Jeu 27 Juin - 16:46
Ratamontade
FT. Ratamahatta
-« Bien, Messieurs… »
Râclements de chaises autour de la grande table ovale en acajou. Chacun des hommes en costume se radosse dans son immense dossier de cuir plissé en prenant appui sur ses accoudoirs.
-« Vous n’avez pas reçu d’ordre du jour pour cette réunion imprévue. Je vais mettre fin aux angoisses de certains, et donner raison à celles des autres. Si nous ne vous avons rien dit, c'est que l’enjeu est de taille. Nous ne pouvons nous permettre aucune erreur…. »
Les fronts plissés avec sérieux écoutaient chaque mot de l’orateur, un homme entre-deux âges avec une certaine prestance, quoi que vieillissant.
-« Quand je dis que l’Alliance a notre très Savante ville dans le collimateur depuis les attentats d’Opale, je ne vous apprends rien. Opale est comme un tigre en boîte prêt à sauter sur l’occasion de nous faire du tord. Malgré leur situation délicate avec la Brume, les Sept familles et le Magistère ne perdront pas une occasion de nous rouler dessus pour prendre la place de leader d’Urh. La première marche de leur plan est de nous discréditer… »
Murmures d’assentiments dans la salle. Jusque là, personne de fâché, tout le monde est d’accord.
-« Ce traître de Régent nous a mis dans une situation indéfendable. Pour ôter à Opale son hochet des mains, nous avons décidé de mener une opération mains-propres sans précédent ! »
Certains fessiers commencent à se réajuster avec malaise dans leur assise.
« Cela fait trop longtemps que nous tolérons certains miasmes au sein de notre cité, sous prétexte qu’ils s’épanouissent dans la basse-ville, comme zone de non-droit. Mais il est temps de rétablir notre autorité sur l’ensemble de la cité. Nous avons déjà commencé à nous en prendre à certaines activités criminelles, comme le trafic d’organes, qui avait parfois lieu au sein de nos usines. On ne peut pas prétendre avoir interrompu le trafic, mais les gangsters sont inquiétés. Nous devons continuer à donner le sentiment aux prolos que nous sommes de leur côté. Nous ne pouvons pas courir le risque qu’Opale nourrisse un ressentiment tel qu’il donne lieu à une guerre civile. Laissons cela à notre voisine, Xandrie.»
Tout le monde écoutait le monologue de l’ancien, dans cette audience de puissants mystérieux. Ils se doutaient bien que quelque chose de plus fracassant les attendait. Car tous étaient déjà plus ou moins au courant de ces idées générales. La vertu, la Science, l’unité, le Régent nous a dupé, blabla…
« Mais des accusations bien plus lourdes pèsent sur nous. Collusion avec l’ennemi suprême, le Mandebrume et le XIIIème Cercle… ne prétendez pas ! Il y a une kabbale! Certains parmi nous font commerce avec le XIIIème Cercle ou ferment les yeux au nom de petits arrangements… Tout cela… c’est terminé. Et maintenant… Officiers… »
Surgis tels des ombres incolores, des commissaires de police triés sur le volet pour leur mutisme et leur loyauté envers l’orateur entrèrent et refermèrent les double-portes à clefs derrière eux. Quelques éclats de voix scandalisés s’insurgèrent. On osait les traiter ainsi. De quoi étaient-ils accusés au juste ?
-« Silence !... Une opération est en cours en ce moment même pour éradiquer la Cour des Miracles dans la Basse-Ville . Je garantis qu’il n’y aura aucune fuite permettant de les avertir, puisque personne, pas même moi, ne quittera cette salle avant la fin de l’intervention… des rafraîchissements, des cigares ainsi qu’un repas gastronomique musical seront proposés pour votre confort en temps voulu. »
Les puissants hésitaient à se montrer réfractaires. Cela sentait trop la purge. Et à raison. Transpirant abondamment, certains virent arriver leur pire cauchemar.
Un officier anonyme déposa une mallette de cuir noir aux coin renforcés de métal argenté sur la table lustrée. L’ancien la fit pivoter vers lui et défit les crochets pour l’ouvrir et dévoiler un cristal de jeremjévite de taille considérable.
-« Pour ceux qui se le demanderaient encore, il s’agit d’un cristal vivifié de polygraphie. Personne ne posera de question sur votre mariage ou votre déclaration d’impôt… En revanche attendez-vous à répondre à « Êtes-vous loyal à Epistopoli ? Êtes-vous membre du XIIIème siècle ? Faites-vous un commerce avec un membre affilié au XIIIème Cercle ou à leurs intérêts ? Projetez-vous de participer ou de soutenir un attentat contre Epistopoli ou ses ressortissants ? »
Silence de mort. Dans l’assemblée d’une vingtaine d’hommes, il en existait plusieurs qui se savaient finis. La présence en surnombre d’officiers de police équipés pour certains de cristaux offensifs et défensifs ne permettaient même pas d’espérer s’échapper…
Sur une placette piteuse, au milieu de laquelle se dressait péniblement une statue décapitée, une silhouette voutée s’abritait sous une couverture. La mise en scène ne devait rien au hasard. Ni le lieu ni le protagoniste n’avaient été choisi inoccemment. R. avait des vices et des marottes bien connues. Lorsqu’un projet « artistique » le prenait aux tripes, il ne pouvait plus ruminer en paix avant de l’avoir accouché.
Son « Violon » tant convoité lui était servi sur un plateau d’argent. Maladif, l’air amaigri et déprimé, quoi de plus normal lorsque l’on mord la main qui vous nourrit. La disgrâce est rapide pour les orgueilleux qui ont cru en une ascension rapide et sans conditions. A trop vouloir toucher le soleil, on finit brûlé et à mordre la poussière.
Ainsi, le pauvre Keshâ’rem avait déchu. Il en était réduit à faire la mendicité. Ses quelques anciens camarades le méprisaient pour avoir gâché une telle opportunité. Et pour avoir cédé à l’Esquisse. L’oisillon tombé du nid chantait, chantait, chantait, des arias mélancoliques, pour tenter d’amadouer passants et gredins et récolter quelques piécettes pour sa subsistance. Même les plus froids s’arrêtaient un instant par curiosité pour identifier l’origine de la mélodie avant de poursuivre leur chemin. Quelques rares silhouette jettent un astra d'argent dans un béret déposé sur la marche en contrebas de la statue.
Profite Keshâ’rem, avant que ta voix ne soit à jamais éraillée et que la mort ne voile tes yeux en retour à ton ingratitude. Toi qui as rejeté le GENIE de ton sauveur. Son timbre suave se déroulait comme le chant envoûtant des sirènes...
Il comptait sur le son de sa voix pour flotter jusqu’aux petites oreilles de la Cour des Miracles en un rien de temps. La tentation devait être trop forte de lui tomber dessus pour Ratamahatta. Ne serait-ce que parce qu’il avait embarqué croco-poulet avec lui. La création ratée de Vilaine avait péri dans le caniveau, après avoir été rejeté pour sa difformité par sa famille et s’être shooté à l’Esquisse. C’était l’une des motivations de l’orphelin pour signer un pacte faustien avec la police Epistote.
Régler son compte à ces ordures de mutants. Et à tous les acolytes du Mandebrume. Il se retrouvait là un peu par défaut, ni policier, ni militaire. Un va-tout puissant, qui s’était montré à plusieurs reprises loyal aux intérêts de la cité. Pourvu de capacités surprenantes. Dans le pire des cas, une perte acceptable, car il n’était pas des leurs. Un bon chien obéissant et naïf.
Râclements de chaises autour de la grande table ovale en acajou. Chacun des hommes en costume se radosse dans son immense dossier de cuir plissé en prenant appui sur ses accoudoirs.
-« Vous n’avez pas reçu d’ordre du jour pour cette réunion imprévue. Je vais mettre fin aux angoisses de certains, et donner raison à celles des autres. Si nous ne vous avons rien dit, c'est que l’enjeu est de taille. Nous ne pouvons nous permettre aucune erreur…. »
Les fronts plissés avec sérieux écoutaient chaque mot de l’orateur, un homme entre-deux âges avec une certaine prestance, quoi que vieillissant.
-« Quand je dis que l’Alliance a notre très Savante ville dans le collimateur depuis les attentats d’Opale, je ne vous apprends rien. Opale est comme un tigre en boîte prêt à sauter sur l’occasion de nous faire du tord. Malgré leur situation délicate avec la Brume, les Sept familles et le Magistère ne perdront pas une occasion de nous rouler dessus pour prendre la place de leader d’Urh. La première marche de leur plan est de nous discréditer… »
Murmures d’assentiments dans la salle. Jusque là, personne de fâché, tout le monde est d’accord.
-« Ce traître de Régent nous a mis dans une situation indéfendable. Pour ôter à Opale son hochet des mains, nous avons décidé de mener une opération mains-propres sans précédent ! »
Certains fessiers commencent à se réajuster avec malaise dans leur assise.
« Cela fait trop longtemps que nous tolérons certains miasmes au sein de notre cité, sous prétexte qu’ils s’épanouissent dans la basse-ville, comme zone de non-droit. Mais il est temps de rétablir notre autorité sur l’ensemble de la cité. Nous avons déjà commencé à nous en prendre à certaines activités criminelles, comme le trafic d’organes, qui avait parfois lieu au sein de nos usines. On ne peut pas prétendre avoir interrompu le trafic, mais les gangsters sont inquiétés. Nous devons continuer à donner le sentiment aux prolos que nous sommes de leur côté. Nous ne pouvons pas courir le risque qu’Opale nourrisse un ressentiment tel qu’il donne lieu à une guerre civile. Laissons cela à notre voisine, Xandrie.»
Tout le monde écoutait le monologue de l’ancien, dans cette audience de puissants mystérieux. Ils se doutaient bien que quelque chose de plus fracassant les attendait. Car tous étaient déjà plus ou moins au courant de ces idées générales. La vertu, la Science, l’unité, le Régent nous a dupé, blabla…
« Mais des accusations bien plus lourdes pèsent sur nous. Collusion avec l’ennemi suprême, le Mandebrume et le XIIIème Cercle… ne prétendez pas ! Il y a une kabbale! Certains parmi nous font commerce avec le XIIIème Cercle ou ferment les yeux au nom de petits arrangements… Tout cela… c’est terminé. Et maintenant… Officiers… »
Surgis tels des ombres incolores, des commissaires de police triés sur le volet pour leur mutisme et leur loyauté envers l’orateur entrèrent et refermèrent les double-portes à clefs derrière eux. Quelques éclats de voix scandalisés s’insurgèrent. On osait les traiter ainsi. De quoi étaient-ils accusés au juste ?
