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[1900] Le Mirage des Dunes de Saleek

[1900] Le Mirage des Dunes de Saleek Brandw10
Ven 19 Avr - 23:28

Le vent froid de la fin d'année soufflait sur le sable du désert, parsemant les abords des dunes d'un miroitement aux couleurs ocres et bleutées. Perdu entre Ventdunes et les Dunes de Saleek, le chemin qui traversait le désert était constellé d'oasis et de hâvres de paix. Les voyageurs se mettaient à l'abri de la rigueur gelée de la nuit et de la chaleur aride des journées. Beaucoup de tribus nomades s'y recueillaient, mais il y avait quelques postes sédentaires qui survivaient aux alentours des oasis. Cependant, depuis peu, quelques attaques semblaient avoir perturbé cette route et des rumeurs inquiétantes étaient arrivées jusqu'à la cité. Des rumeurs d'abris ravagés, des dires de tribus ravagées. Il en fallait beaucoup pour inquiéter les rudes habitants de ces terres ensablées mais déjà une légende prenait forme. L'histoire d'un monstre de crocs, de plumes et de chitine. Une horreur enfantée par la Brume, dont les affres avaient fini par gagner les quelques conteurs de rue d'Aramila. Ainsi, la prime devint une nécessité et elle fut portée auprès d'autres organisations. Parmi elles, la Guilde des Aventuriers ...

Aramila était un des principaux fiefs religieux et détenait peut-être quelques réponses sur le passé de l'Inquisition. Perdus et désorientés depuis les derniers événements, les régents des diverses nations avaient brillé par leur immobilisme. Blasé par ceux qu'il pensait à même de mener l'effort direct contre Arkanis et ses sbires. Cependant, face aux menaces mêmes qui pesaient sur Uhr, les besoins parfois triviaux s'imposaient aux aventuriers. Même les plus chevronnés. Ryker avait terminé à Aramila sur ses maigres deniers, payant le prix fort un transport rapide. Sa bourse s'amenuisait et il demeurait sur le triste constat qu'il était sous équipé. Ainsi avait-il trouvé refuge dans une antenne locale de la Guilde qui faisait office de bazar et de rassemblement de pochtrons mécontents de la gouvernance actuelle : rien de bien glorieux en somme. En quelques jours, il avait commencé à faire partie des meubles et à devenir autre chose qu'une curiosité locale. On n'aimait pas trop les gens qui posaient des questions dans le coin, et encore moins les étrangers. Le Patrouilleur faisait partie des deux à la fois, sans compter son statut particulier au sein même de la Guilde. Ainsi avait-il tout naturellement trouvé sa place dans ce microcosme alcoolique. Non pas qu'il fut porté sur la boisson : jamais pendant le service. Enfin, sauf pour les urgences.

- Cinquante astras ? Pour cette ... tranche de métal ? Mais c'est ... c'est affligeant.


Les forges étaient rares dans ce coin là de la cité, et encore plus celles qui étaient prêtes à se débarrasser d'autant de métal pour un usage aussi trivial qu'une épée. Fort heureusement, il se trouvait encore des artisans capables et qui avaient résiste à l'attrait industriel des autres nations. Il était étrange que l'obscurantisme religieux qu'avait dénoncé le Patrouilleur soit le plus à même de l'aider à dégotter une arme confortable à sa main.

- Pff. Vendu. Mais c'est bien parce que j'en ai besoin.


Il s'en alla de l'étal, sa nouvelle imposante épée en main. Il la fit jouer entre ses doigts et exécuta une légère passe. L'objet était, il fallait le reconnaître, bien équilibré. Cela ferait l'affaire en attente de mieux. Il avait toujours en sa possession de quoi entretenir ses effets mais rectifier le fil de l'objet lui prendrait des jours de travail. Ce fut donc un peu bougon, mais avec autre chose qu'un pommeau d'épée qu'il revint dans le troquet. Il contempla sa bourse bien vide et soudain le voyage retour lui paru bien long, à pieds. Dans le désert.

- Et dix astras de plus pour la chambre, repas compris !

Bon sang ... ce n'était plus une bourse à ce train, c'était une poche trouée.

- Et ... sans la chambre ? Et une demi-portion de repas ?


Un regard noir et quelques négociations. Après tout, le sol des murailles n'était pas si inconfortable que cela et il avait bien souvent dormi à la belle étoile. Ce ne serait pas un lit qui lui changerait ses douleurs. Dire que si peu de temps auparavant il était dans un aéronef accompagné de représentants choisis par l'ensemble des nations pour se lancer à la poursuite du Régent. Ah, le monde était bien sinistre quand la précarité se rappelait à nous.

- Hé, Patrouilleur, j'ai peut-être un truc pour toi. On a ce contrat, là, qui vient d'arriver. Peut-être que tu peux joindre l'utile à l'agréable, hein ? Y aurait une bête qui terroriserait l'est de la cité, entre les dunes. Les gars d'la cité ont toujours pas réussi à gérer, mais peut-être qu'un gars de la Guilde ?

Petit instant de silence, entrecoupé de borborygmes d'alcooliques en fond de taverne.

- Tu m'as vu un peu, Ratouf ? Tu crois que je suis un vulgaire chasseur de monstres ? Je ne fais pas ça pour l'argent...

- Deux mille quatre cent astras, tout de même.

- ... mais il a quand même l'air d'être trop dangereux pour ceux qui vivent dans le coin. Tu sais quoi, je vais y réfléchir.

D'un geste, il s'empara de l'affiche que lui tendait le dénommé Ratouf avec son sourire édenté. Le tavernier se gaussa du Patrouilleur et entreprit de se servir une boisson chaude aux herbes. Il épongea son front brûlé par le soleil à l'aide du même torchon qu'il utilisait pour nettoyer sa vaisselle.

- Le papier vient de nous arriver, apparemment ils ont monté la prime car la bête se rapproche des murs de la cité. On n'a pas beaucoup de gars équipé pour ce genre de chose. Elle m'a l'air tout droit sortie de la Brume. Mon petit doigt m'a dit que t'était équipé en conséquence, Patrouilleur ...

Ryker soupira. Ratouf l'avait accueilli et aiguillé plus d'une fois. Il n'avait pas pu trouver de dénommée Nemeth dans la cité et avait commencé à douter de son existence, mais le tavernier-auxilliaire de Guilde avait su l'aider où chercher. En soi, il était de bon conseil. Pourquoi ne pas l'écouter ? Il était suffisamment aguerri pour comprendre que les décorations à la ceinture du portebrume n'en étaient pas, et que ses talents ne s'arrêtaient pas à sa capacité à se plaindre en permanence du climat aramilien.

- Sur la route des Dunes, hmm ? Soit. Aurais-tu quelque conseil à me prodiguer ?

- Il y a une caravane de marchands en ville, victimes d'une attaque : tu pourrais commencer par là. Et, équipe toi pour la nuit. Les déserts sont froids.

Mer 24 Avr - 19:07

Une bien belle journée pour un bon repas, songea l’ermite qui embrochait le repas fraîchement chassé avec Vilain, son Yearrk. Pour l’occasion, il s’était lui-même changé en un majestueux loup blanc pour l’accompagner. Le Change-Peau et son acolyte invoqué mirent la main sur un beau sanglier qu’ils prirent en chasse. Ce dernier n’eut aucune chance de leur échapper et finit à cuir embroché, au-dessus d’un feu préparé pour l’occasion. Concentré sur la cuisson de la viande, les sens du vagabond l’alertèrent soudain d’une présence en approche. Des pas lourds, maladroits mais déterminés. L’odeur qui émanait de l’intru, assez forte, provoquèrent un léger sourire chez Artémis qui se focalisa de nouveau sur la cuisson de sa prise.

« Eh bien. Qu’est-ce qui t’amène si loin de chez toi, Reno ? », demanda le vagabond alors que le maître de la Guilde des Aventuriers approchait. « L’odeur de la bonne bouffe. », rétorqua ce dernier avec un sourire en coin. Les deus hommes se saluèrent d’une bonne poignée de main. Depuis l’aventure partagée dans le Dainsbourg, ils se respectaient et s’appréciaient. Chacun reconnaissait la valeur de l’autre et Réno n’hésitait pas un seul instant à solliciter Artémis pour les missions les plus périlleuses. D’ailleurs, s’il se trouvait ici, c’était probablement pour une requête. Le Loup Blanc n’avait aucun doute là-dessus. Avant cela, il préféra mettre son compagnon à l’aise en partageant son repas avec lui. Tous deux installés sur des rondins de bois, face au feu, ils dégustèrent ce délicieux sanglier. Une cuisson quasi parfaite, une chaire tendre et généreuse. Elle fondait en bouche. Sans plus attendre, l’ermite décida de crever l’abcès.

