Dim 4 Juin - 18:29
Evyline poussa un long soupir. Le plus long de sa pourtant très longue existence. Quelque chose venait de s’échapper de sa conscience, de s’envoler pour de bon. Elle ne pouvait pas encore dire si c’était un soulagement ou non. Quoi qu’il en était, son travail avait été accompli.
C’est fait, pensa-t-elle simplement en essuyant délicatement le couteau, qu’elle posa par la suite sur un chiffon. Puis elle se dirigea nonchalamment vers le tourne-disque qui s’était affairé à diffuser tout au long de la besogne la douce mélodie de la Sérénade du Dix-Huitième Automne, disque qui lui avait été offert par l’artiste lui-même, un Opalien particulièrement déprimé mais ô combien talentueux. Elle pressa le bouton principal et décala l’aiguille, faisant cesser la musique. Elle avait besoin de calme.
Elle avait prévu la scène des dizaines et des dizaines de fois, réarrangé sa petite galerie de nombreuses fois, revu chaque détail, il fallait que ce soit parfait. Ce fut parfait. Ou presque. Elle n’avait pas prévu les immenses tâches de sang qui étaient venu salir ses tableaux, son parquet, ses murs, et elle-même. Le cadavre, reposant tranquillement sur la chaise qu’elle avait pris soin de placer au centre de la pièce, comme une œuvre que l’on expose, était rouge. Sa victime avait caché un atout dans sa manche.
Evyline vit son reflet dans un miroir, constata que l’enveloppe physique dont elle s’était lentement habituée était souillée du sang de ce porc. Elle ne s’en inquiéta pas d’avantage pour le moment, se déplaça plutôt vers un pan de mur dont la particularité était de tenir cet étrange invention doté d’un combiné et d’une roue de numéro. Elle composa le code qu’elle avait mémorisé pour cet instant précis, celui d’un bar d’Opale où elle était certaine de trouver ce dont elle avait besoin.
Un bip métallique retentissait à chaque numéro sélectionné.
Elle s’était préparée minutieusement.
Bip.
Elle avait mis en scène les derniers instants de cet homme, jubilatoire pour elle.
Bip.
Elle avait soigneusement endormi ses muscles grâce à ses plantes.
Bip.
Elle n’avait simplement pas prévu que l’homme, scientifique fou du Magistère vandalisant des dizaines de cobayes de leur humanité pour y expérimenter les pires mutations, s’était lui même infligé un traitement similaire. Avant même de pouvoir planter sa lame dans son cœur, synonyme d’une mort propre, rapide, presque généreuse, une partie du sang de l’homme s’était évadé de son corps, prenant vie et forme devant Evyline, s’attaquant à elle.
Bip.
Trop lent. A moitié endormi, sa victime n’avait pu que se lancer dans une tentative désespérée qui n’avait pas pu empêcher la sorcière de terminer le travail. Seulement voilà, ce vieux fou avait souillé toute la scène du crime.
Bip.
A l’autre bout de la ville, proches des bas-quartiers, quelqu’un décrocha le combiné. Elle se félicita de nouveau d’avoir retenu ce numéro, surtout au vu des circonstances.
« Passez-moi Jérémiah, je vous prie. »
Tout se passera bien. Elle contempla son œuvre, toujours immobile au milieu de la pièce, entouré d’une marre de sang. Après tout ces mois à enquêter, fureter, et interroger, Evyline pouvait enfin clore ce chapitre de sa nouvelle vie. Une vieille dette qu’elle s’était entêtée à payer à l’ancienne propriétaire de son corps. Le sang n’était qu’un simple contre-temps. Sa véritable nouvelle vie pouvait commencer. Plus rien ne la rendait coupable maintenant, elle jouirait de son enveloppe corporelle sans avoir cette irritable impression de l’avoir volée, arrachée à une pauvre âme qui ne pouvait se reposer tant que la vengeance ne lui avait pas été offerte sur une plateau. Après réflexion, ce qu’elle avait ressenti plutôt était bel et bien un sacré soulagement.
