Astrebrume

Affalée dans un chariot les mains derrière la tête, Violette faisait la sieste alors que la voiture continuait sa route vers le nord. En réalité quand bien même elle avait les yeux fermés, difficilement de pleinement dormir, on était loin ici des routes de qualité qui étaient celles apprêtées pour le commerce entre Opale et Epistopoli. C’était là des belles routes de campagne pleines de bosse et de boue pour peu que l’on soit dans une semaine de pluie.

Enfin bon, elle avait l’habitude de valdinguer dans tous les sens en fonction de la médiocrité de la route ainsi elle tentait de ne pas y faire attention, comptant sur sa chance pour ne pas prendre un mauvais coup à cause d’une énième secousse.

Que faisait-elle dans cette voiture allant droit vers un trou perdu du nord Xandrien ? Bonne question, sans aucun doute quelque chose en rapport avec le Cartel. Violette étant une personne assez casanière et sédentaire, il était assez rare de la voir bouger de chez elle sans aucune raison professionnelle. Elle n’éprouvait aucun désir particulier à voyager et à découvrir de nouveaux paysages.

Et lorsque c’était le Cartel qui la missionnait, c’était que l’affaire était importante. Quand bien même la maraudeuse prétendait le contraire déclarant à qui le voulait qu’elle n’était rien d’autre qu’un pion futile et sacrifiable, la réalité était différente. Portebrume oblige, elle avait de la valeur pour ses employeurs encore plus avec un pouvoir aussi rare et multiple dans ses possibilités que le sien. Si des pouvoirs plus destructeurs étaient souhaitables en combat, pour une organisation dont l’objet était de jouer au chat et à la souris avec les autorités de différents pays, la fortune avait une autre valeur. D’autant que l’affaire où elle avait été confrontée au Magistère l’avait démontré presque contre la volonté de la jeune femme qui s’était vue offrir pour première récompense l’augmentation de ses missions et de ses attributions. La maraudeuse n’ayant rien pu refuser si ce n’était une montée en grade dans la hiérarchie qu’elle ne voulait pas.

La mission du jour : Deux disparitions dans une des plantations secrètes du nord. Trafic de drogue oblige, le Cartel Xandrien se doit d’avoir ses propres petites infrastructures cachées ici et là, pour cultiver les ingrédients de ses produits qui ont besoin de froid mais aussi pour pouvoir tranquillement préparer les substances à travers une connaissance minutieuse de l’herboristerie et de l’alchimie.

Malheureusement pour des raisons inconnues, une de ses petites infrastructures avait cessé de communiquer. Ce qui en général était mauvais signe. Soit les agents présents sur place avaient été capturés, soit ils étaient morts. Il y avait rarement d’autres débouchés à ce genre de situation.

Après quelques jours de route en compagnie de celui qui menait le véhicule, le duo parvint finalement à atteindre l’orée du bois. Préparant un camp rapide face à la forêt avant la tombée de la nuit, les deux criminels se reposèrent ensuite afin de commencer l’enquête au petit matin.

Comme prévu, tu pars seul, j’attends ici.

Violette hochait la tête tout en prenant son sac de vivre. Normalement ce n’était pas nécessaire mais il valait mieux être trop prudent que pas assez. Sa vie en tant que mercenaire lui avait déjà assez démontré l’importance de ce genre de chose.

Alors que la demoiselle allait se retourner pour commencer sa marche, son camarade lui tendais quelque chose.

Tiens, oublie pas ça. Prends une fusée de détresse au cas où. Histoire de savoir si c’est vraiment la merde.

La portebrume regarda la fusée quelques secondes avant de la prendre et de soupirer.

Ouais, ‘fin j’serais ouverte en deux avant même que tu fasses trois pas si je tire.

Le criminel répondit de manière sarcastique.

On s’ra au courant au moins.

Humpf. Ta gueule ducon.