« Qu’est-ce qui t’amène réellement si loin de chez toi, Réno ? Certainement pas un sanglier. ». Le maître de la Guilde des Aventuriers leva ses yeux, jusqu’ici focalisés sur son morceau de viande, pour observer son vieil ami. Artémis avait naturellement visé juste. Alors, Réno s’essuya la bouche et s’expliqua : « Je m’inquiétais pour toi. Plus aucune nouvelle depuis les événements de la tour d’Yfe. Plus aucun pégase qui survole les alentours, plus aucun loup blanc qui s’approche de la ville… Tu as complètement disparu. Donc oui, je m’inquiétais. ». Ce à quoi le vagabond répondit qu’il s’était simplement retiré du monde pour se ressourcer, se retrouver, avant de retourner à l’aventure et de protéger Uhr du danger imminent. On ne se remettait pas aussi facilement d’une telle expédition. « Tu n'as pas non plus tenté de retrouver le nouvel Omniscient ? », demanda l’aventurier. Artémis resta songeur quelques instants avant de répondre : « A quoi bon ? Maîtriser cette faculté lui prendra bien trop de temps. La recherche des données antérieures sont longues et pénibles. Ce pouvoir est fardeau. J’estime que le plus important ne se trouve pas ici. »

Tous deux échangèrent un regard complice, rempli de sens et de compréhension. « J’ai quelque chose pour toi et c’est aussi ce qui m’amène. », reprit Réno après une énième bouchée. « Un Manticore. Il saccage les habitants du désert d’Aramila. Plusieurs escouades ont tenté de l’arrêter, en vain. J’ai donc pensé à toi. Pas mal pour te remettre en selle, non ? ». Artémis, une fois encore, semblait absent et songeur. Il évaluait les risques, les pourcentages de réussite, le tout d’après ses expériences vécues avec des espèces similaires. De toutes manières, il était temps pour lui de quitter sa tanière et de reprendre l’aventure. Même s’il continuait de s’entraîner, de peaufiner son art et garder la forme en chassant, il devait sortir en terrain hostile. Cette forêt, il la connaissait par cœur et presque rien ne pouvait lui arriver en ces lieux.

« J’accepte. D’autres informations qui peuvent m’être utiles ? »
« Tu devrais faire un tour en ville. D’après les derniers retours reçus, une caravane de marchands a été attaquée. La bête s’approche de plus en plus des murs de la cité d’Aramila. »
, répondit Réno.
« Bien. », conclut Artémis. « Je pars immédiatement. Je te laisse finir le repas, je suis repu pour les jours à venir. »

Nulle contestation possible. Le Portebrume venait siffler. Quelques instants plus tard, Ablette, son pégase, apparut des cieux et atterrit aux côtés d’Artémis. Ce dernier lui caressa l’encolure avant d’habilement grimper sur son dos. Le contraste entre le pelage noir du pégase et les cheveux d’albâtre de son cavalier rendait le spectacle époustouflant. Un ordre donné et le pégase débuta sa course d’élan avant de s’envoler vers les cieux. Et quelques secondes plus tard, Réno se retrouva seul et continua de manger le sanglier, comme si de rien était, presque satisfait de voir Artémis retourner aux affaires. Un tel ne pouvait rester inactif ou même se sédentariser. Et il n’avait pas tort. Artémis vivait d’aventures et de sang.


Ce ne fut qu’après des jours de vol, survolant les Dunes de Katorrin dans un premier temps, puis les Dunes dans un second temps, que le vagabond aperçut enfin les remparts de la cité. Le vent frais commençait à l’épuiser. Malgré les pauses effectuées pour nourrir sa jument et la reposer, il ne s’était pas encore acclimaté aux froids nocturnes qu’il avait oublié. Mais une étincelle vint alors le réchauffer. Stupéfait, il aperçut au dernier moment une effroyable bête volante leur foncer dessus. Il eut juste le temps d’activer l’un de ses cristaux pour créer une barrière d’énergie et repousser l’ennemi. Se prenant le choc pleine poire, l’animal ailé sembla sonné et battit temporairement en retrait. Artémis ordonna à Ablette d’entamer la descente. Ils ne se trouvaient plus très loin de la ville et le vagabond préféra finir à pied. L’atterrissage fut glissant sur ce sable doux.

Pour ne pas l’épuiser davantage, le Portebrume descendit et continua la route avec ses propres jambes, aux côtés de sa monture. C’était alors qu’ils se retrouvèrent derrière un homme. Les sens du canidé en lui, notamment l’odorat, l’interpella sur l’odeur de l’individu. Une odeur qui vient rapidement à lui grâce au vent qui leur faisait face. Le vagabond esquissa un sourire faussement content. Encore lui, songea-t-il. Et pour cause, quand l’inconnu se retourna, il n’eut plus aucun doute sur son identité. Ryker. Patrouilleur expérimenté avec lequel existait une sorte de rivalité à sens unique. Ils ne s’étaient plus jamais revus depuis les évènements de la tour d’Yfe. Dans le fond, les deux hommes respectaient. Artémis voyait en Ryker un patrouilleur qualifié pour toutes les missions. C’était un vrai professionnel. Ce dernier avait même certainement progressé depuis leur dernière rencontre.

« Quelle merveilleuse soirée ! », lança le vagabond. « Être accueilli par le Manticore tant redouté et se retrouver nez à nez avec l’illustre Ryker, le tout en quelques minutes d’intervalle. Le hasard est si grand que c’en est suspect. »

Lun 13 Mai - 13:51
Le Patrouilleur sursauta et dégaina son épée de fortune. Il la tenait d’une main, loin de son point d’équilibre. Ses yeux luisaient du cristal de force qu’il venait d’activer. Il grommela lorsqu’il aperçut la toison ivoire de l’aventurier avec qui il avait déjà coopéré de nombreuses fois. Toujours face à des dangers mortels qu’aucun autre Patrouilleur n’avait eu à affronter. Qui d’eux deux attiraient le plus de catastrophes ? La première fois, ils avaient abattu un Fledermaus. La seconde, abattu un dieu. Qu’est-ce que ce serait cette fois ? Ryker baissa son épée et secoua la tête. Il avait remonté la route de la caravane attaquée et n’avait vu que les reliquats d’une attaque. Des corps boursouflés par il ne savait quel maléfice, des chameaux lacérés de coups de griffes et de dents. Il avait estimé la bête de la taille d’un très gros cheval, voire de deux ours. Mais les traces étaient … inhabituelles. Ce qui expliqua qu’il fut prêt à cisailler Artémis lorsque ce dernier le surpris. A vrai dire, il s’attendait surtout à une attaque venant des airs vu les traces qu’il avait suivi. Cela corroborait quelques dires qu’il avait pu récolter sur des gens de passage : mi aigle, mi lion et mi scorpion. Les aramilans étaient des gens de religion, il fallait excuser leur maigre conception des proportions. Quant aux traces, elles corroboraient l’aspect félin et aquilin. Mais le reste …

- Soirée ? maugréa-t-il en jetant un œil impavide au soleil qui se déplaçait subrepticement derrière les dunes. J’ai traqué cette créature toute la journée, et toi tu tombes dessus à peine arrivé ? Tu veux dire que je me suis fadé la marche dans ce désert infini alors que t’es tombé dessus en volant tranquillement ?

Il toisa Arémis et rengaina son épée pour croiser les bras. Il laissa l’instant s’étirer quelques secondes puis s’approcha de lui et s’empara de son avant-bras dans une accolade fraternelle. Le haut du visage du Patrouilleur était rougi par le soleil et ses lèvres sèches. Il portait avec lui trois gourdes entières et avait troqué sa cape noire pour une toile blanche qui se démarquait de sa propension habituelle au dramatique. Son armure de cuir, elle, était toujours la même. Il semblait se détacher du lot, ici. Inutile de dire que les déserts n’étaient pas sa tasse de thé mais en tant qu’aventurier, il avait exploré plus que son lot de contrées. Peu d’endroits lui étaient inconnus en Uhr. Beaucoup étaient inhospitaliers, et cela voulait dire qu’il arrivait parfois qu’il se présente dans un accoutrement inadapté, un peu comme là. Mais il pouvait compter sur un avantage que peu avaient : ses cristaux.

- J’en déduis que tu traques cette chose toi aussi ? Bon sang, c’est bien ma veine. J’ai gaspillé toutes mes économies pour tenter de retrouver Nemeth et Aharon en Aramila, suite à notre voyage à la Tour d’Yfe, car j'avais quelques questions à leur poser. Cela n’a rien donné, mais j’ai besoin de fonds pour le trajet retour. expliqua-t-il après avoir rompu le contact. Hum. Et aussi les dizaines de civils massacrés … et les contingents armés d’Aramila envoyés l’éliminer.

- Et toi ? Loin de ta forêt habituelle : serais-tu venu ici pour rendre des comptes à la bête ? A vrai dire … cela ne m’étonne pas. continua-t-il, s’avouant à contre-cœur qu’il était même soulagé d’être aux côtés d’Artémis. Vu la description qu’on m’en a fait, un dragon serait peut-être une meilleure aubaine que cette chose … Tu l’as rencontrée tu m’as dit ? Je dois avoir quelques rations à partager et …

Yearrk ! Yearrk !

Ils furent interrompus par le crissement caractéristique d’un Yearrk qui se rua sur eux - vous pensiez qu'il avait été appelé ainsi pour quelle raison, vous ? Le Patrouilleur se baissa pour accueillir l’invocation qui vint se frotter contre lui. Il lui gratouilla les picots et la créature se mit à tourner sur elle-même avant de partir à toute allure.

- Ah, le voilà qui a trouvé ce que je cherchais : une oasis. Cela tombe à pic, Artémis. Pourquoi ne me raconterais-tu pas ce que tu as fait depuis la dernière fois ? Depuis notre séparation à Opale. l'invita Ryker avant de rehausser la bandoulière de son sac à dos sur son épaule. Noeils va nous mener tranquillement vers ce qu’il a trouvé.

Il indiqua son totem qui pendait librement sur sa poitrine. Ce faisant, le Patrouilleur glissa ses doigts sur son cristal de guérison et ses plaies dues au soleil régressèrent. Il entreprit de suivre la piste de la créature invoquée et se gratta la tête tout en se maintenant à hauteur d’Artémis. Les oasis étaient tout de même rares dans le coin, et vu la poisse des deux compagnons, il y avait fort à parier qu’à un moment, cela allait dégénérer. Mieux valait espérer que ça n’arrive pas tout de suite.

