Lun 11 Mar - 2:15
Retrouvailles hasardeuses
Ft. Keshâ'rem Evangelisto
We are the echos
Aucune idée de comment se trouvait Opale. Les pensées de Maelström ne cessaient de voleter d'une personne à une autre, tentant de distinguer la moindre informations qui pourraient être utiles à Seraphah mais également à lui-même. Pour se donner une idée des dégâts. Pour se donner une idée de l'envergure de l'aventure qu'ils venaient de vivre. Malgré les autres personnes de haut rang qui se trouvait au-dessus des airs avec eux, il n'y avait rien d'intéressant. Alors son esprit continuait de vagabonder. Retournant sur toi. Keshrä'em. Étais-tu de retour à Epistopoli? Ils auraient du être là avec toi. Mais il avait beau le mentionner à l'élémentaire ce dernier ne cessait de lui rappeler que le sort en avait voulu ainsi. Trop facile. Pourtant il n'avait aucun autre contre-argument à soumettre. Sa place était auprès de Seraphah quand il s'agissait de missions. Mais que toi tu avais du partir sans eux...
Le voyage était particulièrement long. Seraphah avait fait parvenir une missive au Marquis pour qu'on ne se mette pas à sa recherche. Toutefois, en tant que diplomate, il avait hâte d'aller au conseil et de voir les informations qui avaient pu être récoltées. Dans ce genre de moments, leurs escapades pour la connaissance aux pyramides étaient vite occultées, bien qu'il avait déjà en tête une autre destination auprès de l'arbre Dieu, afin qu'urh tout entier ne se retrouve pas sous la Brume.
La situation était ainsi particulièrement inquiétante, mais il ne pouvait sciemment le montrer. Quand le monde commençait à changer, la majorité du monde ne voulait pas voir la réalité en face. C'était déjà inconcevable qu'Opale possédait désormais une place qui ressemblait plus à un trou qu'à ce qu'elle avait été jadis, pour envisager qu'elle puisse se faire grignoter par la Brume, ou vandaliser à nouveau.
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Quand ils arrivèrent au Marquis, ils s'empressèrent tous deux, auprès du Majordome de s'enquérir de Kesha. Le soulagement ressenti du fait qu'il soit là, fut rapidement éclipsé par l'attitude qu'il avait adopté: un hermite silencieux au fond de son lit...Seraphah regarda alors Maelström: «Tu me pardonneras auprès de lui...Je vais te laisser lui parler en premier lieu. Je vais de mon côté obtenir information sur la situation plus globale suite à tout ce qu'il vient de se produire...Et je suis certain que des affaires m'attendent.» Le Porte-brume acquiesça silencieusement. Après tout, il était certain que Seraphah doive prendre soin des affaires étrangères comme des siennes. Mais il ne s'était pas attendu à un tableau de son protégé aussi dramatique. À dire vrai, il aurait cru le voir débarquer de l'ascenseur pour les accueillir.
Chaleur. L'eau coulait sur son corps éreinté de cette expédition imprévue. Ses yeux se fermaient tandis qu'une main se trouvait sur le carrelage, son visage tourné vers le bas. Il prenait soin de se détendre, de respirer...Il ne savait pas trop où il en était envers celui qui était en peu de temps, devenu un rayon braisé dans son quotidien. Il n'y avait pas de promesses entre eux, et il savait qu'il avait plutôt intérêt à ne pas s'attacher. Kesha lui ayant déjà prouvé qu'il était homme d'un instant, même si ces instants pouvaient se renouveler. Mais loin d'être immature, il savait que sa place était auprès de lui en cet instant. Même s'il ne connaissait pas encore la teneur des événements que le jeune homme avait du vivre, son comportement lui laissait présager quelque chose de sombre.
Il revêtit une tenue qui accentuait sa noblesse de coeur. Son élégance n'étant plus à prouver depuis longtemps. Il y avait quelque chose de plus cérémonial sur ses traits, ce qui pouvait le rendre légèrement plus âgé qu'il ne l'était. Cela dépendait toujours des circonstances, son physique semblant dégager quelque chose de différent en fonction de ses humeurs. Sans parler de sa barbe taillée qui lui donnait une certaine prestance.
Ainsi vêtu, il poussa un soupir et parti de ses appartements vers le tien. Il toqua à ta porte. Une première. Puis une seconde fois. Le silence semblait ici son seul ami, alors il décida d'actionner la poignée et de pénétrer sur les lieux. L'ambiance était tamisée, presque sombre en ce début de soirée. Il percevait ta silhouette, dans le lit...endormi? Il n'en avait pas l'impression. Le reste de la pièce avait su garder contenance. Sans aucun doute qu'on avait tenu à faire le ménage même si tu te trouvais dans la pièce.
«Kesha'rem.» Sa voix était de velours. Posée. Contenue. Pourtant, il en était tout autre à l'intérieur de lui. C'est ainsi que son pas fut un peu plus pressé qu'imaginé afin de venir s'installer sur le lit et de saisir tes yeux des siens. «Je suis désolé...»commença-t-il. Ses paupières cachèrent la vivacité du vert de ses yeux, ces derniers se perdant sur les draps. «Désolé de ne pas avoir été là pour toi.» Désarmant. Son regard qui vint chercher à nouveau le tien pour venir se loger en plein cœur. Il sentait. Que ça n'allait pas. Que c'était grave. Il était autant désarmé que percutant à cet instant, uniquement pendu à tes lèvres tandis que tes battements de coeur le torturaient de leur brouhaha.
Dernière édition par Seraphah Von Arendt le Ven 2 Aoû - 23:56, édité 2 fois
Lun 11 Mar - 6:20
Retrouvailles hasardeuses
Ft. Seraphah Von Arendt / Maëlstrom
Les jours et les nuits n’étaient qu’un continuum sans fin qui s’étalait devant lui. Depuis Yfe cette chose rôdait en lui, se repaissait de sa tristesse, de ses doutes et de sa solitude. L’homme Gris avait fortement contribué à son émergence et à sa croissance en le jetant en pâture au miroir et en le droguant avec des psychédéliques. Grâce à la bonté d’une médecin de l’Alliance qui avait plaidé contre ces mauvais traitements, il était sorti à temps d’Opale. Chaque instant perdu le voyait s’éroder un peu plus.
Cela ne se voyait pas ici, où l’on ne voyait de son état qu’un jeune homme affalé à trop dormir et trop peu manger. Mais en bas, dans le monde du rêve, Keshâ lui cédait du terrain, pied par pied. Bien qu’il ressente sa poussée jusque dans l’éveil, il redoutait chaque phase de sommeil comme une confrontation décisive vers sa réclusion aux franges de l’inconscient.
A force de s’empêcher de dormir, il ne savait d’ailleurs plus trop ce qui relevait du réel ou de l’imaginaire. Il chantait en permanence ce refrain qui tissait les fils de la prison aquatique de sa nebula au fond de lui, ne sachant plus trop s’il les fredonnait vraiment ou en imprimait une image mentale se répercutant telle une onde dans son esprit. Il s’y consacrait si pleinement, qu'il devenait lui-même cette onde d'inertie pour la contenir et gagner encore un peu de temps.
Il n’entendit pas frapper à la porte, hébété et transi. Les domestiques défilaient depuis des jours comme des fantômes gardiens de son chevet déclinant. Ses yeux troubles hésitèrent en cherchant l’origine du son dans la pièce. En se posant sur Maëlstrom, ils finirent par le reconnaître. Son visage se ranima d’un coup en un vif mouvement de recul. Après lui avoir voilé ses yeux, la nébula lui avait volé sa voix. Elle se faisait passer pour qui elle souhaitait sans ses songes, lui laissant penser qu’il avait à nouveau succombé à la fatigue sans s’en rendre compte. Qu’allait-t-elle lui prendre cette-fois ?
Son visage se déroba et se tourna vers la table basse, où se trouvait une carafe d’eau presque vide. La soif le tenaillait tellement. Se pouvait-il qu’il ressente à ce point la soif s’il était vraiment endormi ? La présence chaude de Maëlstrom près de lui était une vision qu’il n’espérait plus. On l’avait oublié. Tous l’oublieraient. Sauf elle qui tendait ses bras innombrables vers lui.
Ses doigts bandés effleurèrent la main de l’homme. Elle semblait dense et tiède. C’est à se moment là que son expression se déformerait normalement pour devenir caustique si la nébula voulait se jouer de lui par une autre de ses réflexions.
-« Maëlstrom ? C’est toi. » dit-il d’une voix confuse.
Aussitôt ses yeux débordèrent de larmes et il laissa sa tête tomber contre son torse.
-« Je suis tellement content que tu ailles bien. »
Il voulut ajouter quelque chose mais son propos était incohérent, noyé dans un sanglot qu’il ne pouvait réprimer plus longtemps. Depuis la mort de Déméphor, il n’avait pas versé une seule larme. Mais son corps tout entier semblait empli de larmes prêtes à le submerger. Tout en donnant l’impression d’être effondré contre lui, son bras le serrait très fort dans son dos jusqu’à froisser son habit.
L’holographe qu’il avait rapporté d’Yfe reposait telle une sphère sur un présentoir à côté du crâne inanimé sur la table de chevet.
Mar 12 Mar - 16:56
Retrouvailles hasardeuses
Ft. Keshâ'rem Evangelisto
We are the echos
Pas d'échos à ses excuses. Seulement une voix éraillée par le manque d'eau et ce geste mû par ce qu'il percevait comme du désespoir. Il te laissa l'étreindre, choqué de contenir de ses bras tes sanglots qui se voulaient plus virulents que tes paroles. Il se questionnait à cet instant. Sa main se portant sur ta nuque, sa chaleur t'enveloppant tandis que son autre main se porta au bas de ton dos. Sécurité. Il voulait que tu te sentes en sécurité avec lui. Il baissa le visage un instant, respirant ton odeur, se rendant compte par les sens plus que par la conscience que ce qu'il s'était produit à Yfe avait du être particulièrement éprouvant pour ne pas dire plus. Il avait tant de question, ton bandage ne lui ayant pas échappé...
C'est ainsi qu'il te murmura à l'oreille: «Je suis là maintenant, d'accord.» Oui, tu t'étais inquiété pour lui, sans doute pour Seraphah également...Mais ton attitude n'avait pas rapport avec ça. Ses yeux se mirent à regarder autour de vous tandis qu'il continuait de t'étreindre. Il aperçut alors le crâne avec à ses côtés un holographe. Curieux, il n'était pas l'élémentaire qui se serait précipité. Malgré ses airs parfois énigmatiques et même durs, il possédait une forte empathie. Doucement, sa main délaissa ta nuque pour venir souligner l'angle de ta mâchoire, venant se saisir de ton menton afin de redresser en douceur ton visage, pour que vos regards puissent plonger l'un dans l'autre.
«Keshâ...J'ai besoin que tu me dises tout ce qu'il t'est arrivé...Je ne parle pas de la mission. Je parle de ce que toi tu as ressenti, tu as vécu, d'accord?» Son ton était presque celui d'un commandant qui demandait rapport à son soldat. Mais il savait que les événements traumatiques n'étaient pas ceux qu'on abordait, mais ceux qu'on minimisait. Il espérait que sa demande était suffisamment claire. Quand il perçut un changement dans ton regard, même minime, il se dégagea de ta prise afin de se lever et d'aller servir un grand verre d'eau. «Qu'est-il arrivé à ta main? Pourquoi ce bandage?» Il revint vers toi, te tendit le verre, et se rassit. Il n'était pas disposé à se laisser manger par l'émotion. Il voulait t'offrir tout l'espace dont tu pourrais avoir besoin.
À cet instant, le constat des marques sur ton corps, l'énervement qui avait été le sien, ainsi que la dureté de ses paroles, étaient mis de côté. Il restait à ton écoute. Toutefois, après t'avoir débarrassé de ton verre une fois celui-ci bu, il posa une main sur la tienne, afin que tu ressentes que tu n'étais plus tout seul. C'était fini. Il était de retour.
Dernière édition par Seraphah Von Arendt le Ven 2 Aoû - 23:57, édité 2 fois
Mar 12 Mar - 20:58
Retrouvailles hasardeuses
Ft. Seraphah Von Arendt / Maëlstrom
Quand il envisageait l’aventure, Keshâ’rem y avait toujours vu un concept d’évasion associée à des expériences colorées. Lui qui n’avait jamais eu de foyer n’envisageait pas le sentiment de coupure et l’incertitude du retour vers les siens. Durant son périple dans le ciel d’Urh et à travers les épreuves d’Yfe et Opale, il avait eu tout le loisir de s’inquiéter du sort de Seraphah et de Maëlstrom et de réaliser à quel point son monde s’effritait sans eux.