L'homme se mettait à rire tandis que Violette se retournait sans un mot de plus pour entrer dans la forêt.

Fait gaffe à toi.

Levant la main pour dire au revoir sans se retourner, la xandrienne répondit en un mot.

Ouais.

Disparaissant entre les arbres, elle ne se doutait pas encore que cela serait le point de départ d’une petite aventure.

Désormais seule, la portebrume s’avançait d’un pas prudent dans cette forêt sombre. L’hiver approchant, le froid commençait déjà à mordre, sans doute renforcé par la position nordique et proche des terres gelées du Daim.

Cachant ainsi la partie inférieure de son visage sous une écharpe afin d’échapper aux aléas du vent mordant et de la température, pendant près d’une demi heure, elle suivit le chemin indiqué sur ses plans. La forêt était après tout des labyrinthes sauvages où il était difficile de pouvoir se retrouver si l’on ne connaissait pas le terrain. D’autant plus que pour ceux qui n’étaient pas proche de la nature, la capacité à différencier les arbres même d’une même espèce restait rare et miraculeuse.

Heureusement sans être aussi experte qu’une forestière, la demoiselle savait se repérer dans l’espace. Après tout, la survie dans la brume et les dédales qu’étaient les bidonvilles xandriens nécessitent d’avoir un bon sens de l’orientation et surtout de l’observation. Autant dans le mercenariat que dans le crime, il était facile de se faire planter pour défaut d’attention.

Pendant ce petit trajet, rien ne se passa. Violette avait pensé que peut être il lui arriverait quelques histoires si jamais comme cela était possible les agents du cartel avait été tué pour quelques raisons que ce soit. Mais rien de dangereux ne vint l'accueillir si ce n’est la danse et le son des pins face aux vents du nord.

Ainsi sans grande difficulté, la maraudeuse parvint jusqu’à une petite clairière dissimulée. Caché entre les armes, des plantations et quelques petites maisons. Le tout pour pouvoir y vivre mais également y couper et préparer de la drogue.

Jetant quelques coups d’œils en s’approchant, la main droite posée sur la garde de sa rapière par sécurité. Il ne fallut que quelques mètres pour que Violette s’arrête, fronçant les sourcils.

Ca sent la mort, le cadavre.

Crispant un instant les lèvres, la portebrume refaisait un tour sur elle-même pour vérifier qu’il n’y avait personne. Et en effet, il n’y avait rien. Elle aurait préféré que son adversaire se montre tout de suite mais visiblement soit il ne l’avait pas encore repéré soit il avait l’intention de garder le suspens pendant un bout de temps.

Dégainant alors sa lame, la xandrienne suivit alors les odeurs, le regard noir avant de finalement arriver face à grand arbre au pied duquel, deux corps putréfiés, dévoré par les insectes et les vers reposaient.

Violette regarda un instant les corps silencieusement avant de poser un genou à terre pour se mettre à leur niveau, la lassitude passant un instant dans son regard.

Désolé pour vous les gars..

Baissant la tête, elle respira un grand coup avant de soupirer.

La moindre des choses que j’peux faire c’est de vous venger. J’vais crever le fils de pute qui a fait ça. Z’avez ma parole.

Restant un instant à terre, elle finit par se relever, le regard à la fois noir et maussade. Quand bien même elle n’avait jamais été la personne la plus expressive dans sa peine et sa tristesse, il restait difficile de perdre des camarades que l’on connaissait depuis des années. Plus qu’une simple guilde d’anonyme remplaçable et remplacée. Le Cartel était presque une famille, un grand clan pour ceux qui à Xandrie n’avait rien si ce n’était que la honte d’être miséreux. Dans la souffrance et la galère, chacun avait commis des saloperies. Mais on les avait faits ensemble. Attaquer un membre du Cartel, c’est attaquer le Cartel tout entier. Il n’y aurait pas de pardon. Le coupable crevait.