- Et sinon, ce Manticore, il ressemble à quoi concrètement ? J’ai eu beaucoup de témoignages discordants …


Dernière édition par Ryker Lestat le Mer 16 Oct - 14:42, édité 1 fois
Mar 14 Mai - 11:36

 « Je suis arrivé par les airs, alors je pense qu’elle finissait son dernier repas et n’a pas apprécié mon intrusion dans son espace aérien. De la chance… à moins que ce ne soit de la malchance ? Mais rien de prémédité, l’ami. », lança amicalement le vagabond à l’adresse du patrouilleur, dans le but de le rassurer et de ne surtout pas relancer cette concurrence entre eux. Cela dit, s’ils n’avaient pas le même objectif, il aurait prié de tout cœur pour qu’il ne croisât pas cette monstruosité. Le faible contact ressenti provoqua des frissons chez le Portebrume. Comme à chaque fois que sa route croisait celle de Ryker, le danger semblait gigantesque. A croire que ce type attirait la mort.  

Nemeth et Aaron ? Pourquoi cela ? D'autres événements se sont déroulés après notre départ ?, se demanda Artémis à l’écoute du récit de son comparse. Nemeth n’était pas une saine, ni une tendre, mais plutôt une dangereuse tueuse, qui avait maintes fois prouvée ses capacités au cours de l'expédition. Épuisé, sans le sou, Ryker se mettait plus en danger qu’autre chose. Le traqueur risque d’être le traqué.  « Et c’est là une excellente déduction. Je suis ici pour en apprendre davantage sur cette bête et mettre fin à son carnage. », conclut-il sans rebondir sur les recherches de son ami sur les deux autres participants de la tour d'Yfe.

L’ermite refusa la proposition de Ryker. Non par manque de politesse, mais il entrouvrit son sac pour lui montrer qu’il avait emporté quelques vivres avec lui. Le Patrouilleur était généreux, mais il avait besoin de chaque ressource à sa disposition. La vie dans le désert était rude. Puis un Yearrk apparut, invocation appartenant au patrouilleur, dans le but de trouver une piste. Cette espèce était très pratique et très efficace. Artémis lui-même possédait une invocation du même type malgré son odorat développé. Il venait trouver une oasis et mener le duo à ce dernier. Ryker proposa ainsi à son camarade de lui conter sa vie depuis les évènements de la tour d’Yfe.

 « Rien de bien intéressant. Contrairement à toi, j’ai eu un peu plus de mal à me remettre en selle. J’ai passé beaucoup de temps à m’occuper de mon domaine, de la déco, du jardinage... Puis j’ai progressivement repris la chasse, l’entraînement. J’avais une vie rêvée mais je dois admettre qu’il me manquait quelque chose qui, chaque nuit, me réveillait en sueurs. La Brume n'attend pas et poursuit inlassablement son avancée. Je ne peux pas jouer l'ermite sans rien faire. Je devais donc me relever et repartir à l'aventure. », conclut-il avec un affreux sourire carnassier.  

Concernant le Manticore, le vagabond dut faire appel à toute sa concentration. La tâche n’était pas aisée tant l’échange fut court. De brefs souvenirs survinrent alors, mais ils étaient flous.  « J’ai vu des crocs acérés, des griffes aiguisés, une tête et une queue de lion, des ailes... Mais j’ai surtout été marqué par sa férocité. S'il avait pu, il nous aurait bouffé d’un seul coup. Une faim insatiable. ». En d’autres termes, sa réputation n’était pas usurpée. Ils approchèrent de l’oasis et remplirent leurs gourdes, le tout en discutant de tout et de rien, comme si la bête traquée ne représentait qu’un faible danger. Les deux hommes s’abreuvèrent et décidèrent de monter un camp.  

Au loin, ils purent entendre les cris des bêtes apeurées. On ignorait si le Manticore attaquait de jour ou de nuit.


Dernière édition par Artémis De Goya le Sam 19 Oct - 13:45, édité 1 fois
Mer 16 Oct - 15:06
Assis autour d’un feu improvisé, après avoir rempli leurs gourdes, les deux hommes échangeaient autour d’un point d’eau. Autour de ce qu’ils avaient vécu depuis les événements de la Tour, autour de leurs déconvenues respectives. Le Patrouilleur n’avait pas beaucoup à dire non plus. Il lui conta le poids que l’Alliance lui faisait peser sur les épaules, sur ses liens avec le Chancelier qu’il essayait de fuir comme la peste et la peur maladive qu’il avait depuis que sa Nebula s’était purifiée. Depuis que son pouvoir était devenu … beaucoup trop grand pour lui.

- C’est très étrange. Vraiment. Je me sens moins proche de l’Errance qu’avant, mais chaque utilisation de ce pouvoir me rapproche de ce destin. Puis la sensation disparaît … se confia-t-il, sachant qu’Artémis comprenait de quoi il parlait.

Quant au reste … il faisait confiance au Loup blanc, connaissaient où étaient ses intérêts et ses perspectives. Il soupira, las de s’être lancé dans une quête vaine en venant en Aramila. Il aurait préféré être là où il était utile mais depuis la Tour d’Yfe, il se sentait surveillé et ses faits et gestes contrôlés par l’Alliance. Il savait qu’il possédait des informations sensibles et que la moindre fuite serait condamnée. Il était assez digne de confiance pour avoir été envoyé sur place … et le serait probablement pour la suite mais le fardeau d’avoir menti sur le cristal lui pesait lourd sur les épaules. Il savait qu’Artémis partageait son secret, et espérait que le cristal divin était en sécurité avec Lewen.

- J’ai appris à Andoria que nos alliés n’étaient pas tous aussi blanc que neige. Le jeune Keshâ était un membre de la guilde, certes, mais vraisemblablement un espion épistote. Lewën a toute ma confiance, ainsi que toi. Quant au reste … Jessamy était déjà une créature recherchée, mais était impliquée dans la découverte de Dainsbourg à tes côtés : que tu lui fasses confiance me va. Jeremiah … n’a jamais caché sa nature. Reste donc nos deux derniers comparses : Nemeth et Aharon. Or, j’ai appris que nul ne savait qui ils étaient ni d’où ils venaient. C’est la raison de ma venue ici. Çà et le besoin impérieux de fuir le luxe de l’Alliance et de leurs satanés petits fours, ou matelas beaucoup trop mous … expliqua-t-il, conscience qu’Artémis ne comprenait que trop bien.

- Bref, tous les autres à part eux étaient … Faciles à retrouver, ou correspondant à ce qu’ils disaient. Vu les informations que nous avions acquises, j’avais peur. Je n’ai pas pu contacter Lewën, et c’est tant mieux, mais je me suis dit qu’Aramila serait intéressante à aller visiter, quitte à trouver quelques boulots sur la route. C’est ce qui m’a mené ici. Et là … et bien : chou blanc. J’ai suivi des dizaines de pistes dans tous les sens et impossible d’en apprendre plus : cela me prendrait une vie entière de les trouver. Je sais que les expéditions à mener sont prioritaires mais … mais je ne veux pas de leur foutue politique et je crève de retourner dans la Brume. Alors j’ai décidé de repartir au nord après ça.

Il n’était pas nécessaire d’en dire plus : le Patrouilleur était un adepte des voyages à pieds et plus les choses étaient lentes, mieux c’était pour lui. Là c’était juste … trop. Pour lui, pour la Guilde. Pour les dangers à venir : il avait assez fait durer. Le retour, cependant, se devrait d’être plus rapide et il en frémissait déjà. La Guilde avait besoin de tous les membres sur le front. Il n’avait pas vocation à rester là. Il soupira.

- Au moins serai-je utile pour cette bête. On sera mieux à deux. Donc. Crocs, griffes et tout. Cela m’a tout l’air d’une composition de plusieurs bestioles. Génial. Encore une saloperie mutée ? Ou une expérience d’un taré ? On est loin d’Opale, mais Aramila a plusieurs fois bien caché ses excès … répondit-il, avant que le cris de bêtes ne vienne l’interrompre.

Les deux se regardèrent et se relevèrent d’un bond. Le Patrouilleur jeta du sable sur le feu et se tourna vers la direction d’où venait le cri. Ils grimpèrent la Dune pour se retrouver sous les étoiles, l’horizon devant eux. Ryker glissa sa main sur son cristal d’écholocalisation et l’activa pour étendre son ouïe. Il sentit son champ s’étendre et perçu très nettement des cris de douleurs, des piaillements et quelques cavalcades. Il coupa le lien, sentant déjà le pouvoir puiser dans ses forces. Il indiqua la zone à Artémis d’un geste et s’avança en courant vers le bas de la Dune. Il posa la main sur son épée mais la garda au fourreau. Ils gravirent quelques dunes avant d’arriver proche de l’endroit d’où étaient venus les cris. Ryker s’allongea sur le sable, écouta. Les prédateurs étaient courants dans ce coin, mais ils étaient encore proche de la ville. D’autant plus qu’Artémis lui avait dit avoir croisé la Manticore : ils pouvaient encore être sur son terrain de chasse ?

- Artémis, que voient tes yeux de loup ? murmura Ryker, tout en activant de nouveau son cristal.

Soudain, il se figea, percevant le bruit d’imposantes ailes dans son dos, en direction de l’oasis. Plus bas, les animaux avaient dû être apeurés par le passage d’une immense créature et leur fuite avait été … salvatrice. Le feu allumé avait dû attirer la créature. Si vite, si proche ? Mince, ils l’avaient loupée ? Ryker ronchonna contre sa propre stupidité et prévint Artémis. Tomber dessus si vite était un signe de chance, selon comment ils voyaient les choses. Le Patrouilleur se redressa, chercha un nouveau cristal à sa ceinture. Oui, voilà.