Mais il était là maintenant. La main de Maëlstrom posée sur sa nuque le contenait, ici, dans cette chambre. Pris d’un emballement irrépressible de sa respiration, les larmes n’arrêtaient pas de couler et il se noyait dans son odeur, comme s’il voulait respirer à travers sa peau, tant son contact physique lui était indispensable.
Dans toute la tension et les défis endurés, jamais il ne s’était autorisé à craquer. Il ne pouvait vraiment s’effondrer que maintenant qu’il était dans les bras de l’un des seuls qui ne prendrait pas avantage de sa situation. Ce n’est qu’une fois gorgé de sa chaleur et de son calme que son souffle finit par arriver à une certaine accalmie, sous la main de Maëlstrom qui relevait son menton vers lui.
Même s’il était épuisé, ses yeux humides ne se détournaient pas de ceux de Maëlstrom. Des nombreuses heures qu’il avait passé à répondre de ce qui s’était passé à Yfe, c’est la première fois qu’on lui demandait réellement comment il se sentait. Lui-même ne le savait pas trop, quand bien même il était évident que son état allait de mal en pis.
Quand Maëlström se leva, il sentit un grand froid l’envahir, comme si l’aura protectrice du balafré était la seule l’épargnant de la poussé conquérante de sa nébula à travers ses veines glacées. Ses souvenirs si prenants lui paraissaient décousus, tout comme pouvait l’être la chronologie d’un songe.
-« Nous avons… nous avons tué un dieu. Demephor. » se souvint-il gravement… " les gens ont été gentils. J’en étais étonné. Sauf Jeremiah. C’est un horrible Opalin envoyé par le magistère…. »
A mesure qu’il réfléchissait, il perdait un peu de vue la question centrale de Maëlstrom visant à connaître son ressenti. « Il y a beaucoup de choses que je dois vous dire rapidement. C’est grave, je ne sais pas si Seraphah est au courant de tout. »
Le jeune homme avait englouti son verre d’eau en s’efforçant de marquer une pause entre les gorgées. Maëlstrom menait la conversation vers son bandage, ravivant sa douleur par son attention.
-« Ce sont juste de vilaines ecchymoses. Nous marchions dans les couloirs de la tour d’Yfe, à Dainsbourg. Nous trouvions souvent les corps des soldats du Régent dans un état déchiqueté. Puis, les Jiangshi qui les avaient tués nous ont trouvés. Ils étaient si nombreux… si nombreux qu’ils roulaient comme une vague à travers le couloir depuis le plafond à gauche et à droite. C’est l’une d’entre elle qui m’a blessé en serrant mon poignet. Mais on s’en est tous tirés. »
Aux rencontres anticipées avec sa nébula, s’ajoutaient les sombres visions des créatures rencontrés entre le labyrinthe et la tour. Pendant qu’il parlait, le souvenir de la confrontation s’aviva. La Jiangshi aux cheveux gras, partiellement chauve, âgée, le scrutait de prêt de son regard torve. Sa main repoussait son front hargneux alors qu’elle claquait des dents pour essayer de le mordre, quand son autre main attrapait son avant-bras pour essayer d’arracher ses protections de laine et de cuir.
Instinctivement, cette image qui imprimait son esprit et sa rétine se projeta dans le cristal de télépathie et s’imposa à celui de Maëlstrom en une photo saisissante, le son des râles de l’armée des morts-vivant en plus.
Jeu 14 Mar - 2:23
Retrouvailles hasardeuses
Ft. Keshâ'rem Evangelisto
We are the echos
Confiance. Un sentiment qui s'était tissé tellement vite entre vous. Un sentiment qui allait dans les deux sens, au-delà des malentendus des névroses de chacun. Parce que le passé laissait des traces indélébiles. Il suffisait de le regarder pour le noter. Est-ce qu'il aurait pu modifier son apparence? En avait-il seulement envie? Ses cicatrices lui rappelaient qu'il n'était rien dans la Brume et pour ceux qu'il avait cru être ses frères. La jeunesse possédait ses écueils. Mais pas quand il te regardait à cet instant. Que du contraire. Il trouvait que ta capacité à t'abandonner contre lui était louable dans un monde qui rejetait la moindre larme. Le sort fut tout de même rompu quand il se leva. Vous aurez tout loisir de dormir ensemble comme autrefois dans le désert si tant est que tu accepterais de te laisser aller. Loin d'être dupe il notait les cernes sous tes yeux et le ton de ta voix était bien trop parcellaire pour croire que tu allais bien.
Tes premières paroles étaient intrigantes. Tuer un dieu? Rien que ça? Il retint le nom. Il retenait tout ce que tu disais parce qu'il était expert en cela. Il remarqua comme tu voulais prévenir Seraphah d'un danger...Le regard d'un vert vif du Porte-Brume pouvait paraître aussi tranchant qu'une lame en cet instant. Tu n'avais pas répondu à sa question première. C'était remarquable que de vouloir faire ton rapport comme un soldat...mais tu n'en étais pas un. Cette aventure solo était venue bien trop tôt, il n'en démordrait pas.
À l'énonciation des Jiangshis, il commença à se faire une meilleure idée des horreurs que tu avais du voir. Il était en partie soulagé toutefois d'apprendre que ton bandage était dû à un serrement de poignet plutôt qu'à une attaque directe. Mais il y avait ce qu'il pouvait voir et ce qui imprégnait l'âme plus que le corps. Cette parcelle lui restait encore inconnue tandis qu'il recevait l'image que tu venais de lui projeter sans doute malgré toi. Le regard de Maelström vacilla un instant, juste le temps des quelques secondes où l'image s'était imposé à son esprit ainsi que les sons des morts.
Quand il revint à cet instant, il se saisit de ton visage de ses deux mains, comme si ces dernières étaient une coupelle et toi le plus précieux des liquides. «Actuellement Seraphah apprend énormément de choses sur la situation, et je ne doute pas que tu as des choses très importantes à nous soumettre...» Il laissa un silence vous envelopper. Te rendais-tu seulement compte qu'il te voyait pleinement dans toute la fébrilité de ton être? «Mais il n'y a rien, absolument rien, qui ne peut attendre encore une nuit tu m'entends?» Il prononça soigneusement ces mots afin que tu les entendes dans leur profondeur. «Cela se voit que tu n'as pas dormi depuis un certain temps...au point que tu es incapable de me dire comment tu te sens.» Injuste. Il se doutait que tu ne voulais surtout pas approché cet état, alors mieux valait parler du factuel, aussi douloureux que ce dernier pouvait l'être.
Une main resta sur ta joue, tandis que la seconde s'empara avec douceur de ton poignet bandé. «J'aimerais que tu t'allonges avec moi.» Le geste fit suite à la parole immédiatement. Il commença à s'allonger, une main venant se porter à ta taille, t'invitant avec une légère pression à faire de même, tout ça sans te quitter des yeux. Était-ce ses années d'expériences avec des hommes traumatisés au sein de leurs expéditions? Il faisait preuve d'un immense calme et d'une certaine perspicacité...À dire vrai, il avait appris à te connaître au fil des mois bien plus que son attitude ne pouvait le laisser penser.
Une fois que tu fus allongé face à lui, il attrapa le drap afin de vous en revêtir. Son regard toujours ancré dans le tien, il vint caresser tes cheveux avant d'ajouter: «J'aimerais que tu respires au diapason de ma propre respiration....et surtout que tu acceptes de lâcher...Seraphah et moi sommes là désormais, et nous ne comptons plus te quitter de si tôt. Tu auras tout loisir à ton réveil de nous raconter en détails ton expédition et tes trouvailles...Tout ce que je veux moi, c'est que tu me dises comment tu te sens maintenant.» Cela pouvait apparaitre comme simplet, mais il avait vraiment à coeur de savoir si tu te sentais bien avec lui, et surtout de sentir un relâchement dans ton corps, en vue d'une nuit qu'il souhaitait régénératrice.
Dernière édition par Seraphah Von Arendt le Ven 2 Aoû - 23:57, édité 2 fois
Mar 19 Mar - 16:45
Retrouvailles hasardeuses
Ft. Seraphah Von Arendt / Maëlstrom
Les mains de Maëlstrom encadraient son visage. Elles étaient douces, car c’était un homme soigneux de lui-même, mais un peu caleuses aussi, car il était aussi un combattant coriace. Ce qu’il disait était presque secondaire tant il avait attendu ce moment où il pourrait enfin cesser de lutter.
Il acquiesça. Rien n’était si urgent. Car le monde était sans doute déjà perdu. Quoiqu’il fasse. Quoique l’humanité puisse faire. Le premier domino avait amorcé une réaction en chaîne depuis longtemps. Elle était inarrêtable. Tout serait emporté sur son passage. Même si la surface restait lisse, l’orage grondait en profondeur, tout comme sa nébula enrageait dans ses fondations, s’évertuant à les saper.
Il lui était douloureux d’entendre Maëlstrom énoncer le constat de son état. Mais quelle douceur de le sentir auprès de lui, sans éclair dans le regard, comme il prenait soin de lui, comme avant. Son regard humide dit oui. Quand son corps gourd essaya d’obéir à la pression de la main de Maëlstrom, il sentit combien le mouvement ne lui était plus naturel, comme s’il était piégé dans des phases irrégulières.
Le corps de Keshâ’rem était lourd, si lourd contre le matelas. C’est comme s’il était tombé du ciel et s’était échoué là, pour ne plus jamais se relever. Ses yeux las papillonnaient encore à la recherche du vert émeraude de son amant. Sa poitrine se soulevait périodiquement, mais son souffle était aussi faible que celui d’un nourrisson.
Le drap les recouvrit d’un monde ouaté où tout était diffus, sans parvenir à chasser ce froid gerçant dans ses veines. Si ce n’était la présence si enveloppante, si complète, du corps de Maëlstrom face à lui. A défaut de vaincre le blizzard en lui, il pouvait l’entourer et le recouvrir jusqu’à l’oubli. Ses mots le touchaient énormément. Il aurait voulu dire quelque chose, mais il se sentait débile, comme incapacité. Tout ce qu’il parvint à faire est de s’approcher maigrement de lui pour être dans son étreinte, respirant dans sa poitrine, contre son ventre, à son diapason. Ses forces le quittaient en même temps qu’il s’ouvrait et se laissait tomber toujours plus profondément, avec le sentiment de peser une tonne ; et presque de traverser l’édredon, pour s’enfoncer dans le sol et tomber à travers les étages du Marquis.
-« J’ai mal. Ca ne va pas, Maël. »
Ses doigts firent l’effort de se tendre vers le poignet de l’Aramilan, où ses mains étaient enchevêtrées, afin de le caresser à cet endroit où la peau était si fine et si claire.
De cet aveu sans fioritures, Keshâ’rem glissa dans un sommeil de pierre sans même s’en rendre compte. Il se sentait à l’abri avec Maëlstrom et oublia totalement les fléaux de l’existence. Son corps était immobile, mais habité par une tension palpable qui s’évanouit alors qu’il devenait inerte. Bien entendu, le sommeil fut dépourvu de rêves. Et c’est tant mieux, car la nébula n’eut ainsi pas l’occasion de le confronter une nouvelle fois.
Il se réveilla en proie à une forme d’amnésie stagnante. Était-ce le jour ? Ou bien la nuit ? Où était-il ? Il était Keshâ. Courbaturé, mais bien en vie et lui-même, un jour de plus. Le corps tiède de Maëlstrom l’enveloppait toujours de ses bras et il prit le temps de profiter de ce moment de communion où le protebrume semblait l’avoir pardonné. La fatigue était toujours écrasante, mais son esprit profitait d’une certaine clarté et de forces retrouvées.
Le temps qu’il se sauve très délicatement du lit sur la pointe des pieds pour faire un bon brin de toilette, car il avait une tête à faire peur et ne devait plus sentir très bon, il retrouva Maëlstrom bien réveillé dans sa chambre. Il avait quitté le lit et l’invitait à le rejoindre dans le salon.
Son regard lavande s’attarda un instant sur le crâne en se disant qu’il était trop tard pour le cacher sous une taie d’oreiller. Après avoir pris un verre d’eau et des raisins dans la corbeille à fruits du salon, il prit la parole le premier, depuis sa banquette.