Alors qu’elle s’apprêtait à se rapprocher à nouveaux des bâtiments pour préparer un plan et vérifier que le meurtrier était bien parti, soudainement une voix l’interpella de nulle part.

Tu devrais partir d’ici avant qu’il ne soit trop tard.

D’un geste vif et rapide, la portebrume se retourna vers l’origine du son. Personne. Ou plutôt quelqu’un… mais sa présence semblait être partout à la fois. Finalement après une minute, cette fois ci plutôt que des paroles, des bruits de pas. Les branches sur son passage s’écartant naturellement d’elle-même sans que l’entité n’eût besoin de faire quoi que ce soit, la créature se montra à la xandrienne.


Des cheveux longs et blancs tombant longuement au sol. Un corps particulièrement végétalisé… Cette chose n’était pas humaine… Qu’est ce que c’était ? Un élémentaire de nature ? Un Hespéride ? Où peut-être étaient-ce vraiment les pouvoirs d’un humain transmuté par le biais d’un cristal élémentaire de nature… Le problème avec la brume et toutes les choses occultes liées à cette dernière ce que cela donnait trop de possibilité et de solution crédible à chaque problème. C’était vraiment chiant de réfléchir avec elle.

Pointant sa rapière vers l’inconnue qui tout en se rapprochant lentement restait complètement muette, Violette se contenta pour premières solutions d’une simple question.

Qu’est ce que t’es ?

Silence pour réponse. L’être végétal au visage de marbre n’avait de toute évidence par l’intention de répondre à ses questions.

Qu’importe, la portebrume continua à l’interroger. Peut-être qu’elle aurait plus de choses à dire sur d’autres sujets. Ainsi, d’un geste de la tête, elle désigna les deux cadavres.

C’est toi qui a fait ça.

L’inconnue s’arrêta, jetant un instant un coup d’œil aux cadavres avant que son attention ne revienne sur Violette.

En effet. Je conçois le difficile équilibre entre nature et civilisation… Néanmoins… il y a des choses que je peux tolérer. Ainsi…

Sans qu’elle eut le temps de finir sa phrase, la criminelle bondit sur elle, lui lançant un coup de lame horizontale que l’inconnue esquiva sans mal d’un bond en arrière. L’attaque ne semblait pas l’étonner comme cela. Pour ainsi dire et cela était même étonnant du point de vue de la xandrienne, l’ennemie avait commença à esquiver avant même qu’elle n’engage sa propre attaque.

Oh ? Tu ne me laisses même pas finir ? Tu aurais pu tout savoir…

Un sourire dangereux sur le visage alors que la portebrume retrouvait son équilibre au sol, elle répondit rapidement.

Est ce que j’ai l’air d’avoir une tête à chercher la vérité et la justice.

Elle ne cherchait que de la vengeance, elle ne s’en cachait pas. De ce fait, elle se foutait de savoir les justifications, les raisons, si leurs morts pouvaient être justifiés. La seule chose qu’elle voulait savoir c'était qui elle devait abattre, rien de plus rien de moins. Tout le reste n’avait aucune importance.

N’attendant pas plus, Violette repartait à l’assaut, jouant de sa lame que l’inconnue continuait à esquiver. A force la maraudeuse avait comprit ô combien ses capacités d’esquive surpassait sa propre agilité. Néanmoins, elle ne parvenait pas l’expliquer. Cette personne n’était ni plus rapide ni plus forte qu’elle. Elle n’était pas non plus dotée d'un réflexe transcendant par rapport aux siens. Violette s’était donc décidée à la prendre par surprise histoire de voir ce qu’il en était vraiment.

Continuant de jouer de sa rapière de plus en plus haut afin de relever son axe visuel vers les hauteurs, de sa main gauche alors caché par le reste de son corps, la portebrume récupéra de sa ceinture son arme à feu avant de tirer dans un angle exiguë entre son torse et son bras directement sur l’ennemie. Fortune faisant, elle n'avait pas peur de se blesser. Étant naturellement chanceuse, elle avait également augmenté drastiquement ses probabilités de réussite via son pouvoir vivifié.