- Je te suis, prenons le temps de l’observer avant qu’elle ne nous repère.

Dim 20 Oct - 12:28

Cette discussion permit au vagabond d’en comprendre bien plus au sujet de la pression que subissait Ryker. Il était bien à plaindre. Une vie de patrouilleur n’était jamais aisée, bien que fort enrichissante, mais devenir le jouet du Chancelier devait être… suffocant. Là-dessus, Loup-Blanc ne pouvait réellement l’aider. Si toutefois son ami désirait un jour se défaire de ces liens, il répondrait évidemment présent pour l’y aider. Pour l’heure, inutile de tenter le diable, la décision devait revenir au patrouilleur uniquement. Quant à sa Nebula, Artémis sourit. En effet, cela lui rappelle ses moments de doute, une fois cette dernière purifiée. Le pouvoir était plus fort mais l’emprise l’était également.

« C’est un combat éternel, intérieur, entre ta Nebula et toi-même. Si je voyage tant, c’est aussi pour trouver un remède, un traitement ou une technique qui permet de prendre le dessus sur elle. », dit-il en plaquant la main contre son torse, comme pour sentir un éventuel mouvement intérieur.

Mais la suite de cette discussion initialement banale prit une tournure des plus intéressantes. Il apprit davantage sur les membres qui composaient l’unité de la tour d’Yfe. Ce n’était pas joli. Keshâ’rem, espion épistote. Jeremiah ne s’était jamais caché et n’était qu’un chien du Magistère. Tout le monde le savait. Jessamy, une pauvre créature recherchée, mais si Artémis lui faisait confiance, alors Ryker lui faisait confiance. Même chose pour Lëwen. Ne restait donc plus que Nemeth et Aharon. Mais de quoi les accusait-on exactement ? D’avoir menti. Nul ne savait d’où ils venaient, impossible de les retrouver, ils étaient comme envolés dans la nature. Chacun avait un employeur, un lieu de résidence, un motif connu quant à sa venue. Ces deux-là n’avaient manifestement rien de tout cela. Peut-être même que leur identité était fausse. Alors…

« … Pourquoi diable nous ont-ils accompagné ? Qui les a envoyés ? », question le Portebrume à voix haute, avant de reprendre : « Ce sont des professionnels. On ne pourra pas les trouver sans indice. Néanmoins, j’ai le sentiment que nos chemins se croiseront de nouveau. Et ce jour-là, ils devront nous fournir quelques réponses à nos questions. »

Hélas, pour l’heure, ils devaient s’occuper d’un terrible monstre qui rendait la vie invivable pour beaucoup de pauvres innocents. Ils pourraient ensuite se concentrer sur les deux inconnus. Procéder par étapes était la meilleure chose à faire. D’ailleurs, des cris retentirent et firent bondir les deux aventuriers. Ce fut à cet instant que le vagabond remarqua les nouvelles acquisitions de Ryker. Il continue de se perfectionner. Il sera fin prêt pour affronter les dangers de Zénobie, songea-t-il d’un œil bienveillant. S’il ne s’agissait pas du Manticore, de nombreux prédateurs rôdaient bien trop près des villes.

« Pour l’instant, ce que je vois ne ressemble en rien à notre cible. D’ailleurs… », fit-il sans pouvoir finir sa phrase. Ils détalent tous. Se retournant rapidement, avec un poil de retard que son partenaire, il aperçut une monstruosité ailée passer au-dessus de leur tête : le Manticore. Déjà affamé, le prédateur devait certainement repartir à la chasse, attiré par la lumière qu’ils avaient utilisé pour leur propre repas. Maintenant, elle traquait certainement les monstres en fuite. L’écholocalisation du patrouilleur pourrait être forte de son utilité. Artémis siffla et les deux hommes attendirent avant de voir Ablette, le pégase, arriver quelques instants plus tard.

« Suivons cette chose. Pas trop près, mais suffisamment pour attendre qu’elle se pose, l’observer et éventuellement l’attaquer durant sa sieste. », suggéra l’ermite en montant sur sa monture. Il invita Ryker à le suivre mais ce dernier déclina l’invitation, détestant les montures de manière générale. Artémis s’excusa auprès d’Ablette et la laissa repartir se reposer. Elle décida toute de même de les accompagner, sans doute pour se dégourdir les jambes. Le cavalier suggéra la course à pied pour ne pas perdre les traces de leur cible, ce que le patrouilleur accepta sans la moindre hésitation. Dévaler les dunes était assez aisé, les monter représentait une tâche un peu plus ardue. Cependant, les deux hommes et le pégase ne se plaignaient pas et poursuivaient leur effort.

Ce n’était qu’après avoir couru quelques kilomètres, haletants, qu’ils entendirent des cris qui n’étaient pas humains. Le prédateur avait atteint ses cibles. Ils se dépêchèrent de grimper la dernière dune et s’allongèrent. Ablette était restée en contre-bas. Le nez, les oreilles et les yeux d’Artémis changèrent subtilement. Son ouïe fine permettait de clairement entendre ce qu’il se tramait, tandis que son odorat lui permit de sentir l’odeur du sang. Enfin, ses yeux phosphorescents permirent de voir l’intégralité de la scène. Une scène d’une brutalité inouïe se déroulait sous leurs yeux. Le Manticore ne laissa aucune chance à la meute qui se défendait désespérément.

« J’ai beaucoup entendu parler du Manticore, mais je n’en avais encore jamais vu. C’est bien pire que ce que je craignais. Les descriptions sont mauvaises parce qu’aucun survivant n’est encore revenu d’une rencontre avec cette espèce. Serons-nous les premiers, Ryker ? », dit l’homme aux cheveux d’albâtre en affichant une horrible grimace, mélange d’excitation et de crainte. Il avait déjà rencontré de nombreuses bêtes, sauf que nous étions bien loin des monstres communs de sa forêt.
Dim 20 Oct - 13:19
Le Patrouilleur soupira, il n'y avait pas de remède. Seule l'Errance. Tout comme les questions d'Artémis restèrent sans réponse : c'était plutôt le risque de voir de telles informations diffusées et utilisées à tort. Avec la défection du Régent, il n'était pas besoin d'être un fin stratège pour comprendre que cela pourrait faire beaucoup de mal à Epistopoli. Mais ces affaires n'étaient rien face au danger dans lequel ils évoluaient pour l'heure : le monstre ne tarda pas à se faire connaître.

- Je ne leur fais pas confiance. Elles gênent les traques, trahissent notre présence par leur odeur ... et ont la fâcheuse tendance de ne pas être fiable. répondit-il, admirant les dents d'Ablette de loin.

Foutu canasson, ils avaient une propension à le mordre pour rien. Par simple plaisir malsain, comme tous les monstres d'Uhr. Le Patrouilleur émit un mouvement de retrait, regarda l'immonde créature s'en aller. La vitesse ne valait pas la discrétion, ne valait pas l'efficience.

- Les créatures de la Brume les sentent toujours. Toujours. Et les Errants se font un malin plaisir de les perturber pour mieux nous tomber dessus. frissonna-t-il, en mémoire à plusieurs déconvenues qui lui avaient valu de sordides souvenirs ... et un buffet garni de viande chevaline.

Ils coururent donc pour suivre la bête qui venait de les survoler. Le sable était inconfortable et il était difficile de rester stable dessus, ce qui les fatiguait d'autant. Il ne fut pas nécessaire d'avoir recours au cristal pour suivre la trajectoire de la bête, tant les cris de ses proies se répercutaient dans l'infini des dunes. Néanmoins, Ryker se questionna sur la facilité avec laquelle la chose leur était tombée dessus, par deux fois. Elle se déplaçait vite, fondait sur tout ce qui se trouvait sur sa route et paraissait terroriser la région. C'était étrange comme comportement : si ce n'était que pour se nourrir, elle ne se serait pas lancée ainsi dans des traques expéditives ? Il savait qu'elle causait énormément de dégâts, mais ce comportement ne correspondait pas à celui d'une bête sauvage.

Impression qui se confirma lorsqu'ils gravirent une énième dune pour contempler le massacre. Des corps démembrés, des organes dans tous les sens et un charnier où la créature s'en donnait à coeur joie pour détruire la moindre trace de vie aux alentours. Incapable de voir mieux que ce que projetait la lueur de la Lune, Ryker ne pouvait qu'essayer de deviner la nature de la chose, et n'arrivait pas à en comprendre les contours. Elle roulait se déplacer comme un félin, tandis que ce qui ressemblait à un appendice caudal fracassait le sol en plusieurs endroits et faisait voler cadavres et sable. Mais ses ailes battaient l'air tout autour et générait un chaos qu'il avait du mal à discerner. La créature rugit plusieurs fois mais ne parut pas boulotter la moindre carcasse. Elle hurlait, et le Patrouilleur ne pouvait s'empêcher de frémir. Une rage sourde ? Une douleur perpétuelle ? Quelque chose d'anormal dans le comportement de la bête.