-« Silence !... Une opération est en cours en ce moment même pour éradiquer la Cour des Miracles dans la Basse-Ville . Je garantis qu’il n’y aura aucune fuite permettant de les avertir, puisque personne, pas même moi, ne quittera cette salle avant la fin de l’intervention… des rafraîchissements, des cigares ainsi qu’un repas gastronomique musical seront proposés pour votre confort en temps voulu. »
Les puissants hésitaient à se montrer réfractaires. Cela sentait trop la purge. Et à raison. Transpirant abondamment, certains virent arriver leur pire cauchemar.
Un officier anonyme déposa une mallette de cuir noir aux coin renforcés de métal argenté sur la table lustrée. L’ancien la fit pivoter vers lui et défit les crochets pour l’ouvrir et dévoiler un cristal de jeremjévite de taille considérable.
-« Pour ceux qui se le demanderaient encore, il s’agit d’un cristal vivifié de polygraphie. Personne ne posera de question sur votre mariage ou votre déclaration d’impôt… En revanche attendez-vous à répondre à « Êtes-vous loyal à Epistopoli ? Êtes-vous membre du XIIIème siècle ? Faites-vous un commerce avec un membre affilié au XIIIème Cercle ou à leurs intérêts ? Projetez-vous de participer ou de soutenir un attentat contre Epistopoli ou ses ressortissants ? »
Silence de mort. Dans l’assemblée d’une vingtaine d’hommes, il en existait plusieurs qui se savaient finis. La présence en surnombre d’officiers de police équipés pour certains de cristaux offensifs et défensifs ne permettaient même pas d’espérer s’échapper…
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Sur une placette piteuse, au milieu de laquelle se dressait péniblement une statue décapitée, une silhouette voutée s’abritait sous une couverture. La mise en scène ne devait rien au hasard. Ni le lieu ni le protagoniste n’avaient été choisi inoccemment. R. avait des vices et des marottes bien connues. Lorsqu’un projet « artistique » le prenait aux tripes, il ne pouvait plus ruminer en paix avant de l’avoir accouché.
Son « Violon » tant convoité lui était servi sur un plateau d’argent. Maladif, l’air amaigri et déprimé, quoi de plus normal lorsque l’on mord la main qui vous nourrit. La disgrâce est rapide pour les orgueilleux qui ont cru en une ascension rapide et sans conditions. A trop vouloir toucher le soleil, on finit brûlé et à mordre la poussière.
Ainsi, le pauvre Keshâ’rem avait déchu. Il en était réduit à faire la mendicité. Ses quelques anciens camarades le méprisaient pour avoir gâché une telle opportunité. Et pour avoir cédé à l’Esquisse. L’oisillon tombé du nid chantait, chantait, chantait, des arias mélancoliques, pour tenter d’amadouer passants et gredins et récolter quelques piécettes pour sa subsistance. Même les plus froids s’arrêtaient un instant par curiosité pour identifier l’origine de la mélodie avant de poursuivre leur chemin. Quelques rares silhouette jettent un astra d'argent dans un béret déposé sur la marche en contrebas de la statue.
Profite Keshâ’rem, avant que ta voix ne soit à jamais éraillée et que la mort ne voile tes yeux en retour à ton ingratitude. Toi qui as rejeté le GENIE de ton sauveur. Son timbre suave se déroulait comme le chant envoûtant des sirènes...
Il comptait sur le son de sa voix pour flotter jusqu’aux petites oreilles de la Cour des Miracles en un rien de temps. La tentation devait être trop forte de lui tomber dessus pour Ratamahatta. Ne serait-ce que parce qu’il avait embarqué croco-poulet avec lui. La création ratée de Vilaine avait péri dans le caniveau, après avoir été rejeté pour sa difformité par sa famille et s’être shooté à l’Esquisse. C’était l’une des motivations de l’orphelin pour signer un pacte faustien avec la police Epistote.
Régler son compte à ces ordures de mutants. Et à tous les acolytes du Mandebrume. Il se retrouvait là un peu par défaut, ni policier, ni militaire. Un va-tout puissant, qui s’était montré à plusieurs reprises loyal aux intérêts de la cité. Pourvu de capacités surprenantes. Dans le pire des cas, une perte acceptable, car il n’était pas des leurs. Un bon chien obéissant et naïf.
Dernière édition par Keshâ'rem Evangelisto le Mer 9 Oct - 19:36, édité 2 fois
Sam 6 Juil - 11:46
Mon gramophone inonde l'atelier d'un délicieux rap technoïde mélancolique.
Les statues se tournent vers le nouvel arrivant, lui adressant une volée de radieux sourires.
Gabriel répond à cet accueil par un regard inquisiteur. Ses violents petits yeux méchants attaquent le papa de ces oeuvres.
Ô Gabriel ! Cesse de me mirer ainsi ou tu vas provoquer un accident malencontreux dans mon slip.
- Ratamahatta ! Je vois que tu prépares ton départ.
- Bonjour, Gaby ! Je prépare rien du tout,
- Ta gueule, bourrique, j'étais sarcastique.
- j'écoute les murmures de mes capillaires bouillants, sais-tu que j'ai de plus en plus d'hémorragies cérébrales ? Lorsqu'un filet de sang bleu sort de mes naseaux, j'y ajoute un grain de magie et de folie puis le réinjecte directement dans ma machine à créer
- Ta gueule. Ta cervelle est trop trouée pour que tu t'en rendes compte, mais les flics peuvent débarquer à tout moment pour te coller une balle dans la tête.
- Tu me sous-estimes Gaby si tu me crois incapable de revenir des limbes lorsqu'on m'y envoie, je suis déjà mort une dizaine de fois rien qu'hier et ça m'a à peine chatouillé,
si aucun des chronophages du cinquième plan n'a réussi à me sceller, sois certain qu'aucun poulet epistote n'y parviendra non plus,
L'argile, mêlé au myste, devient de la Sève, cette séduisante matière vaporeuse mi-physique mi-imaginaire, qui répond à tous les caprices de ton esprit, comme un animal bien dressé
Je plie ma colonne vertébrale en arc de cercle, jusqu'à l'entendre me supplier d'arrêter ; puis je badigonne mon torse de Sève, comme si mon ventre était un portail menant sur une galaxie lointaine, il se met à luire de mille feux. Ne pouvant supporter le spectacle, mes statues ferment les yeux et se prostrent dans un craquement sourd,
Mon gramophone tousse et s'étouffe dans son vomi.
- T'as pris quoi ?
- Fèves d'Anastase, 12 grammes. Torrent d'Amour, 600 microgrammes. Esquisse, 15 milligrammes. Jack bleu... je ne sais plus ? Trois cartons ?
- Des doses de cheval.
- Un cocktail de champion
- Je pensais pouvoir compter sur toi pour le surveiller, Vilaine ?
Vilaine est allongée sur une toile, persuadée que celle-ci est vivante et qu'elle la nourrit d'un énorme câlin chaleureux. Note que c'est quelque chose qui pourrait arriver pour de vrai, ici ; mais non là c'est faux, Vilaine est simplement déchirée, elle secoue ses petites pattes velues devant elle et se frotte à ma peinture comme si elle la baisait ou je sais pas quoi : j'adore cet esprit "romance hardcore" qu'elle apporte à mon atelier, excellente suggestion Vilaine,
- Excellente suggestion, Vilaine
- M-Merci... ?
- Bon, ça suffit.
Gabriel se téléporte devant moi. D'une poignée musculeuse, il me saisit par une esgourde et me fracasse le museau contre le plancher. Ça me ferait extrêmement mal si je n'avais pas le système nerveux noyé !
Il attend pas que je me relève et me traîne sur le sol, sous le regard effaré de mes oeuvres.
- Je t'exfiltre d'Episto aujourd'hui. Pas négociable. Les fiestas, les drogues, les orgies, c'est fini. Fais tes valises, du vrai boulot t'attend.
- Mes petits lutins viennent avec moi, c'est pas négociable ! Tu le sais, la famille c'est sacré
- Si ça leur chante, qu'ils nous suivent. C'est ton cul qui m'intéresse, pas ceux de tes potes.
- Mon cul a un succès fou ces temps-ci
Il m'a laissé me relever entretemps ! Ben il m'aurait pas traîné sur trois cent mètres à travers la base penses-tu, c'aurait été idiot d'abimer le minois de la plus belle Bête du Cercle. J'ai réalisé un petit stop dans ma pièce de cérémonie dans laquelle j'avais besoin de récupérer deux trois bricoles : mon sceptre Cocu , ma poudre d'escampette, ainsi que mes encens entropiques. On va voyager léger, on refera notre vie ailleurs, on est un citoyen du monde qui n'a besoin de rien d'autre dans ses valises que ses copinous.
J'ai pris le temps de bien notifier à chacun qui je voulais garder à mes côtés et qui resterait ici pour veiller sur mes affaires en attendant mon retour ! Selon Gaby y aura pas de retour, moi je crois qu'un jour Episto viendra me supplier, agenouillée, de revenir étaler sur ses murs ma semence bienfaitrice, je l'ai rendue dépendante.
Accompagné d'un troupeau de fidèles troubadours, à la fois forts en bagarre et en arts, je rejoins Gaby qui patiente dans le salon, assis sur le canap à mirer dans le vide de ses deux gros yeux à moitié décomposés. Vilaine aussi est là, groggy mais souriante, trépignant d'impatience, excitée à l'idée de partir en voyage - même si je suis pas sûr qu'elle ait toutes les clés de compréhension pour savoir ce qu'on va aller foutre dans ce gros anus moite et fumant qu'est Xandrie.
- Cette ville m'a vue accoucher d'oeuvres et de projets merveilleux ; j'y laisse quelques tripes, les amis, je vous l'avoue
Voyez Xandrie comme une parenthèse - un joli poème annexe au grand récit que je rédigeais ici
- Comment on transformera les gens là-bas R ? s'inquiète Vilaine. Merde, et mes travaux en cours ? Je laisse tout ici ?