Néanmoins, sans même que l’inconnue ne baissa le regard, une plante naissait du sol, interceptant la balle sans grande difficulté. Par réflexe devant cette plante, la portebrume recula soudainement par sécurité. Ce genre de pouvoir pouvait être dangereux à bout portant.

Style déloyal. Approche sans honneur. En effet… Tu es bien comme eux.

La criminelle ne répondait pas, se remettant en position de tir, cette fois-ci à plus grande distance alors qu’un plus grand nombre de plantes émergeait du sol devant l’inconnu. Tirant de nouveau, les plantes interceptaient ses balles sans grande difficulté. Cela pouvait paraître simple, mais en réalité arrêter déjà une balle demandait d’avoir des réflexes suffisamment aiguisés pour assimiler et prendre des contre-mesures contre une attaque qui dépassait le mur du son, peu de gens étaient capables de faire ça aussi naturellement.

C’est inutile. Tu ne parviendras pas à me toucher.

Humpf. Je sais.

L’inconnue entendit alors un craquement derrière elle. Surprise, elle se retourna pour voir un grand arbre tombé sur elle.

Que ?

Elle voulut le bloquer mais ces plantes devenaient curieusement plus difficiles à contrôler et à gérer si bien que l’arbre s’écrasa sur elle.

Au bout de quelques secondes toutefois, l’inconnue se releva, son corps abîmé composé d’une multitude de plantes commençant à se reformer progressivement tandis qu’elle réfléchissait.

Etrange…

Elle jeta alors un coup d'œil vers Violette mais cette dernière n’était pas là, elle avait littéralement disparu grâce à son pouvoir d'invisibilité.

Elle se dirige ailleurs…

L’inconnue souriait.

Elle essaye de fuir… ?

Merde putain…

Tout en courant en état d’invisibilité, la portebrume s’enfuyait des lieux du combat. Il y avait un problème, en l’état elle ne pouvait pas gagner. Si son adversaire était capable d’anticiper toutes ses attaques, elle n’avait aucune chance de la vaincre. L’intégralité du pouvoir et du style de la xandrienne reposait sur la maîtrise des événements et non sur le fait de surpasser par la force et la puissance ses adversaires. Si quelqu’un en face d’elle était capable de mieux maîtriser les événements qu’elle, elle devenait impuissante.

Elle n’abandonnait pas l’idée de tuer ce monstre végétal, néanmoins il lui fallait comprendre ses capacités afin de faire quoi que ce soit. Qu’est ce que pouvait bien être ce pouvoir. Une capacité de voir l’avenir ? Non, dans ce cas elle aurait pu anticiper la chute de l’arbre sur elle. Elle était en capacité d’anticiper les attaques simples mais pas complexes. Dans tous les cas, elle avait deux pouvoirs, l’un de maîtrise des végétaux, l’un pour saisir la plupart des stratégies directes de ses adversaires.

Pour l’heure, il lui fallait chercher des informations et pour cela elle devait revenir aux bâtisses pour atteindre les journaux de bord des lieux avant que le monstre ne la retrouve. Elle n’aurait sans doute que quelques minutes, elle devait ainsi compter sur sa chance. Par une manipulation active des probabilités, elle devait décupler sa capacité à tomber sur les bonnes informations parmi les centaines de pages des livres.

Entrant en trouble dans les bâtisses abandonnées, la maraudeuse se jeta sur les documents, les compulsant rapidement jusqu’à ce qu’avec l’aide de sa fortune, elle tombe sur les informations recherchées. Le nom de ce monstre était Zahel, une Hespéride qui vit depuis des siècles dans ses bois. Initialement pacifique, tolérant l’implantation d’une base en échange de la fourniture par le cartel d’un cristal élémentaire de plante, la situation serait devenue tendue lorsque le Cartel aurait trouvé dans les bois, une mystérieuse graine que l’hespéride voulait obtenir. Mais malheureusement pour elle et pour les hommes, le Cartel ne rend jamais ce qu’il prend. L’Hespéride a tué les hommes, mais ils ont le temps de cacher la graine pour qu’elle ne l’obtienne pas.