Dans un dernier rugissement, sa queue empala plusieurs carcasses qu'elle fit jouer entre ses pattes avant de frapper le sol et de décoller avec une violence inouïe. Son cri strident se répercuta dans la nuit et les deux hommes se jetèrent au sol pour éviter d'attirer son attention. Mais ivre de sang, la créature ne sembla pas les remarquer lorsqu'elle passa au-dessus d'eux. Leur coeur battait la chamade, et ils attendirent plusieurs dizaines de secondes avant de se relever et espérer qu'elle fut loin. Elle continuait de rugir, le son de son passage n'étant bientôt qu'un bref écho. Le monstre semblait parcourir la nuit tout en répétant ses massacres et à en croire l'importance de la prime, cela ne faisait que s'accroître. Ce point questionnait le Patrouilleur, à mesure qu'ils descendaient pour observer les corps mutilés. Il sortit son cristal de lumière pour générer de quoi observer la scène, frappé de la langueur habituelle de l'usage d'un tel pouvoir. Il s'accroupit à côte de ce qu'il restait du corps d'un des paisibles herbivores, en étudiât les blessures. De profondes saillies dans la chair. Un thorax sectionné en deux par un seul coup de mâchoire. La bête était féroce, destructrice. Certains présentaient aussi des trous béants, suintant d'un liquide nauséabond qui faisait crépiter leurs blessures. Un poison caustique ? La chose semblait posséder de multiples caractéristiques inquiétantes. Mais un point émergeait.

- Elle tue pour le plaisir de tuer ... murmura-t-il, face à l'état de la harde.

Il passa d'un cadavre à l'autre, et même si quelques morceaux manquaient, les prédateurs ne tuaient pas les troupeaux entiers. C'était un comportement anormal, quelque chose clochait chez cette engeance. Il y avait là une forme de rage primale inexplicable. Parfois, la douleur poussait les animaux à adopter des comportements anormaux : il se souvenait d'un drake malade dans ses jeunes années qui avait attaqué tout ce qui passait à portée. Mais là, il n'aurait su dire. Il leur fallait déterminer ses actes, ce qui motivait le tout que ce fut conscient ou non. Les points faibles de la bête se révèleraient alors, avec ce qui nourrissait sa hargne.

- Elle a emporté des cadavres, pour se nourrir certainement. Mais le reste, le chaos et la violence ... bon sang, tu m'étonnes que personne n'en ait réchappé. Elle détruit tout, et a tendance à s'acharner sur la moindre créature vivante. Nous avons eu, en quelque sorte, de la chance que le sang qui la maculait cache notre odeur. conclut-il, tout en gardant pour lui le fait qu'Ablette aurait été une mauvaise idée mais un bien beau sacrifice pour l'éradication des horreurs équines.

Ryker regarda le ciel et soupira. Impossible de prendre cette chose de vitesse. Il lui vint une idée et s'avoua soulagé de savoir Artémis avec lui dans le cadre de cette traque. Il était fortuit qu'ils se soient rencontrés, mais il fallait avouer que les chasseurs de monstres étaient rares en Uhr. Ils étaient deux spécialistes de ces traques suicidaires : ce n'était pas si étonnant au final ... juste le fait de s'être retrouvé en Aramila. Le Patrouilleur frissonna, le froid du désert commençant à s'instiller sous ses vêtements maintenant que l'adrénaline était retombée et que la sueur de la course avait imbibé ses vêtements.

- Tu pourrais retrouver sa piste grâce au sang ? Si elle a embarqué des cadavres, il y a une chance qu'elle nous mène directement à son antre. A partir de là, nous pourrons ... établir un plan. Qu'en penses-tu ?

Et il n'en fallut pas plus pour que les deux amis se mettent en route, jusqu'à finir par déterminer une direction plutôt précise grâce à ce qui coulait des corps des proies ... et le fin odorat d'Artémis. Ils étaient habitués aux traques, mais la créature finit par les mener au milieu de contreforts rocheux, non loin d'une oasis visiblement déserte. Ils n'y parvinrent qu'au point du jour, après s'être dissimulés lors de nouvelles sorties de la Manticore, qui passait visiblement sa nuit à répandre sa rage aux alentours. Ce fut donc au petit matin que les deux hommes se dissimulèrent au milieu des roches, et au milieu d'une quantité anormale d'os et de squelettes. De corps en décomposition, laissés là par la Manticore. L'odeur de charnier inexpugnable leur donna des nausées, comme si le venin et la maladie s'étaient invité pour souiller l'émergence vitale qu'était cette oasis. Épuisé, Ryker s'adossa à quelques rocailles. La Manticore était rentrée, elle aussi, au point du jour. Elle n'avait pas bougé depuis.

- On dirait bien son antre ... Le sommeil nous manque, je te propose de nous retirer pour la journée et d'établir un plan pour demain ? A moins qu'on trouve des cavernes, il n'y a pas d'endroit sûr à des lieues à la ronde ... Et j'espère qu'aucune caravane n'aura la mauvaise idée de passer par là ...
Lun 21 Oct - 11:40
Pister des monstres constituait le cœur de leur travail. Combien de bêtes avaient-ils traqué ? Bien trop et depuis trop longtemps. Doté un odorat de canidé, autant dire très efficace, ils purent suivre le Manticore sur une longue portion. Ils le suivirent jusqu’à un lieu bordé de rochers, de squelettes et chairs en décomposition. Ce lieu sentait la mort. L’antre du monstre, sa salle de trophées. Ryker suggéra de se reposer et il avait bien raison. Cette longue traque, couplée d’une légère utilisation des cristaux avait puisé dans l’énergie des deux hommes. Dissimulés entre des rochers, il y avait peu de chance d’être dérangés. Quant aux caravanes, Artémis espérait qu’ils avaient déjà identifié ce lieu comme mortellement dangereux. Ils préparèrent leur « campement » et se reposèrent autant que possible.

***


A la nuit tombée, un rugissement féroce sortit les deux hommes de leur sommeil. Ils avaient eu du mal à s’endormir et s’étaient réveillés à plusieurs reprises, à tour de rôle, afin de s’assurer qu’ils étaient bien en sécurité. Ensuite, ils s’étaient endormis un peu plus profondément. Un réveil, certes brutal, mais un repos réellement salvateur. Les deux hommes jetèrent un coup au niveau de l’antre du démon et constatèrent qu’il rugissait comme baillait un homme en se levant d’une bonne nuit. S’il ne constituait pas un réel danger pour les populations, je l’aurais laissé en paix, songea le vagabond en observant ce Manticore à la fois majestueux et terrifiant. Les deux amis échangèrent un regard complice. Ils sentaient le goût du sang, l’approche de l’affrontement tant redouté.

Le Manticore prit son envol et partit en quête de nourriture, ou simplement de plaisir. Ce fut le moment pour les deux hommes de courir jusqu’à l’entrée de son antre. Artémis ne détecta aucun danger à l’intérieur. Seulement l’odeur de sang permanente. « Il n’y aura à priori aucune mauvaise surprise à l’intérieur. », dit-il en regard l’horizon derrière, comme s’assuré que leur cible ne revenait. Il entra le premier. Comme à l’extérieur, on pouvait y trouver des piles d’ossements éparpillés. Depuis combien de temps se trouvait-il ici ? La quantité était exagérée. Des animaux, des monstres de la Brume, des humains… on y trouvait tout ce qu’on désirait. Un prédateur qui ne se donnait aucune limité sur les proies souhaitées.

La grotte était étonnamment ample. Le Manticore pouvait s’y déplacer librement. La lumière provoquée par Ryker permit une observation plus détaillée. En s’enfonçant davantage dans le dédale, ils débouchèrent dans une salle bien plus grande, plus spacieuse. En son centre, un promontoire sur lequel devait manger et dormir la bête qu’ils traquaient. Un trône naturellement bâtit pour l’un des rois de la chaîne alimentaire. Quiconque se trouvait ici devait ressentir la crainte d’être broyée par une puissance trop grande. « Nous devrions lui tendre un p… »

Il ne put finir sa phrase. Un rugissement retentit de l’extérieur. Un rugissement bien trop connu pour l’ignorer. Loup Blanc courut aussi vite que possible vers la sortie. Un sprint sans économie. Il retrouva rapidement la lumière du jour, s’approchant donc de la sortie de cette tanière. Alors qu’il dégaina sa lame pour affrontement ce qui arrivait, il fut accueilli par un éboulement de rochers qui condamna leur seule sortie. Haletant, il prit le temps d’analyser la situation. Ryker arriva peu de temps après, constatant également leur seule issue condamnée. « Nous avons été repérés. J’ignore depuis combien de temps mais l’issue est la même. Cela dit, je l’imagine mal enfermer deux potentielles proies sans pouvoir s’amuser avec et les déguster ensuite. Une autre issue doit exister. »

Ils n’avaient pas achevé leur inspection. Soit le Manticore les attendait patiemment au seul accès restant, soit il les avait enfermés le temps de vaquer à ses occupations, sachant pertinemment qu’ils ne trouveraient pas d’autres accès. Loup Blanc fut presque vexé, mais on parlait d’un monstre légendaire, le seul de son espèce, le sommet de la chaîne. Elle se jouait d’eux et c’était presque un signe de respect pour ce genre de prédateur. Il rengaina son sihil et rebroussa chemin en restant le plus calme possible. « Il semblerait que nous n’ayons d’autre choix que de poursuivre notre visite. Tâchons de trouver une issue si nous ne voulons pas servir de dîner. »
Lun 21 Oct - 12:51
Ryker baissa sa main et la lumière qu’il en générait. L’éboulis était trop dense pour qu’ils puissent en faire quoi que ce soit. Il maudit la créature et se retourna vers l’immense cave. L’odeur de putréfaction était tenace et les craquements qu’ils firent en marchant sur les os des centaines de victimes de les aidait pas à se projeter vers un avenir serein. Le Patrouilleur fut forcé de maintenir son pouvoir, même s’il sentait petit à petit sa prise sur son corps. Il ne possédait pas les yeux d’Artémis et sans ce dernier … Il soupira, tira une torche de son sac et entreprit de l’allumer. Une pensée rapide à son Duddo resté à l’extérieur, certainement en quête de nourriture. Au moins il serait en sécurité ? Quoi qu’il en fut, les ris de la bête résonnaient plus haut. Elle avait su les piéger et était partie … pourquoi donc ? La créature était … trop maligne, une intelligence trop peu animale.