Elle s’essuya le visage avec délicatesse, jeta ses vêtements imprégnés de sang au sol et se changea en hâte, avant de revenir vers son fidèle tourne-disque. Ce sera une musique plus entraînante, cette fois.
C’est fait, pensa-t-elle simplement en essuyant délicatement le couteau, qu’elle posa par la suite sur un chiffon. Puis elle se dirigea nonchalamment vers le tourne-disque qui s’était affairé à diffuser tout au long de la besogne la douce mélodie de la Sérénade du Dix-Huitième Automne, disque qui lui avait été offert par l’artiste lui-même, un Opalien particulièrement déprimé mais ô combien talentueux. Elle pressa le bouton principal et décala l’aiguille, faisant cesser la musique. Elle avait besoin de calme.
Elle avait prévu la scène des dizaines et des dizaines de fois, réarrangé sa petite galerie de nombreuses fois, revu chaque détail, il fallait que ce soit parfait. Ce fut parfait. Ou presque. Elle n’avait pas prévu les immenses tâches de sang qui étaient venu salir ses tableaux, son parquet, ses murs, et elle-même. Le cadavre, reposant tranquillement sur la chaise qu’elle avait pris soin de placer au centre de la pièce, comme une œuvre que l’on expose, était rouge. Sa victime avait caché un atout dans sa manche.
Evyline vit son reflet dans un miroir, constata que l’enveloppe physique dont elle s’était lentement habituée était souillée du sang de ce porc. Elle ne s’en inquiéta pas d’avantage pour le moment, se déplaça plutôt vers un pan de mur dont la particularité était de tenir cet étrange invention doté d’un combiné et d’une roue de numéro. Elle composa le code qu’elle avait mémorisé pour cet instant précis, celui d’un bar d’Opale où elle était certaine de trouver ce dont elle avait besoin.
Un bip métallique retentissait à chaque numéro sélectionné.
Elle s’était préparée minutieusement.
Bip.
Elle avait mis en scène les derniers instants de cet homme, jubilatoire pour elle.
Bip.
Elle avait soigneusement endormi ses muscles grâce à ses plantes.
Bip.
Elle n’avait simplement pas prévu que l’homme, scientifique fou du Magistère vandalisant des dizaines de cobayes de leur humanité pour y expérimenter les pires mutations, s’était lui même infligé un traitement similaire. Avant même de pouvoir planter sa lame dans son cœur, synonyme d’une mort propre, rapide, presque généreuse, une partie du sang de l’homme s’était évadé de son corps, prenant vie et forme devant Evyline, s’attaquant à elle.
Bip.
Trop lent. A moitié endormi, sa victime n’avait pu que se lancer dans une tentative désespérée qui n’avait pas pu empêcher la sorcière de terminer le travail. Seulement voilà, ce vieux fou avait souillé toute la scène du crime.
Bip.
A l’autre bout de la ville, proches des bas-quartiers, quelqu’un décrocha le combiné. Elle se félicita de nouveau d’avoir retenu ce numéro, surtout au vu des circonstances.
« Passez-moi Jérémiah, je vous prie. »
Tout se passera bien. Elle contempla son œuvre, toujours immobile au milieu de la pièce, entouré d’une marre de sang. Après tout ces mois à enquêter, fureter, et interroger, Evyline pouvait enfin clore ce chapitre de sa nouvelle vie. Une vieille dette qu’elle s’était entêtée à payer à l’ancienne propriétaire de son corps. Le sang n’était qu’un simple contre-temps. Sa véritable nouvelle vie pouvait commencer. Plus rien ne la rendait coupable maintenant, elle jouirait de son enveloppe corporelle sans avoir cette irritable impression de l’avoir volée, arrachée à une pauvre âme qui ne pouvait se reposer tant que la vengeance ne lui avait pas été offerte sur une plateau. Après réflexion, ce qu’elle avait ressenti plutôt était bel et bien un sacré soulagement.
Elle s’essuya le visage avec délicatesse, jeta ses vêtements imprégnés de sang au sol et se changea en hâte, avant de revenir vers son fidèle tourne-disque. Ce sera une musique plus entraînante, cette fois.