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Te Moana Ora [PW Lö]

Te Moana Ora [PW Lö] Brandw10
Jeu 7 Sep - 18:53
Les premières lueurs de l’aube étiraient leurs doigts roses à travers les cieux au-dessus d’Aramila. Le fleuve, habituellement paisible, reflétait les teintes pastel du matin. Pour Atahara, prêtresse de Tohorâ, cette journée avait commencé comme n’importe quelle autre. Elle avait allumé les lampes votives et avait récité ses prières matinales, écoutant le murmure de la déesse Baleine dans le vent qui caressait les murs de son humble temple.

Cependant, alors que la prêtresse se plongeait dans ses méditations, un son sourd parvient à ses oreilles, un grondement lointain semblable à un écho de tonnerre dans les montagnes. Son cœur s’emballa, une inquiétude profonde s’insinuait en elle. Se levant d’un bond, Atahara se précipita vers la fenêtre.

Ses yeux s’écarquillèrent alors que la tritonne observait le fleuve. Les eaux, d’ordinaire calmes et prévisibles, avaient pris un caractère fougueux, se gonflant au-delà de leurs berges. Une vague de panique la submergea. Le fleuve débordait, et ce n’était pas un phénomène naturel. Quelque chose n’allait pas.

Atahara se hâta de descendre les escaliers de pierre qui menaient au hall principal du temple. Là, elle fut accueillie par les lueurs vacillantes des cierges et par l’odeur apaisante de l’encens. Parmi les ombres dansantes, elle distingua un visage familier, celui de Kaelan, un fidèle dévoué à Tohorâ depuis de nombreuses années.

- Kaelan, viens, il se passe quelque chose avec le fleuve. Nous devons agir rapidement.

Sa voix se faisait urgente et Kaelan se tourna vers la prêtresse, ses yeux empreints de surprise et d'inquiétude

- Atahara, je n’ai que rarement vu le fleuve se comporter ainsi. C’est comme si ces vagues nous étaient destinées…

Il n’eut pas le temps de finir sa phrase, car un grondement sourd résonna à nouveau, faisant trembler les murs du temple. Atahara et Kaelan échangèrent un regard résolu.

- Nous devons sauver ce qui peut encore l’être. Rassemble les autres fidèles et apportez des récipients vides. Nous allons préserver les offrandes et objets sacrés.

Kaelan acquiesça et se hâta de mettre en œuvre les instructions d’Atahara. Bientôt, d’autres membres du culte de Tohorâ se joignirent à eux, portant des récipients de toutes tailles pour récupérer l’eau qui menaçait d’envahir le sanctuaire.

Ils n’étaient pas nombreux, mais ils travaillèrent avec ferveur, se relayant pour transporter les précieux objets (précieux par leur symbolique, car ils ne valaient rien financièrement) et les offrandes vers l’étage supérieur du temple, les plaçant hors de portée des flots déchaînés. Chaque mouvement était empreint d’une dévotion profonde envers la déesse Tohorâ, mais surtout d’une amitié solide envers Atahara, cette tritonne qui était là pour chacun.

Alors que le temps passe et que le fleuve continue de gronder, la prêtresse et les fidèles tentent de répondre à cet événement avec détermination. Ils étaient unis dans cette mission, même face à ce phénomène mystérieux et menaçant. Était-ce la Déesse qui s’exprimait ? Une autre divinité jalouse et destructrice à l'œuvre ? Est-ce que le fleuve allait enfin s’arrêter de les mettre à l’épreuve ? Dans le mouvement continu de l’eau, la prêtresse n’entendait plus sa Déesse, et ça, c’était pour le moins très inquiétant.
Dim 10 Sep - 19:12
La nature roule, comme la houle. Elle tonne, elle hurle: la nature est comme une bête sauvage, un cheval fou, un animal furieux que nul ne peut enfermer. La nature, c’est un ouragan indomptable que l’on touche du bout des doigts pour sentir le vent fouetter sa peau, mais que l’on ne peut saisir qu’au prix qu’elle a fixé. Et on perd toujours, face à la nature. Sauf si on danse avec elle et qu’on se perd dans le vent.

Les murs de pierres jaunes et ôcres lui faisaient de plus en plus mal aux yeux. Elle se cachait dans les ruelles, la petite flamme aux boucles furieuses, elle courait toujours plus vite pour fuir les vivants et retrouver les plantes, les animaux, un rien de la jungle qui l’avait accouché et qu’elle avait lâchement abandonné pour cette ville terrifiante. Chaque appel de la nature contrainte était un mirage, un caillou dans l’eau. Partout, elle cherchait le vent, les feuilles qui s’entrechoquent, le rugissement du guépard, l’empreinte du serpent. Mais à la place, des plantes en pot, de petits palmiers, autant de faux espoirs pour son coeur d’enfant et ses ambitions sauvages. Pourquoi elle marchait, là? Pourquoi, là? Pourquoi?

Les gens rôdaient. Ils rôdaient tous, partout. Habillés dans de grands vêtements avec des couleurs amusantes, ils avaient des têtes étranges qui ressemblaient parfois à la sienne, parfois pas. Souvent, pas.
Ils ressentaient forts aussi, les gens. Elle recevait tout: la joie, la haine, la tristesse, la crainte, tous ces fils rouges entrelacés à l’excès, et au bout de cette longue suite de cordes chaotiques, l’hespéride écoeurée qui n’en pouvait plus de tout ressentir. Dans la jungle, tout était doux, tout était sage. Mais ici, c’était la lutte des sentiments qui se bousculent. Sa tête était lourde. Ses yeux rouges de larmes qui ne coulaient plus.

Ses pieds étaient couverts de poussières, marchant nus sur le sol pour la conduire le plus loin possible des vivants. Elle n’aimait pas ne pas sentir la terre sous ses pieds, et si les autres voulaient porter des objets bizarres autour des leurs, c’était leur problème. Habillée d’une chemise d’homme volé dans un marché, l’hespéride avançait au grès des sentiments, écoutant le vent pour fuire le dédale de rue dans lesquelles elle s’était perdue. Elle vivait comme une paria, volant sans comprendre qu’elle volait, se nourrissant ce qu’elle trouvait, fuyant comme la peste ceux qui s’approchaient trop, avec leur sentiment trop bruyants qui lui donnaient mal au crâne. Sauf les petits gens. Eux, elle les aimait bien. Elle avait compris qu’ils étaient les bébés des grands gens. Si les grands faisaient peur, les petits, eux, ressentaient comment elle.

Il n’y avait que peu de monde, ce jour là. Le soleil se levait à peine. La ville était dorée. Et là, comme une oasis, elle aperçu le reflet scintillant de l’eau. Ses yeux s’ouvrirent comme des soucoupes, rondes comme si Lö était sous substance. Les vagues l’appelaient. Le fleuve l’appelait. Comme en transe, elle s’approcha, guidée par l’appel du vent, des embruns, de la nature. Dans sa chemise tâchée de terre, les mains sombres de poussière, elle avançait. Toujours plus près du fleuve. Un bourdonnement ravit ses oreilles.
L’eau scintillait.
Le vent s’était tu.
Les vagues devenaient silence.
Les algues tremblaient.
Le lit se tarissait comme un ventre creux.
Le fleuve retenait son souffle.


Elle était tout contre, les pieds dans l’eau qui baissait cruellement. Le fleuve retenait son souffle… La nature grondait. La pression était lourde sur ses épaules… L’eau se préparait à bondir. Et face à elle, Lö souriait à pleines dents.
Elle eu le temps de reculer jusqu’à la terre quand le fleuve sortit de son lit, provoquant chez l’hespéride des rires enfantins. Elle avait de l’eau jusqu’aux genoux, mais cela n’altéra pas son sentiment profond d’euphorie. C’était un si beau spectacle, toute cette eau sauvage qui retrouvait sa place. Le courant fort la poussa à courir le long de la berge, suivant l’eau et ses caprices jusqu’à un édifice qui l’arrêta dans sa course. Comme un fantôme, une apparition dorée, le temple avait lui aussi les pieds dans l’eau.

Elle ne su pas trop ce qui la poussa à rentrer. Si c’était la beauté du lieu, la paix qu’il semblait dégager, la sensation qu’il ne faisait plus qu’un avec les vagues ou les bribes de détresse qui s’en échappaient. Elle entendait les coeurs qui chavirent, la tristesse des coeurs, l’urgence et l’unité. Tant d’émotions nouvelles et curieuse qui l’appelaient comme autant de phare. Son visage se lissa, mais elle avança quand même, longeant l’édifice pour entrevoir une chaîne de gens, tenant à bout de bras des objets en tout genre, comme pour les protéger de l’eau.
Mais l’eau, c’était doux, non? C’était beau, non? Pour son coeur était si triste, d’un coup?