- Ce n’est encore une fois pas un comportement normal.
grommela le Patrouilleur avant de lever sa torche. Une créature capable de comprendre le concept de piège, avec un tel don pour la cruauté … on dirait quelque chose de contre nature, Artémis.

Ils avancèrent parmi les cadavres, plus ou moins frais, et parvinrent jusqu’au reposoir de la bête. Il était strié de multiples traces de griffes, de ses passages multiples. Une quantité faramineuse d’ossements mâchonnés trônaient tout autour. Un spectacle qui rappelait avec horreur l’ossuaire de l’Astrolable. Il échangea un regard avec Artémis, ils se comprenaient. Le Patrouilleur inspira pour se donner du courage et entreprit d’inspecter la zone. Ils pourraient apprendre des choses sur leur proie ici, en attendant de pouvoir trouver une sortie. Il se baissa, chercha parmi les déchets. Des plumes colossales, des poils odorants. Elle semblait composée de plusieurs choses. Ou alors c’était une nouvelle espèce inconnue.

- Peut-être pourras-tu en tirer quelque chose. fit-il à Artémis en lui montrant les reliquats de la créature.

Quelques fragments de chitine montrant une mue régulière et précoce. Il y avait aussi des dents de lait éparpillées, de plusieurs tailles. C’était comme si la bête souffrait de mues régulières. Le Patrouilleur fouilla dans les décombres, en tira des objets divers, probablement appartenant à ses victimes. Mais c’était ce qui appartenait à la bête qui l’intriguait le plus. Il connaissait assez les créatures d’Uhr et de la Brume pour avoir une idée de leur développement classique. Vu la fraîcheur et la taille des mues, tout laisser penser qu’elle avait grandi vite : en quelques années tout au plus. La chose était colossale à présent. Il fouilla dans les décombres pour en tirer les débris d’une caisse et de quelque drapé carmin et or. Il fronça les sourcils. L’objet était vieux, usé. Pourtant déposé là il aurait dû être jeté à bas comme tout le reste. C’était comme une grande couverture. Le symbole d’une triskèle stylisée trônait en son centre. Cela aurait pu entourer un gros chien. Il jura.

- Par les Douze, le Magistère. murmura-t-il, en donnant la couverture à Artémis. Je ne crois pas à une coïncidence … cette bête pourrait tout à fait sortir de leurs fourneaux. Par la Brume, ça pourrait expliquer sa férocité. Elle a l’air de grandir vite, et d’avoir un intellect supérieur. Cela expliquerait aussi pourquoi elle n’est qu’un problème récent … Il me semble que tu as toujours ton cristal de cognition, si ma mémoire est bonne depuis la Tour … peut-être pourrais-tu en apprendre plus ?

Mais cela ne résolvait pas leurs affaires. Il convenait de trouver un plan pour lui faire face ou une sortie pour mieux se préparer. Elle avait probablement bouché l’entrée de façon à pouvoir la déblayer plus tard … mais il existait toujours une solution à tout. Ryker entreprit d’activer son cristal d’écholocalisation pour tenter de discerner le moindre son à même de les aiguiller hors de la grotte. Mis à part la vermine qui grouillait, il fit chou blanc. Il perçu bien le son cristallin d’une source d’eau qui coulait non loin, peut-être en rapport avec l’oasis ? Il se rapprocha d’un mur, fit glisser sa main dessus, torche levée.

- Là, j’entends le son de l’eau. J’ai une idée.

Quelques heures plus tard …

Toujours enfermés dans la grotte, les deux chasseurs n’étaient pas restés inactifs. Ils avaient dressé un feu, alimenté par les ossements et branchages trouvés çà et là. Ils étaient en nage, mais leur plan était ficelé. Les raclements de la bête les fit malgré tout sursauter lorsqu’elle entreprit de s’occuper des gravats pour venir leur rendre une funeste visite. Bien assez vite, ils perçurent le son des rochers qui roulaient et du passage qui se dégageait … ainsi que le râle hurlant de la Manticore qui se félicitait d’avance du sort qu’elle allait leur faire subir. Renforcé par l’adrénaline qui suintait dans ses veines, Ryker fit un signe à Artémis qui se tint prêt. Il lança avec fracas un énorme rocher contre la paroi fragilisée. Mince, pas assez. Un second. Un troisième. La bête continuait de se frayer un passage vers eux. Il réitéra, causa une large fissure. Elle s’agrandit, les rochers commencèrent à s’effriter et alors qu’elle céda en éclatant, le loup blanc y colla une barrière énergétique pour contenir le torrent furieux mêlé de roche et d’eau. Ils avaient creusé une partie de la journée, en échangeant les cristaux pour garder un minimum de forces. Juste assez pour tendre leur piège. L’eau se colla avec toute sa force à la barrière … et commença à la fissurer. La créature se façonna alors un passage, éclata les rochers et surgit dans la grotte en piaillant, jetant des gravats un peu partout. Les rayons du jour illuminèrent l’entrée, illuminèrent la grotte. Le Patrouilleur posa la main sur l’épaule de son pair. Changea de cristal. Souffla, laissa la langueur s’emparer de lui.

- Trois … deux …

La bête sauta avec une telle vigueur qu’elle en fit chanceler son reposoir quand elle atterrit. Sa queue immense de scorpion fouetta l’air. Les rocs de l’entrée continuaient de s’ébouler, de glisser pour laisser passer toujours plus de rayons lumineux. Petit à petit, le corps de Ryker se garnissait lui-même de lumière, glissait le long de son corps pour l’auréoler d’une aura diaphane qui se magnifia à l’instant où la lumière du jour se fit plus intense dans la caverne. La Manticore profita de cet instant pour leur jaillir dessus, crocs et serres dehors.

- Maintenant !

Le Patrouilleur attrapa la tunique d’Artémis et profita de la lumière pour les sortir de la caverne à une vitesse surhumaine. A moitié transporté par les rais, il parvint à grand effort à tirer le loup blanc avec lui et les deux hommes roulèrent hors de la caverne, emportés par l’élan et la difficulté de maîtrise du pouvoir. Ils étaient passés entre les pattes de la créature tandis que celle-ci s’était écrasée contre le mur et la pseudo barrière énergétique qui … avait tout simplement cessé d’être. Puis ce fut le chaos, dans un mélange d’eau et de roches. Les deux chasseurs, quant à eux, se relevaient péniblement. Ereintés mais saufs, mis à part leurs contusions.

- Aïe, putain … ah, je crois que je me suis pété quelque chose … ah, bordel, ça marchait mieux dans les espaces découverts … grommela Ryker en se massant les côtes.

La terre trembla, grogna. Ils n’avaient pas lésiné sur les efforts … et savaient pertinemment que leurs coups ne seraient pas suffisants pour s’occuper de la Manticore. Il chancela. Cet effort lui avait coûté beaucoup, tout comme l'usage alterné de deux cristaux. Il dégaina son épée et s'appuya dessus, tout en priant pour que la créature soit morte. Des étoiles dansaient devant ses yeux, et ce n'était pas dû qu'à la douleur. Si seulement c'était si facile ...
Lun 21 Oct - 21:48

Toute cette affaire puait grandement l’expérience qui avait mal tourné. Artémis cracha à la vue des indices présents sous leurs yeux. La Magistère était une épouvantable organisation qui méritait d’être dissoute. On pouvait parler d’avancées pour le bien du monde, mais quand on observait précisément ce qu’ils concevaient, on pouvait s’interroger. Seuls des aventuriers étaient témoins de ces monstruosités créées de toutes pièces par ces scientifiques. Sans piper mot, Artémis son cristal de cognition avant de toucher l’objet rapporté par Ryker. Il fut alors plongé dans un tourbillon de souvenirs qu’il devait trier du mieux que possible.

***

Se trouvait une créature chimérique face à lui. D’apparence, elle semblait totalement inoffensive et assez mignonne. Allons un peu plus loin, songea le voyageur du temps en observant cette petite bête disparaître dans un tourbillon, aspirée par d’innombrables souvenirs. Ce qu’il vit ensuite releva de la science-fiction, de la folie de l’Homme. Difficile de savoir s’il s’agissait d’expériences ratées, mais les conséquences de ce travail sont absolument désastreuses. On ne parvenait pas réellement à discerner si le Manticore fut une création humaine ou brumeuse. La vérité ne saurait probablement jamais dévoilée. Cependant, sans pouvoir le prouver, Artémis semble voir des expérimentations humaines sur cette pauvre bête. Des effets lumineux empêchaient de clairement voir ce qu’il se déroulait. Des éclairs, des explosions, des hurlements juvéniles…

Retour sur la petite créature chimérique, dans un univers entièrement blanc. L’homme aux cheveux d’albâtre face à cette mystérieuse création. Que diable t’ont-ils fait subir, mon ami ? Tu n’étais pas promis à une telle existence… au départ, constata-t-il avec peine. Pas étonnant qu’il n’en existait pas d’autres. Le Manticore était unique et ne pouvait pas se reproduire. Par ailleurs, sa récente apparition ne faisait que confirmer sa création – elle aussi récente – et une croissance extraordinaire. Peut-être n’avait-elle pas fini de grandir et cela risquait de devenir problématique. Enfin, Loup Blanc fut téléporté un peu plus loin dans le futur.

