouilleur se redressa, s’empara lui aussi d’un verre pour se désaltérer. Il y avait longtemps qu’il n’avait pas goûté autre chose que le fond d’une chope tiède. Il goûta le vin. Posa le verre et s’essuya la bouche. Les tanins prononcés lui donnaient l’impression de mâcher de la terre, avec un arrière-goût puissant qui éveillèrent sa curiosité. Il fronça cependant les sourcils.

Méfie-toi, petit humain, ne le trouves-tu pas … trop chaleureux ? ricana sa voix intérieure, sa part de Malice.

Un frisson parcourut son échine, tandis que la paranoïa que sa nebula savait instiller en lui se déroulait dans les moindres recoins de sa psychée. Il secoua la tête, chassa ces pensées parasites. Il se concentra sur ce sentiment de sécurité, ne sachant pourquoi elle s’était ainsi emballée pour tenter de le convaincre de se méfier. Il n’arrivait toujours pas à comprendre pourquoi elle le malmenait ainsi : cherchait-elle à le faire craquer ? A le transformer en Errant ? Il en était convaincu … mais il était plus facile de s’en faire une ennemie que de réaliser que, bien souvent, elle avait participé à sa survie.

- Pardon ? laissa-t-il échapper en haussant un sourcil.

Sa main chercha instinctivement une arme, son cœur s’emballa et il eut un mouvement de recul. Il avait écouté les révélations de Seraphah avec circonspection mais au fur et à mesure du récit, les éléments s’emboîtaient et révélaient une vérité qu’il n’était pas prêt à accepter. Il confirma ce que le pauvre élémentaire avait déjà du vivre à chaque fois qu’on découvrait sa nature. La crainte, la peur. Mais dans le cas de Ryker, il y avait d’autres raisons qui le poussaient à cela. Il avait déjà combattu des élémentaires responsables de destructions massives. Il n’avait que très rarement réussi à discuter avec eux. Ils étaient des êtres exceptionnels. Des êtres issus de la Brume. Il ouvrit la bouche. Il était un Patrouilleur, condamné à arpenter la Brume et à la combattre.

- Pardon ? répéta-t-il, tandis que les pouvoirs de sa nebula se glissaient en lui et faisaient suinter une abrogation toute malicieuse.

Il observa l’élémentaire, ne décela aucun danger émanant de lui. Il resta tendu, assis. Pourquoi lui révélait-il cela ainsi ? A quelle fin ? L’avait-il attiré ici pour le … non. Cela n’avait pas de sens. Il secoua la tête, refoula l’influence de la nebula et contint son raisonnement à tout ce qu’il pouvait trouver de logique dans cette situation. Etait-il possible qu’un élémentaire soit quelqu’un de bon ? Oui. En théorie. Bien qu’en général, ces derniers n’aient … aucun penchant pour quoi que ce soit. Ils étaient, voilà tout.

- Un élémentaire ? Sous forme humaine ? C’est … très rare. Encore plus aussi bien implanté dans une société. répondit-il sans lâcher sa méfiance, son cerveau essayant de trouver une logique à cette situation.

Issus d’une nebula qui n’avait pas trouvé d’hôte. Qui s’était transformée au fil du temps … Il observa mécaniquement les issues. Les élémentaires étaient puissants. Impossibles à défaire sans aide, ou ressources. Il en avait rencontré dans la Brume et ailleurs. Jamais en ville. Jamais ainsi. Que devait-il faire ? En comprendre ? Sa vie n’avait-elle était marquée que par cette foutue Brume ? Un pan sembla s’écrouler dans sa mémoire, éclatant cette sensation qu’il avait éprouvée un peu plus tôt. Le goût terreux du vin se transforma en cendres.

- Quel est votre dessein ?
murmura le Patrouilleur, ne sachant quelle posture adopter face à une telle révélation. Les élémentaires torturés deviennent des vengeurs. Ceux que j’ai combattu, du moins.

Qu’est-ce qui avait marqué Seraphah ? Quelle histoire avait façonné son identité ? Les créatures avec une aussi grande longévité ourdissaient des plans sur des décennies, voire siècles. Impossible à appréhender pour lui, alors il se concentra sur ce qu’il savait faire de mieux : combattre la Brume. Ses instincts revinrent au galop et tout dans sa posture trahissait le combattant aguerri, certain qu’il était tombé dans un piège. Mais, à la fois, une sorte d’espoir que ce ne fut pas le cas. Il n’était pas très bon comédien, cela n’avait jamais servi à rien dans la Brume.