- Le Cercle s'occupera de déplacer mon matériel, et...
Je mate Gaby. Je lui adresse un énorme sourire. Mon sourire grandit, fend mes oreilles, grimpe jusqu'au plafond.
- ... le Cercle suivra nos activités de plus près aussi
Le Cercle veut s'assurer que personne -y compris moi-même- ne me fera du mal. C'est très très aimable de leur part mais leur tendance à me coller commence à me taper sur le système tu sais ? Ces dernières semaines, ils m'envoyaient tous les jours un sbire pour me demander quand est-ce que je comptais m'envoler, pour me conseiller de moins me défoncer, et pour m'ordonner de me sortir les doigts du cul, mais t'es pas ma mère Cercle tu crois quoi ?! Que R n'est pas suffisamment adapté au monde réel pour assurer sa propre subsistance en dehors de son cocon d'Amour epistote ?
- Est-ce que je peux amener mes esclaves en viande de porc ?, les mandibules de Vilaine remuent innocemment.
- Bien sûr tu n'auras qu'à les tasser sur le toit de la limousine
- Non. Gaby rétorque, Ce sera suffisamment difficile comme ça d'exfiltrer votre cirque ambulant. Pas de viande de porc sur le toit. Et ce n'est pas une limousine mais un fourgon blindé.
- R ! R ! Keshou ! Je l'ai retrouvé !
Attends, quoi ?
- Qui me parle ?
- Moi ! Là ! Là !
C'est Ninja, petit homme-rat moustachu. Il furetait discretos pour nous dans les rues, en recherche de nouvelles rumeurs croustillantes.
Attends quoi ?
- Keshou ?
- Retrouvé !
Je mets une bonne dizaine de secondes à digérer l'annonce. Durant ce laps de temps, de la joie se propage sur chaque visage de l'assistance. Sauf sur celui de Gaby le rabat-joie.
- ... Le violon ? On a retrouvé mon violon ?
- Oui ! C'est devenu une épave. Il se défonce en mendiant pour pouvoir se défoncer encore plus.
- Il profite de la vie ! Ravissant !
Gabriel... Me regarde pas comme ça, oh la la ! Ce dégoût que je perçois dans tes grosses pupilles zombies !
- C'est mon dernier projet ici, Gabriel. Je te le promets. C'est capital que je l'achève, pour le bien-être de ma petite famille
- T'es sérieux ?
- Je pars pas sans mon violon
Mes menaces ne fonctionneront jamais sur toi, Gabriel ! Mais je suis hors de TOUT contrôle quand on me cause de Keshou. Lorsque j'ai perdu sa trace j'ai été putain de TRISTE pendant TROIS JOURS durant en pensant à cette fantastique voix qui ne chantera plus jamais pour moi, à ses majestueuses cordes vocales qui ne figureront jamais dans ma collection de viande sublime.
Mais ! Il est de retour ! l'occasion se présente de l'amener avec moi à Xandrie ! Alors va te faire enculer Gaby. Si tu me refuses mon Keshou, je vais être ronchon pendant toute la route et me cogner la boule partout contre les murs du fourgon.
- Bon, tu as deux heures, le temps que je règle les derniers détails. Pas d'entourloupe. Mes ordres sont de t'exfiltrer, même si je dois te péter les jambes pour le faire.
- Merci Gaby, tu as toujours été le psychopompe le plus gentil et compréhensif de notre communauté,
BEC !
Bec, la femme-perroquet toute de mauve vêtue, piaille de stupeur.
- Keshou. Tous les moyens sont permis, tant que tu n'abîmes pas sa voix
Tu mobilises qui tu veux sous tes ordres. Sers toi dans la réserve de flingues et de cristaux. C'est toi la patronne
Mais t'as UNE. HEURE. pour me ramener KESHOU.
UNE HEURE.
Elle re-piaille hystériquement puis se carapate en battant des ailes.
Elle pointe de ses doigts emplumés plusieurs gros bras mutants et tous se mettent en branle. Ça galope dans les couloirs comme si leurs vies en dépendaient - oui c'est un peu le cas finalement !
Quant à Gaby, il s'est téléporté, pouf. Il a disparu, ce farceur. Il me laisse seul dans le grand salon, en tête à tête avec mes songes.
J'ai encore du mal à réaliser que je vais partir d'Episto tu sais ? Avant même d'avoir pu la faire mienne, avant même d'avoir pu la transformer en un gîte chaleureux pour tous les aficionados du Mystère.
Episto était mon amante abusive et je la quitte avant d'avoir réussi à la changer ! Douce et cruelle Episto, tu n'as jamais compris tout le Bien que je te voulais...
Oh ! Ça m'arrache des larmes, ça y est, je n'aurai jamais eu l'occasion de finir ce que j'ai commencé ici !! Saloperie ! Des cascades de fluides lacrymaux rougeoyants se déversent hors de mes petits yeux équins. Accuse moi d'être trop sensible ben oui je plaide coupable ! j'ai un coeur tendre et sucré, avide de douceur et de sens. Je m'affale dans le canapé miteux du salon et démarre une énorme séance de chialade.
Surpris, l'un des gardes mutants qui patrouillait dans le salon se rapproche timidement de moi, et me tapote l'épaule. Quel gros nounours !
... Je veux dire que c'est littéralement un mutant nounours, avec un sourire immense qui réconforte les petits comme les grands. Je m'engage avec lui dans un intense câlin libérateur, serrant fort son bide, fort fort fort à lui en faire imploser les tripes.
Amener Keshou avec moi me réconforte ! Je lui pardonne de m'avoir fui. C'est difficile d'accepter la présence d'un Dieu bienfaiteur prêt à t'offrir un monde, tu te demandes quel est le prix d'une telle générosité ?
Tu te demandes, "une fois que tu m'auras absorbé dans ton étreinte, serai-je encore moi-même ?",
et je te réponds, "Non, Keshou, tu seras mon violon, tu me régaleras de tes vocalises nostalgiques et tu me téléporteras dans les rues fantasmées de ma folle jeunesse..."
Ben oui j'ai hâte de jouer de toi, Keshou...
Les statues se tournent vers le nouvel arrivant, lui adressant une volée de radieux sourires.
Gabriel répond à cet accueil par un regard inquisiteur. Ses violents petits yeux méchants attaquent le papa de ces oeuvres.
Ô Gabriel ! Cesse de me mirer ainsi ou tu vas provoquer un accident malencontreux dans mon slip.
- Ratamahatta ! Je vois que tu prépares ton départ.
- Bonjour, Gaby ! Je prépare rien du tout,
- Ta gueule, bourrique, j'étais sarcastique.
- j'écoute les murmures de mes capillaires bouillants, sais-tu que j'ai de plus en plus d'hémorragies cérébrales ? Lorsqu'un filet de sang bleu sort de mes naseaux, j'y ajoute un grain de magie et de folie puis le réinjecte directement dans ma machine à créer
- Ta gueule. Ta cervelle est trop trouée pour que tu t'en rendes compte, mais les flics peuvent débarquer à tout moment pour te coller une balle dans la tête.
- Tu me sous-estimes Gaby si tu me crois incapable de revenir des limbes lorsqu'on m'y envoie, je suis déjà mort une dizaine de fois rien qu'hier et ça m'a à peine chatouillé,
si aucun des chronophages du cinquième plan n'a réussi à me sceller, sois certain qu'aucun poulet epistote n'y parviendra non plus,
L'argile, mêlé au myste, devient de la Sève, cette séduisante matière vaporeuse mi-physique mi-imaginaire, qui répond à tous les caprices de ton esprit, comme un animal bien dressé
Je plie ma colonne vertébrale en arc de cercle, jusqu'à l'entendre me supplier d'arrêter ; puis je badigonne mon torse de Sève, comme si mon ventre était un portail menant sur une galaxie lointaine, il se met à luire de mille feux. Ne pouvant supporter le spectacle, mes statues ferment les yeux et se prostrent dans un craquement sourd,
Mon gramophone tousse et s'étouffe dans son vomi.
- T'as pris quoi ?
- Fèves d'Anastase, 12 grammes. Torrent d'Amour, 600 microgrammes. Esquisse, 15 milligrammes. Jack bleu... je ne sais plus ? Trois cartons ?
- Des doses de cheval.
- Un cocktail de champion
- Je pensais pouvoir compter sur toi pour le surveiller, Vilaine ?
Vilaine est allongée sur une toile, persuadée que celle-ci est vivante et qu'elle la nourrit d'un énorme câlin chaleureux. Note que c'est quelque chose qui pourrait arriver pour de vrai, ici ; mais non là c'est faux, Vilaine est simplement déchirée, elle secoue ses petites pattes velues devant elle et se frotte à ma peinture comme si elle la baisait ou je sais pas quoi : j'adore cet esprit "romance hardcore" qu'elle apporte à mon atelier, excellente suggestion Vilaine,
- Excellente suggestion, Vilaine
- M-Merci... ?
- Bon, ça suffit.
Gabriel se téléporte devant moi. D'une poignée musculeuse, il me saisit par une esgourde et me fracasse le museau contre le plancher. Ça me ferait extrêmement mal si je n'avais pas le système nerveux noyé !
Il attend pas que je me relève et me traîne sur le sol, sous le regard effaré de mes oeuvres.
- Je t'exfiltre d'Episto aujourd'hui. Pas négociable. Les fiestas, les drogues, les orgies, c'est fini. Fais tes valises, du vrai boulot t'attend.
- Mes petits lutins viennent avec moi, c'est pas négociable ! Tu le sais, la famille c'est sacré
- Si ça leur chante, qu'ils nous suivent. C'est ton cul qui m'intéresse, pas ceux de tes potes.
- Mon cul a un succès fou ces temps-ci
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Il m'a laissé me relever entretemps ! Ben il m'aurait pas traîné sur trois cent mètres à travers la base penses-tu, c'aurait été idiot d'abimer le minois de la plus belle Bête du Cercle. J'ai réalisé un petit stop dans ma pièce de cérémonie dans laquelle j'avais besoin de récupérer deux trois bricoles : mon sceptre Cocu , ma poudre d'escampette, ainsi que mes encens entropiques. On va voyager léger, on refera notre vie ailleurs, on est un citoyen du monde qui n'a besoin de rien d'autre dans ses valises que ses copinous.