Un soir, un jeune scientifique, probablement surexploité en début de carrière, restait encore au laboratoire pour prendre les constantes de la créature, enfermée et branchée dans un tube rempli d’un liquide peu naturel. Ce jeune homme semblait perturbé, luttant intérieur contre un mal qu’il tentait de repousser. Mais comme tout jeune homme que l’on mettait face à ses responsabilités, des questions éthiques se posaient, alors on hésitait et on prenait souvent les mauvaises décisions. Celle qu’il avait prise ce soir lui couta chère. Très chère. Bêtise, folie, excès de compassion ? Finalement, cela n’avait guère d’importance. Il appuya sur un bouton, le tube se vida, il enveloppa ensuite la bête dans un tissu blanc avant de quitter le laboratoire. La créature semblait tenir dans un sac, ce qui lui permit de quitter l’établissement sans éveiller les soupçons. S’en suivit une course dans la forêt, une chute, et l’élément dérobé roula sur quelques mètres, enroulé dans son tissu. Mais quelque chose sauta aux yeux du scientifiques. La petite bête avait déjà doublé de volume. Voici probablement la raison de sa chute. Un regard maléfique, un horrible rugissement et un carnage.

La disparition du Manticore fut signalé dès l’aube. Une équipe composée de tartares partit à la recherche d’un quelconque indice. Tout ce qu’ils trouvèrent la dépouille, ou du moins ce qu’il restât, du jeune scientifique. Le tissu blanc semblait masquer les parties les plus laissées de son corps. Quel funeste destin pour ce jeune homme, victime de son bon cœur.

***


La suite, on la connaissait. Revenu dans sa réalité, tout alla très vite et le vagabond fut tiré à toute vitesse par le patrouilleur. Une vitesse exagérément élevée, incontrôlée, mais ô combien nécessaire. Tous deux semblaient blessés après une réception très mal assurée. Ryker se plaignait des côtes, Artémis de l’épaule. Ils avaient bossé toute la journée et l’utilisation poussée de son cristal l’avait lessivée. Alors, comme son ami, il souhaitait de tout cœur que le féroce animal piégé à l’intérieur fût mort. Hélas, il rugit une énième fois. Mais ce coup-ci, on aurait davantage dit le rugissement d’une bête blessée. « C’est horrible de se dire cela quand on voit l’effort fourni, mais on doit l’achever aujourd’hui. Si on lui laisse l’occasion de récupérer, nous sommes finis. »

Elle allait sortir de sa tanière pour finir le travail. Ils devaient se préparer. Artémis observa rapidement les lieux. On pouvait facilement grimper et prendre de la hauteur. Chose assez inutile contre un animal ailé. « Si je te dis Opération Fladermaus, ça te parle ? », lança le vagabond en souriant. Un sourire qui n’en était pas tout à fait un. L’idée de devoir tuer ce Manticore après avoir son histoire en tête n’était pas un plaisir. Il n’était cependant pas question de reproduire la même erreur que ce scientifique.
Lun 21 Oct - 22:28
Pour seule réponse, un sourire s'étira sur les traits de Ryker. Il laissa échapper un petit rire narquois, se redressa. Il chancela et se tint sur ses talons pour faire face aux rugissements de la bête. L'eau s'échappait de la caverne en un torrent confus, charriant ses cadavres et les tristes témoins de l'ire de la bête. Il fit jouer son épée autour de lui et en éprouva le tranchant de son doigt ganté. L'arme était particulièrement affûtée. Il n'était pas de ceux qui ... prenaient ce risque. Dans un geyser d'eau, de roches et de rage, la bête émergea de la caverne. Les deux hommes eurent un pas de recul en l'observant peiner en dépit de sa grande stature. Le Patrouilleur jura tout bas, yeux dans les yeux.

- J'ai failli crever la dernière fois ... Cette fois, c'est toi qui fais l'appât. murmura-t-il, au souvenir douloureux de la créature qui avait failli le tuer par deux fois avant qu'il ne soit en mesure de le défaire avec l'aide d'Artémis.

Il devait de profondes sailles sur son torse au Fledermaüs et l'avait affronté par deux fois dans sa vie avant de le vaincre. Dix années avaient séparé les deux combats. Mais cette fois, ils n'étaient pas dans la Brume, cette fois, ils n'étaient pas surpris. Cette fois ... ils avait appris à combattre ensemble. S'ébrouant, le Manticore secoua l'une de ses ailes amochées et exécuta un bond qui le propulsa en hauteur. Sa queue de scorpidé les menaça de là. Les deux hommes se regardèrent et se séparèrent pour courir, portés par l'adrénaline, au combat. Ryker soufflait à petite goulée pour chasser la douleur jusqu'à ce qu'elle disparaisse. Il ne pouvait s'empêcher de sentir ses pas engoncé dans la gangue de sa fatigue. Mais la bête aussi semblait diminuée. Il hurla pour attirer l'attention de la créature et sa queue colossale fendit l'air. Il eut le réflexe de rouler à terre pour voir sa position précédente être maculée d'un venin corrosif qui eut tôt fait de perforer la terre de centaines de trous.

- Sale fille de strigoï ... murmura-t-il en reprenant sa course tandis qu'Artémis se mettait en position.

Le Patrouilleur porta sa main à sa ceinture et hésita un instant lorsque l'attention de la créature se détourna de lui. Il n'aurait pas beaucoup d'essais et cet usage là le laisserait exsangue. Il secoua la tête et entreprit plutôt de gravir les gravats chancelants à cause de l'eau qui se déversait. Artémis l'attirerait en contrebas : il lui ferait confiance. Il rengaina son épée dans la bocle de son dos, oublia là son sac à dos dont il se débarassa comme d'un vieil encombrant. Il se débarassa aussi de sa cape et bondit sur un premier rocher. Il joua d'équilibre pour passer sur le suivant et en quelques secondes parvint à prendre plusieurs mètres de hauteur tandis que le loup blanc attirait l'attention de la créature. Il parvint à prendre suffisamment de hauteur pour arriver à son surplomb. Il regarda en bas. Recula. Observa la bête, s'approcha. Recula. Une fois, deux fois. Et puis merde.

- Artémiiiiiiis ! hurla-t-il, ce qui eut pour effet de faire lever la tête à la créature.

La queue de la Manticore décrivit un arc de cercle et frappa Ryker d'un geste négligent. Elle répandit du poison aux alentours, creusa la roche de son fiel mais l'image lumineuse du Patrouilleur fut à peine troublée par le passage matériel de la queue de la bête qui se retrouva prise au dépourvu lorsque sa lame se planta à la base de sa queue de scorpion. Elle hurla de douleur, leva tête. Encore plus qu'elle ne l'avait fait en percevant le Patrouilleur. Jouant entre deux plaques de chitine, Ryker enfonça son arme. Il appuya de toutes ses forces, conscient que la langueur s'emparait à nouveau de ses muscles. La pointe de l'épée rencontra de la résistance puis ... plus rien. Elle s'enfonça avec un bruit de succion écoeurant et vint se glisser entre deux vertèbres. Juste avant le bassin. Les pattes de la Manticore flanchèrent une fois. Deux fois. Elle glissa, hurla. Battit des ailes pour chasser la douleur qui lui matraquait l'arrière train. Mais le moustique restait accroché, serrait la poigne de son arme de ses ultimes forces, galvanisé par son instinct de survie. Il fit jouer la lame dans la blessure jusqu'à ce que les pattes ne s'affaissent définitivement et qu'il fut hors de danger d'un nouvelle attaque de dard. Ses doigts gourds menaçaient de lâcher à tout moment ... pourvu que la bête n'ait pas l'idée de s'envoler maintenant.

La chose ressemblait à un croisement entre un lion, un aig et un serpent. Il avait tout misé sur le fait qu'elle tienne plus du vertébré que du scorpidé. Pari gagnant. Cependant, lui enfoncer son arme dans l'arrière train ne réglait pas le soucis des griffes, des crocs ... et de sa haine viscérale envers toute créature vivante.
Mer 23 Oct - 12:48
Le vagabond n’enviait pas du tout son ami dans sa partie de rodéo avec le batard croisé de plusieurs espèces. Artémis avait souri quand Ryker insista pour ne pas jouer le rôle d’appât. Je ne peux pas le lui reprocher vu le sacrifice rendu la dernière fois, se moqua-t-il intérieur. Le rôle inverse ne semblait pas lui convenir pour autant. Le Manticore souffrait, hurlait de rage et de douleurs, gesticulait dans tous les sens et désirait toujours détruire ses deux proies. Pour autant, Loup Blanc sembla le défier en duel et cela rendit la chimère dans état de transe. Le vagabond se plongea dans une concentration intense. L’erreur n’était pas possible.

Respire. Concentre-toi. Rate une manœuvre et tu es mort. Repense à tes entraînements. Tant d’heures passées face à un mannequin., songea-t-il en coordonnant sa respiration. Le Manticore, complètement enragé, se jetait sur lui pour l’engloutir d’un seul coup. Il pourrait ensuite s’occuper du moustique se trouvant actuellement sur son arrière-train. Mais Artémis n’avait pas l’intention de se laisser mourir sans ne rien faire. Quitte à mourir, il préférait que cela n’arrivât après un dernier sacrifice pour permettre à son ami d’achever la bête. Le cristal de barrière énergétique dans une main, la seconde étendue face à sa cible, une onde de choc, toute légère, repoussa la chimère qui fut surprise par l’attaque.