Mar 7 Mai - 0:18



Au Bon souvenir de la Brume

Ft. Ryker Lestat




La crainte. Plus que l'étonnement. Une peur malicieuse qui s'inscrivait peut-être en toi en raison d'expériences malheureuses. Seraphah garda son calme. Tu n'étais pas un danger à ses yeux, même s'il savait à quel point la peur pouvait générer des réactions qui défiaient toute imagination. Il perçut ton geste qui cherchait de quoi combattre. De son côté, il ne pouvait à cet instant que s'imaginer justement, ce que tu avais bien pu vivre pour ainsi le voir lui comme un danger. Il n'avait pas prévu de te revoir, encore moins de te dévoiler sa nature. Mais il savait que c'était ce qu'il y avait de plus juste. En raison de votre passé. Mais aussi de votre futur. Oui, en très peu de temps il s'était convaincu que vos pas auraient à se relier. Mais à cet instant, le doute aurait pu s'emparer de lui comme la peur de ton côté.

Les autres mots s'articulaient ensemble. Une phrase. C'était déjà mieux. Même si ta posture en disait long sur le non relâchement qui t'habitait. Et puis cette surprise à travers tes paroles. Non. Ton cerveau cherchait une logique. Il n'en trouvait pas. Et Seraphah savait que tu avais raison. Plusieurs des siens préféraient la liberté de leur élément plutôt que ce corps à maintenir en permanence. Sans parler de sa position sociale. Il n'aurait jamais cru devenir sapiarque un jour...Jusqu'à ce qu'il comprenne que ses ambitions auraient besoin de moyen. Jusqu'à ce qu'il se rende compte que le sort des humains lui incombaient. Pas autant que de définir la Brume elle-même, mais plus que d'autres humains. C'était en cela qu'il était un élémentaire rare.

«Ai-je l'air torturé?» Un sourire illumina ses traits. Contraste. Il ne semblait pas de son côté vouloir te combattre. À dire vrai, rien ne laissait transparaitre dans sa posture ou le ton de sa voix qu'il voyait la scène de la même façon que toi. Mais il n'était pas non plus idiot. Juste sans mauvais dessein à ton encontre. «Je ne cherche à me venger de personne. Et comme je l'ai mentionné, ceux qui m'ont fait du mal continuent de souffrir à voir leur nom porté par ma personne. Cela m'est bien suffisant. Ça et le fait que loin de me tapir, je me suis élevé afin de pouvoir aider toute personne qui pourrait vivre le même sort que moi. Cela concerne notamment les Porte-Brume...Je me désole de voir à quel point la différence est crainte et parfois même esclavagée, au lieu de voir cela comme une force.» Il avait vu trop de personnes se voir rejetées de leurs proches ou de leur patrie, simplement car la Brume les avait choisi. «En tant que membre de la Guilde, je suis certain que vous en connaissez...beaucoup gardent cela secret, comme une tare ou un fardeau...mais cela n'est pas une obligation.»

Toute les nebula ne cherchaient pas à corrompre. C'était une demi-vérité, comme il y avait des hommes foncièrement bons et d'autres mauvais. À son sens, c'était une histoire de caractère mais aussi de vécu...et de choix.

«Je suis navré que mes mots aient pu vous écorcher. Accepteriez-vous de m'en dire davantage sur votre vécu? Votre réaction me prouve que je ne suis pas le premier élémentaire que vous avez croisé...mais en avez-vous croisé qui ont décidé de prendre part à ce monde, ou simplement ceux ivres de leur nature originelle?»

Il en avait lui-même croisé, simplement étant de même nature, cela n'allait jamais bien loin. Mais s'arrêter à une nature pour définir qui est un monstre ou non, serait trop simpliste. À ses yeux, il avait vu que la monstruosité prenait naissance dans n'importe qui. Même des humains.


Mer 16 Oct - 15:36
Il était difficile de juguler cette part ancrée de combattant, de survivant. Lorsqu’on parlait élémentaire, c'étaient les cadavres calcinés de ses frères qui revenaient. C'était l'instant sale où il s’était laissé envahir par sa part de Brume, dissociée dans son esprit par des traits d’humour tout aussi noirs. Il la savait factice, et pourtant … il était bien plus facile de lutter contre si il lui prêtait une individualité. Il serra donc les dents, observa Seraphah. Les Aventuriers foudroyés, les ruines ravagées. Des morts, des torturés. Une destruction violente et immédiate. Il savait ce qu’il fallait faire pour les combattre, comment les détruire et qu’il le veuille ou non, ce savoir déferlait dans sa tête à présent. Il en frémit. Tenta de calmer son cœur, son instinct. Il n’était pas sous la Brume, il était au Marquis. C’était Seraphah qu’il avait devant lui, pas un être de Brume incarné sous forme taurine en train de ravager le torse d’un paysan. Trop de morts, trop de sang. Il se força à se détendre, mais ses traits creusés témoignaient des traumas qu’il avait pu vivre.

Il l’écouta, dressa malgré tout son plan et ses actes. Etudia la créature, définit les voies de retrait. Le mobilier, son agencement et comment il pouvait utiliser le décor à son avantage. Non, ça n’avait pas de sens, du calme. Du calme … il existait bien des golems paisibles. Des Portebrumes … concernés. De nombreuses entités nées de la Brume avec un dessin élévateur. La Brume était sa génitrice, rien de plus. Les circonstances faisaient les individualités et plus rarement l’inverse.