J'ai pris le temps de bien notifier à chacun qui je voulais garder à mes côtés et qui resterait ici pour veiller sur mes affaires en attendant mon retour ! Selon Gaby y aura pas de retour, moi je crois qu'un jour Episto viendra me supplier, agenouillée, de revenir étaler sur ses murs ma semence bienfaitrice, je l'ai rendue dépendante.
Accompagné d'un troupeau de fidèles troubadours, à la fois forts en bagarre et en arts, je rejoins Gaby qui patiente dans le salon, assis sur le canap à mirer dans le vide de ses deux gros yeux à moitié décomposés. Vilaine aussi est là, groggy mais souriante, trépignant d'impatience, excitée à l'idée de partir en voyage - même si je suis pas sûr qu'elle ait toutes les clés de compréhension pour savoir ce qu'on va aller foutre dans ce gros anus moite et fumant qu'est Xandrie.
- Cette ville m'a vue accoucher d'oeuvres et de projets merveilleux ; j'y laisse quelques tripes, les amis, je vous l'avoue
Voyez Xandrie comme une parenthèse - un joli poème annexe au grand récit que je rédigeais ici
- Comment on transformera les gens là-bas R ? s'inquiète Vilaine. Merde, et mes travaux en cours ? Je laisse tout ici ?
- Le Cercle s'occupera de déplacer mon matériel, et...
Je mate Gaby. Je lui adresse un énorme sourire. Mon sourire grandit, fend mes oreilles, grimpe jusqu'au plafond.
- ... le Cercle suivra nos activités de plus près aussi
Le Cercle veut s'assurer que personne -y compris moi-même- ne me fera du mal. C'est très très aimable de leur part mais leur tendance à me coller commence à me taper sur le système tu sais ? Ces dernières semaines, ils m'envoyaient tous les jours un sbire pour me demander quand est-ce que je comptais m'envoler, pour me conseiller de moins me défoncer, et pour m'ordonner de me sortir les doigts du cul, mais t'es pas ma mère Cercle tu crois quoi ?! Que R n'est pas suffisamment adapté au monde réel pour assurer sa propre subsistance en dehors de son cocon d'Amour epistote ?
- Est-ce que je peux amener mes esclaves en viande de porc ?, les mandibules de Vilaine remuent innocemment.
- Bien sûr tu n'auras qu'à les tasser sur le toit de la limousine
- Non. Gaby rétorque, Ce sera suffisamment difficile comme ça d'exfiltrer votre cirque ambulant. Pas de viande de porc sur le toit. Et ce n'est pas une limousine mais un fourgon blindé.
- R ! R ! Keshou ! Je l'ai retrouvé !
Attends, quoi ?
- Qui me parle ?
- Moi ! Là ! Là !
C'est Ninja, petit homme-rat moustachu. Il furetait discretos pour nous dans les rues, en recherche de nouvelles rumeurs croustillantes.
Attends quoi ?
- Keshou ?
- Retrouvé !
Je mets une bonne dizaine de secondes à digérer l'annonce. Durant ce laps de temps, de la joie se propage sur chaque visage de l'assistance. Sauf sur celui de Gaby le rabat-joie.
- ... Le violon ? On a retrouvé mon violon ?
- Oui ! C'est devenu une épave. Il se défonce en mendiant pour pouvoir se défoncer encore plus.
- Il profite de la vie ! Ravissant !
Gabriel... Me regarde pas comme ça, oh la la ! Ce dégoût que je perçois dans tes grosses pupilles zombies !
- C'est mon dernier projet ici, Gabriel. Je te le promets. C'est capital que je l'achève, pour le bien-être de ma petite famille
- T'es sérieux ?
- Je pars pas sans mon violon
Mes menaces ne fonctionneront jamais sur toi, Gabriel ! Mais je suis hors de TOUT contrôle quand on me cause de Keshou. Lorsque j'ai perdu sa trace j'ai été putain de TRISTE pendant TROIS JOURS durant en pensant à cette fantastique voix qui ne chantera plus jamais pour moi, à ses majestueuses cordes vocales qui ne figureront jamais dans ma collection de viande sublime.
Mais ! Il est de retour ! l'occasion se présente de l'amener avec moi à Xandrie ! Alors va te faire enculer Gaby. Si tu me refuses mon Keshou, je vais être ronchon pendant toute la route et me cogner la boule partout contre les murs du fourgon.
- Bon, tu as deux heures, le temps que je règle les derniers détails. Pas d'entourloupe. Mes ordres sont de t'exfiltrer, même si je dois te péter les jambes pour le faire.
- Merci Gaby, tu as toujours été le psychopompe le plus gentil et compréhensif de notre communauté,
BEC !
Bec, la femme-perroquet toute de mauve vêtue, piaille de stupeur.
- Keshou. Tous les moyens sont permis, tant que tu n'abîmes pas sa voix
Tu mobilises qui tu veux sous tes ordres. Sers toi dans la réserve de flingues et de cristaux. C'est toi la patronne
Mais t'as UNE. HEURE. pour me ramener KESHOU.
UNE HEURE.
Elle re-piaille hystériquement puis se carapate en battant des ailes.
Elle pointe de ses doigts emplumés plusieurs gros bras mutants et tous se mettent en branle. Ça galope dans les couloirs comme si leurs vies en dépendaient - oui c'est un peu le cas finalement !
Quant à Gaby, il s'est téléporté, pouf. Il a disparu, ce farceur. Il me laisse seul dans le grand salon, en tête à tête avec mes songes.
J'ai encore du mal à réaliser que je vais partir d'Episto tu sais ? Avant même d'avoir pu la faire mienne, avant même d'avoir pu la transformer en un gîte chaleureux pour tous les aficionados du Mystère.
Episto était mon amante abusive et je la quitte avant d'avoir réussi à la changer ! Douce et cruelle Episto, tu n'as jamais compris tout le Bien que je te voulais...
Oh ! Ça m'arrache des larmes, ça y est, je n'aurai jamais eu l'occasion de finir ce que j'ai commencé ici !! Saloperie ! Des cascades de fluides lacrymaux rougeoyants se déversent hors de mes petits yeux équins. Accuse moi d'être trop sensible ben oui je plaide coupable ! j'ai un coeur tendre et sucré, avide de douceur et de sens. Je m'affale dans le canapé miteux du salon et démarre une énorme séance de chialade.
Surpris, l'un des gardes mutants qui patrouillait dans le salon se rapproche timidement de moi, et me tapote l'épaule. Quel gros nounours !
... Je veux dire que c'est littéralement un mutant nounours, avec un sourire immense qui réconforte les petits comme les grands. Je m'engage avec lui dans un intense câlin libérateur, serrant fort son bide, fort fort fort à lui en faire imploser les tripes.
Amener Keshou avec moi me réconforte ! Je lui pardonne de m'avoir fui. C'est difficile d'accepter la présence d'un Dieu bienfaiteur prêt à t'offrir un monde, tu te demandes quel est le prix d'une telle générosité ?
Tu te demandes, "une fois que tu m'auras absorbé dans ton étreinte, serai-je encore moi-même ?",
et je te réponds, "Non, Keshou, tu seras mon violon, tu me régaleras de tes vocalises nostalgiques et tu me téléporteras dans les rues fantasmées de ma folle jeunesse..."
Ben oui j'ai hâte de jouer de toi, Keshou...
Sam 27 Juil - 15:18
Ratamontade
FT. Ratamahatta
Une foule mi-méprisante mi-fascinée avait fini par s’amasser en arc de cercle autour de son estrade de fortune. Les nuages jaunâtres du smog voilaient le soleil, réduit à un halo fragile qui n’était que le reflet des yeux éteints du chanteur. A demi-fermés, ils semblaient incapables d’accueillir plus de lumière que celle que daignait lui transmettre le ciel d’Epistopoli.
Sa beauté fragile se parait de famine. Les yeux rougis bordés par des cernes violets, une peau aussi blanche que la farine, anémiée, esquissée d’une trace de suie. Tout avait été pensé dans son maquillage de scène populaire, pour exploser le box-office dans son rôle des bas-fonds. Avec difficulté, il réfrénait son regard curieux de passer d’un protagoniste à l’autre pour suivre l’arrivée des sbires de Ratamahatta. Keshâ’rem s’était entraîné à avoir l’air un peu égaré, comme s’il ne savait pas vraiment ce qu’il faisait là, en bon drogué, comme si son chant était un accident de la bonne fortune, laissant le divin émerger de la crasse.
L’innocence dans la perversion. Le talent dans la déchéance.
~ ° Evangelisto. Aucun signe des individus recherchés pour le moment. Continue tant qu’il le faudra. Stop. ° ~
Si le piège ne fonctionnait pas, il serait profondément déçu. Toute cette mise en scène pour rien. Il ne savait pas comment les forces de police comptaient procéder. Keshâ avait juste pu constater que les plus gros jouets électroniques et l’élite cristalline avait été mobilisées. Si un jour ces zozos devaient lui courir après, il en serait mortifié.
L’agent de liaison lui donnait des consignes par télépathie, faisant le point ponctuellement. Aucun mot de trop. Sa voix sèche et pragmatique lui rappelait néanmoins qu’il n’était pas seul dans la gueule du loup. S’il n’apercevait personne, l’agent devait être quelque part dans un rayon de cent mètres avec un moyen quelconque de l’observer en temps réel. Sous la suie, sur sa joue, une marque noire, que lui avait apposé un soldat pour pouvoir le localiser et épier ses faits et gestes, au cas où il se commette en intelligence avec l’ennemi. La paranoïa était partout dans les strates de l’Etat Epistopolitain. Après tant d’efforts pour neutraliser les alliés du Cercle dans les hautes sphères durant l’opération, ce n’était pas pour qu’un agent double permette à R. de s’enfuir.
Quelques badauds avaient fini par lui lâcher des piécettes. Quand même ! Heureusement que les affiches de l’opéra du Marquis n’étaient pas encore imprimées, sans quoi, on aurait pu deviner une supercherie, quoiqu’il soit méconnaissable dans son costume de Sankhir.