-« Il est arrivé plein de choses en peu de temps. Mais il m’est arrivé quelque chose de terrible en particulier. Je sais que je dois en parler le plus vite possible. Mais c’est dur. J’ai du mal à le faire. »
Son teint était toujours un peu cireux, mais ses yeux avaient l’air plus grands et présents. Qui plus est, le fait de s’être vêtu correctement lui donnait l’impression de redevenir un peu lui-même, ou en tout cas de ressentir un peu plus la dignité d’un être humain.
Son menton pointa vers le bas, sur ses genoux soigneusement repliés, quand sa main finit par se placer sur l'avant bras de Maëlstrom à côté de lui.
-"Est-ce que tu m'en veux toujours? ... j'ai besoin de le savoir."
Les morsures du strigoi étaient à peine cicatrisées. Celle à sa cuisse n'était d'ailleurs pas très jolie. Et Maëlstrom n'avait aperçu que celle à son cou. Cette passade rocambolesque de leur voyage avait laissé des traces dans leur relation, qui n'avait d'ailleurs jamais été clairement définie. Alors qu'il ressentait ce parasite grouiller dans son âme, il voulait savoir combien de salissure son ami voyait déjà en lui. Peut-être pour savoir s'il pourrait supporter son regard en s'éloignant encore davantage de la pureté.
Il acquiesça. Rien n’était si urgent. Car le monde était sans doute déjà perdu. Quoiqu’il fasse. Quoique l’humanité puisse faire. Le premier domino avait amorcé une réaction en chaîne depuis longtemps. Elle était inarrêtable. Tout serait emporté sur son passage. Même si la surface restait lisse, l’orage grondait en profondeur, tout comme sa nébula enrageait dans ses fondations, s’évertuant à les saper.
Il lui était douloureux d’entendre Maëlstrom énoncer le constat de son état. Mais quelle douceur de le sentir auprès de lui, sans éclair dans le regard, comme il prenait soin de lui, comme avant. Son regard humide dit oui. Quand son corps gourd essaya d’obéir à la pression de la main de Maëlstrom, il sentit combien le mouvement ne lui était plus naturel, comme s’il était piégé dans des phases irrégulières.
Le corps de Keshâ’rem était lourd, si lourd contre le matelas. C’est comme s’il était tombé du ciel et s’était échoué là, pour ne plus jamais se relever. Ses yeux las papillonnaient encore à la recherche du vert émeraude de son amant. Sa poitrine se soulevait périodiquement, mais son souffle était aussi faible que celui d’un nourrisson.
Le drap les recouvrit d’un monde ouaté où tout était diffus, sans parvenir à chasser ce froid gerçant dans ses veines. Si ce n’était la présence si enveloppante, si complète, du corps de Maëlstrom face à lui. A défaut de vaincre le blizzard en lui, il pouvait l’entourer et le recouvrir jusqu’à l’oubli. Ses mots le touchaient énormément. Il aurait voulu dire quelque chose, mais il se sentait débile, comme incapacité. Tout ce qu’il parvint à faire est de s’approcher maigrement de lui pour être dans son étreinte, respirant dans sa poitrine, contre son ventre, à son diapason. Ses forces le quittaient en même temps qu’il s’ouvrait et se laissait tomber toujours plus profondément, avec le sentiment de peser une tonne ; et presque de traverser l’édredon, pour s’enfoncer dans le sol et tomber à travers les étages du Marquis.
-« J’ai mal. Ca ne va pas, Maël. »
Ses doigts firent l’effort de se tendre vers le poignet de l’Aramilan, où ses mains étaient enchevêtrées, afin de le caresser à cet endroit où la peau était si fine et si claire.
De cet aveu sans fioritures, Keshâ’rem glissa dans un sommeil de pierre sans même s’en rendre compte. Il se sentait à l’abri avec Maëlstrom et oublia totalement les fléaux de l’existence. Son corps était immobile, mais habité par une tension palpable qui s’évanouit alors qu’il devenait inerte. Bien entendu, le sommeil fut dépourvu de rêves. Et c’est tant mieux, car la nébula n’eut ainsi pas l’occasion de le confronter une nouvelle fois.
Il se réveilla en proie à une forme d’amnésie stagnante. Était-ce le jour ? Ou bien la nuit ? Où était-il ? Il était Keshâ. Courbaturé, mais bien en vie et lui-même, un jour de plus. Le corps tiède de Maëlstrom l’enveloppait toujours de ses bras et il prit le temps de profiter de ce moment de communion où le protebrume semblait l’avoir pardonné. La fatigue était toujours écrasante, mais son esprit profitait d’une certaine clarté et de forces retrouvées.
Le temps qu’il se sauve très délicatement du lit sur la pointe des pieds pour faire un bon brin de toilette, car il avait une tête à faire peur et ne devait plus sentir très bon, il retrouva Maëlstrom bien réveillé dans sa chambre. Il avait quitté le lit et l’invitait à le rejoindre dans le salon.
Son regard lavande s’attarda un instant sur le crâne en se disant qu’il était trop tard pour le cacher sous une taie d’oreiller. Après avoir pris un verre d’eau et des raisins dans la corbeille à fruits du salon, il prit la parole le premier, depuis sa banquette.
-« Il est arrivé plein de choses en peu de temps. Mais il m’est arrivé quelque chose de terrible en particulier. Je sais que je dois en parler le plus vite possible. Mais c’est dur. J’ai du mal à le faire. »
Son teint était toujours un peu cireux, mais ses yeux avaient l’air plus grands et présents. Qui plus est, le fait de s’être vêtu correctement lui donnait l’impression de redevenir un peu lui-même, ou en tout cas de ressentir un peu plus la dignité d’un être humain.
Son menton pointa vers le bas, sur ses genoux soigneusement repliés, quand sa main finit par se placer sur l'avant bras de Maëlstrom à côté de lui.
-"Est-ce que tu m'en veux toujours? ... j'ai besoin de le savoir."
Les morsures du strigoi étaient à peine cicatrisées. Celle à sa cuisse n'était d'ailleurs pas très jolie. Et Maëlstrom n'avait aperçu que celle à son cou. Cette passade rocambolesque de leur voyage avait laissé des traces dans leur relation, qui n'avait d'ailleurs jamais été clairement définie. Alors qu'il ressentait ce parasite grouiller dans son âme, il voulait savoir combien de salissure son ami voyait déjà en lui. Peut-être pour savoir s'il pourrait supporter son regard en s'éloignant encore davantage de la pureté.
Mar 19 Mar - 23:28
Retrouvailles hasardeuses
Ft. Keshâ'rem Evangelisto
Confirmation. Son regard se porta sur toi avec douceur. Comme l'était ta caresse dans le creux de son poignet. Insaisissable. Cet instant l'était. Perdu entre deux aventures. Maelström savait que Seraphah viendrait au rapport dès le lendemain. Parce que l'élémentaire était insaisissable et en même temps il était facile de deviner ses intérêts quand on le connaissait bien. Contrairement à toi. Il ne te connaissait pas tant que cela. Quelques mois n'étaient rien face à plusieurs années. Toutefois, cela allait au-delà de ça. Il y avait une intimité forte entre vous et en même temps vous aviez tous deux vos secrets. Alors il t'en avait voulu. Sans doute t'en voulait-il encore. D'avoir eu ce privilège de dormir avec lui si souvent, au point qu'il n'avait pu respecter ses propres règles. Il n'était pas fait pour une relation. Mais ce que vous avez créé était ce qui s'en rapprochait le plus pour lui. Il n'aimait pas ça. Pas vraiment.
Épuisement. Il se saisit de lui. Après tout, voyager pendant des jours prenait beaucoup d'énergie. Le Marquis étant suffisamment solide pour lui permettre de se laisser totalement aller. C'est ainsi que ses songes se firent silencieux. C'était toujours ainsi depuis sa nebula. Le silence. Qu'il avait cru de mort. Avant de le considérer comme régénérateur. C'est toujours dans ces moments-là qu'il apparaissait. Stature imposante, regard vif. À l'image qu'il aurait du être à quelques centimètres près. Il avait appris à l'aimer. Parce que dans les débuts il avait du lutter. Contre cet autre qui n'avait pas la langue dans sa poche. Et aujourd'hui, au sein des songes, ils voyageaient dans des endroits fabuleux, ils se parlaient par télépathie, respectant le silence...
Le bruit de l'eau dans la douche le ramena sur les berges de votre réalité. Son regard se plissa face à la lumière éclatante du jour. Le soleil se levait relativement tôt, il était presque étonné de ne pas avoir eu de Seraphah assis sur le lit à l'attendre. Sans trop tarder, il se leva, et alla se servir un verre d'eau. Au moins semblais-tu apte à reprendre forme humaine. Son regard traina à nouveau vers l'holographe et le crâne, sans pour autant aller les inspecter. Après avoir pris quelques raisons, il alla s'installer dans le salon, appelant au passage la réception pour commander un vrai repas. Cette journée ne serait certainement pas comme la soirée.
Quand tu fus installé à ton tour, il écouta attentivement tes premiers mots au-delà de ton regard qui captait bien vite l'attention. Ce regard se déroba tandis que c'est ta main qui se porta sur son avant-bras. Maelström n'exprima pas de nouvelles expressions tandis qu'il vint cueillir ton menton afin que tu le regardes dans les yeux. Ces derniers étaient si vifs, qu'au-delà de ce que tu avais du mal à avouer, ils étaient toujours très captivants. «Tout ce que tu as besoin de savoir c'est que peu importe ce que tu veux m'avouer, je ne te laisserais pas seul avec ça, d'accord?» Pas doué. Pour parler de ces histoires là. Il n'irait pas là. Malgré tout ce qu'il venait de se produire, et surtout cette boule dans son ventre en apprenant que tu n'étais plus toi-même, il ne pouvait se résoudre de s'avouer que tu pouvais compter un peu plus que d'autres personnes dans sa vie. Et c'était pour ça qu'il ne voulait pardonner. Pardonner à lui-même d'avoir cru que ce genre d'affaires pouvaient être pour lui.
Malgré ses mots, malgré ce que tu pourrais percevoir comme une non réponse, il laissa glisser sa main de ton menton, le long de ton bras, jusqu'à se loger dans ta main. Il était toujours très difficile de lire sur ses traits. Sauf quand ces derniers étaient particulièrement froids et impassibles...Là, tu sentais son attention sur toi et son soutien. Ce qui n'avait pas été le cas suite à l'épisode dans le désert. «Parle moi Nishrem».
Dernière édition par Seraphah Von Arendt le Ven 2 Aoû - 23:57, édité 1 fois
Mer 20 Mar - 1:08
Retrouvailles hasardeuses
Ft. Seraphah Von Arendt / Maëlstrom
En voyant Maëlstrom s’asseoir à côté de lui dans ce salon si familier, qu’il n’occupait pourtant que depuis quelques mois, il eut l’illusion de la normalité. L’aurore montait sur le ciel gris d’Epistopoli et, déjà, les honnêtes citoyens s’affairaient. Les dirigeables sillonnaient les cieux.
A être assis ici, c’était comme si l’arc d’Yfe était vraiment derrière lui. Il en était revenu. Mais, tout en fixant ce regard impénétrable que Maëlstrom posait sur lui, il se demandait encore s’il ne rêvait pas, si par extraordinaire, tous les derniers événements en rapport à l’Astronome, Demephor et même le magistère n’étaient pas du fait de sa pure imagination. Et si, en fin de compte, il se trouvait toujours là-bas, quelque part dans la Brume, sous la puissance des Sept Glaciers… dans le labyrinthe, à subir les tours du Liechi.
Sous la fluidité de son don de télépathie à présent vivifié, il exprima malgré lui la vision saisissante de cette longue silhouette amassant écorce, crâne et andouillers dans un cri angoissant. Une vision paradoxale tenant plus du cauchemar qui imprégnait les lieux, car lui-même ne l’avait jamais vu. C’était une vision que Jeremiah lui avait envoyé après son combat, qui se répercutait maintenant en écho lointain dans l’esprit de Maëlstrom.
Était-ce le nouveau chemin que trouvait son âme pour parler, alors que les mots lui devenaient aussi piquant ? Le toucher de leur peau ne faisait que faciliter la transmission de l’influx télépathique. Ces assauts fantomatiques ne parvenaient pas à ébranler l’ancienne Sentinelle. La fermeté de son regard n’avait pas vacillé.