Le vagabond désactiva aussitôt le pouvoir de son cristal. Mais… ce n’était pas terminé. « Ce sera à toi de finir le boulot, l’ami. », lança-t-il non sans un sourire. Le Manticore allait charger de nouveau. L’homme aux cheveux d’albâtre, à bout de force, effleura son cristal de magnétisme. La main droite toujours tendue en direction de sa cible, il déploya un rayon électromagnétique qui le frappa de plein fouet. La suite, le Portebrume ne put la voir. Il espéra que le Manticore fut au moins partiellement paralysé. Frappant avec le peu d’énergie qui lui restait, il ne put frapper comme il le souhaitait. Une quinte de toux sanglante, la vue trouble, le vagabond s’écroula lourdement, inconscient. Du sang s’écoulait légèrement de son nez.

L’utilisation accrue des cristaux peut-être engendrer de lourds effets secondaires, se rappela-t-il avant de rejoindre les bras de Morphée. Désormais, la suite t’appartient, patrouilleur.
Jeu 24 Oct - 13:40
Secouée d’arcs électriques, la créature s’effondra à terre. Déjà blessée au niveau de sa queue, elle fut prise de soubresauts qui firent chuter Ryker qui roula à terre. Elle s’était défoulée sur les protections d’Artémis qui avait encaissé le lourd de la charge. Le Patrouilleur se retrouva dos sur le sol, sous les cris de la créature. Il roula sur le ventre, se releva. Son épée était toujours plantée dans le dos de la bête, inaccessible. Il chercha Artémis du regard mais constata avec effroi qu’il était à portée de gueule du Manticore et que sa main chancelait. Il le vit poser un poing à terre puis basculer tête la première. Vidé de toute énergie. Ryker pesta, lutta pour se relever et contre la langueur qui le prenait. Il sentait chacun de ses os parcouru par l’usure des cristaux, par les secousses de la créature. Il avait tant enserré son arme qu’il sentait ses doigts gourds. Il chercha le long de sa ceinture, crocheta ses phalanges maladroites contre le pommeau de sa dague. Le Patrouilleur se redressa.

- Artémis ! Debout, c’est pas fini ! l’appela-t-il, sans effet. Artémis !

La créature gigotait, ses yeux roulaient dans leur orbite. Sa mâchoire claquait dans le vide, comme s’il était en quête d’air. Ryker s’écorcha les genoux, trébucha. Ses paupières étaient lourdes. Il grimaça, chercha ses côtes pour appuyer là où la douleur failli le faire chanceler. Il piailla mais l’effet fut efficace. Il fit un pas. Les serres de la créature s’agitaient. Elle reprenait peu à peu la maîtrise de ses membres. Couchée sur le dos, paralysée à partir du bassin … mais incapacitée par Artémis. Son flanc était ouvert. Il se soulevait avec difficulté, parcouru par des décharges de douleur et une paralysie temporaire. Il s’avança vers elle. C’était risqué. Très risqué. Le Patrouilleur s’effondra contre le flanc de la Manticore. L’odeur de cadavre rance le pris aux narines tandis qu’il crochetait le pelage de la créature pour se hisser à hauteur. Elle secoua, sa tête tenta de basculer mais sans succès. Elle le sentait, elle le percevait mais ne pouvait rien faire.

Ryker planta la dague, qui effleura à peine le cuir. Elle fit sauter une touffe de poils, lézarda la peau pour faire perler quelques gouttes de sang. Il avait ripé sur les côtes, adressé à peine une éraflure au cuir épais de la bête. Il pesta. Recommença. Un effet à peine différent. Elle s’agitait, de plus en plus. Il enserra ses doigts. Poinçonna la peau mais ne put aller plus loin. Le coude de la bête le frôla, ses serres vinrent creuser un sillon profond dans la roche. Elle comprenait le danger, et tentait de l’en déloger. Le Patrouilleur serra les dents, jura contre le mauvais sort qui avait doté la créature d’une peau plus solide que celle d’un golem. Sa lame finit par se planter à grand renfort d’essais … mais n’alla pas plus loin. Il essaya encore, hoqueta entre douleur et langueur.

- Merde … pas le choix putain … grogna-t-il les dents serrées.

Il laissa sa dague dans la blessure légère de la créature. S’empara de son cristal de force. Il l’attrapa entre ses doigts. Inspira. Allez. Un dernier effort. Un dernier pour leur salut. Foutus cristaux, foutue magie. Des années à les utiliser avec parcimonie, à craindre leurs effets. A voir les dangers qu’ils pouvaient causer. Bon sang. C’était ça ou … eux. Fuir était compromis, il n’y avait pas d’échappatoire. Le Patrouilleur porta le cristal dans la main emmêlée dans les poils. Posa la paume de l’autre sur la dague. Il inspira, une fois. Deux fois. Les pattes avant de la Manticore s’agitaient. De plus en plus fort. Ses dents de plus en plus proches. Une, deux …

Schrraaac …

Puis l’oubli.
Ven 25 Oct - 15:18

Le vagabond sembla perdu, désorienté. Tout était noir autour lui. Seule cette barrière énergétique, dans laquelle il se trouvait, produisait une certaine lumière. Mais elle ne semblait pas être de son fait, il ne réussit pas la désactiver. Il plaça la paume de ses mains sur la barrière sans pouvoir y ressentir le moindre espoir. Ce fut alors qu’il vit des flashs de Ryker en difficulté, en train d’être férocement dévoré par le Manticore. Sans plus attendre, Artémis dégaina son sihil et frappa le plus fort possible, obstinément, contre cette barrière lumineuse qui le gardait prisonnier. Loup Blanc était têtu et n’abandonnait jamais ses amis. Il continuait de frapper sans ne jamais céder au désespoir. Des efforts qui payaient progressivement. Une fissure, un trou, puis la sphère se brisa tel un verre.

***


Artémis se réveilla en sursaut, réveillé par le hurlement d’un Manticore en pleine agonie. En redressant sa tête, parcourue d’horribles migraines, il observa Ryker s’écrouler, la main complètement ensanglantée. Il put constater l’horrible blessure infligée au flanc de la bête. Une main humaine ne pouvait réaliser un tel carnage sur un peau aussi robuste. Du moins, pas sans l’utilisation d’un cristal de pouvoir et il comprenait pourquoi son camarade gisait au sol. Les migraines continuaient de tambouriner sans crâne, mais il devait poursuivre sa tâche coûte que coûte. Il roula sur son flanc, dégaina son sihil et s’en servit comme une canne pour prendre appui dessus et se relever. Ses muscles tremblaient face à cet effort trop intense. En plus des maux de tête, il dut maintenant gérer son équilibre.

La bête rugissait encore et toujours. Elle souffrait tellement qu’elle demandait probablement à ce qu’on l’achevât. Les deux mains sur le pommeau de sa lame, Artémis avança lentement et prudemment vers la gueule du Manticore. Ce dernier était complètement allongé, les pattes à plat. A l’arrière, le patrouilleur avait fait des dégâts considérables, empêchant complètement toute avancée. Il pourrait éventuellement avancer avec ses pattes, mais il était hélas contraint par la blessure importante sur son flanc. Il se vidait littéralement de son sang. Seule la mort l’attendait à la fin de cette journée. Perdu dans ses songes, partagés entre le devoir et la compassion, une violente quinte de toux ramener le vagabond à lui. Une légère trainée de sang s’échappa de sa bouche. Lui aussi était en bien mauvais état.

« Tu n’avais qu’une sale tâche, Ryker… Fait chier. », pesta-t-il sans grande méchanceté vers son ami inconscient.

Suffisamment proche de la tête de lion, Loup Blanc put réellement croiser le regard avec lui. Ce furent les yeux d’un enfant qui avait grandi trop vite. Un enfant qui, comme tout enfant, espérait vivre et s’amuser le plus longtemps possible. Certaines espèces étaient plus violentes que d’autres, il fallait s’en méfier. Mais le Manticore n’était pas mauvais pour autant. Une création de l’Homme qui rendait cette situation malheureuse. Artémis enrageait à l’idée de nettoyer les erreurs du Magistère. Les Tartares devraient être leur place. Mais Ryker et Artémis risquaient leur vie. Déjà qu’il ne les portait pas dans son cœur, l’homme aux cheveux d’albâtre se promit presque de se venger et de mettre un terme à ces foutues expérimentations.

« J’espère qu’une autre vie, bien meilleure que celle-ci, t’attend dans l’au-delà. », dit-il avec une profonde sincérité. Des animaux, des monstres, de la Brume elle-même, Artémis ne savait guère de quel côté se ranger. Chaque espèce présentait des aspects intéressants. Mais l’Homme semblait particulièrement destructeur. A tel point que l’avancée de la Brume dans tout Uhr ne serait finalement pas une si mauvaise chose. Sans joie et satisfaction particulière, le vagabond leva son sihil avec difficulté. Cet effort lui demanda beaucoup dans son état actuel. Il fit fi de la douleur qui martelait son crâne pour donner le coup de grâce. Avec toute la force qui lui restait, Loup Blanc abaissa sa lame dans un mouvement fluide et sans aucune hésitation. La nuque semblait être la partie la moins protégée de ce corps. Le sihil fendit la tête du Manticore qui se détacha nettement. Le Portebrume crut voir de l’apaisement dans les yeux du monstre.

Il s’écroula de nouveau, haletant. Cette fois-ci, il n’était guère très loin du Porte-Mort. Entre deux quintes de toux, Artémis pouffa faiblement. « Je crois que nous allons avoir besoin d’une bonne sieste avant de reprendre la route. », dit-il avant de sombrer dans les tréfonds de son esprit torturé. Plus tard, les deux hommes se réveilleraient, rapporteraient la tête et empocheraient leur prime. Mais – car il y a toujours un « mais » - les deux hommes devront prendre un certain pour complètement récupérer. Ce Manticore leur avait donné du fil à retordre. Ils avaient poussé leurs capacités physiques au maximum et étaient maintenant vidés. Reposons-nous un peu. Rien qu’un peu.