Epuisé par la chaleur poisseuse et l’abondante foule qui l’agressait de ses émotions, il glissa doucement sur le marbre de sa plateforme, comme si ses jambes ne le portaient plus. Son cristal d’hypersensibilité captait des vagues de pitié ou d’admiration mêlées ; un torrent impétueux qu’il s’efforçait d’endurer pour éventuellement détecter une forme de folie ou de convoitise des suppôts de la Cour des Miracles. A un moment, il avait cru sentir une pique d’excitation frénétique, qui s’était vite évanouie. Mais peut-être était-ce seulement le produit de son imagination.
Alors qu’il s’arrêtait pour boire, surgirent comme un seul homme un groupe de gros bras à l’allure incomparable. Ailes de chauve-souris, crinière de lion et une mutante qu’il reconnaissait avec certitude. Bec.
-« Suis-nous, Keshâ. » clama le perroquet en ébrouant ses magnifiques plumes de ara.
L’œil cave, le jeune homme frêle cligna des yeux comme si tant de couleur l’éblouissait. Il avait l’air un peu perdu, comme s’il n’avait pas compris que l’on s’adressait à lui, ou qu’il s’apprêtait à reprendre sa mélopée. Son regard lavande passait à travers la mutante, trahissant une expression hagarde.
La main de l’un des mutants s’enflamma, un autre fit cliqueter une mitrailleuse Dexar qu’il portait en bandoulière, pour souligner le caractère impératif de cette demande. Autour, la foule recula en bloc de quelques pas sans que personne ne se soit concerté, ouvrant un couloir rectiligne pour le retrait de la troupe, que personne ne voulait approcher.
Bien qu’il se sache surveillé par des forces d’intervention spéciales, sans doute au fusil à lunette, la scène était très impressionnante. Sa respiration se fit sifflante. La « main » de bec se tendit vers lui et déplia ce qui faisait figure de doigts mais ressemblait plus à des serres. Ses doigts déliés se replièrent sur la griffe principale parmi les trois qui se tendaient vers lui. Sa nébula s’agita en lui, lui rappelant le triomphe dans la bataille contre les trafiquants en compagnie de Val’Ihem Karmine. S’il écoutait son élan tribal, il aurait succombé à l’envie de la drainer de sa vitalité devant tous ces spectateurs pour se repaître de sa stupeur.
Il se releva, alors que Bec l’entourait de ses rémiges, le prenant symboliquement sous l’aile de la Cour des Miracles sous l’œil des dizaines de témoins réunis. Les mutants remontèrent la place avec leur trophée. Leur chef emporterait son violon en Xandrie. L'artiste libéré de la misère marchait vers son destin.
~ ° C’est dans la boîte. Gagne seulement du temps une fois sur place. Le ver est dans le fruit. ° ~
Assez vite, il se retrouva à l'arrière d'un fourgon, le cul serré entre des monstruosités rivalisant avec celles qu'il se plaisait désormais à invoquer. Pour rien au monde, il ne serait retourné de son plein gré dans cet asile d’aliénés. Mais ce n’était plus le même, lui aussi était un peu fêlé désormais. Pauvre R. Il ne pouvait se douter du frigo qui allait lui tomber sur le coin de la gueule.
Sa beauté fragile se parait de famine. Les yeux rougis bordés par des cernes violets, une peau aussi blanche que la farine, anémiée, esquissée d’une trace de suie. Tout avait été pensé dans son maquillage de scène populaire, pour exploser le box-office dans son rôle des bas-fonds. Avec difficulté, il réfrénait son regard curieux de passer d’un protagoniste à l’autre pour suivre l’arrivée des sbires de Ratamahatta. Keshâ’rem s’était entraîné à avoir l’air un peu égaré, comme s’il ne savait pas vraiment ce qu’il faisait là, en bon drogué, comme si son chant était un accident de la bonne fortune, laissant le divin émerger de la crasse.
L’innocence dans la perversion. Le talent dans la déchéance.
~ ° Evangelisto. Aucun signe des individus recherchés pour le moment. Continue tant qu’il le faudra. Stop. ° ~
Si le piège ne fonctionnait pas, il serait profondément déçu. Toute cette mise en scène pour rien. Il ne savait pas comment les forces de police comptaient procéder. Keshâ avait juste pu constater que les plus gros jouets électroniques et l’élite cristalline avait été mobilisées. Si un jour ces zozos devaient lui courir après, il en serait mortifié.
L’agent de liaison lui donnait des consignes par télépathie, faisant le point ponctuellement. Aucun mot de trop. Sa voix sèche et pragmatique lui rappelait néanmoins qu’il n’était pas seul dans la gueule du loup. S’il n’apercevait personne, l’agent devait être quelque part dans un rayon de cent mètres avec un moyen quelconque de l’observer en temps réel. Sous la suie, sur sa joue, une marque noire, que lui avait apposé un soldat pour pouvoir le localiser et épier ses faits et gestes, au cas où il se commette en intelligence avec l’ennemi. La paranoïa était partout dans les strates de l’Etat Epistopolitain. Après tant d’efforts pour neutraliser les alliés du Cercle dans les hautes sphères durant l’opération, ce n’était pas pour qu’un agent double permette à R. de s’enfuir.
Quelques badauds avaient fini par lui lâcher des piécettes. Quand même ! Heureusement que les affiches de l’opéra du Marquis n’étaient pas encore imprimées, sans quoi, on aurait pu deviner une supercherie, quoiqu’il soit méconnaissable dans son costume de Sankhir.
Epuisé par la chaleur poisseuse et l’abondante foule qui l’agressait de ses émotions, il glissa doucement sur le marbre de sa plateforme, comme si ses jambes ne le portaient plus. Son cristal d’hypersensibilité captait des vagues de pitié ou d’admiration mêlées ; un torrent impétueux qu’il s’efforçait d’endurer pour éventuellement détecter une forme de folie ou de convoitise des suppôts de la Cour des Miracles. A un moment, il avait cru sentir une pique d’excitation frénétique, qui s’était vite évanouie. Mais peut-être était-ce seulement le produit de son imagination.
Alors qu’il s’arrêtait pour boire, surgirent comme un seul homme un groupe de gros bras à l’allure incomparable. Ailes de chauve-souris, crinière de lion et une mutante qu’il reconnaissait avec certitude. Bec.
-« Suis-nous, Keshâ. » clama le perroquet en ébrouant ses magnifiques plumes de ara.
L’œil cave, le jeune homme frêle cligna des yeux comme si tant de couleur l’éblouissait. Il avait l’air un peu perdu, comme s’il n’avait pas compris que l’on s’adressait à lui, ou qu’il s’apprêtait à reprendre sa mélopée. Son regard lavande passait à travers la mutante, trahissant une expression hagarde.
La main de l’un des mutants s’enflamma, un autre fit cliqueter une mitrailleuse Dexar qu’il portait en bandoulière, pour souligner le caractère impératif de cette demande. Autour, la foule recula en bloc de quelques pas sans que personne ne se soit concerté, ouvrant un couloir rectiligne pour le retrait de la troupe, que personne ne voulait approcher.
Bien qu’il se sache surveillé par des forces d’intervention spéciales, sans doute au fusil à lunette, la scène était très impressionnante. Sa respiration se fit sifflante. La « main » de bec se tendit vers lui et déplia ce qui faisait figure de doigts mais ressemblait plus à des serres. Ses doigts déliés se replièrent sur la griffe principale parmi les trois qui se tendaient vers lui. Sa nébula s’agita en lui, lui rappelant le triomphe dans la bataille contre les trafiquants en compagnie de Val’Ihem Karmine. S’il écoutait son élan tribal, il aurait succombé à l’envie de la drainer de sa vitalité devant tous ces spectateurs pour se repaître de sa stupeur.
Il se releva, alors que Bec l’entourait de ses rémiges, le prenant symboliquement sous l’aile de la Cour des Miracles sous l’œil des dizaines de témoins réunis. Les mutants remontèrent la place avec leur trophée. Leur chef emporterait son violon en Xandrie. L'artiste libéré de la misère marchait vers son destin.
~ ° C’est dans la boîte. Gagne seulement du temps une fois sur place. Le ver est dans le fruit. ° ~
Assez vite, il se retrouva à l'arrière d'un fourgon, le cul serré entre des monstruosités rivalisant avec celles qu'il se plaisait désormais à invoquer. Pour rien au monde, il ne serait retourné de son plein gré dans cet asile d’aliénés. Mais ce n’était plus le même, lui aussi était un peu fêlé désormais. Pauvre R. Il ne pouvait se douter du frigo qui allait lui tomber sur le coin de la gueule.
Mar 24 Sep - 14:03
Un petit jouvenceau me fixe de ses grands yeux marron chiasse. Un regard vide, tout mort, le cerveau derrière est transparent ! Cheveux bouclés, visage un peu boutonneux, du genre qu'on a envie de racler avec sa langue. Dix sept ans pas plus ! La Dexar qu'il porte dans son dos fait quasiment sa taille. Ce petit gars est vraiment tout frais, à peine sorti du cul de sa mère. Il me déclare de sa voix de bambin :
- Grand est le Mandebrume, puisse-t-il se déverser sur le monde et régner sur nous pour l'éternité.
- Le Mandebrume ! Je le sens encore palpipoter, celui-là, quelque part dans mon ventricule gauche. Ça veut dire qu'il est encore dans notre univers
- J'ai eu l'insigne honneur d'être désigné pour compléter votre équipe de gardes du corps. Laissez moi vous soulager de vos bagages, monsieur.
- Oui mais n'en fais tomber aucun par terre ! tu ne sais pas quelles conséquences cela pourrait avoir sur notre génétique à tous ou sur l'espace-temps
Le parking souterrain est rempli de pions du Cercle ! Wow wow j'en ai jamais vus autant réunis en un seul endroit, quelle belle famille ils forment ! on les reconnaît à leurs gueules de cadavres et à leur manie de hurler Grand est le Mandebrume ! en serrant le poing contre leurs coeurs quand on s'approche d'eux. Ils me racontent tous d'être très honorés et enchantés de me croiser lorsque j'arrive à leur niveau, et patati et patata. J'ai jamais vu aucun de ces mecs tu sais ou alors ils sont tellement bénins que je les ai tous oubliés ? J'en sais rien ils sont moins vivants que mes statues, j'adorerais les enfoncer tous dans un broyeur et les unifier en un immense smoothie auquel j'ajouterais quelques fraises des bois
Dans ce grand parking puant et agité mes petits pas légers et frénétiques résonnent comme une démoniaque musique de suspense. Combien de ces gens vont crever dans la semaine qui vient ? Non, mieux, combien vont crever aujourd'hui ?