-« D’accord. » Son mot renfermait toute sa confiance. Spinelle violet contre émeraude.
Maëlstrom avait le droit de lui en vouloir. Au moins, il ne l’avait pas enfoncé et lui était d’un réconfort inexprimable.
-« J’étais dans la tour d’Yfe. Avec tous les autres… »
Trois coups marqués frappèrent à la porte. Le service de chambre avait choisi ce moment pour faire entrer le petit-déjeuner demandé par Maëlstrom. Coupé dans son élan, Keshâ’rem affecta le silence de circonstance pour ne pas exposer toute son intériorité en spectacle au personnel de l’hôtel ; lequel saisit néanmoins l’intimité du moment et écourta la sarabande d’explications fleuries qui allaient habituellement avec la présentation des plats. La deuxième serveuse se fit plus indiscrète que la gouvernante, dévisageant Keshâ, qui était malgré lui devenu l’objet de rumeurs par son comportement étrange des derniers jours au sein du Marquis.
Quand la porte se referma sur la gouvernante, il tenta de reprendre. Mais le saut paraissait plus difficile, maintenant. Son ventre se gonfla d’une nouvelle inspiration, comme s’il tentait de remonter dans le prochain train pour sa déclaration.
-« Nous nous sommes battus contre un automate, enfin… l’Astronome… et… j’ai été attaqué par la brume... J’ai une nébula. »
C’était tout ce qu’il y avait à dire. Plus il aurait donné de détails, plus cela lui aurait semblé obscène et horrible à raconter. De ce sentiment de honte dont il n’arrivait pas à se départir, il ne trouvait pas d’explication. C’était presque de sa faute si c’était arrivé. Peut-être aurait-il du lutter davantage, cesser de respirer, pour l’empêcher d’entrer dans ses poumons.
Maëlstrom avait tenté une parole, peut-être un infime mouvement. Une vision le fouetta. Un éclat bleuté. Cette fois, ce n’était pas Keshâ qui l’envoyait inconsciemment. C’était elle. Le bout de brume n’était pas enchanté de voir cette présence encombrante rôder autour de son hôte et lui disputer la maîtrise de son cœur.
Un grand miroir aux tâches irisées de mercure était bordé de boiseries dorées. La silhouette était ramassée en une posture tordue sous un amoncellement d’étoffes effilochées. Sans que son corps ne se meuve, son long cou s’allongea lentement jusqu’à retourner complètement sa tête de travers vers Maëlstrom. Bien qu’elle n’aie pas de bouche, un râle gutturale et sifflant souffla le portebrume.
-« Il est à moi ! » La voix était celle de Keshâ.
L’apparition défiait les lois de la raison, car les traits de son visage étaient lisse, comme un ballotin de paille sur lequel on aurait étiré une peau humaine. Un épouvantail mangeur d’âme. Soudain, deux paupières se dessinèrent au centre de ce grand désert. Leur ouverture avait la violence d’une cisaille qui révéla deux yeux de spinelle violet en tout point identiques à ceux de Keshâ.
Il était impossible de projeter quelqu’un par télépathie. La rupture du contact mental avait cependant tout d’une claque magistrale. Si l'entité-parcelle de brume avait pu le déchiqueter, elle ne l'aurait pas lâché jusqu'à ce qu'il s'éloigne de celui sur qui elle affermissait son emprise vénéneuse.
-« Maëlstrom ? » s’éleva, la même voix, emprunte de doute.
« Est-ce que tu l’as sentie ? »
Mer 20 Mar - 3:20
Retrouvailles hasardeuses
Ft. Keshâ'rem Evangelisto
Est-ce que le silence de ses rêves revêtiraient désormais ses moments en ta compagnie? Il se posa la question un bref instant, après qu'une vision lugubre se soit inscrit dans la rétine de son esprit. Une nouvelle habitude? Une volonté de ta part d'être de plus en plus immersif? Le Porte-Brume ne cherchait nullement à comprendre. Il était telle une urne dont l'unique volonté serait de recevoir ton esprit, mais surtout ce qui semblait tant d'étreindre l'âme autant que taire ta voix. Il ne comprit que partiellement ce qu'il entraperçu, se demandant si ce que tu voulais lui dire allait avoir le moindre lien ou non.
Quand tu te décidas enfin à t'exprimer, vous fûtes interrompus. L'odeur de la viande marinée lui monta aux narines, lui faisant se rendre compte qu'il avait de l'appétit. Mais il était tant pris par ce moment qu'il fut aisé de revenir à toi tandis que le silence reprenait possession des lieux. Tout comme l'hésitation semblait à nouveau venir t'englober. Il pressa ainsi ta main, pour venir te montrer que tu ne l'avais pas perdu en cours de route. Il n'avait pas d'idée sur ce qu'il t'était arrivé. C'est ainsi qu'il t'entendit balbutier quelques mots, et finir ta phrase par ce simple, mais lourd de sens, mot qu'est "nebula". Ce fut alors l'histoire de quelques secondes. Il ne s'était pas attendu à ce que toi aussi tu te fasses agripper par la Brume, le risque était présent à tout instant au sein de cette dernière...Mais l'ayant lui-même vécu, il eu l'infime sensation de ce que cela devait être avant de ressentir la dangerosité de la tienne.
De la voir se dérouler à partir d'un miroir. De ressentir l'apesanteur qui se trouvait tout autour d'elle. Et quand ce cou, informe, commença à se diriger vers lui, il sentit le soutien de sa propre nebula, même si cette dernière était depuis longtemps silencieuse face à sa réalité. Mais elle avait senti elle aussi de la menace qui allait être proférée avant même qu'elle ne le soit. «Tu es à lui!» Loin de se démonter, il avait répondu mentalement du tac au tac. Il savait comme la lisère était fine entre maîtriser la nebula et se perdre en elle, et même si cette dernière était à la fois monstrueuse et entichée de toi dans son regard, il ne comptait pas la laisser te bouffer...Parce qu'elle semblait être de cet acabit.
Contact rompu. Brutalement. Maelström te voyait à nouveau. Tu pouvais percevoir qu'il avait été happé, ailleurs, pendant l'affaire de secondes qui avaient été très percutantes. Ta voix, similaire à la nebula, l'amena à te regarder plus en détails. Il savait qu'il devait en référer sans tarder à Seraphah parce que ce dernier saurait préserver ton esprit, pour que tu ne vires pas fou. «Je l'ai vu Kesha.» Il se redressa sur son siège, lâchant ta main afin de poser ses coudes sur ses genoux et passant ses mains dans ses cheveux avant de les utiliser comme réceptacle pour son visage. Il poussa un soupir, avant de tourner son regard vers toi: «Tu vas devoir apprendre à cohabiter avec elle...Tu vas devoir lui apprendre qu'elle est chez toi. Et lui montrer à chaque seconde que tu es le maître à bord.» Il te savait plus fort que ta silhouette pouvait le laisser penser. Tu as survécu à la rue, et même à cette satanée tour d'Yfe! Il te faisait confiance, même si une colère bouillait en lui dans le même temps.
Conflit impossible au demeurant. Il n'aurait pu laisser Seraphah...mais lui n'aurait pas du te laisser partir sans eux.
Il se leva afin de se servir à manger. Son silence pouvait être angoissant, alors même qu'il l'utilisait pour rassembler ses pensées. «Est-ce qu'elle te parle? J'aimerai que tu me dises tout ce qu'elle te dit. Absolument tout. Note sur un carnet si tu as peur d'oublier mais chaque jour je veux que tu me racontes, d'accord?» Il revint sur le canapé, déposant son assiette sur la table basse avant de te regarder franchement: «On va en parler à Seraphah et il va pouvoir t'aider comme il a été là pour moi, ok? Maintenant si tu as des questions, des peurs, des doutes...dis moi tout.» Il insistait beaucoup sur ce point car il savait que la volonté première de la nebula sera de te couper de tes soutiens. D'autant plus qu'en lui ayant montré son vrai visage, il avait pu voir sa coriacité et que les moyens qu'ils mettront avec l'élémentaire, seront à cette hauteur là.
Dernière édition par Seraphah Von Arendt le Ven 2 Aoû - 23:58, édité 1 fois
Jeu 21 Mar - 18:12
Retrouvailles hasardeuses
Ft. Seraphah Von Arendt / Maëlstrom
Faisait-il exprès de t’imposer ces visions ? Pas vraiment. L’art était bourgeon. Il s’étendait vers la lumière, dans les possibles, entretissés avec ses connexions neuronales. La conscience et la maîtrise viendraient un autre jour.
Maëlstrom le regardait maintenant avec une forme d’avidité, comme s’il cherchait à percer les apparences. Son annonce ne pouvait pas le laisser sans réaction. Quant à sa confirmation qu’il avait vu la nébula, même s’il ne savait pas comment il avait pu faire, cela le réconforta dans l’idée qu’il ne se faisait pas des films. Il n’était pas complètement fou.
Mais l’effervescente réflexion de Maëlstrom était assez ambigüe. Il ne savait pas trop quoi en penser, bien qu’il soit content de ne plus être seul livré à son sort. Etait-ce bon signe qu’il se replie et cogite ainsi. Sans doute que oui.
Il hocha faiblement de la tête. Il aurait voulu que Maëlstrom lui dise qu’il n’était pas trop tard pour le délivrer de cette visiteuse indésirable, qu’on pourrait extraire chirurgicalement sa nébula, grâce à une technologie d’avant-garde. Même s’il savait au fond que ce n’était pas possible. La déclaration de Maëlstrom ne fit que confirmer une chose : il était foutu. Cohabiter avec cette chose ? Il l’avait pourtant vu. Digne des œuvres d’épouvante, elle allait le dépecer. Il savait sa résolution fragile et ses frondes être de l’esbrouffe qui ne la divertirait pas longtemps. Ces quelques jours lui avaient paru interminables et tenus lieu de demi-vie. Comment pourrait-il être à nouveau un humain fonctionnel dans ces conditions ?
-« Mais comment je vais faire ? » concéda-t-il, désarmé.
« Elle est vraiment très forte. Et je ne fais que m’affaiblir un peu plus à chaque heure. »
Survivre à la violence et la misère exigeait sans doute de receler certaines ressources. Quant à les reconnaître, c’était autre chose. Les traumas répétés avaient cela de tragique qu’ils obéraient la capacité à s’estimer et à faire revivre encore les mêmes schémas délétères d’emprises et d’auto-destruction. Keshâ’rem voyait en lui des intentions fébriles et une morale sans conviction, quand la nébula se présentait en armes, conquérante et sans merci. Elle n’avait d’ailleurs pas besoin de repos. Contrairement à lui.
Voir Maëlstrom se servir à manger raviva un appétit coriace, son pauvre estomac était dans les talons. Une part de lui répugnait à l’idée de s’alimenter dans ses circonstances, mais son corps criait à l’aide. Ainsi finit-il par imiter Maëlstrom, car il était plus facile de passer à l’acte avec quelqu’un.
Une première bouchée de sachimi vint le revigorer, alors qu’il mâchait le poisson qu’il trouvait un rien caoutchouteux.
-« Pas vraiment. Enfin, pas au début. C’était comme un grand vide que rien ne peut remplir. Comme si j’allais m’effondrer sur elle… puis, elle a arraché des bouts de moi et s’en est nourrie. On dirait qu’elle me copie… elle… elle apprend. Maintenant, elle a ma voix. »
Rien de tout cela ne le rassurait grandement. C’était la crise. Mais au moins, il avait un ami à qui en parler, quelqu’un qui le comprenait, car il avait vécu la même chose. En plus, il s’en était sorti. Non ? Keshâ’rem avait toujours considéré la transformation de Maëlstrom comme un détail de l’histoire. Il considérait ces infortunés réputés Maudits comme des légendes urbaines aux qualités surhumaines, capables de dompter leurs forces intérieures. Maintenant qu’il le vivait, il n’en menait pas large et suppliait le ciel de ne pas se faire dévorer. Mais comme il le savait à présent, il n’existait pas de dieux. En tout cas, ceux-ci n’avaient pas la forme qu’on leur avait promis, s’ils existaient. Et aucun n’avait l’air d’être à son écoute. Sauf Maëlstrom. Lui l’écoutait. Et il s’accrochait religieusement à son soutien et ses conseils.