Au milieu de cette foule, une femme, une créature qui semblaient se détacher du reste des vivants. Ses émotions étaient vives et brutes, et semblaient relever de l’expectative et de l’incompréhension, plus que de la détresse. En la regardant, Lö se sentait perdue, et comme attirée. Elle s’avança d’elle, luttant avec l’eau pour arriver à son niveau, porter une main vers elle, la regarder de plus prêt. Cette personne, elle ne lui faisait pas peur. Non, elle voulait l’aider.

Coup-Main? Lö avait entendu ça, un jour. Coup-Main, c’était faire quelque chose pour quelqu’un. Enfin, elle croyait. Et cette dame-rivière, elle voulait vraiment faire quelque chose pour elle.
Lun 18 Sep - 22:07
L’eau tourbillonnait autour d’Atahara, sa robe flottait autour d’elle tandis qu’elle luttait pour évacuer l’inondation. Le fleuve débordait de son lit habituel, emplissant le temple de Tohorâ de vagues furieuses. Le chant apaisant de la déesse qui résonnait autrefois en elle avait disparu, comme si même Tohorâ était en proie à une agitation inexplicable.

Dans le tumulte, Atahara imaginait une autre divinité marine, une force indomptable qui tentait de rompre le lien sacré entre elle et Tohorâ. Cette entité mystérieuse prenait la forme d’une créature majestueuse, un poulpe pourpre aux reflets émeraude, les yeux brillants de malice et de défi. Peut-être était-ce une divinité oubliée, cherchant à regagner sa place dans le panthéon des mers.

Alors qu’Atahara luttait contre les flots, une silhouette rousse et élancée se dessina à travers l’embrun. Une femme d’apparence étrange s’approcha, ses yeux pétillants d’une innocence enfantine. Elle s’exprima d’une voix douce, presque musicale : “Coup-Main !”.

La prêtresse tourna son regard vers la nouvelle venue, surprise de voir quelqu'un d’autre ici, en ces moments critiques. La femme était une énigme, une énergie imprévisible dans ce lieu de spiritualité solennelle.

Atahara hésita un instant, puis comprit que chaque paire de mains comptait dans ces luttes contre les éléments déchaînés.

- Oui, Coup-Main.

Elle acquiesça, acceptant l’offre d’aide avec reconnaissance. Se présentant à son tour, Atahara murmura.

- Je suis Atahara, la prêtresse de Tohorâ. Merci d’être venue en aide.

Les deux femmes se mirent au travail, se passant des récipients vides pour évacuer l’eau. Leurs mouvements étaient coordonnés, malgré la différence de langage et de compréhension du monde qui les entourait. Cette rouquine était peut-être une force de la nature, apportant avec elle une énergie vitale qui semblait infatigable.

Au milieu de l’effort, Atahara sentait un regain d’espoir. Peut-être que cette rencontre fortuite avec cette femme était un signe que Tohorâ ne les avait pas abandonnées, qu’elle leur envoyait cette âme bienveillante pour les aider dans leur épreuve.

- Continuez ainsi, mes amis !

Atahara se voulait encourageante, son regard passant de la nouvelle recrue aux fidèles dévoués qui travaillaient sans relâche.

- Nous sommes près du but. Ensemble, nous préservons ce temple en l’honneur de Tohorâ.

Sous le regard bienveillant de la prêtresse, chacun redoubla d’efforts. Chaque récipient d’eau vidé, chaque objet du culte préservé, était une victoire remportée comme la marée déchaînée. Le temple resterait debout, un sanctuaire fidèle à Tohorâ.

Dans cette lutte commune, Atahara trouva un nouvel espoir, une certitude renforcée que même face à l’adversité, la foi pouvait être leur guide. Malheureusement, malgré cette positivité, les eaux turbulentes du fleuve ne montraient aucun signe d’apaisement. En passant près d’une fenêtre, Atahara remarqua des coffrets de cierges et de paniers d’offrandes qui traînaient et qui allaient bientôt être débordés par l’eau.

- Coup-Main !

Atahara espérait que le terme serait compréhensible. Elle se mit à genoux devant un coffret de cierge, des bougies de cire blanche colorée en bleu, et en expliqua la signification.

- Ceci est un cierge, un symbole de lumière et de dévotion. Les fidèles l’allument pour honorer Tohorâ et lui offrir leurs prières.

Est-ce que cette femme à la langue si innocente allait comprendre le concept de la lumière et de la dévotion ? Bonne question…
Sam 23 Sep - 17:47
Le fleuve est un être indocile. Une créature qu’aucun fer ne peut entraver.
Lutter contre lui est une illusion: il faut faire corps avec lui et l’embrasser.


La femme aux allures de flots tranquilles lui fit soudainement face, avec dans son sillage un banc d’autres debouts qui semblaient affairé. Elle pu sentir sa surprise qui se répandait en vagues tenaces autour d’elle, comme une aura radiante, puis une certaine… Satisfaction? L’hespéride se tenait là, nageant dans les sentiments qui lui parvenaient de toutes parts et dans l’eau boueuse qui ne cessait de grimper un peu plus sur le sol du temple. Comme un voile qui se posait sur elle, épousant son visage, son corps: elle était comme le poisson dans une eau épaisse de sentiments compliqués.

Atahara… Ce mot sonnait comme de l’eau. Comme un filet pure qui s’écoule sur une roche lisse. Comme une pluie d’écailles scintillantes. Enfin, elle n’était pas vraiment sûre que ça soit son nom. Mais elle commençait à comprendre “je suis”. Je suis, c’était moi. Enfin, c’était Lö. Et c’était Atahara, aussi. C’était la faim. La soif. Je suis, c’est le moi. Mais l’utiliser, c’était une autre paire de manches; Et la dame-rivière était Atahara. Atahara, c’était comme la faim, la soif? Atahara, c’était comme le chaud ou le froid?
Elle n’aurait pas le temps de tout comprendre - ni ce nom qui sonnait comme du miel, si le reste de la phrase qui suivait derrière. Prêtresse, Tora… Elle avait dû la dévisager avec toute la volonté du monde à vouloir comprendre sans y arriver, mais à tout de même saisir le sens ultime de tous ces mots: Oui.

Prise dans le mouvement, Lö commença à imiter, à attraper les récipients qu’on lui tendait pour les emmener plus loin dans la rivière. Elle revenait à la tâche, cherchant des yeux la sirène qui semblait dominer la foule et les flots de sa présence - elle semblait naturellement plus lumineuse que le reste des debouts qui s’activaient autour d’elle, et ainsi apparaissait comme un phare au-dessus de cet eau trouble. Et même si elle s'exécutait sagement sans répondre aux questions qu’on lui lançait, elle ne manquait pas de sourire à pleines dents: elle s’amusait. Elle n’était que joie, une joie radieuse, celle de pouvoir aider, celle d’apprendre, celle de pouvoir évoluer sans les assommantes émotions du monde. Elle aimait l’espoir que cette réunion suscitait, et même si elle ne comprenait pas tout à fait que la situation était critique, elle barbotait volontiers dedans, faisant ce qu’elle pouvait pour chasser la détresse.

Le fleuve ne semblait pourtant pas se calmer au niveau du fleuve: en baissant les yeux, elle ne voyait plus ses pieds, pris dans un mélange de sable et de vase charrié par le courant. En passant les yeux sur l’endroit, elle se dit qu’il devait être bien différent de d'habitude. Les pierres dégageaient une certaine formalité, une tranquillité minérale et délicate. Elle ne comprendrait la spiritualité du lieu que plus tard, mais elle ne pouvait s’empêcher de penser que l’eau lui allait bien.

Au-dessus de cette marée, la naïade semblait orchestrer tout le monde, et Lö répondait présente à chacune de ses questions. Oh, elle ne comprenait pas les mots, mais ses gestes et sa voix dont le ton était clair et parlait de lui-même. Sa palette de sentiments avait changé, et la petite flamme y répondait joyeusement en s’imbibant de chaque bribe de joie qu’elle pouvait capter. Dans la panique, l’ordre était revenu.
Et dans son silence, les oreilles de Lö étaient plus affûtées. Plus attentives. Elle entendait souvent ce mot: Tohorâ. Etait-ce la sirène qui surmontait la plèbe? Était-ce le nom de la rivière? Tohorâ, ça sonnait comme du miel aussi.