- Ton pari, Vilaine ?
- Q-Quoi ?
- Ton pari
- Je suis pas dans ta tête, R. Tu peux pas juste me balancer tes bouts de phrases et croire que je vais tout piger et puis je suis fatiguée et défoncée et-
- Je te demande : combien vont crever aujourd'hui ?
- Hmm... La moitié à peu près ?
- Moi, je dis : tous. 100%
- C'est audacieux ça comme pari !
Je m'approche de ma limo délicieusement laide. Le gris standard epistote celui qui fait bander nos bons Sapiarques, pas le moindre froufrou ou la moindre vis qui dépasse, ça me donne envie de lui ajouter des reliefs au marteau à ta bagnole. Un grand bénêt en descend, comme ses collègues, yeux blancs, vitreux, pas d'âme ; il lui reste que quelques poils sur le caillou, vieux monsieur échappé de la morgue, son sourire langoureux donnerait des envies de suicide à n'importe quel être vivant normalement constitué, afin de pouvoir le rejoindre dans ses ténèbres et d'aller couler des éternités heureuses en sa nécrotique compagnie ; moi je garde mon sang-froid et lui tire amicalement la joue en guise de salut.
Ca croustille sous mes doigts.
- Grand est le Mandebrume ! Je suis honoré d'être votre chauffeur aujourd'hui, Sir R. Appelez moi Charon.
- D'accord Charon !
- Nous avons pu réquisitionner d'autres véhicules, afin de pouvoir transporter vos hommes et vos... nombreux bagages.
- Vous les avez volées ces bagnoles, quoi ? Vilaine demande un éclaircissement.
- ... Oui.
- J'espère que ça va pas -encore plus- attirer l'attention des flics sur nous. Pff.
- Le jour où j'ai essayé de voler une bagnole, je me souviens qu'elle s'était changée en une sorte de mammouth métallique
- Je vous en prie, prenez place.
- Non. Pas tout de suite
Immobile ! Je me perche sur le bout de mes sabots, les oreilles dressées et frétillantes. Je SENS le fumet caractéristique de...
- Monsieur... ?
- KESHA !
A l'autre bout du parking se forme timidement la silhouette de Keshou escorté par mes loyaux rêves humides.
En deux ou trois enjambées, deux trois points de ballerines, je gomme les 200 mètres qui nous séparent en chantonnant ton hymne que j'ai retenu par coeur de notre premier contact ; puis badaboum je suis devant toi
Et là
Et là ben je suis un peu déçu. T'es mort. Je leur avais demandé un mec vivant, qu'est-ce que tu veux que je foute avec un maccabé ? Un tapis en viande pourrie ? Une chaise en viande pourrie ? Une singularité en viande pourrie qui s'effondre sur elle-même et part en trou noir en viande pourrie ?
Je faisais déjà une overdose de zombies avec tous les cons du Cercle. T'es la goutte de trop mon Keshou.
- ... Il est mort
- Non R, regardez, il respire
- Ca empêche pas d'être mort
Il était plus vivace dans mes souvenirs. Là il est tout mou, le machin, on dirait que je pourrais l'embouteiller et le boire à la paille. C'est les ravages de la drogue, c'est pour ça, on en parle à la télé mais ça existe vraiment, ce truc là, faut faire attention avec les substances, et toujours venir se fournir en qualité premium chez bibi plutôt que de s'injecter tout ce qui traîne dans la rue
Le vieux mec moche qui me sert de chauffeur m'alpague. Il est moins guilleret qu'il y a deux minutes, là il tient son talkie en tremblotant on dirait qu'il a peur de quelque chose. Ben si quelque chose est plus flippant que moi dans un rayon de 5 kilomètres c'est sûr que là c'est l'heure de se chier dessus.
- Sir R ! Nous devons partir ! Vite ! Nos ordres sont...
- Oui oui oh la la oui bon. Bon, Bec, tu charges le Keshou dans ma limo. On va discuter du futur en route
Après un piaillement d'approbation, la perroquette ordonne aux sbires de trimbaler Keshou jusqu'à la caisse. Ils s'y mettent à deux pour le transporter, mais franchement n'importe qui peut balader ce truc-là à bout de bras sans forcer. Keshou tu manques de calcium je crois ? J'espère que tes cordes vocales sont pas aussi ratatinées que le laisse présager ta gueule, sinon je vais être fâché et triste
- Monsieur Gabriel est en tête du convoi, papote le vioque, Il m'informe de mouvements suspects des autorités. Nous avons piraté leurs communications, ils semblent plus prudents qu'à l'accoutumé, je-
Là j'écoute pas la suite. Je suis assis tout au fond du fourgon, près de la vitre du conducteur qui continue à jacasser. Mais moi j'écoute pas la suite car je fixe Keshou dans ses yeux creux. Il est naze, plat, pas loquace, un peu crétin. Je le secoue. vigoureusement, en lui cognant un peu la tête contre les murs de la bagnole. pour voir si ça l'éveille. Les potes, même Vilaine, savent pas trop quoi dire. Je crois qu'ils devinent que je suis déçu et ils ont peur que la déception mène à la colère et la colère mène à la haine etc.
Non c'est pas grave franchement. Tu casses des jouets, tu le répares ou tu le remplaces c'est comme ça que je marche. Celui-là c'est pas moi qui l'ait pété alors bon blabla c'est dommage. J'en trouverai des pelletés des comme lui, à Xandrie, de quoi me bricoler tout un petit concerto perso. J'en ai rien à foutre c'est pas grave franchement.
- Combien d'heures de voyage ?
- ... écoutiez vous mon briefing, sir R ?
- Combien d'heures ?
- Euh... Deux jours si tout se passe bien, sir. Mais selon monsieur Gabriel, notre niveau d'alerte est passé au noir ! Je crains que...
- Deux jours ! C'est peut-être mieux de caner tout de suite plutôt que de se faire chier si longtemps non ?
- Euh, suggère Ninja le petit rat, je connais quelques blagues pour faire passer le temps...
- M-Moi je peux jouer de l'harmonica...
- Tu as un harmonica ?
- N-non je l'ai oublié dans la base...
Vilaine a sorti sa table de dissection de poche, le gadget que je lui ai offert pour son anniversaire et qu'est normalement destiné aux enfants de 3 à 10 ans mais va savoir elle elle s'amuse bien avec ce truc.
- Vilaine ?
- Non. T'avais qu'à amener de quoi t'occuper. T'as plus de drogues ?
Restait un petit sachet d'Esquisse, coincé dans mon slip entre mon aine et ma couille. Y en a pas pour très lourd. Un demi-trip, au max,
- Cadeau, je jette le sachet sur les genoux de Keshou. Peut-être que s'il tape le violon cassé va redevenir mélodieux comme dans sa jeunesse ? Peut-être qu'il faut juste le réaccorder un coup. C'est de l'Esquisse catalysée et amplifiée par bibi dans sa cuisine perso. Ca invite le feu sacré dans tes neurones tu deviens un dieu antique pour quelques heures, le temps de fonder deux ou trois religions.
Qui sait ça réveille aussi peut-être les morts ?
- Grand est le Mandebrume, puisse-t-il se déverser sur le monde et régner sur nous pour l'éternité.
- Le Mandebrume ! Je le sens encore palpipoter, celui-là, quelque part dans mon ventricule gauche. Ça veut dire qu'il est encore dans notre univers
- J'ai eu l'insigne honneur d'être désigné pour compléter votre équipe de gardes du corps. Laissez moi vous soulager de vos bagages, monsieur.
- Oui mais n'en fais tomber aucun par terre ! tu ne sais pas quelles conséquences cela pourrait avoir sur notre génétique à tous ou sur l'espace-temps
Le parking souterrain est rempli de pions du Cercle ! Wow wow j'en ai jamais vus autant réunis en un seul endroit, quelle belle famille ils forment ! on les reconnaît à leurs gueules de cadavres et à leur manie de hurler Grand est le Mandebrume ! en serrant le poing contre leurs coeurs quand on s'approche d'eux. Ils me racontent tous d'être très honorés et enchantés de me croiser lorsque j'arrive à leur niveau, et patati et patata. J'ai jamais vu aucun de ces mecs tu sais ou alors ils sont tellement bénins que je les ai tous oubliés ? J'en sais rien ils sont moins vivants que mes statues, j'adorerais les enfoncer tous dans un broyeur et les unifier en un immense smoothie auquel j'ajouterais quelques fraises des bois
Dans ce grand parking puant et agité mes petits pas légers et frénétiques résonnent comme une démoniaque musique de suspense. Combien de ces gens vont crever dans la semaine qui vient ? Non, mieux, combien vont crever aujourd'hui ?
- Ton pari, Vilaine ?
- Q-Quoi ?
- Ton pari
- Je suis pas dans ta tête, R. Tu peux pas juste me balancer tes bouts de phrases et croire que je vais tout piger et puis je suis fatiguée et défoncée et-
- Je te demande : combien vont crever aujourd'hui ?
- Hmm... La moitié à peu près ?
- Moi, je dis : tous. 100%
- C'est audacieux ça comme pari !
Je m'approche de ma limo délicieusement laide. Le gris standard epistote celui qui fait bander nos bons Sapiarques, pas le moindre froufrou ou la moindre vis qui dépasse, ça me donne envie de lui ajouter des reliefs au marteau à ta bagnole. Un grand bénêt en descend, comme ses collègues, yeux blancs, vitreux, pas d'âme ; il lui reste que quelques poils sur le caillou, vieux monsieur échappé de la morgue, son sourire langoureux donnerait des envies de suicide à n'importe quel être vivant normalement constitué, afin de pouvoir le rejoindre dans ses ténèbres et d'aller couler des éternités heureuses en sa nécrotique compagnie ; moi je garde mon sang-froid et lui tire amicalement la joue en guise de salut.