-« Je ferai tout ce que vous me direz. J’écrirai dans un carnet mes cauchemars. Car c’est souvent là qu’elle devient plus forte et utilise mon imagination pour se développer… je ne sais pas si je serai capable d’y survivre. Pas sans vous. Ne me laisse pas, Maëlstrom. »
C’était peut-être un peu mélodramatique, mais il se sentait aussi désespéré que s’il était accroché sur la falaise intérieure du cratère d’un volcan, piégé à la verticale au-dessus des vapeurs de souffre brûlantes et trop tétanisé pour bouger.
-« Je ne sais pas comment je peux faire pour dormir sans qu’elle m’attaque… et aussi, j’ai voilé les miroirs de la salle de bain. Car j’ai l’impression qu’elle me regarde. C’est bizarre à dire, mais j’ai l’impression qu’elle s’accroche à mon image et qu’elle m’aspire. »
Il se résolut à manger quelques bouchées bien méritées en mâchant lentement. L’envie de vivre n’était pas si anecdotique quand on luttait contre une nébula décidée à nous en déposséder. Après Yfe et la rencontre avec les hommes du magistère, Keshâ n’était plus sûr d’avoir envie de vivre dans ce monde. Mais la chaleur de Maëlstrom et ces bouchées gourmandes paraissaient plus tangibles que le monde entier et il reprenait un peu de substance.
Dernière édition par Keshâ'rem Evangelisto le Mer 17 Avr - 4:30, édité 4 fois
Jeu 11 Avr - 4:13
Retrouvailles hasardeuses
Ft. Keshâ'rem Evangelisto
Cela arrivait bien plus régulièrement qu'on ne l'imaginait. Les nebula s'infiltraient et ne voulaient plus repartir. Certaines plus coriaces que d'autres. Certaines plus conscientes que d'autres. Parce que la vérité était là. L'expérience était différente pour chacun. Et il avait d'ores et déjà perçu que la tienne était plus vivace que la sienne. Il n'avait pas d'explication à cela, il les laissait à l'élémentaire. Mais être face à cette nouvelle vérité l'amenait à se replonger dans son propre passé. À ce long moment dans un lit d'hôpital de fortune, à ne jamais cesser de rêver, à voir ce borgne qui lui souriait sans rien comprendre à ce qui lui arrivait. Entre la vie et la mort, les rêves ont un goût de cendres.
La fatigue et la peur teintaient ta voix. Cela ne lui permit pas de replonger dans ses souvenirs qu'il préférait taire. Après tout, tu connaissais l'histoire de ses cicatrices, mais pas toute l'histoire. Comment cela s'était passé psychiquement...et maintenant tu le vivais. Il sentait ta fébrilité, il savait comme ton équilibre était à l'heure d'aujourd'hui précaire et comme la nebula pouvait devenir pire qu'un fantôme car même en fermant les yeux, elle serait toujours là.
Il avait au moins ce mérite de parler de ce qui t'arrivait comme un fait important oui, mais qui n'était pas sans ressources. C'était avant tout cela qu'il voulait que tu retiennes, que les choses pourraient se poser d'ici quelques temps.
Toutes les informations que tu lui communiquais, il les gardait en mémoire, notamment ce qui concernait les miroirs et cette impression qu'elle t'observait à travers eux. Après tout, actuellement, on ne savait pas le cadeau qui venait avec elle. «Il n'est nullement question de te laisser Keshâ. D'ailleurs, cela n'aurait pas du se passer, pas pour une affaire d'aussi grande importance.» Mais les événements s'étaient ainsi produit, et cela ne pouvait être changé. «Mais maintenant que les choses sont telles qu'elles sont, on mettra en place ensemble les solutions qui existent...Regarde moi, c'est après tout ce qui m'était arrivé.» Et si tu ne l'avais pas vu à l'oeuvre, jamais tu n'aurais pu croire qu'une nebula l'habitait. Il espérait que tu fasses ce rapprochement, sachant qu'en même temps tu étais des plus épuisés donc pas forcément le plus à même de faire des connexions.
À peine avait-il finit ces quelques mots qu'on frappa à la porte avant que celle-ci ne s'ouvre avec grandiloquence, au même titre que le personnage qui fit son entrée. «On m'a signalé que le repas vous a été servi...» Façon de certifier qu'il ne serait pas rentré comme dans une auberge, même si Maelström était bien placé pour savoir que l'élémentaire ne s'enquiquinait pas des convenances. «Seraphah, nous avons quelque chose à te dire.» L'air grave du porte-brume ne plut point à l'esthète qui s'approcha de vous, son regard aspiré vers toi qui lui apparaissait comme minuscule dans ce que tu dégageais...
Il avait pris connaissance que tu avais été interrogé à Opale et à cet instant, il se demandait si c'était cela qui t'avait rendu moins "brillant". Son regard exprima le soucis, et il vint se poser à tes côtés, une main venant se poser sur ton épaule opposée de là où il se tenait. Il venait ainsi t'enlacer les épaules, son parfum venant à tes narines tandis que sa main libre se porta à ton menton afin que tes yeux ne lâchent pas les siens. «Que s'est-il passé Maelström?»
Cette proximité pouvait te décontenancer, c'était bien la première fois qu'il se montrait si prévenant et tactile envers toi. «Une nebula.» Maelström n'avait pas besoin d'en dire plus. Et le regard de feu de Seraphah sembla soudainement prendre vie sans qu'on ne puisse comprendre s'il s'agissait de fureur ou d'autre chose. «Comment vous sentez-vous Keshrä'hem?» Opale n'était plus que fumée en cet instant dans son esprit. Il voulait savoir comment allait celui qui aurait du rester le chanteur du Marquis au lieu de devenir un aventurier malgré lui. Sa question visait avant tout à te donner parole et à sonder à travers cette dernière comment tu te portais réellement. Parce qu'en parallèle, il pensait déjà aux soins qu'il devrait t'apporter. Après tout, il était de la même nature à ce que tu portais désormais en toi.
Mer 17 Avr - 16:05
Retrouvailles hasardeuses
Ft. Seraphah Von Arendt / Maëlstrom
La fatigue ne le rendait pas optimiste. Mais il ne demandait qu’à croire les paroles rassurantes de Maëlstrom. Il voyait en lui un homme capable de maintenir une apparence sereine. Là où une surface placide laissait imaginait un grand lac intérieur fait de sérénité, il savait à présent que bouillonnait en dessous un courant furieux. Indomptable. Maëlstrom lui paraissait d’autant plus exceptionnel de conserver son équilibre. A première vue, il le faisait sans effort.
Keshâ’rem doutait de pouvoir un jour se réapproprier le flot de ses pensées comme il le faisait. L’instant le laissait néanmoins puiser le réconfort tant attendu. On verrait demain.
Le bref mouvement d’air qui précéda l’entrée de Seraphah dans la pièce signala sa présence si particulière, faite de chaleur et de vivacité. Son élégance pleine de couleurs était inimitable et suffisait à rendre le monde plus merveilleux. Il n’en revenait pas de le revoir. Depuis Opale, il s’était fait une raison : les geôles du magistère deviendraient sa nouvelle demeure. L’homme Gris remplacerait toutes ses conversations amicales. Peut-être aurait-il fini par attendre ses entretiens d’une joie anticipée, à force de moisir à l’isolement durant des lustres.
Le contact du bras de Seraphah autour de lui était une oasis dans le désert. Ses manières intimes pouvaient sembler incongrues en tant qu’employeur. Pour Keshâ’rem qui s’étaient habitué à ce qu’il lui dessine des formes invisibles dans le creux de sa main, ces gestes étaient devenus on ne peut plus naturels. L’odeur de son parfum complexe monta à ses narines et ne fit que rehausser la tangibilité de l’élémentaire à ses sens. Pourtant, ce n’est pas à lui que Seraphah s’adresse directement. Il l’absorbe de son regard enflammé. Le sien est tailladé de spinelle violet et n’est que déchirure malgré le masque lisse de sa peau.
Pourtant, il en avait assez d’être à terre. Il ne voulait plus qu’on le plaigne. Mais que pouvait-il dire d’autre que la vérité.
-« Mal. Mais déjà beaucoup mieux depuis que vous êtes arrivés. »
Il désignait aussi bien Maëlstrom que Seraphah. Cela était-il clair ? A son tour, il étreignit pleinement Seraphah pour se noyer dans sa chevelure, dont il s’imprégna profondément du parfum. Déjà, il sentait sa pression artérielle redescendre.
-« C’est idiot. Je sais que vous êtes pratiquement immortel. Mais j’ai pensé que vous aviez peut-être péri comme tous les autres à Opale… et ça m'a brisé le cœur... je pensais que c’est moi qui revenais des plus grands dangers de la Brume. Et finalement, toute la ville d’Opale était ravagée. Personne n’a rien voulu me dire pendant que j’étais enfermé. »
Il n’arrivait pas à décider si cette mesure de contention de l’information avait pour but de le torturer psychologiquement ou de ne pas lui donner de grain à moudre pour façonner des mensonges plus perfectionnés si on le prenait pour un collaborateur secret du XIIIème Cercle.
-« Attendez. » intima—t-il en se reculant.
Il essayait de rassembler ses esprits pour dire quelque chose qui lui tenait à cœur, une leçon apprise. Les mots n’étaient pas facile à toucher de son esprit et il se sentait tout petit en menant son autocritique.
-« Je sais que ce n’était pas votre choix de m’envoyer là-bas, seul. Ce n’était pas ma faute non plus… en tout cas, pas d’un point de vue rationnel à cet instant… mais, tout ce que j’ai fait avant a participé à me mettre en danger… je me rends compte maintenant, que j’ai eu beaucoup de chance de m’en sortir indemne, même en considérant ma condition de… avec la nébula… »
Il terminait son introduction cahoteuse, mais il y avait bien sûr un fond en deçà qu’il essayait d’exposer.
-« J’ai peur de beaucoup de choses. Je suis quelqu’un de prudent. Et pourtant, je me retrouve souvent dans des situations périlleuses, comme si une part de moi cherchait à s’exposer au risque… comme si j'avais besoin de l'intensité du danger... Une part de moi aspire peut-être à la souffrance ou à la mort. Aussi, je ne suis pas juste une victime. En l’état, je dois me considérer responsable des choix qui ont conduit à me faire du mal… je l’ai compris en restant longtemps seul et dans l’incertitude de cette chambre de l'Alliance, et lorsque j’ai du faire face dans mon esprit à cette autre moitié. Elle n’accepte que la vérité. Et elle s'en saisira contre moi si je n'y fais pas face.»
Il secoua négativement de la tête. Il ne prévoyait pas de dire tout cela et c’était plus difficile qu’il n’aurait pu l’imaginer. C’était comme si une main invisible se refermait sur sa pomme d’Adam. Une douloureuse pique lui traversait la gorge. Un tremblement intérieur commençait à se propager dans ses membres.
« Je suis désolé, Seraphah. En de multiples occasions, je vous ai désobéi. » Il énumérait : « à Qasak, sur la route des pyramides, en partant sans vous le dire enquêter en Xandrie sur le tueur à la rose violette… ... ... j’en déduis qu’il y a quelque chose de cassé en moi, qui me conduit toujours à prendre les pires décisions… Plus que jamais, j’ai l’impression de ne plus pouvoir me faire confiance, avec un esprit aussi fracturé…" Une larme finit par déborder de ses yeux et roula sur sa joue. "Aussi, je m’en remets à votre jugement. Je vous promets de vous soumettre mes intentions avant d’agir, car mes actes risquent d’avoir des retombées sur vous. Je suivrai vos instructions… pas juste comme employé, mais parce que c’est ce qu’il y a de mieux pour tout le monde. »
Keshâ’rem doutait de pouvoir un jour se réapproprier le flot de ses pensées comme il le faisait. L’instant le laissait néanmoins puiser le réconfort tant attendu. On verrait demain.
Le bref mouvement d’air qui précéda l’entrée de Seraphah dans la pièce signala sa présence si particulière, faite de chaleur et de vivacité. Son élégance pleine de couleurs était inimitable et suffisait à rendre le monde plus merveilleux. Il n’en revenait pas de le revoir. Depuis Opale, il s’était fait une raison : les geôles du magistère deviendraient sa nouvelle demeure. L’homme Gris remplacerait toutes ses conversations amicales. Peut-être aurait-il fini par attendre ses entretiens d’une joie anticipée, à force de moisir à l’isolement durant des lustres.