Coup-main. Le mot l’interpella brusquement, comme un écho de sa voix à travers le temple. Instinctivement, Lö lâcha la bassine qu’elle tenait pour se précipiter vers la voix qui l’appelait, et elle trouva face à de nombreux coffrets remplis d’une multitude d’objets, mais l’eau avait déjà commencé à recouvrir certains d’entre eux - les autres flottaient nerveusement, prêts à rejoindre la rivière à la moindre vague un peu capricieuse.
Atahara lui présenta une boîte remplie de longs bâtons de couleurs, surmontés d’une petite ficelle. Elle semblait lui expliquer quelque chose: son ton était sage, son visage serein. Dévotion, lumière… Prière. Elle avait entendu tous les mots, mais ils sonnaient un peu creux. Ces objets, quant à eux, elle les connaissait pour les avoir vu sur des bords de fenêtres. Mais il manquait quelque chose, là… Au-dessus.

Feu.” Lö regardait les petites lumières éteintes avec une certaine solennité. “ Pas de feu. Silence.

Elle comprenait peu pourquoi ces bâtons - ces “cierges” avaient une importance. Après tout, il faisait encore jour, et on y voyait claire. Mais elle semblait pourtant particulièrement y tenir, même sans la flamme qui devait les surmonter. Elle pouvait le capter. Ces objets avaient une important particulière pour elle. Et puis… Tohorâ. Tohorâ, Tohorâ, Tohorâ. Tohorâ, c’était quoi pour revenir tout le temps. Tohorâ, c’était le feu? Ou c’était la lumière?

Tohorâ, c’est lumière?” Dit-elle en lui tendant une des chandelles éteintes. “ Tohorâ c’est toi?

Elle sentait qu’Atahara voulait lui expliquer quelque chose. Mais les mots… Les mots étaient creux. tout comme les bassines qu’ils remplissaient inlassablement avec l’eau du fleuve. Tout en posant sa question, Lö avait attrapé une des boîtes remplies d’offrandes. C’était peut-être Tohorâ, aussi.
Sam 30 Sep - 22:19
Les eaux tumultueuses du fleuve avaient perdu de leur fureur, mais elles persistaient dans leur étreinte tenace, insistant sur le temple de Tohorâ. Atahara scrutait les alentours, observant chaque recoin du sanctuaire pour s’assurer que rien n’était resté vulnérable à la marée montante. Les cierges, autrefois flamboyants, s’étaient éteints, laissant derrière eux l’odeur de la fumée.

Lö, la femme rousse au regard émerveillé, se tenait près d’Atahara et de la boite de cierge, les yeux fixés sur les chandelles éteintes. Elle murmurait presque pour elle-même des mots dont la prêtresse ne pouvait que cerner la naïveté enfantine.

Atahara s’approcha doucement, son regard bienveillant posé sur Lö.

- Oui, ma chère. Les cierges apportent la lumière, mais parfois, la force de l’eau peut les éteindre. Cela ne signifie pas que Tohorâ a abandonné, mais seulement que nous devons les rallumer quand nous le pouvons.

Lö semblait écouter attentivement, ses grands yeux fixés sur Atahara, semblant absorber chaque mot avec une curiosité enfantine. Puis, elle saisit un cierge, le tenant avec précaution entre ses doigts, et demanda si c’était ça, la lumière, si c’était Tohorâ.

Atahara sourit, touchée par la simplicité et la pureté de la question.

- Oui, ma chère. Tohorâ est une des lumières dans nos vies, une des lueurs qui peut nous guider à travers les eaux troubles de l’existence. Elle est une des déesses de la mer, une protectrice des océans et toutes les créatures qui y habitent.

Elle se pencha légèrement vers Lö, partageant avec elle la profondeur de sa foi.

- Tohorâ est la force qui nous unit tous, nous rappelant que même dans les moments les plus sombres, il y a toujours de la lumière à trouver.

Que la femme rousse puisse comprendre immédiatement ce que la prêtresse disait n’avait finalement que peu d’importance. Atahara donnait des petites graines de sa pensée religieuse et philosophique à cette beauté brute et naïve. Des graines qui pourront germer si la porteuse décide d’en prendre soin. Qui sait ce qu’elle décidera d’en faire ?

Puis, la prêtresse se tourna vers le temple, examinant à nouveau chaque recoin pour s’assurer que rien n’avait été laissé au hasard. L’eau du fleuve se calmait lentement, la crue se ralentissant, mais ne s’arrêtant pas complètement. Elle stagnait maintenant, les mouvements moins frénétiques mais toujours insistants.

Atahara se tourna vers Lö, la gratitude brillant dans son regard.

- Nous avons réussi, grâce à votre aide. Tohorâ a veillé sur nous aujourd’hui.

Alors qu’elles se tenaient ensemble dans le temple préservé, Atahara sentait un lien spécial se former entre elles. Peut-être que cette femme n’avait pas la connaissance profonde de Tohorâ, mais sa présence et son dévouement étaient des témoignages vivants de la puissance de la déesse et de la force de la foi.

Cette journée était une épreuve, mais elle était aussi une leçon. Tohorâ les avait mises à l’épreuve, les avait réunies dans l’adversité et avait montré que la lumière pouvait toujours être trouvée, même au cœur de la tempête.

Néanmoins, l'inquiétude persistait et étreignait Atahara. L’eau omniprésente étouffait le doux murmure de Tohorâ. La prêtresse redoutait que le retour au calme ne soit pas suffisant pour ramener le chant de la déesse baleine. Sous son apparence de sagesse spirituelle, la prêtresse cédait à sa panique intérieure. Les belles leçons qu’elle venait de comprendre ne pouvaient pas, ne devaient pas être les derniers chants de la grande Tohorâ. C’était impensable.
Jeu 12 Oct - 12:16
Regarder les abysses dans les yeux, y voir les lumières danser.
Est-ce la croyance ou la vie qui anime tes pas?



Elle sentait toujours l’eau passer entre ses orteils. Comme une caresse, ou comme une gifle, elle ressentait les caprices du fleuve sur sa peau nue. Face à la dame-fleuve, elle se sentait si petite, nappée par les vagues et les émotions diffuses qui émanaient d’elles et de tous les autres debouts qui s’affairaient plus loin. C’était un endroit calme, bien plus doux que ce qu’elle avait jusqu’ici connu dans les terres arides et dans la ville étouffante. Elle espérait même pouvoir apprendre, ici, quelques mots.
Elle regardait la chandelle avec intensité, mais plus intense encore, c’était la force d’Atahara. Elle dégageait une vibrante puissance, une paix sage et tranquille mais qui ferait tomber des montagnes.

Lö ressentait quelque chose. Une étincelle, un murmure. Une petite lueur au fond de son coeur qu’elle comprendrait plus tard comme de l’humilité. Mais pour l’instant, c’était simplement une curieuse sensation, celle d’être toute petite, de n’être rien, d’être un morceau de poussière face à quelqu’un de beaucoup plus fort.

Sa voix était douce, aussi. Comme la pluie ou l’eau claire qui caresse le lit de la rivière. Pleine de fraîcheur et de calme, comme une chanson sans musique. Elle était impressionnante, Atahara, et elle parlait beaucoup aussi. Elle ne comprenait pas tout. Bien sûr, certains mots sonnaient plus forts que d’autre, surtout parce que le son était beau: lumière, force, Tohorâ, rallumer… Mais tous les liens entre eux lui étaient inconnus. Des articulations nébuleuses qui lui empêcher de faire bien sens de ce qu’on lui disait. Comme un bras sans coude, elle ne voyait que le début et la fin: le milieu était à définir, mais dans quel sens?
Et dans tout cela, elle n’était pas sûr d’avoir sa réponse non plus. Cierge, c’est lumière? Mais Tohorâ… C’est lumière aussi? Elle dodelinait de la tête, dressant des dessins complexes dans un esprit brut.

Puis Atahara attrapa une des bougies avec précautions. Oui, Tohorâ était la lumière. Un grand sourire se dessina sur ses lèvres - ça, elle n’avait compris, oui et non. Oui, c’était joie. Non, c’était tristesse. Ou plutôt, c’était acide. Parce qu’en général, il n’y avait derrière que l’aigreur et la colère. Elle avait compris que non, il ne fallait pas y aller. Mais oui, c’était vrai.
Mais l’histoire ne s’arrêta pas là, et Atahara poursuivit, lui lançant de nouveaux mots qui lui était inconnu. Déesse, mer, eau séant, kréture… Tohorâ; c’était bien la lumière. La force… Mais le reste?

O séant?.” Lö regarda autour d’elle. “O séant, c’est Lö? O séant, c’est Tohorâ pareil?.” Les mots chahutaient, et elle commençait à ne pas comprendre. C’était quoi, kréture? Déesse. “Déesse, c’est toi?.”

Les questions fusaient probablement plus lentement entre ses lèvres, que dans son esprit. Là, tout devenait flou. Il y avait dans cet endroit beaucoup de choses qu’elle ne comprenait pas. Peut-être que…

Allumer Tohorâ partout..” Dit elle en tendant un cierge à Atahara. Avec de la lumière, elle y verrait mieux, sans doute.