Ca croustille sous mes doigts.
- Grand est le Mandebrume ! Je suis honoré d'être votre chauffeur aujourd'hui, Sir R. Appelez moi Charon.
- D'accord Charon !
- Nous avons pu réquisitionner d'autres véhicules, afin de pouvoir transporter vos hommes et vos... nombreux bagages.
- Vous les avez volées ces bagnoles, quoi ? Vilaine demande un éclaircissement.
- ... Oui.
- J'espère que ça va pas -encore plus- attirer l'attention des flics sur nous. Pff.
- Le jour où j'ai essayé de voler une bagnole, je me souviens qu'elle s'était changée en une sorte de mammouth métallique
- Je vous en prie, prenez place.
- Non. Pas tout de suite
Immobile ! Je me perche sur le bout de mes sabots, les oreilles dressées et frétillantes. Je SENS le fumet caractéristique de...
- Monsieur... ?
- KESHA !
A l'autre bout du parking se forme timidement la silhouette de Keshou escorté par mes loyaux rêves humides.
En deux ou trois enjambées, deux trois points de ballerines, je gomme les 200 mètres qui nous séparent en chantonnant ton hymne que j'ai retenu par coeur de notre premier contact ; puis badaboum je suis devant toi
Et là
Et là ben je suis un peu déçu. T'es mort. Je leur avais demandé un mec vivant, qu'est-ce que tu veux que je foute avec un maccabé ? Un tapis en viande pourrie ? Une chaise en viande pourrie ? Une singularité en viande pourrie qui s'effondre sur elle-même et part en trou noir en viande pourrie ?
Je faisais déjà une overdose de zombies avec tous les cons du Cercle. T'es la goutte de trop mon Keshou.
- ... Il est mort
- Non R, regardez, il respire
- Ca empêche pas d'être mort
Il était plus vivace dans mes souvenirs. Là il est tout mou, le machin, on dirait que je pourrais l'embouteiller et le boire à la paille. C'est les ravages de la drogue, c'est pour ça, on en parle à la télé mais ça existe vraiment, ce truc là, faut faire attention avec les substances, et toujours venir se fournir en qualité premium chez bibi plutôt que de s'injecter tout ce qui traîne dans la rue
Le vieux mec moche qui me sert de chauffeur m'alpague. Il est moins guilleret qu'il y a deux minutes, là il tient son talkie en tremblotant on dirait qu'il a peur de quelque chose. Ben si quelque chose est plus flippant que moi dans un rayon de 5 kilomètres c'est sûr que là c'est l'heure de se chier dessus.
- Sir R ! Nous devons partir ! Vite ! Nos ordres sont...
- Oui oui oh la la oui bon. Bon, Bec, tu charges le Keshou dans ma limo. On va discuter du futur en route
Après un piaillement d'approbation, la perroquette ordonne aux sbires de trimbaler Keshou jusqu'à la caisse. Ils s'y mettent à deux pour le transporter, mais franchement n'importe qui peut balader ce truc-là à bout de bras sans forcer. Keshou tu manques de calcium je crois ? J'espère que tes cordes vocales sont pas aussi ratatinées que le laisse présager ta gueule, sinon je vais être fâché et triste
- Monsieur Gabriel est en tête du convoi, papote le vioque, Il m'informe de mouvements suspects des autorités. Nous avons piraté leurs communications, ils semblent plus prudents qu'à l'accoutumé, je-
Là j'écoute pas la suite. Je suis assis tout au fond du fourgon, près de la vitre du conducteur qui continue à jacasser. Mais moi j'écoute pas la suite car je fixe Keshou dans ses yeux creux. Il est naze, plat, pas loquace, un peu crétin. Je le secoue. vigoureusement, en lui cognant un peu la tête contre les murs de la bagnole. pour voir si ça l'éveille. Les potes, même Vilaine, savent pas trop quoi dire. Je crois qu'ils devinent que je suis déçu et ils ont peur que la déception mène à la colère et la colère mène à la haine etc.
Non c'est pas grave franchement. Tu casses des jouets, tu le répares ou tu le remplaces c'est comme ça que je marche. Celui-là c'est pas moi qui l'ait pété alors bon blabla c'est dommage. J'en trouverai des pelletés des comme lui, à Xandrie, de quoi me bricoler tout un petit concerto perso. J'en ai rien à foutre c'est pas grave franchement.
- Combien d'heures de voyage ?
- ... écoutiez vous mon briefing, sir R ?
- Combien d'heures ?
- Euh... Deux jours si tout se passe bien, sir. Mais selon monsieur Gabriel, notre niveau d'alerte est passé au noir ! Je crains que...
- Deux jours ! C'est peut-être mieux de caner tout de suite plutôt que de se faire chier si longtemps non ?
- Euh, suggère Ninja le petit rat, je connais quelques blagues pour faire passer le temps...
- M-Moi je peux jouer de l'harmonica...
- Tu as un harmonica ?
- N-non je l'ai oublié dans la base...
Vilaine a sorti sa table de dissection de poche, le gadget que je lui ai offert pour son anniversaire et qu'est normalement destiné aux enfants de 3 à 10 ans mais va savoir elle elle s'amuse bien avec ce truc.
- Vilaine ?
- Non. T'avais qu'à amener de quoi t'occuper. T'as plus de drogues ?
Restait un petit sachet d'Esquisse, coincé dans mon slip entre mon aine et ma couille. Y en a pas pour très lourd. Un demi-trip, au max,
- Cadeau, je jette le sachet sur les genoux de Keshou. Peut-être que s'il tape le violon cassé va redevenir mélodieux comme dans sa jeunesse ? Peut-être qu'il faut juste le réaccorder un coup. C'est de l'Esquisse catalysée et amplifiée par bibi dans sa cuisine perso. Ca invite le feu sacré dans tes neurones tu deviens un dieu antique pour quelques heures, le temps de fonder deux ou trois religions.
Qui sait ça réveille aussi peut-être les morts ?
Mer 9 Oct - 20:56
Ratamontade
FT. Ratamahatta
C’est la plus stupide des idées. Même pas sûr que les flics viennent le sauver avant qu’on transforme ses tripes en guirlande lumineuse, si ça leur permet d’obtenir plus d’informations juteuses sur le Cercle via sa « marque ». En vrai, il ne peut compter que sur lui et sur ses idées déconcertantes pour s’en tirer. Sur un malentendu, ça passe. Souvent.
D’une voix nasillarde, le mutant équin bondit comme une diva à travers le parking pour le rejoindre. Une part de lui a du mal à en croire ses yeux. Il pensait que ses souvenirs avaient « enjolivé » les transformations physiques de R. Mais non, c’est lui tout entier. Plumes dans le cul. Oreilles longues. Petits yeux vicieux. Et esprit valdinguant.
Il s’en faut de peu que Keshâ se retourne pour prendre ses jambes à son coup en criant. Voir un âne-paon voler vers lui en grand-jetés tout en fredonnant son chant diphonique… on n’imagine pas ça tous les jours, surtout au milieu d’un parking aussi glauque. Pas besoin d’halloween en ce monde pour vivre le grand frisson !
Son corps s’est malgré lui réfugié dans le plumage de Bec. Ses yeux mutiques se baissent vers le sol. R. est déçu. C’est aussi risqué que de le rendre enthousiaste. Mais ce qui l’encourage à risquer un regard est ce protagoniste humain à l’allure fantôme, un talkie à la main. Les forces de l’ordre peuvent-elles le voir comme il le voit ?
L’urgence du départ signifie-t-elle que l’opération a été détectée ? Depuis un moment, il n’a plus reçu de contact de l’agent de liaison. Sans doute parce qu’il est trop loin. Il faut s’en tenir au plan. Bec l’agrippe par les épaules et le pousse avec ménagement vers la limousine. Ce qui l’effraie un peu plus est le lion capable de s’enflammer qui l’encadre de l’autre côté.
Le silence est son seul refuge pendant qu’on l’oublie, à nouveau serré entre des mutants de bonne carrure. Mais Keshâ écoute. Il entend tout. Ses craintes sont fondées. Le Cercle pressent quelque chose. Il ne sait pas encore tout. Je suis peut-être mal… mais, pour toi, R., il est trop tard ! Le filet se resserre. Je t’ai forcé à leur donner ta localisation. Tu as déjà perdu du temps. Pas besoin de se risquer à flirter avec ses émotions porteuses de folie pour s’en assurer.
D’un coup, Rattamahata est devant lui dans une proximité dérangeante. L’habitacle est si restreint qu’il est difficile de ne pas paniquer. Puis il se sent ballotté comme un prunier et sa tête frappe la vitre à plusieurs reprises. Accablé, il se tasse autant que possible sur sa banquette en se tenant le front, sincèrement effrayé.
Quel enculé ! Je ne sais pas ce qui me retient de l’ouvrir de la glotte au nombril ici même. La peur sans doute. Le fait d’être un gentil ? Même pas complètement sûr.
Assis aux côté d’un perroquet, d’un rat, d’un lion, du fameux R. et de son pilote blafard, la situation se précise. De nouvelles questions se soulèvent. Deux jours ? Qu’est-ce qui peut bien se trouver à deux jours ? Ils ne vont pas venir à Aramila avec des gueules comme ça ? Un coin de nature Epistote ? La Contade ? Xandrie. Il parie pour lui-même 100 astras que le QG a sorti les cartes et les compas pour spéculer.
Un sachet de drogue atterrit sur ses cuisses. Mortifié, il ne sait plus comment réagir. Aucune envie d’attirer à nouveau l’attention de R. Comme camé, il serait censé aimer ça et se réfugier dans la drogue, peu importe la provenance, peu importe le mélange… même si elle était entre les couilles de son ennemi. Il a pu échapper au gloubiboulga de Vilaine la dernière fois, mais cette fois, il va falloir y passer. A bien y réfléchir, il doit déjà avoir fait pire, non ?
Ses doigts saisissent le rebord du sachet bleuté et l’agitent pour faire bouger la poudre où dansent de mini cristaux. C’est un bruit fin qui doit parler à l’âme des drogués. Il entrouvre le sachet et renifle l’odeur. Ça ne lui dit rien qui vaille. Il pourrait y avoir du myste et de la mort aux rats là-dedans.