Le monstre, utilisateur en dehors de son cristal du pouvoir d’hypersensibilité à la faculté de ressentir à travers les émotions, les intentions d’autrui. C’était ce qui lui permettait de pouvoir anticiper les attaques. Il ressentait les intentions de Violette avant même que cette dernière n'ait commencé son geste. Mais puisque la détection des intentions était une version d’utilisation complexe de la détection des émotions, la demoiselle ne pouvait que ressentir les intentions simples et linéaires.

D’accord, une bonne partie des événements s’expliquaient. Petit à petit, un plan se dessinait dans l’esprit de la demoiselle. Prenant des fioles et de la poudre ici et là, elle se figeait un instant. Et la graine ? Caché… Cela voulait dire qu’elle devait être par ici. Tournant le regard à droite et à gauche, la portebrume de la fortune en utilisant de nouveau ses pouvoirs statistiques fit le tour des lieux avant que finalement alors qu’elle marchait sur le plancher, celui-ci se brisait sous l’un de ses pieds, laissant apparaître une petite cache où se trouvait effectivement une graine. Prenant la graine entre ses deux doigts, elle l’inspectait que tout à coup une fenêtre se brisait.

Effectivement… Cela valait le coup de te laisser le temps de fouiller à ma place.

La xandrienne se retourna, prenant la graine de sa main gauche pour laisser à la droite le soin de se poser sur la gâchette de son arme.

Donne-moi cette graine, et tu auras la vie sauve.

Sans répondre, Violette tira dans une fenêtre avec l’intention de s’échapper. Comme prévu, l’hespéride s’y interposa envoyant une salve de plantes boucher cet accès. Soudainement, la maraudeuse changeait de trajectoire pour fondre sur l’hespéride qui cette fois-ci, quelque peu surprise recula de deux pas.

Comme prévu. Si elle peut lire les intentions, elle ne peut pas lire les plans en plusieurs étapes. Proche d’elle, la criminelle lui adressa un coup de genou dans le ventre que le monstre contra de sa main avant d’ensuite décale rapidement sa tête alors qu’une balle fut tiré par Violette. Pour éviter de prendre la balle dans la tête, Zahel avait été obligé de laisser passer son adversaire qui désormais sortait pour retrouver le plein air.

Presque vexée, la dame de la nature sortie en furie, le regard noir.

Ne me sous-estime pas humaine. Ne crois pas que l’anticipation soit ma seule force. Tu as dû le lire, je suis une hespéride.

Soudainement apparut à côté du monstre, des brumes noirâtres qui prenaient forme humaine. En voyant à quoi ressemblait désormais cette fumée, Violette écarquilla un instant les yeux avant au contraire de les froncer. Une colère froide de plus en plus chaude l’envahissait.

Alors toi… Je ne vais pas t’offrir une mort douce.

Présomptueux.

La fumée… avait pris les apparences de ses frères et sœurs, de sa famille, de ce qu’elle aimait. Tournée vers elle, cette dernière avait l’intention de la tuer, crachant à son visage des mots de colère et de haine. Violette ne réagissait pas vraiment à ses provocations, se contentant de fixer l’ennemi en tentant d’écouter le moins possible ce que ses ombres infantiles pouvaient dire. Ce n’était pas que cela la brisait en plein en combat. Néanmoins se voir cracher au visage ses propres doutes existentiels dans une forme matérialisée avait un certain impact psychologique sur le long terme.

Finalement, un de ses frères fonça sur elle une arme à la main. D’un geste, elle lui tira dans la tête. Le regardant s’effondrer lourdement au sol, dans un amas de sang, de chair et d’os de crâne brisé.