Mais la dame rivière s’éloigna pour regarder autour d’elle. L’eau sous ses genoux se faisait moins forte, moins ténue - plus douce autour de ses chevilles. Comme une seconde peau qui respire à un rythme lointain, la caresse délicate d’une main douce. Elle aimait cette vision: ce sol de pierre recouvert d’une eau transparente, où les grains de poussières se déplaçaient avec le courant et des vagues solitaires pour rebondir sur les orteils des debouts; elle regardait cette danse, cette valse de la nature qui s’affranchissait de tout. Comme un poumon invisible, elle regardait le monde respirer.
C’est l’émotion d’Atahara qui la ramena à elle. Une vague plus douce et plus vive encore que celle de l’eau, un embrasement bienveillant qui la recouvrir. Ses lèvres s’étirèrent joyeusement - un sourire plein, vibrant, qui ferma ses yeux et montra toutes ses dents trop blanches à la femme-rivière. Elle ne comprenait pas son émotion, mais elle l’aimait beaucoup, et elle voulait la partager.

La lumière semblait avoir une grande importance pour elle. Tohorâ, tohorâ… Comme un coeur battant, elle l’invoquait à chaque détour de ses mots. Peut-être qu’elle avait peur du noire. Peut-être qu’il y avait quelque chose qu’elle ne comprenait pas. Lö la fixa. Elle était radieuse, lumineuse, mais sous sa peau irisée, il y avait quelque chose d’autre. Elle le sentait par bribe. De la peur, de la crainte… En même temps qu’elle les sentait, sa peau se stria de frissons. Quelque chose la tourmentait. C’était impensable, pourtant. Pareille dame ne pouvait pas être troublée! Tohorâ, tohorâ… Elle la cherchait peut-être. Mais c’était simple, pourtant. Lö s’avança vers elle, posa une main candide sur son épaule, un sourire tranquil aux lèvres.

Allumer Tohorâ..” C’était ça, la solution. Ramener la lumière.
Sam 21 Oct - 11:06
La curiosité innocente de Lö était une lueur bienvenue au milieu de la tension qui persistait. Chaque question qu'elle posait, aussi simple soit-elle, apportait une lumière de compréhension à la situation. Atahara pouvait voir dans les yeux de Lö un désir sincère de comprendre, de se connecter à cette divinité qu'elle ne connaissait pas encore.

Lorsque Lö tendit le cierge à Atahara, la prêtresse approuva d'un sourire. Elle prit le cierge, expliquant patiemment à Lö comment l'allumer. Elle lui montra comment tenir la flamme près de la mèche, laissant la chaleur embraser lentement le bout de la bougie. Lö regardait attentivement, absorbant chaque geste avec une attention presque enfantine.

Ensemble, elles se mirent à allumer les cierges, parsemant le temple de petites flammes dansantes. Lö s'appliquait peut-être avec soin, montrant qu'elle prenait cette tâche à cœur. Chaque cierge allumé était un éclat de lumière qui chassait l'obscurité qui planait.

Alors qu'elles travaillaient, Atahara sentait son cœur s'apaiser. Lö n'était peut-être pas une prêtresse, mais sa présence et son engagement étaient un rappel puissant de la simplicité de la foi. Elle montrait que parfois, il suffisait d'un geste humble pour raviver la connexion avec la déesse.

Lorsque le dernier cierge fut allumé, une sensation de calme enveloppa le temple. Les flammes vacillaient doucement, dansant en harmonie avec le murmure apaisant de l'eau au-dehors. Atahara s'agenouilla, prenant une profonde inspiration. Elle sentait la présence de Tohorâ tout autour d'elle, reconnaissant le rôle essentiel que Lö avait joué dans cette communion retrouvée.

Soudain, au milieu de ce moment de paix, un son lointain atteignit les oreilles d'Atahara. Une complainte, douce et mélancolique, presque inaudible sous les bruits de l'eau et les échos de la tempête passée. C'était la voix de Tohorâ, une mélodie entremêlée de réconfort et de chagrin.

Les larmes embuèrent les yeux d'Atahara. Elle se tourna vers Lö, cherchant à exprimer la profondeur de son émotion.

- Tu as rallumé la lumière dans nos cœurs. Tohorâ nous entend, elle est avec nous en ce moment. Merci, chère amie.

En cet instant, Atahara sut que cette journée resterait gravée dans sa mémoire pour toujours. Lö, avec sa simplicité et sa pureté d'esprit, avait apporté une lumière nouvelle à la foi qu'elles partageaient. Ensemble, elles avaient surmonté l'adversité, renforçant leur lien avec Tohorâ et affirmant la puissance de la dévotion sincère.

Atahara écoutait attentivement, ses sens tendus vers la mélodie de Tohorâ. Mais les notes étaient comme voilées, mêlées à d'autres murmures indistincts, comme si d'autres chants, d'autres présences, venaient interférer avec celui de la déesse baleine. Elle se tourna vers Lö, cherchant les mots pour expliquer cette étrange sensation.

- Ma chère, imagine que chaque personne, chaque divinité, a sa propre chanson, sa propre mélodie. Parfois, ces mélodies se croisent, se mêlent. C'est ce que nous entendons maintenant. Le chant de Tohorâ est là, mais il est entrelacé avec d'autres voix, d'autres histoires qui se racontent en même temps.

Elle posa sa main sur le cœur de Lö, espérant que ce geste simple communiquerait l'essence de ses paroles.

- Nous écoutons et nous comprenons autant que nous le pouvons. C'est ainsi que nous sommes reliés les uns aux autres, à travers nos chants, nos prières, nos vies entrelacées.
Mar 24 Oct - 3:37
Danse des lumières, danse du feu
Sur l’eau, le reflet des flammes me rappelle
celui de tes yeux


Dans sa main, la petite flamme dansait au bout du cierge, un phare minuscule surmontant sa paume. Il ne pourrait peut-être pas attirer de grands navires et les mener à bon port, mais au moins il pourrait la ramener sur le rivage de cet endroit quand la nuit serait tombée. Ce n’était pas compliqué, Atahara lui avait montré doucement comment travailler. D’une main attentive, porter la flamme allumée d’une bougie à l’autre, assurant ainsi une longue chaîne de lueur au travers de tout le temple. La dame rivière semblait scintiller comme les poissons au fond des rivières, aux robes irisées et argentées, encore plus éclatantes sous la lumière des bougies.
D’autres avaient pris leur suite. Aidé par les autres debouts, ils avaient bientôt allumé tous les cierges du temple. Elle s’amusait beaucoup, l’hespéride à la crinière de feu. L’eau se retirait petit à petit, laissant dans son sillage quelques grains de sable et la caresse d’un départ qui chatouillait encore ses orteils. A de nombreuses reprises, les gouttes de cire tombaient sur ses doigts, mais elle ignorait la brûlure, adoucie par la joie ambiante.

Tout le monde autour d’elle semblait en résonance, une masse unie et forte de sentiments forts, grouillants, homogène. Elle avait rarement ressenti une aussi belle cohésion, remplissant chaque battement de son cœur d’une profonde allégresse. Comme un tout, une chanson fredonnée à l’unisson par tout un chœur, Lö était le témoin secret d’une chanson éteinte.
Habituellement, les émotions qu’elle percevait étaient ambivalentes, parfois contraires, s’entrechoquaient entre elles avant de lui tomber dessus.

Elles n’étaient pas un. Mais plusieurs.

Elles l’empêchaient de respirer.

Mais là… Là, elle en aurait bien pris de grandes lampées d’air tant cette émotion était belle. S’en nourrir jusqu’à tomber, rassasiée, heureuse, à jouer dans le sable pour savourer encore, digérer un peu, cette douce émotion.

Atahara avait l’air heureuse, elle aussi. Le trouble qui l’avait traversé semblait avoir disparu, remplacé par autre chose de plus net. Comme si quelque chose lui était tombé dessus. Comme si dans les lumières se cachait ce qu’elle cherchait. Lö avait elle réussi à chasser le nuage de ses yeux? Elle avait maintenant l’impression qu’ils étaient remplis de pluie.
Mais cette buée n’était pas acide: c’était de la douceur qu’elle percevait par longues ondes tranquilles. Satisfaite? Oui. Surprise? Un peu. Perdue? Plus tout à fait. Lö était heureuse, avec elle. Elle n’avait pas les mots, mais elle comprenait.