Le contact du bras de Seraphah autour de lui était une oasis dans le désert. Ses manières intimes pouvaient sembler incongrues en tant qu’employeur. Pour Keshâ’rem qui s’étaient habitué à ce qu’il lui dessine des formes invisibles dans le creux de sa main, ces gestes étaient devenus on ne peut plus naturels. L’odeur de son parfum complexe monta à ses narines et ne fit que rehausser la tangibilité de l’élémentaire à ses sens. Pourtant, ce n’est pas à lui que Seraphah s’adresse directement. Il l’absorbe de son regard enflammé. Le sien est tailladé de spinelle violet et n’est que déchirure malgré le masque lisse de sa peau.
Pourtant, il en avait assez d’être à terre. Il ne voulait plus qu’on le plaigne. Mais que pouvait-il dire d’autre que la vérité.
-« Mal. Mais déjà beaucoup mieux depuis que vous êtes arrivés. »
Il désignait aussi bien Maëlstrom que Seraphah. Cela était-il clair ? A son tour, il étreignit pleinement Seraphah pour se noyer dans sa chevelure, dont il s’imprégna profondément du parfum. Déjà, il sentait sa pression artérielle redescendre.
-« C’est idiot. Je sais que vous êtes pratiquement immortel. Mais j’ai pensé que vous aviez peut-être péri comme tous les autres à Opale… et ça m'a brisé le cœur... je pensais que c’est moi qui revenais des plus grands dangers de la Brume. Et finalement, toute la ville d’Opale était ravagée. Personne n’a rien voulu me dire pendant que j’étais enfermé. »
Il n’arrivait pas à décider si cette mesure de contention de l’information avait pour but de le torturer psychologiquement ou de ne pas lui donner de grain à moudre pour façonner des mensonges plus perfectionnés si on le prenait pour un collaborateur secret du XIIIème Cercle.
-« Attendez. » intima—t-il en se reculant.
Il essayait de rassembler ses esprits pour dire quelque chose qui lui tenait à cœur, une leçon apprise. Les mots n’étaient pas facile à toucher de son esprit et il se sentait tout petit en menant son autocritique.
-« Je sais que ce n’était pas votre choix de m’envoyer là-bas, seul. Ce n’était pas ma faute non plus… en tout cas, pas d’un point de vue rationnel à cet instant… mais, tout ce que j’ai fait avant a participé à me mettre en danger… je me rends compte maintenant, que j’ai eu beaucoup de chance de m’en sortir indemne, même en considérant ma condition de… avec la nébula… »
Il terminait son introduction cahoteuse, mais il y avait bien sûr un fond en deçà qu’il essayait d’exposer.
-« J’ai peur de beaucoup de choses. Je suis quelqu’un de prudent. Et pourtant, je me retrouve souvent dans des situations périlleuses, comme si une part de moi cherchait à s’exposer au risque… comme si j'avais besoin de l'intensité du danger... Une part de moi aspire peut-être à la souffrance ou à la mort. Aussi, je ne suis pas juste une victime. En l’état, je dois me considérer responsable des choix qui ont conduit à me faire du mal… je l’ai compris en restant longtemps seul et dans l’incertitude de cette chambre de l'Alliance, et lorsque j’ai du faire face dans mon esprit à cette autre moitié. Elle n’accepte que la vérité. Et elle s'en saisira contre moi si je n'y fais pas face.»
Il secoua négativement de la tête. Il ne prévoyait pas de dire tout cela et c’était plus difficile qu’il n’aurait pu l’imaginer. C’était comme si une main invisible se refermait sur sa pomme d’Adam. Une douloureuse pique lui traversait la gorge. Un tremblement intérieur commençait à se propager dans ses membres.
« Je suis désolé, Seraphah. En de multiples occasions, je vous ai désobéi. » Il énumérait : « à Qasak, sur la route des pyramides, en partant sans vous le dire enquêter en Xandrie sur le tueur à la rose violette… ... ... j’en déduis qu’il y a quelque chose de cassé en moi, qui me conduit toujours à prendre les pires décisions… Plus que jamais, j’ai l’impression de ne plus pouvoir me faire confiance, avec un esprit aussi fracturé…" Une larme finit par déborder de ses yeux et roula sur sa joue. "Aussi, je m’en remets à votre jugement. Je vous promets de vous soumettre mes intentions avant d’agir, car mes actes risquent d’avoir des retombées sur vous. Je suivrai vos instructions… pas juste comme employé, mais parce que c’est ce qu’il y a de mieux pour tout le monde. »
Jeu 2 Mai - 22:39
Retrouvailles hasardeuses
Ft. Keshâ'rem Evangelisto
Est-ce que l'élémentaire cherchait à se constituer une famille? À les voir tous les trois réunis après les épreuves qui furent les leurs on pouvait aisément le croire. Il y avait du réconfort, une réelle compassion, et surtout cette façon de prendre soin par la nourriture, mais surtout par les gestes. Derrière les mèches rousses, il était difficile d'en être pour autant assuré. Il avait toujours pris soin de tous les hommes qui partaient en excursion avec lui, ou pour lui. Il avait un sens de l'honneur des plus nobles et une propension à pourvoir aux besoins de chacun. Mais il était évident pour tous ceux du Marquis, que ce Keshâ avait su le toucher, comme Maelström avant lui. Oui, il était beaucoup plus soucieux de ce jeune homme là, que d'autres avant lui.
Il cueillit tes premières paroles par son regard qui ne te lâcha plus. Tandis que tu partageais la peur qui t'avait étreint, il caressa du bout des doigts ton visage, comme un geste d'apaisement et de retour à la réalité tangible de vos présences mutuelles. Il prenait surtout connaissance par tes lèvres de ton emprisonnement dont il avait eu vent la veille, à son arrivée, quand il s'était entretenu avec le Grand Sapiarque, faisant son rapport autant qu'il prenait conscience des ravages qu'Opale venait de connaître et du vrai objectif qu'avait eu le treizième cercle.
Pour le moment toutefois, pas le temps de prendre la parole, que tu poursuivis avec une volonté qui laissa attentif les deux hommes autour de toi. L'élémentaire fut troublé par tes premières paroles. Non pas car il ne les comprenait pas, mais car il n'arrivait pas encore à savoir où tu voulais en venir. Il y avait dans tes confidences quelque chose d'intime dont il n'avait pas l'habitude avec toi. De son côté, Maelström ne put que repenser au désert, à ta disparition...à ton retour joyeux et à cette marque sur ton cou, cette odeur et cette façon furibonde de garder tes secrets. Très rapidement, il se demanda si tu le trouvais fade en comparaison à l'intensité que l'extérieur et d'autres semblaient venir t'apporter. Toutefois, tout cela s'estompa rapidement avec la suite de tes propos.
La main de Seraphah vint se poser sur ta cuisse, délaissant ton visage, dégageant ce dernier pour que la vérité qui te faisait trembler puisse enfin jaillir, sans aucun obstacle. Désobéissance. Énumération. Silencieux, Seraphah ne perdait rien de tes paroles qui sonnaient comme des excuses. Il ne bougea pas face à cette larme solitaire qui coula sur ta joue avant d'épouser le vide et sécher pour mieux disparaitre. À travers tes mots, il entendait tout ce qui ne pouvait être dit. Cet appel. Cet appel d'un meilleur, cette volonté de te réparer, cette volonté d'être fidèle à ce que tu proposais. Mais était-ce seulement possible en étant brisé?
«Il y a eu plusieurs situations malencontreuses en effet Kesha'rem. Et j'apprécie cette volonté que vous m'affichez ici à faire désormais les choses en prenant en considération les conséquences qu'elles peuvent avoir.» Une pause. Son regard continuait de te fixer avec une intensité brûlante. Maelström observait silencieux, ramenant une jambe sous lui, comme s'effaçant du moment. «Je vais pouvoir vous aider avec votre nouvel hôte. Mais concernant ce que vous jugez cassé, il va vous falloir bien plus que juste le nommer pour en réchapper je le crains.» Sa voix était d'une douceur berçante. Le genre de voix qu'on ne voulait pas qu'elle s'arrête, parce qu'elle vous protégeait du reste du monde. «Je suis heureux que vous veniez m'offrir votre loyauté. Ma confiance était déjà vôtre, j'espère que vous l'avez perçu.» Bien sûr qu'il avait déjà manifesté son autorité à ton encontre, comme il le faisait également envers Maelström et d'autres. Mais il y avait toujours eu des limites à cette dernière, comme si dans le monde de l'élémentaire le ravage des émotions n'atteignait jamais les côtes de la connexion des coeurs.
«J'aimerai simplement que nous prenions du temps ensemble où vous me parlez plus spécifiquement de ce besoin de vous exposer au risque. Ce besoin, s'il n'est pas pris en charge pourrait vous valoir du tort en premier lieu, mais cela pourrait avoir un impact plus grand sur nous tous.» Il était bien placé pour connaitre les jeux sous-marin qui existaient. «Maintenant que votre nom va être associé au mien, vous risquez de devenir une cible pour mes détracteurs. Promettez-moi de ne rien me cacher.» Est-ce qu'il en demandait beaucoup? Il connaissait les hommes et la majorité cacheraient toujours des choses. Seras-tu de ceux là toi aussi?
Suite à cet échange, il commença à t'exposer la prise en charge de ta nebula.
Mer 8 Mai - 16:20
Retrouvailles hasardeuses
Ft. Seraphah Von Arendt / Maëlstrom
Le toucher de Seraphah était comme un berceau. Pris contre ses doigts, son visage tenait à une distance lointaine les sombres réalités de ce monde. Dans sa chaleur, dans cette intimité, il se sentait bien. Relater ses ombres ou les terribles événements lui faisaient moins peur. L'idée qu'il puisse utilisait le pouvoir de séduction de son cristal ne le traversait pas.
Dans ses yeux, Seraphah était un homme grand. Et comme tout clou qui dépasse, il devait essuyer les vices et la convoitise des autres Sapiarques. Keshâ’rem aurait voulu retirer de ce poids pesant sur les épaules de Seraphah, juste un peu. Mais il se sentait la consistance d’un fantôme et ne pouvait même plus s’occuper de lui-même.
Son regard partit de côté dans le vague. Le soutien était présent. Mais il y avait quelque chose de lourd dans le fait d’être reconnu comme un objet endommagé. Pourrait-il seulement être autre chose un jour ? Se définirait-il par autre chose que par de la fébrilité et une longue suite d’erreurs ?
Le timbre grave le berçait, aussi sûrement que si les fréquences sonores lui prodiguaient un massage. Il hocha de la tête, confirmant qu’il comprenait la confiance accordée.
La promesse qui lui était demandée n’était pas anodine. Il le savait. En son for intérieur, il sentait qu’il y avait en cela comme la malédiction d’un génie ou la bénédiction d’une déesse, suivant si l’on respectait la parole donnée ou non. L’élémentaire n’oubliait pas et les mots avaient un sens profond pour lui, profond comme ils pouvaient l’être dans le dialecte Andoleïa.
Il donna sa promesse. Et il exposa comme il put ses failles, tout en ayant l’impression d’en avoir déjà trop dit pour aujourd’hui.
Après quoi, Seraphah lui ouvrit quelques perspectives d’espoir quant à la gestion de sa nébula. Sans parler de traitement, car il n’en existait pas pour les hommes et les femmes de sa condition, il avait créé une médication grâce à ses recherches. Les personnes touchées par la Malice avaient une connexion étroite avec elle, qui la rendait capable de les transformer. Pour preuve de son affinité latente, la Brume avait été capable de modifier certains de ses traits physiques lors de son exposition juvénile. En transformant le châtain de ses cheveux en blanc cendré, elle semblait l’avoir marqué. Comme un met que l’on réserve pour plus tard.
L’Elémentaire quitta la suite pour quelques minutes, le temps d’aller chercher ladite médication. Pendant ce temps, une forme de gêne s’installa. Il se sentait honteux. Mais il aurait en même temps voulu se jeter dans les bras de Maëlstrom et ne plus le quitter.
Seraphah déplia à son retour une mallette miniature dans laquelle était soigneusement rangée des ampoules en verre dans un rembourrage sur mesure. Levant le mélange pour que la lumière du jour passe au travers, Keshâ aperçut un éclat d’argent à travers la substance. En le prenant le soir, avant de s’endormir, il affaiblirait suffisamment le lien qu’il pouvait avoir avec sa nébula pour que celle-ci ne puisse le tourmenter dans son sommeil. Cela n’était qu’un pansement. Mais il connaîtrait à nouveau le repos. Avec une volonté moins continuellement entamée, il serait en mesure de mieux résister à sa pression la journée… pour peu à peu, on l’espérait, se faire à son agressivité. Des éventuels effets secondaires, il ne voulait rien savoir. Ni sur la composition du remède. Sa genèse se trouvait dans le génie de Séraphah. Cela lui suffisait.