-« Merci, R. C’est un beau cadeau. »
La voiture s’éloigne. Ses pneus crissent dans les spirales du parking. Le retour à l’extérieur indique de nombreux autres véhicules banalisés. Plus qu’à prier. Et espérer que la police soit vraiment de son côté. Sa langue humifie son index, qu’il trempe dans la poudre avant de le remettre dans sa bouche. Ça pique. Mi-amer. Mi sucré. Mais finalement, le goût de « rien ». Du chimique. Il en reprend plus, pour ne pas passer pour un gros noob timide.
Ses yeux se portent sur le rat-ninja et R. avec une forme d’anticipation. Leurs yeux sont frétillants.
Je ne sens rien. Ce n’est peut-être pas si terrible après tout.
-« Je ne voulais pas vous décevoir. Si vous voulez vous distraire, je peux peut-être chanter pour vous avec l’harmonica ? » propose-t-il.
Première prise de drogue. Un initié reconnaîtrait les premiers signes subtils. Une frontière légèrement altéré. Un battement de cœur plus perceptible... Tout à coup, il remarque une étrange lueur. Quelque part dans l’air, dans l’espace entre lui et R. Il la fixe avec intensité. Elle si petite. Si minuscule. Si mignonne. Ce pourrait être une fée. Ou un ange. Peut-être l’âme d’un défunt. Il n’a pas entendu la réponse qui se profilait. Un doux chavirement valse dans son conduit auditif, comme un rouleau de mer, ou peut-être un tuyau empli de gravier. Sa main s’approche pour effleurer cette magnifique lueur. Mais elle disparaît aussitôt. Un miracle doit être révéré sans être profané.
Il se sent bien. On ne sait pas pourquoi. Les plumes de Bec sont douces. Il fait chaud dans cet habitacle. Le ronronnement du moteur est démiurge et hospitalier, comme un tambour de laveuse à vêtements.
Imperceptiblement, sa posture s’est redressée. Cette ambiance l’a requinquée, avec toutes ces tronches rigolotes de dessins-animés autour de lui. Tout un zoo. Une montée de confiance et de charisme s’installe au creux de son ventre.
-« Oh Bec ! Cette couleur est vraiment spectaculaire ! Ce mauve, c’est comme un parfum de paradis. »
Joignant le geste à la parole, sa main caresse l’étoffe doucement comme s’il voulait réchauffer Bec par une longue nuit d’hiver au coin du feu. Il ne peut s’empêcher d’enfouir son visage dans ses rémiges et de l’y frotter pour apprécier leurs stries texturées. Un délice sensoriel. Ce faisant, la lueur réapparaît ! Dans les couleurs des plumes du ara. Elle est plus nombreuses.
Plus répartie. Quelle farceuse. Comme si plein de pointillés se connectaient tous ensemble sous ses yeux pour danser une farandole ondoyante d’énergie. Maintenant qu’il la touche, elle passe à travers lui, dans sa peau !
-« Waou. Je crois que je n’ai jamais vu une énergie aussi scintillante. C'est comme de la barbe-à-papa. » articule-t-il avec le plus grand sérieux, avant de se rappeler aux autres occupants de la navette. Il se fiche bien, alors des opérations qui ont court dehors. Tout n’est que l’Instant.
D’une voix nasillarde, le mutant équin bondit comme une diva à travers le parking pour le rejoindre. Une part de lui a du mal à en croire ses yeux. Il pensait que ses souvenirs avaient « enjolivé » les transformations physiques de R. Mais non, c’est lui tout entier. Plumes dans le cul. Oreilles longues. Petits yeux vicieux. Et esprit valdinguant.
Il s’en faut de peu que Keshâ se retourne pour prendre ses jambes à son coup en criant. Voir un âne-paon voler vers lui en grand-jetés tout en fredonnant son chant diphonique… on n’imagine pas ça tous les jours, surtout au milieu d’un parking aussi glauque. Pas besoin d’halloween en ce monde pour vivre le grand frisson !
Son corps s’est malgré lui réfugié dans le plumage de Bec. Ses yeux mutiques se baissent vers le sol. R. est déçu. C’est aussi risqué que de le rendre enthousiaste. Mais ce qui l’encourage à risquer un regard est ce protagoniste humain à l’allure fantôme, un talkie à la main. Les forces de l’ordre peuvent-elles le voir comme il le voit ?
L’urgence du départ signifie-t-elle que l’opération a été détectée ? Depuis un moment, il n’a plus reçu de contact de l’agent de liaison. Sans doute parce qu’il est trop loin. Il faut s’en tenir au plan. Bec l’agrippe par les épaules et le pousse avec ménagement vers la limousine. Ce qui l’effraie un peu plus est le lion capable de s’enflammer qui l’encadre de l’autre côté.
Le silence est son seul refuge pendant qu’on l’oublie, à nouveau serré entre des mutants de bonne carrure. Mais Keshâ écoute. Il entend tout. Ses craintes sont fondées. Le Cercle pressent quelque chose. Il ne sait pas encore tout. Je suis peut-être mal… mais, pour toi, R., il est trop tard ! Le filet se resserre. Je t’ai forcé à leur donner ta localisation. Tu as déjà perdu du temps. Pas besoin de se risquer à flirter avec ses émotions porteuses de folie pour s’en assurer.
D’un coup, Rattamahata est devant lui dans une proximité dérangeante. L’habitacle est si restreint qu’il est difficile de ne pas paniquer. Puis il se sent ballotté comme un prunier et sa tête frappe la vitre à plusieurs reprises. Accablé, il se tasse autant que possible sur sa banquette en se tenant le front, sincèrement effrayé.
Quel enculé ! Je ne sais pas ce qui me retient de l’ouvrir de la glotte au nombril ici même. La peur sans doute. Le fait d’être un gentil ? Même pas complètement sûr.
Assis aux côté d’un perroquet, d’un rat, d’un lion, du fameux R. et de son pilote blafard, la situation se précise. De nouvelles questions se soulèvent. Deux jours ? Qu’est-ce qui peut bien se trouver à deux jours ? Ils ne vont pas venir à Aramila avec des gueules comme ça ? Un coin de nature Epistote ? La Contade ? Xandrie. Il parie pour lui-même 100 astras que le QG a sorti les cartes et les compas pour spéculer.
Un sachet de drogue atterrit sur ses cuisses. Mortifié, il ne sait plus comment réagir. Aucune envie d’attirer à nouveau l’attention de R. Comme camé, il serait censé aimer ça et se réfugier dans la drogue, peu importe la provenance, peu importe le mélange… même si elle était entre les couilles de son ennemi. Il a pu échapper au gloubiboulga de Vilaine la dernière fois, mais cette fois, il va falloir y passer. A bien y réfléchir, il doit déjà avoir fait pire, non ?
Ses doigts saisissent le rebord du sachet bleuté et l’agitent pour faire bouger la poudre où dansent de mini cristaux. C’est un bruit fin qui doit parler à l’âme des drogués. Il entrouvre le sachet et renifle l’odeur. Ça ne lui dit rien qui vaille. Il pourrait y avoir du myste et de la mort aux rats là-dedans.
-« Merci, R. C’est un beau cadeau. »
La voiture s’éloigne. Ses pneus crissent dans les spirales du parking. Le retour à l’extérieur indique de nombreux autres véhicules banalisés. Plus qu’à prier. Et espérer que la police soit vraiment de son côté. Sa langue humifie son index, qu’il trempe dans la poudre avant de le remettre dans sa bouche. Ça pique. Mi-amer. Mi sucré. Mais finalement, le goût de « rien ». Du chimique. Il en reprend plus, pour ne pas passer pour un gros noob timide.
Ses yeux se portent sur le rat-ninja et R. avec une forme d’anticipation. Leurs yeux sont frétillants.
Je ne sens rien. Ce n’est peut-être pas si terrible après tout.
-« Je ne voulais pas vous décevoir. Si vous voulez vous distraire, je peux peut-être chanter pour vous avec l’harmonica ? » propose-t-il.
Première prise de drogue. Un initié reconnaîtrait les premiers signes subtils. Une frontière légèrement altéré. Un battement de cœur plus perceptible... Tout à coup, il remarque une étrange lueur. Quelque part dans l’air, dans l’espace entre lui et R. Il la fixe avec intensité. Elle si petite. Si minuscule. Si mignonne. Ce pourrait être une fée. Ou un ange. Peut-être l’âme d’un défunt. Il n’a pas entendu la réponse qui se profilait. Un doux chavirement valse dans son conduit auditif, comme un rouleau de mer, ou peut-être un tuyau empli de gravier. Sa main s’approche pour effleurer cette magnifique lueur. Mais elle disparaît aussitôt. Un miracle doit être révéré sans être profané.
Il se sent bien. On ne sait pas pourquoi. Les plumes de Bec sont douces. Il fait chaud dans cet habitacle. Le ronronnement du moteur est démiurge et hospitalier, comme un tambour de laveuse à vêtements.
Imperceptiblement, sa posture s’est redressée. Cette ambiance l’a requinquée, avec toutes ces tronches rigolotes de dessins-animés autour de lui. Tout un zoo. Une montée de confiance et de charisme s’installe au creux de son ventre.
-« Oh Bec ! Cette couleur est vraiment spectaculaire ! Ce mauve, c’est comme un parfum de paradis. »
Joignant le geste à la parole, sa main caresse l’étoffe doucement comme s’il voulait réchauffer Bec par une longue nuit d’hiver au coin du feu. Il ne peut s’empêcher d’enfouir son visage dans ses rémiges et de l’y frotter pour apprécier leurs stries texturées. Un délice sensoriel. Ce faisant, la lueur réapparaît ! Dans les couleurs des plumes du ara. Elle est plus nombreuses.
Plus répartie. Quelle farceuse. Comme si plein de pointillés se connectaient tous ensemble sous ses yeux pour danser une farandole ondoyante d’énergie. Maintenant qu’il la touche, elle passe à travers lui, dans sa peau !
-« Waou. Je crois que je n’ai jamais vu une énergie aussi scintillante. C'est comme de la barbe-à-papa. » articule-t-il avec le plus grand sérieux, avant de se rappeler aux autres occupants de la navette. Il se fiche bien, alors des opérations qui ont court dehors. Tout n’est que l’Instant.
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