Avec douceur, Atahara commença à lui expliquer, tranquillement, ce qu’il venait de se passer. Tout du moins, c’est ainsi qu’elle le comprenait. Perdue, trouvée, émue, écoutée. Des vies ensembles - mais qu’est-ce qu’une vie? - entrelacées - mais qu’est-ce qu’entrelacé?
La voix, c’est ce qui sort de la gorge, c’est quand elle crit, quand elle parle, quand elle chante.
Alors la mélodie, c’est ce qui sort de…

Mélodie… ” Répéta-t-elle doucement, plus pour elle que pour les autres. Elle aimait ce mot. Les mélodies sont les gens, chaque debout à sa mélodie…

Mélodie, c’est ce qu’elle entend? Lö s’attrapa les oreilles. Elle n’entendait rien, mais elle… Elle recevait tant de choses. Tant d’émotions, les heureuses, les tristes, les colères, les dégoûts, la douleur, le sel, le souffle tendre, la morsure fièvreuse. C’était ainsi que l’on appelait ça? Mélodie, c’est beau. Ça sonne comme du miel, comme une musique. La main d’Atahara se posa comme une confirmation sur le coeur encore jeune de l’hesperide. C’était ça son pouvoir… Elle pouvait entendre toutes les mélodies, comme la mélodie de Tohora, et celle d’Atahara aussi.

Mélodie, c’est là… ” Sa main vint à son tour posée sur le coeur d’Atahara. “Lö entend ta mélodie. Lö entend toutes les mélodies.

Même si elle n’entendait pas encore quand elle tendait l’oreille, elle pouvait sentir chaque mélodie de chaque coeur, toutes celles qui résonnaient autour d’elle. Mais alors…

Tohorâ comme Lö?

Un espoir. Un espoir fou. Une miette, une poignée de sel jeté sur une épaule, un grain de sable dans les dunes. Est-ce qu’elle avait trouvé quelqu’un comme elle?
Dim 5 Nov - 18:15
Les cierges dansaient doucement, leur lueur tremblotante illuminant le temple de Tohorâ. L'eau, jadis furieuse, se retirait peu à peu, révélant des traces de l'inondation qui avait frappé. Un calme précaire régnait désormais, laissant place à un silence presque sacré. Atahara se tourna vers Lö, observant avec attention les gestes et les paroles de la femme rousse. "Mélodie...", répéta-t-elle, sentant le poids de ce mot empreint de profondeur. Lö se prit les oreilles, comme si elle cherchait à saisir les vibrations mélodiques invisibles qui remplissaient l'air.

Lorsque Lö posa sa main sur le cœur d'Atahara, la prêtresse ressentit une étrange connexion, comme si leurs âmes étaient liées par cette mélodie universelle. Les paroles de Lö résonnèrent en elle. Atahara acquiesça doucement, touchée par la sensibilité de Lö envers ces harmonies intangibles qui tissaient le tissu de l'existence. Puis, avec espoir, Lö évoqua Tohorâ. Atahara sentit un frisson parcourir son échine. Peut-être que dans le langage simple et pur de l'Hespéride, il y avait une vérité profonde.

Cependant, alors qu'elle se concentrait pour percevoir la réponse de Tohorâ, Atahara se rendit compte que la tâche ne serait pas aisée. Les chants des divinités, telles des vagues lointaines, se mêlaient dans son esprit, créant une symphonie mystique et complexe. Tohorâ semblait parfois proche, puis son chant s'éloignait, puis revenait à elle, comme le rythme inconstant des marées. Dans l'obscurité de ses méditations, une image émergea. La divinité qu'elle avait entrevue plus tôt se matérialisa devant ses yeux intérieurs. Un poulpe majestueux, d'un violet profond, ses tentacules ondoyant comme des rubans d'émeraude. Une aura de puissance émanait de cette créature, comme si elle était la gardienne des profondeurs insondables.

Un nom se forma dans l'esprit d'Atahara, mais il restait insaisissable, un murmure indistinct porté par les vagues du cosmos. Elle tenta de le saisir, de le retenir, mais il glissait entre ses doigts comme du sable fin. Finalement, elle émergea de sa méditation profonde, les yeux brillants d'une lueur d'émerveillement et de frustration mêlées. Le temple autour d'elle était toujours, les cierges brûlaient toujours, Lö était là, un phare de lumière dans l'obscurité.

Elle se tourna vers Lö, cherchant ses mots avec précaution. "Chère Lö, tu as apporté une lumière nouvelle à ce temple et à mon cœur. Je crois que Tohorâ nous parle à travers toi, à travers nous tous. Il y a tant de mélodies qui s'entrelacent, tant de voix qui se répondent dans ce vaste océan de la vie. Nous écoutons, nous apprenons, et nous continuons d'avancer, unis par cette mélodie universelle qui résonne en nous."

La vision du poulpe divin avait subjugué Atahara, mais elle ne pouvait s'empêcher de ressentir une pointe de méfiance. Tant de beauté, tant de puissance semblaient presque trop belles pour être vraies. De plus, la présence de cette divinité dans son esprit semblait coïncider avec l'éloignement du chant de Tohorâ. Un frisson d'inquiétude la traversa. Était-ce possible que cette nouvelle entité ait un impact sur la connexion sacrée qu'elle entretenait avec la déesse baleine ?

Atahara détourna son regard de l'imaginaire, se tournant vers Lö avec une expression grave. "Chère Lö, ta présence ici a apporté des changements, des révélations. Je te prie de rester quelque temps au temple. Peut-être que dans ton innocence, tu as éveillé une nouvelle compréhension, une nouvelle harmonie entre nous et les divinités qui veillent sur nous."
Jeu 9 Nov - 11:43
Comme un fil tendu, une mélodie lointaine
La musique de ton esprit s’étire jusque dans le mien
J’entends tes sons


Voyait-elle loin, la dame rivière? Avait-elle des yeux qui regardaient dans les voiles intangibles de l’au-delà? Lö observait cette grande dame aux reflets d’argent briller sous les flammes des cierges. Elle était une merveille, une forme douce et flottante, un avatar des abysses qu’elle n’avait vu qu’en de très lointains rêves, ou qu’elle avait imaginé en ouvrant grand ses yeux sous l’eau. Elle avait déjà plongé dans des rivières, observé les poissons glisser dans l’eau, arborer leurs écailles briller sous le soleil. Pouvaient-ils voir, eux aussi?
Non, ils ne pouvaient pas. Mais Atahara semblait capable de cette seconde vision, de projeter son regard au delà de ce qui était visible.

Devant ce spectacle, Lö restait silencieuse, incapable de ne voir plus que devant ses yeux. Elle, elle ne voyait qu’Atahara. Les lumières danser. Les autres debouts qui étaient patients dans le lieu. Ses yeux ne pouvaient regarder que ce qu’il y avait face à elle.

Et pourtant, elle sentait au delà de ses yeux. Elle percevait des choses tout autour d’elle, toutes les émotions qui dansaient comme de petits éons espiègles avant de tomber dans son coeur sans fond.

Il raisonnait d’elle quelque chose. Une joie mêlée à autre chose - autre chose d’amer, de piquant. Un sentiment peu plaisant et en suspens. Lö n’aimait pas ça. Comme des aiguilles sous ses doigts, comme si une petite coupure était apparue entre ses doigts, et qu’elle ne pouvait que la regarder. Une frustration. Oui, c’était ça. Atahara était heureuse, mais frustrée.

Mais au delà de ça, ses mots étaient compliqués, difficiles à comprendre. Alors, Tohora était au delà de Lö, à travers Lö? Quelqu’un qui n’était pas là, mais dont elle entendait et partageait la mélodie? Un peu comme le vent, se dit-elle, même si elle peinait à bien restituer ce que la dame rivière lui disait doucement. Les mots étaient dans un ordre qu’elle ne décodait pas encore, et manquait de sens.

Atahara peur?” Demanda-t-elle. Elle sentait à travers elle danser les remords et les doutes, une crainte qu’elle ressentait comme une vague scélérate à la surface d’un lac tranquille.

Elle la ressentait plus fortement que tous les autres convives, toutes ces émotions réunies en un coeur paisible. Cette imperceptible frisson, cette crispation redoutable et redoutée.
Avec douceur, elle se retrouva vers elle, et lui demanda de rester. Elle connaissait ce mot. Rester, c’était arrêter le mouvement. Ne pas partir, demeurer au même endroit comme un arbre.
Ses petits yeux d’écorce se baladaient sur les murs de la maison aux lumières - un temple, donc. Un temple c’est différent de maison? Rester dans le temple? Lö était le vent, la brise. Elle s’était toujours, depuis sa naissance, considérée comme un souffle volatile qui n’a pas d’attache - depuis qu’elle avait quitté son berceau, en tout cas. Et elle regrettait cette décision, arrachée trop tôt aux bras de la jungle et la paix qu’elle y trouvait. Mais dans le temple… Oui, il y avait de la paix, là-aussi. Une paix différente, mais une paix tout de même. Aussi…

Lö rester.” Dit-elle doucement, un sourire d’enfant sur ses lèvres candides, son corps de femme n’étant qu’un artifice pour son être sans âge. “Un peu, aider Atahara.