Après avoir franchement remercié Seraphah et Maëlstrom pour leur soutien – et indirectement, pour être revenus en vie – il leur proposa sur un soudain regain d’enthousiasme d’aller au restaurant de l’hôtel pour parler de la suite des choses.
Un changement de décor lui ferait du bien après des jours à être resté enfermé. Et voir ses amis hors de ces murs renforcerait sa conviction qu’il n’était pas victime d’une hallucination sensorielle. Les couloirs du Marquis lui paraissaient être le grand monde, comparé au confinement de sa suite. Un vague sentiment d’irritation le frappa au contact des quelques employés qui passaient. Comme si les bruits de la vie et la pleine lumière étaient trop crus pour lui.
Arrivés dans un coin plus feutré du luxueux restaurant, il était temps que tous se mettent à jour. En milieu de matinée, il n’y avait personne.
-« Bon… je crois qu’on à tous beaucoup de choses à se dire. »
Il pensait à l’holographe et au dessin qu’il avait mystérieusement réunis dans un sac, emporté au restaurant, pour illustrer son aventure à Yfe.
-« Racontez-moi un peu ce qui se passe dehors. De votre point de vue, qu'est-il arrivé à Opale ? Et où étiez-vous pendant tout ce temps ? »
Comme une envie soudaine de se remplir de leurs impressions, de parler d’autre chose que lui-même. Être aux prises avec les bouleversements que vivait l’humanité pourrait être une pression accablante pour son âme fragilisée. Mais il croyait au contraire que cela le mettrait au contact avec le réel. Peut-être aurait-il une meilleure prise sur son quotidien s’il se sentait dans l’action.
Toujours pâlichon, l'ombre d'un sourire se dessina. Ce n'en était pas vraiment un. Sans que ses lèvres bougent, son visage semblait se ranimer.
-"Alcide, est-ce qu'on pourrait avoir du thé blanc... et des œufs brouillés pour moi?" demanda-t-il d'un geste lointain au serveur qui l'observait. Son appétit était revenu en force.
Dans ses yeux, Seraphah était un homme grand. Et comme tout clou qui dépasse, il devait essuyer les vices et la convoitise des autres Sapiarques. Keshâ’rem aurait voulu retirer de ce poids pesant sur les épaules de Seraphah, juste un peu. Mais il se sentait la consistance d’un fantôme et ne pouvait même plus s’occuper de lui-même.
Son regard partit de côté dans le vague. Le soutien était présent. Mais il y avait quelque chose de lourd dans le fait d’être reconnu comme un objet endommagé. Pourrait-il seulement être autre chose un jour ? Se définirait-il par autre chose que par de la fébrilité et une longue suite d’erreurs ?
Le timbre grave le berçait, aussi sûrement que si les fréquences sonores lui prodiguaient un massage. Il hocha de la tête, confirmant qu’il comprenait la confiance accordée.
La promesse qui lui était demandée n’était pas anodine. Il le savait. En son for intérieur, il sentait qu’il y avait en cela comme la malédiction d’un génie ou la bénédiction d’une déesse, suivant si l’on respectait la parole donnée ou non. L’élémentaire n’oubliait pas et les mots avaient un sens profond pour lui, profond comme ils pouvaient l’être dans le dialecte Andoleïa.
Il donna sa promesse. Et il exposa comme il put ses failles, tout en ayant l’impression d’en avoir déjà trop dit pour aujourd’hui.
Après quoi, Seraphah lui ouvrit quelques perspectives d’espoir quant à la gestion de sa nébula. Sans parler de traitement, car il n’en existait pas pour les hommes et les femmes de sa condition, il avait créé une médication grâce à ses recherches. Les personnes touchées par la Malice avaient une connexion étroite avec elle, qui la rendait capable de les transformer. Pour preuve de son affinité latente, la Brume avait été capable de modifier certains de ses traits physiques lors de son exposition juvénile. En transformant le châtain de ses cheveux en blanc cendré, elle semblait l’avoir marqué. Comme un met que l’on réserve pour plus tard.
L’Elémentaire quitta la suite pour quelques minutes, le temps d’aller chercher ladite médication. Pendant ce temps, une forme de gêne s’installa. Il se sentait honteux. Mais il aurait en même temps voulu se jeter dans les bras de Maëlstrom et ne plus le quitter.
Seraphah déplia à son retour une mallette miniature dans laquelle était soigneusement rangée des ampoules en verre dans un rembourrage sur mesure. Levant le mélange pour que la lumière du jour passe au travers, Keshâ aperçut un éclat d’argent à travers la substance. En le prenant le soir, avant de s’endormir, il affaiblirait suffisamment le lien qu’il pouvait avoir avec sa nébula pour que celle-ci ne puisse le tourmenter dans son sommeil. Cela n’était qu’un pansement. Mais il connaîtrait à nouveau le repos. Avec une volonté moins continuellement entamée, il serait en mesure de mieux résister à sa pression la journée… pour peu à peu, on l’espérait, se faire à son agressivité. Des éventuels effets secondaires, il ne voulait rien savoir. Ni sur la composition du remède. Sa genèse se trouvait dans le génie de Séraphah. Cela lui suffisait.
Après avoir franchement remercié Seraphah et Maëlstrom pour leur soutien – et indirectement, pour être revenus en vie – il leur proposa sur un soudain regain d’enthousiasme d’aller au restaurant de l’hôtel pour parler de la suite des choses.
Un changement de décor lui ferait du bien après des jours à être resté enfermé. Et voir ses amis hors de ces murs renforcerait sa conviction qu’il n’était pas victime d’une hallucination sensorielle. Les couloirs du Marquis lui paraissaient être le grand monde, comparé au confinement de sa suite. Un vague sentiment d’irritation le frappa au contact des quelques employés qui passaient. Comme si les bruits de la vie et la pleine lumière étaient trop crus pour lui.
Arrivés dans un coin plus feutré du luxueux restaurant, il était temps que tous se mettent à jour. En milieu de matinée, il n’y avait personne.
-« Bon… je crois qu’on à tous beaucoup de choses à se dire. »
Il pensait à l’holographe et au dessin qu’il avait mystérieusement réunis dans un sac, emporté au restaurant, pour illustrer son aventure à Yfe.
-« Racontez-moi un peu ce qui se passe dehors. De votre point de vue, qu'est-il arrivé à Opale ? Et où étiez-vous pendant tout ce temps ? »
Comme une envie soudaine de se remplir de leurs impressions, de parler d’autre chose que lui-même. Être aux prises avec les bouleversements que vivait l’humanité pourrait être une pression accablante pour son âme fragilisée. Mais il croyait au contraire que cela le mettrait au contact avec le réel. Peut-être aurait-il une meilleure prise sur son quotidien s’il se sentait dans l’action.
Toujours pâlichon, l'ombre d'un sourire se dessina. Ce n'en était pas vraiment un. Sans que ses lèvres bougent, son visage semblait se ranimer.
-"Alcide, est-ce qu'on pourrait avoir du thé blanc... et des œufs brouillés pour moi?" demanda-t-il d'un geste lointain au serveur qui l'observait. Son appétit était revenu en force.
Mer 5 Juin - 0:42
Retrouvailles hasardeuses
Ft. Keshâ'rem Evangelisto
L'élémentaire avait disparut. Et avec lui, une part de la souffrance que Maelström avait perçu dans tes paroles envers l'élémentaire. Ce n'était pas grand chose, mais ce dernier se décida à venir se saisir de ta main, afin que tes yeux quittent le néant dans lequel ils aimaient se réfugier. La cicatrice du porte-brume barrait l'éclat de son regard d'émeraude. Et pourtant, cela n'enlevait rien à ce charme qui semblait venir se saisir de ton visage, aussi sûrement que l'auraient fait ses mains. Au lieu de cela, il quitta ta main, afin de laisser place à Seraphah qui était de retour. Vous aurez le temps de vous retrouver. Différemment d'avant. Il y avait eu les pyramides et ces marques indélébiles à ses yeux sur ton corps. Il y avait eu cette séparation, et la promesse de la mort qu'elle aurait pu à jamais vous éloigner. Mais ce qui était voulu entre vous restait flou. Parce que le monde se faisait grignoter.
Après que Seraphah t'ai montré comment utiliser les fioles, vous glissèrent vers le restaurant à ta demande. L'élémentaire ne paraissait jamais fatigué, mais en cet instant, c'était son sourire qui avait été manquant et le voir à nouveau apparaitre donnait une impression de fraicheur à cet instant hors du temps. Maelström restait quant à lui assez silencieux, t'observant, ne voulant être dupe de ce changement d'humeur, même s'il comprenait qu'il était nécessaire.
Une fois installé, ils te laissèrent commander avant que Seraphah ne vienne tout te conter sur ce qu'il s'était passé pour eux. Le cortège en arrivant à la grand place d'Opale. La panique qui s'empara de la foule à l'arrivée de Yodicaël alors qu'eux-même s'étaient engouffrés chez une ancienne connaissance de l'élémentaire. La tentative échouée pour heurter cette représentante du 13eme siècle. La mansarde qui a brûlé suite aux éclairs...Violette que Seraphah avait aidé suite à une action incompréhensible de sa part de vouloir sauver son roi. Puis le trou. Puis les Lymphes. Puis leur réapparition à l'autre bout d'Uhr.
«Cela était une diversion. Le 13eme cercle s'en est pris aux racines de l'arbre-Dieu. Opale est en voie de disparition sous la Brume si rien est entamé. Nous nous devons d'agir et vite.» Il termina par ces quelques mots, l'air grave, tandis que ce que tu avais commandé t'était servi. Maelström s'était pris du Vermeille, un vin chaud et légèrement sucré tandis que Seraphah n'avait pas d'appétit. «Je suis heureux de voir que vous vous reprenez, avec cet appétit...J'ai hâte d'entendre ce que vous avez vécu au-delà de votre nouvel invité...J'ai su à mon arrivée que vous avez été soumis à de nombreux interrogatoires.» Il porta une main sur la tienne. «Surtout dîtes moi tout Kesha'rem. Vous ont-ils fait du tort?»
Il n'accepterait certainement pas que le Magistère ait pu user de son autorité à ton encontre. Il savait qu'ils avaient tendance à tordre les règles à leur avantage. «Je suis vraiment navré de ne pas avoir été avec vous. Ce fut un ordre de dernière minute, et je reste persuadé que j'aurai été plus utile avec vous au vue des événements.»
Lun 10 Juin - 19:40
Retrouvailles hasardeuses
Ft. Seraphah Von Arendt / Maëlstrom
Le retour de Maëlstrom à ses côtés le surprit. Il y avait cette bulle qui se formait immanquablement autour d’eux lorsqu’il se sentait regardé par ses yeux verts. Comme un interlude, ce moment avide fut balayé. Les fleurs fragiles peuvent-elles germé sur un sol balayé par les vents ? Ils l’espéraient, car ils se dirigeaient vers une tempête qui ne finirait jamais. Leurs vies lui appartenaient désormais. Ils en faisaient partie.
Au restaurant, l’attention de Keshâ était suspendue aux lèvres de Seraphah. Il dévisageait tour à tour l’élémentaire et Maëlstrom en les questionant. Avaient-ils eu peur ?
-« Elle avait l’air vraiment terrible cette Yodicaëlle ! C’était pourtant une bonne idée que vous aviz eu de la viser de là-haut… en même temps, c’est bizarre qu’elle se soit laissée avoir « si facilement ». »
Rapidement, Seraphah l’informait que c’était la stratégie du Cercle d’entraîner tout le monde après Yodicaëlle. Cela lui paraissait assez dément, compte tenu des ressources perdues dans l’opération avec ces nombreux cristaux. Il se demandait donc si le XIIIème Cercle avait en réserve des centaines de cristaux à sacrifier pour armer des kamikazes. Il savait qu’Opale était associée à des souvenirs aigus chez Seraphah, mais c’était tout de même la terre des hommes, un petit bout de plus grignoté sur le confetti habitable restant.
-« Qu’est-ce qu’on peut faire contre ça ? » demanda-t-il, inquiet.