- Non. Vous n’avez pas l’air … ainsi. répondit-il, toujours engoncé dans les souvenirs sordides qui découlaient de ses précédentes interactions avec des élémentaires. Je comprends mieux le lien avec les Von Arendt … et la difficulté que vous avez dû traverser – bien que je n’ai aucune connaissance précise en Opale, je connais leur réputation. C’est tout à votre honneur d’avoir une telle … cible dans le dos.

Vint la question sur les nebulas. Il se redressa, un frisson glacé dans le dos. Preuve de sa confiance, Seraphah n’avait pas hésité à se vendre. Le prolixe Patrouilleur cachait son secret depuis si longtemps que la simple idée de penser à le partager le perturbait. Il repoussa cette idée, qui s’empressa de revenir. Beaucoup pensaient qu’il n’y avait que des Portebrumes chez les Patrouilleurs, ce qui était à moitié vrai. Ryker était une exception : il était parmi ceux qui avaient déjà survécu un temps anormal. Sans compter qu’il n’était pas un criminel, mais un engagé volontaire. Un taré, donc, aux yeux de beaucoup. Tarés et Portebrumes étaient souvent synonymes. Bon dans son cas ça se vérifiait. Mais pas parce qu’il était un Portebrume. Il était simplement rassuré de savoir que plus il marchait avec Elle, plus il avait de chances de s’abandonner à Elle sans causer de dégâts. Il savait quel pouvoir il portait en lui. Il savait sa force et la puissance qu’il déploierait si jamais il se trouvait au mauvais moment au mauvais endroit. Tout comme il savait que les rares Portebrumes qui y avaient fait face … s’en étaient trouvés soulagés. Il inspira.

- Oui, les Portebrumes. Contaminés par la Brume, destinés à mourir dès l’instant où ils ont été touchés par Elle. Beaucoup le sont, parmi les Patrouilleurs. Beaucoup prennent l’habit en espérant que l’Errance les cueille au milieu de la Brume pour ne pas causer plus de tracas. Le suicide n’est pas la solution la plus efficace, je connais quelques personnes pour qui l’acception de mettre fin à leur jour à précipiter le passage vers l’Errance … expliqua-t-il avec un ton monocorde, les yeux dans le vague.

Oui, il y avait déjà pensé. Mais il pouvait faire tellement avec ce don de la Brume pour aider les autres, avant qu’il ne soit trop tard pour lui. Il les pourchassait. Les tuait. Le Patrouilleur tueur d’Errants. Un jour, il en ferait une triste ironie.

- Et je suis désolé de ma réaction, Seraphah. Mon travail me pousse davantage à sortir mes armes qu’à réfléchir. Je traque et j’élimine les menaces dans la Brume et à sa périphérie. Ainsi, j’ai rencontré beaucoup d’élémentaires agressifs et meurtriers. Qu’ils soient ivres de leur nature, tels des feux de montagne … ou d’autres plus virulents prenant un aspect taurin mêlé à l’essence même de la terre pour dévaster un village. Plusieurs sont morts sous mes coups, sous les coups de mes camarades. Cela tient souvent à la volonté primaire qui les pousse à s'incarner. Je suis désolé de vous avoir traité de rareté. La plupart des élémentaires ne sont pas …. comme vous. tenta-t-il de s’excuser de façon un peu pathétique.

Il hésita. Quel risque prenait-il ? C’était Seraphah, bon sang. Ce qu’il venait de lui dire était un gage de confiance, une invitation à la loyauté. Il frémit. Il se sentirait libéré d’un fardeau, il pourrait se reposer, partager ! Depuis quand n’avait-il pas fait cela ? Depuis quand avait-il pu être entier, avec tous ses travers ? Il avait envie de redevenir humain, de se sentir … moins seul. Moins envahi par ces pensées, par la puissance de cette nebula qui grandissait en lui et obscurcissait de plus en plus ses sens. Il le savait, chaque mois était une douleur supplémentaire à supporter. Dix années. C’était long, tellement long … Il ne tenait que grâce à sa volonté et, peut-être, sa propre idiotie moralisatrice. Il se voyait comme un Protecteur, comme un combattant du Juste. Protéger le maximum de gens, sauver des vies. Il tenait mieux le compte de celles qu’il avait perdues que celles qu’il avait sauvé. Mais le nombre de monstres qu’il avait occis aurait dû parler pour lui. Ceux qu’il n’avait pas occis le faisaient encore mieux.

- Mais rien n’est pire qu’un Errant … rien n’est pire que la folie destructrice d’un Portebrume qui a cédé, qui s’abandonne. Je plains … je plains tous les Portebrumes pour porter ce fardeau et cette destination promise en eux.

Son regard se perdit dans le vide. C’était une façon de voir les choses. Partager ses craintes … Il sentit sa part de Brume ricaner dans son cerveau, manifestation sordide de ce destin qu’il redoutait. Il le savait, qu’elle gagnerait à la fin.