Elle ne comprenait pas très bien sa mission, ni ce qu’on attendait d’elle. Mais elle pouvait aussi trouver un peu de paix. Et si elle pouvait redonner le sourire à la femme des rivières, c’était tout pour le mieux. Oui, elle pourrait bien trouver la paix aussi.
Sam 18 Nov - 18:02
La conversation avec Lö était empreinte de douceur et de compréhension. Atahara cherchait à expliquer qu'elle n'avait pas peur, que la peur n'était pas une émotion qui l'immobilisait, mais plutôt une force qu'elle s'efforçait de comprendre et de surmonter avec sagesse. Elle partageait avec Lö les enseignements de Tohorâ, les principes de courage et de vertu qui émanaient de la déesse baleine.

Alors qu'elle terminait ses explications, un étrange vertige la saisit. Atahara se sentit soudainement s'évanouir, mais ce n'était pas une perte de conscience ordinaire. Son esprit semblait se détacher de son corps, flottant au-dessus de lui, comme un spectateur éthéré.

La surprise et l'inquiétude l'envahirent. Était-ce la mort ? Pourquoi ne pouvait-elle plus percevoir Tohorâ ? Paniquée, elle appela sa déesse au secours, mais à la place, une présence inattendue se matérialisa : le grand poulpe mauve, ses tentacules chatoyants comme des joyaux dans les eaux profondes.

Dans une voix abyssale, le poulpe lui expliqua qu'il venait de lui offrir un don, une capacité transcendante de quitter son enveloppe charnelle pour voyager en tant qu'esprit. Il insinua que c'était simplement un avant-goût de ce qu'il pouvait offrir en termes de pouvoir, une puissance tentatrice qui chatoyait comme les reflets de ses tentacules émeraude.

Cependant, au loin, un murmure familier émergea dans l'esprit d'Atahara : le chant de Tohorâ. Un avertissement, une alerte que quelque chose n'était pas juste, que cette offrande de puissance était trompeuse. Elle sentit sa forme d'esprit vaciller, comme si elle perdait prise sur cette réalité transcendante.

La confusion et la détresse l'envahirent. Elle devait revenir, elle devait retrouver son corps. Elle lutta pour se concentrer, pour reprendre pied dans la réalité physique. Son esprit semblait être emporté, mais son lien avec Tohorâ lui offrait une ancre, une possibilité de retour.

Et soudain, dans un tourbillon de sensation, elle sentit son esprit glisser, se fondre dans son corps étendu sur le sol du temple. La froideur du sol lui fit comprendre qu'elle était revenue, que cette épreuve transcendante avait pris fin.

Elle ouvrit les yeux, reprenant conscience de son enveloppe charnelle. Les cierges brûlaient toujours, Lö était là, mais le poulpe et cette réalité spirituelle semblaient avoir disparu. Un mélange de soulagement et de perplexité l'envahit alors qu'elle se relevait, se sentant à la fois plus proche et plus éloignée de la sagesse mystique qu'elle avait touchée, mais dont elle ne comprenait toujours pas entièrement la signification.

Atahara chercha ses mots, tentant de rendre compréhensible ce qu'elle avait vécu. "Lö, parfois, notre esprit peut... voyager loin de notre corps. Mais c'est comme un rêve, tu sais ? On est là, mais aussi ailleurs. J'ai cru voir quelque chose qui semblait beau, mais... c'était comme une illusion. Tohorâ m'a rappelé à la réalité. Ce n'était pas ce que je devais suivre."

Elle regarda Lö, espérant que ses mots simples auraient un sens pour elle, malgré la complexité de l'expérience qu'elle avait vécue. Atahara se redressa lentement, essayant de retrouver son équilibre, une légère confusion persistant dans son esprit.
Dim 26 Nov - 18:48
Voie impassible de l’au-delà, traverser les voiles nébuleux
Je ne te vois pas flotter mais je sens ton coeur vide

Elle écoutait attentivement, Lö, la voix douce et bienfaitrice d’Atahara. Ses mots étaient chauds, bienveillants, comme du miel. Elle usait d’une bienveillance extrême pour lui parler, patiente et douce, essayant d’user des bons mots pour s’assurer que l’hespéride comprenne. Peur. Elle comprenait, peur. Elle avait senti la peur chez Atahara, comme chez les autres croyants lors de la crue. Comme elle avait senti la peur en quittant sa forêt.
La peur, c’était ce sentiment qui lui tordait le ventre quand un danger était proche. Quand approchaient les éclairs.
Plus elle parlait, plus elle écoutait la femme-rivière, captivée par son chant, par son apparence magnifique. Elle était une grande sage pour elle qui n’avait rien connu. Et elle commençait à comprendre les mots pour ce qu’elle lui racontait.

Mais furtivement, doucement, quelque chose s’installait. Un mouvement derrière son oeil. Une lumière dans son iris. Un imperceptible souffle qui annonce les tempêtes.
Quelque chose se passait.
Une ombre, ou était-ce un ange, qui brusquement posa ses mains sur les yeux d’Atahara qui partit en arrière, basculant lentement comme si la vie la quittait. Et Lö, pour la seconde fois de sa vie, cria.

Aide!” Cria-t-elle à qui voudrait bien l’entendre.

Un pélerin, deux vinrent l’aider, prenant avec une douceur infinie le corps de la prêtresse dans les bras. Flamme tremblante, Lö espionnait, son ventre tordu par la peur, et l’incompréhension. La femme rivière était partie, comme ça, comme si elle avait été fauchée par quelque chose d’invisible. Etait-ce la fin? Elle resta à côté d’elle, la tête posée sur ses bras, à la regarder dormir. Enfin… Elle espérait qu’elle dormait. Son coeur était complètement fermé, pour la première fois depuis leur rencontre, elle lui était complètement hermétique. Il n’y avait plus d’émotions, plus de sentiments, il n’y avait rien… Rien dans le coeur d’Atahara.

Elle attendit ce qui lui sembla être une éternité avant qu’Atahara se réveille. Reprenne vie sur ce sol froid. Que ses émotions retrouve son chemin pour vibrer comme la lumière des cierges.
Finalement, au mout de quelques minutes, la prêtresse se remit à bouger, au grand soulagement des croyants qui veillaient avec elles. Un grand sourire éclaira son visage quand elle la vit ouvrir les yeux, et le soulagement l’envahit. Comme une vague tranquille, une écume précieuse, elle était heureuse de la voir là, tout simplement. Malgré cela, elle semblait confuse, désorientée. Lö lisait sur son visage qu’elle avait vécu une expérience transcendante sans pouvoir vraiment mettre les mots dessus.

Quand Atahara se mit à lui parler doucement, à lui expliquer ce qu’elle venait de vivre, Lö redoubla d’attention, essaya de bien comprendre ce qu’elle lui disait. Des mots vinrent s’entrechoquer dans son esprit comme des billes, peignant un tableau complexe, coloré. Rêve, réalité… Illusion.

Rêve c’est… C’est illusion?” Lö demanda naïvement, essayant de comprendre ce qu’elle avait bien traversé, espérant l’épauler du mieux qu’elle le pouvait. “Atahara va bien? Atahara là, bien là. Pas dans rêve.” Son sourire s’éclaira de plus belle. “Atahara revenue.

Oui, elle pouvait le sentir. Atahara était là, bien là, un être connecté à elle par un fil rouge et tendu tissé de paix, de tranquillité, de quelques doutes aussi. Mais elle n’était plus absente et fermée comme elle avait bien pu l’être quelques minutes plus tôt.

Tohorâ protéger Atahara des illusions.
Sam 9 Déc - 17:02

Te Moana Ora

avec Lö


Lorsque les ténèbres l'avaient enveloppée, Atahara avait ressenti un éloignement radical, comme si son être s'était séparé de son corps. Elle avait entendu les cris de Lö, perçus comme des échos lointains dans ce tumulte spirituel, mais elle n'avait pu intervenir. C'était comme être pris dans un rêve sans contrôle, traversant des territoires inconnus où le temps et l'espace semblaient s'effacer.

Lorsqu'elle revint à elle, des mains secourables l'aidèrent à se redresser. Deux fidèles du culte de Tohorâ étaient là, inquiets pour leur prêtresse.

"Atahara, ça va ? Vous avez eu peur, nous avons entendu des cris...", s'inquiéta l'un d'eux.

"Oui, ça va aller, ne vous en faites pas", répondit-elle doucement, tentant de dissimuler sa propre confusion.

Atahara hocha légèrement la tête, cherchant à rassurer Lö d'un sourire. Puis, se tournant vers ses fidèles, elle les remercia de leur aide et leur demanda d'apporter tous les écrits concernant les cultes marins, même les plus obscurs.