Ne pense pas que le fait que tes illusions prennent les formes de ma famille m’empêchera de les dégommer.

Ta famille ? Hum je vois. Ne t’inquiète pas, je ne le pensais pas. Il n’y a que les niais et les faibles d’esprit pour ne pas se défendre face à ce genre de chose. Mais cela laisse des traces n’est ce pas ?

Levant les mains, de nouvelles fumées apparaissent ici et là.

J’ai hâte de voir à quoi tu ressembleras après avoir dû tuer des dizaines de fois leurs images.

…

Sans rien dire de plus, Violette devenait invisible. Dans une réaction rapide, des plantes partaient vers elle, traversaient la zone de toute part sans lui laisser une chance d’esquiver malgré son invisibilité.

Je ne peux pas prédire tes intentions par mon pouvoir certes… Mais je peux le faire par mon propre intellect.

Une attaque de plantes large était moins dangereuse. Ce pouvoir élémentaire était moins létal que celui du feu. Néanmoins, cela faisait mal tout de même. Et de son coté gauche, la maraudeuse avait pris de plein fouet le passage des ronces et des feuilles tranches. Le bras et son torse étaient désormais lacérés, mais elle avait toutefois réussi à reculer avant de tomber en arrière entre les buissons.

Merde…

Hein ?

Elle sentait quelque chose en train de boire son sang. Elle tourna son regard vers sa main gauche, la graine bougeait en se nourrissant de son hémoglobine. Devenant plus grosse, elle grandissait jusqu’à une dizaine de centimètres avant de prendre petit à petit une forme plus humanoïde.


Putain, qu’est ce que t’es toi encore…

Dans sa main se trouvait désormais un autre petit être végétal. Le regard assez troublé de la portebrume croisant celui de la bestiale juvénile. Serrant les temps, la xandrienne jetait alors violemment contre un arbre ce nouveau monstre.

Dégage !

Le visage crispé, elle se remettait difficile debout, le bras engourdit et encore sanguinolent du fait des lacérations, le dos endolori à cause du choc et de la chute.

Oh… Le trent est né de ton sang… chanceuse… Malgré tout, mes efforts d’autant la graine n’a jamais germé.

Un trent ? En fouillant rapidement dans sa mémoire, il lui semblait déjà avoir entendu ce nom. Cela devait être celui d’un monstre des brumes, le genre de saloperie mythique dont les explorateurs se passaient les histoires de génération en génération.

La chance… est souvent de mon côté.

Pas cette fois.

Une salve de ronce partait de nouveau dans sa direction, devenant invisible violette s’enfonçait dans les bois poursuivis par l’hespéride cette fois ci bien plus méfiante face aux variations stratégiques de la portebrume. Le petit trent de son côté suivait, tant bien que mal, ce qui faisait sourire l’hespéride.

Les trents sont liés à la terre qui les a vu naître. Si tu t’éloignes trop de lui, il mourra.

Qu’est-ce que ça peut me foutre.

Ce n’était pas qu’elle allait s’amuser à planter gratuitement pour rire cette bestiole. Néanmoins peu importe la situation, jamais elle ne risquerait sa vie pour la sauver de quoi que ce soit. Il y avait des limites à tout, Violette protégeait toujours avant tout sa propre survie avant celle des autres, y compris vis à vis de sa propre famille.

Ainsi la xandrienne continuait à courir, lâchant aux passages quelques produits qu’elle avait récupéré dans la cabane.

Alors avoir lâché ses fioles, une dizaine de secondes plus tard, celle-ci explosèrent, enflammant au passage la zone.

L’hespéride s'arrêta alors net en se retournant.

Qu’est ce que…

10 mètres plus loin, Violette en faisait de même tout sourire.