"Je dois chercher quelque chose", expliqua-t-elle, essayant de contenir son inquiétude. "Il y a une présence... une divinité, peut-être, qui a tenté de me séduire avec des dons. Je dois savoir si d'autres ont parlé de cette entité."

Une fois relevée, Atahara se dirigea vers l'extérieur du temple, où le fleuve reprenait lentement son cours normal. Observant la crue en diminution, elle se tourna vers Lö, cherchant une explication à cette montée soudaine des eaux.

"Lö, pourquoi le fleuve a-t-il augmenté si vite ? Y a-t-il une raison que tu connaisses ?"

Sa voix était calme, mais son esprit était troublé. Elle espérait trouver des réponses dans les textes anciens, des indices qui pourraient lui donner des pistes sur cette divinité énigmatique.

Atahara s'éloigna du temple, marchant lentement vers les rives du fleuve. Elle laissa ses pieds s'enfoncer dans l'eau, sentant la boue du rivage sous ses pas. Son regard se perdit dans le flux apaisé du cours d'eau, mais son esprit, lui, cherchait loin, dans les méandres de ses souvenirs.

Elle tenta de plonger dans les souvenirs familiaux, de trouver des traces de divinités marines liées à la tromperie, à la quête du pouvoir ou à la chute. Mais malgré ses efforts, les images restaient floues, comme si un voile opaque masquait cette partie de son passé. Les souvenirs se dérobaient, insaisissables, échappant à sa quête désespérée.

Revenant vers Lö, Atahara exprima sa frustration d'une voix teintée d'incompréhension : "Je ne comprends pas, Lö. Il devrait y avoir des récits, des légendes sur des divinités semblables à celle que j'ai vue. Mais mes souvenirs, mes connaissances, tout semble... bloqué, comme si quelque chose me les camouflait."

Elle avait du mal à cacher son inquiétude. Ce blocage était troublant, comme si une force invisible avait délibérément effacé ces informations cruciales de sa mémoire. Elle se sentait perdue, comme si une partie essentielle de son savoir avait été retirée, la laissant désarmée face à cette mystérieuse divinité qui avait tenté de la séduire.

"Je ressens un vide, une lacune dans mes connaissances, et c'est troublant", expliqua-t-elle à Lö, cherchant à partager son désarroi avec sa nouvelle compagne d'infortune. "Il y a quelque chose que je devrais savoir, quelque chose qui pourrait nous aider à comprendre ce qui se passe ici, mais c'est comme si on me l'avait caché, comme si on avait effacé ces vérités de ma mémoire."


Dernière édition par Atahara le Sam 23 Déc - 21:27, édité 1 fois
Sam 16 Déc - 18:35
La lumière sur les vagues me rappellent
la couleur des écailles sur ta nuque

Assise à même le sol, elle accueillait les doutes qui venaient se fracasser contre elle comme des vagues agitées. Depuis son réveil, la dame-rivière n’était plus un flot tranquille, mais semblait secouée de vives interrogations - des mouvements nerveux qu’elle percevait droit au cœur. Pendant son sommeil - ou son absence - elle avait perçu quelque chose qui semblait l’avoir profondément affecté, changeant toute sa couleur pour une palette plus sombre. Silencieusement, Lö regardait ce paysage évoluer, la traverser comme une eau devenue rebelle, peu rassurée par le sourire qu’on lui présentait car elle voyait à travers comme un livre.

Elle cherchait de toute évidence quelque chose dans son esprit. Lö connaissait bien: elle le faisait tout le temps. Plonger dans sa tête, y barboter, se poser des questions. C’était bien quelque chose qu’elle connaissait. C’était peut-être ce qui la différencier des poissons, des algues. Cette mer calme où elle formulait ses pensées. Et ce qu’Atahara y avait vu… Elle était changée.
Et changée, elle se leva et partie vers le fleuve. Changée, elle se tenait face au bras d’eau qui circulait. Et témoin, Lö la suivit comme le ferait le caneton qui ne peut se déplacer sans l’aile bienveillante de sa mère. A vrai dire, elle n’aurait su expliquer cet attachement soudain, et pourquoi elle se sentait le besoin de ne pas la quitter. Si c’était ce coeur croulant sous les doutes qu’elle voulait apaiser. Ou si c’était la radiance de cette personne qui l’atirait comme un phare, lui révélant une voie qu’elle n’avait jusqu’ici jamais imaginer.

En sortant dehors, l’hespéride prit une profonde bouffée d’air frais, heureuse de retrouver les rivages et l’air libre d’un monde ouvert et sans frontière, même faites de briques et d’argile. Une maison ou un mur, n’est-ce pas une barrière qui l’éloignait de la nature fertile? Un large sourire éclaira son visage, radieux sous ses mèches rousses qui flottaient au vent comme une crinière de lion. Pourtant, Atahara ne partageait pas cette extase - les doutes continuant d’agiter son coeur.

Le fleuve… Le fleuve. Fleuve, c’était l’eau? Fleuve, c’était doux. Comme une fleure, un mot tendre qu’on a envie d’épouser. Alors, le fleuve s’était mis en colère, peut-être?

Fleuve est caprice” Dit-elle, un peu penaude. Elle n’était pas certaine que c’était la raison qu’elle attendait, si c’était ce qu’elle voulait entendre. Ses yeux se firent plus grands, plus attentifs. Atahara attendait quelque chose, mais Lö ne savait pas quoi. “Fleuve est liberté.

Oui, c’était ça. Le fleuve était libre, comme la jungle, comme les dunes, comme la forêt qui s’étend et respire. Le fleuve ne devait rien à personne, il ne devait ni l’obéissance, ni la servitude. Ses yeux remontaient le long des rives et jusqu’à toucher l’horizon. Partout, des bateaux, des batiments. On avait contraint le fleuve dans une forme qu’il n’aimait pas. Ses sourcils se froncèrent. La nature est libre.

Ce n’était pas la réponse qu’Atahara attendait, car presque immédiatement, elle la sentit redoubler de doute et de craintes, une boule d’épines dans son coeur qui piquait et lui donnait un air grave. Elle lui parlait doucement, mais Lö sentait son trouble plus que le sens de ses mots. Elle était à la recherche de quelque chose… C’était certain. Mais elle n’aurait su dire quoi…
Doucement, Lö posa ses mains sur ses yeux.

Atahara,” lui dit-elle doucement. “orage sur toi. Calme, comme fleuve.”

En lui disant cela, elle tira doucement sur ses mains pour la conduire plus profondément dans la rivière, l’entrainant jusqu’à ce que l’eau recouvre leurs genoux, leur hanche. Elle sentait la caresse des vagues, l’argile et la vase passer entre ses orteils nus, les algues glisser contre ses genoux. Elle sentait la vie dans cette eau, et voulait qu’Atahara la sente aussi.

Fleuve tranquille maintenant. Atahara retrouver fleuve.

Et dans un éclat de rire, la jeune hespéride, espiègle, s’amusa à l’éclabousser avec une gerbe d’eau, poussant un grand rire d’enfant qui résonna sur le son des vagues. Elle voulait qu’Atahara voit cette beauté, se retrouve dans les vagues, puisse trouver les réponses dans l’eau qu’elle chérissait. Elle lâcha ses mains, la rousse, commença à tourner sur elle-même, fendant l’eau de son corps comme si elle était un poisson. Mais elle n’avait ni la grâce ni la beauté de la prêtresse, seulement l’âme de la nature qui animait tout son corps.

Elle sentait le trouble dans Atahara, mais la clé était devant elle. Retrouver Tohora, retrouver le réel: les réponses étaient peut-être sous ses yeux.
Sam 23 Déc - 22:02

Te Moana Ora

avec Lö

Alors qu'Atahara contemplait le fleuve, Lö évoqua sa vision singulière du cours d'eau. "Fleuve est caprice. Fleuve est liberté", dit-elle d'une voix douce, ses mots évoquant une vérité simple mais profonde.

Atahara ne put s'empêcher de reconnaître la justesse de ces paroles. Le fleuve était libre, suivi de ses propres rythmes et désirs, débordant et se retirant à sa guise. Cependant, l'étrange concordance entre l'apparition de la divinité poulpe et la montée du fleuve persistait dans son esprit.

Lö, les mains posées sur ses yeux, murmura doucement : "Atahara, orage sur toi. Calme, comme fleuve." Ces paroles apaisantes firent écho en elle, lui rappelant la sagesse tranquille de Tohorâ. Elle se concentra, invoquant la quiétude intérieure que la déesse baleine lui enseignait.

"Merci, Lö. Je méditerai longuement sur cette coïncidence étrange", répondit Atahara, tentant de calmer ses angoisses naissantes.

Soudain, Lö éclaboussa Atahara avec l'eau du fleuve, souriant malicieusement. "Fleuve tranquille maintenant. Atahara retrouver fleuve."

Amusée par la légèreté de Lö, Atahara sourit à son tour et se laissa emporter par la spontanéité de l'instant. Elle approuva silencieusement la suggestion de Lö et, en un mouvement fluide, elle plongea dans les eaux du fleuve.

La fraîcheur de l'eau l'enveloppa, et elle se laissa porter par le courant apaisé. Avec la grâce d'une tritonne, elle se mouvait avec une aisance naturelle, fusionnant avec le fleuve et sa tranquillité retrouvée. Les mouvements simples de ses bras et de ses jambes épousaient les flux du courant, créant des ondulations harmonieuses à travers l'eau paisible.

Elle se sentait libérée, loin des tourments de son esprit, fondue dans la sérénité du fleuve. Le murmure apaisant de Tohorâ semblait résonner en elle, lui rappelant l'importance de l'équilibre et de la patience face aux mystères qui entouraient cette étrange divinité poulpe. En cet instant de communion avec l'eau, elle trouvait un répit, un moment de calme pour réfléchir et méditer sur les événements troublants qui avaient secoué sa foi et son savoir.

Atahara s'immergea longuement dans les eaux du fleuve, se laissant porter par son héritage de tritonne. Les branchies qui avaient fleuri le long de son cou s'activèrent, lui permettant de respirer sous l'eau. Elle poussa de grandes respirations, sentant le flux d'eau circuler à travers ses ouvertures branchiales.

Après quelques minutes dans cet état méditatif, elle remonta à la surface, libérant une gerbe d'eau avec sa chevelure trempée. Ses yeux fixèrent Lö avec douceur, alors qu'elle lui proposait de retourner au temple.

"Viens avec moi, Lö. Nous devrions rejoindre les autres fidèles", dit-elle d'une voix douce.

Expliquant son plan à Lö, Atahara lui parla de la propreté du temple après les crues et de sa proposition de séance de méditation pour les croyants. Elle la rassura : "Ce sera très simple, Lö. La méditation, c'est comme si tu prenais le temps de parler à ton cœur et à ton esprit. Tu fermes les yeux, tu respires doucement et tu laisses tes pensées se calmer, comme une douce brise dans ton esprit. Tu te sens apaisée, tranquille, et ça t'aide à être en paix avec toi-même."

Atahara esquissa un sourire encourageant, espérant que ses mots simples aideraient Lö à comprendre cette pratique, si différente des autres rituels des temples voisins.
Lun 1 Jan - 17:09
L’eau dans les yeux, les vagues sur la peau
Je deviens écume
Et laisse m’emporter les ondes capricieuses


Elle était belle, Atahara. A moitié dans l’eau, flottant sur le fleuve, on aurait dit une de ces créatures des mers quand le soleil fait scintiller ses écailles. Et elle restait sous les eaux si longtemps… Lö la contemplait avec de grands yeux, sans comprendre pourquoi elle, après de si longues secondes, sentait ses poumons brûler et le besoin immédiat de remonter à la surface. Si elle l’avait pu, elle serait restée sous l’eau éternellement.
Mais non, caprice de son corps et de la nature, elle n’avait pas ce pouvoir. A la place, elle restait près du rivage, tentant de temps en temps quelques brasses dans l’eau pour toucher le fond, jouant avec les rayons du soleil à travers la masse aqueuse.

Quand la prêtresse ressortie finalement de l’eau, l’hespéride était sagement, simplement partie s’assoir sur une roche proche, respirant au soleil, séchant tranquillement comme l’aurait fait les crocodiles. Le fleuve appelle le fleu, le flot créait le flot, le temps appelle l’arrêt. Et quand elle lui proposa de rejoindre les autres, Lö ne lutta pas. Elle comprenait assez bien ce qu’elle voulait lui signifier. Malgré ses maigres connaissances en mots, elle commençait à les comprendre, à voir les chemins. Et comprendre comment répondre. Elle approuva, se levant pour la suivre.

Le temple reprenait sa vie, aussi rapidement que la décrue. Si ce lieu était à l’image de tous ceux qu’elle avait croisé dans sa courte vie, elle commençait à se demander pourquoi elle n’avait jamais pris la peine de rentrer dans l’un d’entre eux - il transpirait la tranquillité et la paix. Pourquoi tous les autres endroits lui avait fait peur?
Ce devait être celui-ci, cet endroit était spécial.

Atahara prit le temps de lui expliquer ce qu’elle comptait faire, certainement suivie par tous les autres debouts.

Métation c’est paix.” Murmura-t-elle. Lö se sentait déjà paix, mais elle était grandement curieuse de l’expérience. Et elle devait admettre apprécier grandement la quiétude de l’endroit.

Contrairement à la ville, le temple était une oasis, les coeurs y étaient tranquilles et silencieux contrairement aux émotions brutes et passionnées du reste d’Aramila. Un changement bienvenue qui lui avait permis de rester juste là. Curieuse, hespéride, tu regardes la femme-rivière dans les yeux, se demandant bien ce qui t’attends en disant oui. Peut-être une profonde révélation, peut-être rien. Née des tempêtes, tu peux être aussi changeante que le vent et la pluie. Pourras-tu seulement trouver la paix dans cette pratique?
Tout autour d’elle, tout le monde semblait calme.

Mais pour Atahara…Elle pouvait toujours la sentir en recherche, le coeur tourné vers des sphères bien plus hautes. Les doutes s’étaient calmés, le ciel de nouveau clair. Mais si ses émotions étaient douces, son esprit, lui, semblait toujours palpiter de tant de pensées.

Lö rester.” Dit-elle finalement. Consciente qu’elle pourrait toujours apprendre, peut-être, aider un peu plus… Avant de filer comme le vent.
Sam 27 Jan - 18:40

Te Moana Ora

avec Lö


La prêtresse de Tohorâ, Atahara, sourit doucement à la réponse simple mais profonde de Lö. "Oui, méditation, c'est paix. C'est un moyen de trouver la paix intérieure, de se connecter avec notre esprit et de trouver l'harmonie avec le monde qui nous entoure."

Atahara, soulagée que Lö semble accepter ces enseignements, inclina légèrement la tête en signe de reconnaissance. "Je suis heureuse que tu sois ici, Lö."

Lö répondit simplement, "Lö rester."

Un léger sourire se dessina sur le visage d'Atahara. "C'est merveilleux. Ensemble, nous cheminerons vers la paix intérieure."

Les deux femmes marchèrent côte à côte vers le temple de Tohorâ. À mesure qu'elles approchaient, la beauté surannée de l'édifice se dévoila. Les murs étaient ornés de motifs marins peints à la main, des représentations grossières de créatures des profondeurs et de vagues abstraites sculptées dans la pierre. Des coquillages et des perles ornaient les autels, et la lumière filtrée à travers des vitraux représentant des scènes sous-marines baignait l'intérieur d'une lueur apaisante.

Atahara s'arrêta un instant devant l'entrée, émue par la beauté de son lieu de culte. "Merci à Tohorâ de nous avoir protégé des éléments déchaînés. Les fidèles ont travaillé dur pour réparer les dégâts causés par l'inondation, et maintenant, notre temple resplendit de nouveau."

Elles entrèrent dans le temple où les fidèles s'affairaient, préparant des offrandes et entretenant les lieux saints. Atahara, accompagnée de Lö, salua les fidèles et les remercia pour leur dévouement.

"Chers fidèles, je vous présente Lö, une nouvelle compagne de voyage. Elle a choisi de rester avec nous et d'apprendre nos enseignements. Nous sommes tous unis dans notre quête de paix et de sagesse, et je propose que nous célébrions son arrivée par une séance de méditation sur la reconnaissance. Acceptez-vous, chers fidèles ?"

Un murmure d'approbation se répandit parmi l'assemblée, et les fidèles s'assirent en cercle, prêts à suivre les instructions d'Atahara. La prêtresse guida la méditation avec douceur, invitant chacun à réfléchir sur les bénédictions de la vie et à exprimer sa gratitude envers Tohorâ.

Au fur et à mesure que la méditation progressait, une atmosphère de calme et de connexion enveloppa le temple. Atahara sentit son cœur s'emplir de gratitude envers la déesse baleine et envers la vie elle-même. Lö, même si elle ne comprenait peut-être pas toutes les paroles, se joignit à la séance avec une présence paisible.

Lorsque la méditation prit fin, Atahara ouvrit les yeux et rencontra le regard de Lö. Un sourire partagé témoignait du lien naissant entre elles.

"Merci, chère Lö, d'avoir partagé cette séance de méditation avec nous. Que cette paix intérieure t'accompagne dans tous tes voyages."

Ainsi se conclut l'aventure, les deux femmes unies par la quête commune de la paix et de la sagesse dans le sanctuaire dédié à Tohorâ.