Tu devrais t’en occuper… C’est peut-être des produits inflammables…

Plus loin d’autres explosions, qui en faisaient de même, cette course-poursuite avait permit à la portebrume de faire un véritable domino dans les longueurs.

Toi…

Le visage de l’hespéride se crispa de douleur.

Tu peux pas t’arrêter de ressentir hein ?

Se tenant la tête entre ses mains, Zahel se tordait de douleur. Dans le même temps, tout en rechargeant son arme, Violette observait les environs incandescents.

Douloureux n’est ce pas ? Les cris et le râle d’agonie des plantes et des animaux dévorés par les flammes.

L’hespéride se tourna soudainement vers Violette, le regard empli de haine, levant toutes les plantes qu’elle pouvait pour se protéger alors que la criminelle tentait son canon en sa direction. Inutile toutefois, son hypersensibilité était altérée par le flux d’information continu qu’elle recevait de la faune et de la flore en souffrance, elle était incapable d’anticiper pleinement l’action précise de l’humaine.

La balle partait renforcée par la fortune et la manipulation statistique de sa tireuse, passait ainsi avec la chance qui était la sienne, les plantes en mouvement pour frapper directement sa cible en plus torse. Celle-ci tombant alors en arrière sous le choc, lâchant dans le même temps son cristal, ce qui provoqua la chute de toutes ses plantes.

Les maîtres des variables resteront toujours supérieurs aux mentalistes.

Le cristal à un mètre d’elle, l’hespéride bien que blessée et agonisante tentait de le reprendre pour pouvoir se défendre. Néanmoins, alors qu’elle s’approchait, celle-ci se retrouverait ensevelie sous des herbes tressées.

Mmmm ?

Le regard de la portebrume se tourna vers la petite bestiole qui était née en se nourrissant de ses propres nutriments.

La forêt brûle. T’es pas censé être de l’autre côté du combat la trent ?

Muette. Celle ci lui faisait des gestes de joie et d’affection qu’elle ne comprenait pas. Sans plus insister, elle détourna son regard pour revenir sur l’hespéride qui se devait d’être achevé. S’approchant de quelques mètres en sortant une fiole, elle souriait.

Je t’avais dit que tu ne mourrais pas de manière indolore.

Puis elle jeta la fiole. L’Hespéride la regarda venir, puis ferma les yeux. Boom.

Pendant cinq minutes, Violette regardait le corps bruler, histoire d’être certaine qu’elle n’en réchappe pas avant de tourner les talons pour rejoindre la carrière afin de soigner ses blessures en cherchant du matériel dans ce qui restait des petites maisons.

Quand elle eut fini, elle aperçut cachée dans les buissons non loin d’elle, la trent qui l’observait discrètement. Soupirant, elle s’approcha avant de poser à genou à terre devant elle pour se mettre à son niveau.

Tu peux pas vivre sans moi donc…

La trent hocha la tête en signe de confirmation.

Et tu comprends ce que je te raconte…

Elle avait envie de la laisser là. Néanmoins, ce serait triste pour cette chose de mourir pour rien ici d’une certaine manière. Si cette chose était capable de l’aider pour bruler une forêt, il n’y avait que peu de chance pour qu’elle la plante.

Bon… J’imagine que je dois te dire de venir… Sache que si tu crèves. c’est pas ma faute.

Début de relation particulière.

La trent laissa échapper sa joie en sautant autour d’elle finissant par s’approcher de la main blessée et panser de Violette comme pour en respirant l’odeur du sang. Cette dernière en voyant ça pouffait de rire.

T'as vraiment l’air d’être après mes nutriments la morfales.

Profitant qu’elle soit à coté de sa main, Violette l’attrapa avant de se lever.

Faut te donner un nom. Trent c’est de la merde. On va t’appeler Ziel, plus simple comme ça. J’dois évacuer des corps, interdit de les manger. On attends mon partenaire et on y va.

La portebrume et le trent. Le début d’une grande histoire, ou peut être pas.