Il n’avait plus très faim sur le coup. Plus absorbé par la conversation que son appétit, il essayait de se rappeler qu’on n’abat pas un monceau de travail le ventre vide.
Sa mine s’assombrit encore lorsque Seraphah remit les projecteurs sur lui et l’épisode de l’Alliance et du Magistère.
-« Bien sûr qu’ils m’ont fait du tort… je ne vois pas pourquoi Seraphah… je n’ai rien fait de mal. Avec mes modestes moyens, j’ai suivi les ordres d’Amir et aidé l’expédition. C’est vrai qu’il y avait une personne recherchée parmi nous. C’est aussi vrai qu’elle s’est enfuie avant d’atterrir à Opale. Et que le cristal divin a été disputé….
C’est peut-être par là que j’aurais dû commencer. » ajouta-t-il en voyant la stupéfaction tenter les traits de ses amis.
-« Ce qui est fait est fait. » répondit l’orphelin d’un air résigné. Il n’en tenait pas rigueur à Seraphah et Maëlstrom. Personne n’avait rien vu venir ni eu le contrôle sur les événements.
« Le Magistère a été frappé en plein cœur avec l’attaque de sa cité. Ils n’ont pas digéré cet affront et se sont rabattus sur la personne qui était à leur portée pour essayer de se rattraper au maximum. Mais c’était improductif parce que j’étais innocent… ils étaient prêt à tout pour trouver un bouc-émissaire.»
Il narra l’accueil courtois par l’Alliance, son audience partagée avec Lewen, qui était parti rapidement. Expliqua rapidement que celui-ci s’était dégagé très vite de ses obligations. Et que c’est seulement après que quelque chose avait changé. Il avait déduit de ses interrogatoires que quelque chose était arrivé à Lewen et qu’on lui avait volé le cristal.
-« Sans doute pensaient-ils que je faisais parti d’un complot pour voler le cristal à Lewen. Ils suspectaient que je puisse appartenir au XIIIème Cercle. »
Il expliqua aussi comment on l’avait subtilement drogué et impressionné de manière à laisser sa peur de sa nébula triomphante le consumer dans la durée. Il n’avait du son salut qu’à ses suppliques à la bonne personne, une Opalienne médecin au sein de l’Alliance.
Elle lui avait permis d’être extradé en convoi officiel et de prendre le premier dirigeable pour Epistopoli.
Avant d’aller plus loin, il voulait revenir sur ce qui s’était passé à Yfe.
-« Compte tenu de ce que nous avons vécu, j’ai vraiment eu beaucoup de chance. Il faisait vraiment très froid là-bas. Nous ne savions pas ce que nous allions trouver. Le dirigeable du Régent était abandonné. Nous avons trouvé le pilote mort et desséché à l’intérieur. Sur le chemin, nous avons trouvé d’autres cadavres dans un état assez difficile à regarder… il y a d’abord eu un labyrinthe à traverser. Il semblait vivant. Les murs s’ouvraient et se refermaient. Même si nous étions attachés, nous avons été séparés. »
Il essayait d’être factuels et courts. Mais ne voyait pas comment expliquer tout ce qui lui semblait important en si peu de mots.
« La corde a été tiré violemment et c’est Amir qui l’a tranché au dernier moment pour empêcher les branches des buissons de m’attraper. Puis on s’est battus séparément contre des monstres, comme les incubes. Et les autres ont dû affronter le Liechi, comme celui de Dainsbourg. Ils l’ont détruit, mais il a ressuscité et il nous a fallu nous replier au plus vite vers la tour… l’intérieur avait l’air calme. On suivait facilement les soldats à la trace… »
Sa voix se fit plus hésitante.
« D’un coup il y a eu des Jiangshis. Partout. Comme une vague. C’était, comme un rouleau compresseur, jusqu’au plafond. Nous avons couru. Mais l’autre bout du couloir débordait aussi…
Ensuite… »
Une petite montée de stress revenait hanter ces souvenirs. Personne ne pensait s’en sortir face à la porte-blindée, si ce n’est la dextérité de crocheteur d’Aharon.
-« Nous avons réussi à protéger Aharon le temps de forcer une porte blindée. Elle menait sur un lieu digne d’intérêt pour vous Seraphah… c’était un observatoire. »
Parce qu’il avait déjà beaucoup parlé, il saisit l’holographe et l’actionna. Ce morceau de scène était très rapide. Au début paisible, on y voyait Lewen et Nemeth jouer avec des planétoïdes évanescents dans les airs, qui entouraient également Keshâ. Puis l’attaque des élémentaires de glace et les cris de Ryker et Artémis, alors que Keshâ chutait et laissait échapper l’holographe. Il y avait ces yeux de néants venus d’un autre monde qui les regardaient avant d’éteindre l’antique machine, leur fuite in extremis vers une morgue très glauque. Les cadavres étaient colonisés par des cristaux de « la peste ». Toutes ces scènes étaient on ne peut plus immersives. On y voyaient en gros plan et mal cadrés les traits figés, les blessés, les aventuriers dans l'incertitude en quête d'une sortie pour fuir. Avec toujours en arrière plan le raclement et les râles des Jiangshi qui hantaient les couloirs de la tour.
L’holographe s’arrêta sur le franchissement d’un grand escalier effondré, qui ne leur offrait qu’une corniche pourrie de vingt centimètre pour suivre la troupe du Régent. Il existait bien un autre extrait. Mais Keshâ'rem préférait d'abord laisser place aux réactions.
Au restaurant, l’attention de Keshâ était suspendue aux lèvres de Seraphah. Il dévisageait tour à tour l’élémentaire et Maëlstrom en les questionant. Avaient-ils eu peur ?
-« Elle avait l’air vraiment terrible cette Yodicaëlle ! C’était pourtant une bonne idée que vous aviz eu de la viser de là-haut… en même temps, c’est bizarre qu’elle se soit laissée avoir « si facilement ». »
Rapidement, Seraphah l’informait que c’était la stratégie du Cercle d’entraîner tout le monde après Yodicaëlle. Cela lui paraissait assez dément, compte tenu des ressources perdues dans l’opération avec ces nombreux cristaux. Il se demandait donc si le XIIIème Cercle avait en réserve des centaines de cristaux à sacrifier pour armer des kamikazes. Il savait qu’Opale était associée à des souvenirs aigus chez Seraphah, mais c’était tout de même la terre des hommes, un petit bout de plus grignoté sur le confetti habitable restant.
-« Qu’est-ce qu’on peut faire contre ça ? » demanda-t-il, inquiet.
Il n’avait plus très faim sur le coup. Plus absorbé par la conversation que son appétit, il essayait de se rappeler qu’on n’abat pas un monceau de travail le ventre vide.
Sa mine s’assombrit encore lorsque Seraphah remit les projecteurs sur lui et l’épisode de l’Alliance et du Magistère.
-« Bien sûr qu’ils m’ont fait du tort… je ne vois pas pourquoi Seraphah… je n’ai rien fait de mal. Avec mes modestes moyens, j’ai suivi les ordres d’Amir et aidé l’expédition. C’est vrai qu’il y avait une personne recherchée parmi nous. C’est aussi vrai qu’elle s’est enfuie avant d’atterrir à Opale. Et que le cristal divin a été disputé….
C’est peut-être par là que j’aurais dû commencer. » ajouta-t-il en voyant la stupéfaction tenter les traits de ses amis.
-« Ce qui est fait est fait. » répondit l’orphelin d’un air résigné. Il n’en tenait pas rigueur à Seraphah et Maëlstrom. Personne n’avait rien vu venir ni eu le contrôle sur les événements.
« Le Magistère a été frappé en plein cœur avec l’attaque de sa cité. Ils n’ont pas digéré cet affront et se sont rabattus sur la personne qui était à leur portée pour essayer de se rattraper au maximum. Mais c’était improductif parce que j’étais innocent… ils étaient prêt à tout pour trouver un bouc-émissaire.»
Il narra l’accueil courtois par l’Alliance, son audience partagée avec Lewen, qui était parti rapidement. Expliqua rapidement que celui-ci s’était dégagé très vite de ses obligations. Et que c’est seulement après que quelque chose avait changé. Il avait déduit de ses interrogatoires que quelque chose était arrivé à Lewen et qu’on lui avait volé le cristal.
-« Sans doute pensaient-ils que je faisais parti d’un complot pour voler le cristal à Lewen. Ils suspectaient que je puisse appartenir au XIIIème Cercle. »
Il expliqua aussi comment on l’avait subtilement drogué et impressionné de manière à laisser sa peur de sa nébula triomphante le consumer dans la durée. Il n’avait du son salut qu’à ses suppliques à la bonne personne, une Opalienne médecin au sein de l’Alliance.
Elle lui avait permis d’être extradé en convoi officiel et de prendre le premier dirigeable pour Epistopoli.
Avant d’aller plus loin, il voulait revenir sur ce qui s’était passé à Yfe.
-« Compte tenu de ce que nous avons vécu, j’ai vraiment eu beaucoup de chance. Il faisait vraiment très froid là-bas. Nous ne savions pas ce que nous allions trouver. Le dirigeable du Régent était abandonné. Nous avons trouvé le pilote mort et desséché à l’intérieur. Sur le chemin, nous avons trouvé d’autres cadavres dans un état assez difficile à regarder… il y a d’abord eu un labyrinthe à traverser. Il semblait vivant. Les murs s’ouvraient et se refermaient. Même si nous étions attachés, nous avons été séparés. »
Il essayait d’être factuels et courts. Mais ne voyait pas comment expliquer tout ce qui lui semblait important en si peu de mots.
« La corde a été tiré violemment et c’est Amir qui l’a tranché au dernier moment pour empêcher les branches des buissons de m’attraper. Puis on s’est battus séparément contre des monstres, comme les incubes. Et les autres ont dû affronter le Liechi, comme celui de Dainsbourg. Ils l’ont détruit, mais il a ressuscité et il nous a fallu nous replier au plus vite vers la tour… l’intérieur avait l’air calme. On suivait facilement les soldats à la trace… »
Sa voix se fit plus hésitante.
« D’un coup il y a eu des Jiangshis. Partout. Comme une vague. C’était, comme un rouleau compresseur, jusqu’au plafond. Nous avons couru. Mais l’autre bout du couloir débordait aussi…
Ensuite… »
Une petite montée de stress revenait hanter ces souvenirs. Personne ne pensait s’en sortir face à la porte-blindée, si ce n’est la dextérité de crocheteur d’Aharon.
-« Nous avons réussi à protéger Aharon le temps de forcer une porte blindée. Elle menait sur un lieu digne d’intérêt pour vous Seraphah… c’était un observatoire. »
Parce qu’il avait déjà beaucoup parlé, il saisit l’holographe et l’actionna. Ce morceau de scène était très rapide. Au début paisible, on y voyait Lewen et Nemeth jouer avec des planétoïdes évanescents dans les airs, qui entouraient également Keshâ. Puis l’attaque des élémentaires de glace et les cris de Ryker et Artémis, alors que Keshâ chutait et laissait échapper l’holographe. Il y avait ces yeux de néants venus d’un autre monde qui les regardaient avant d’éteindre l’antique machine, leur fuite in extremis vers une morgue très glauque. Les cadavres étaient colonisés par des cristaux de « la peste ». Toutes ces scènes étaient on ne peut plus immersives. On y voyaient en gros plan et mal cadrés les traits figés, les blessés, les aventuriers dans l'incertitude en quête d'une sortie pour fuir. Avec toujours en arrière plan le raclement et les râles des Jiangshi qui hantaient les couloirs de la tour.
L’holographe s’arrêta sur le franchissement d’un grand escalier effondré, qui ne leur offrait qu’une corniche pourrie de vingt centimètre pour suivre la troupe du Régent. Il existait bien un autre extrait. Mais Keshâ'rem préférait d'abord laisser place aux réactions.
Sam 29 Juin - 20:46
Retrouvailles hasardeuses
Ft. Keshâ'rem Evangelisto
Même si le Marquis avait été créé en vue d'être un havre de paix, le monde extérieur continuait de tourner et ce qu'il s'était produit à Opale avait bousculé les esprits...La Brume rappelle l'incertitude inhérente à toute vie. Celle-là même que les hommes - et plus encore s'ils sont influents, ont du pouvoir et de l'argent - semblent vouloir repousser au-delà de leurs horizons. Comme si la mort ne pourrait jamais les grignoter. Pourtant c'est à cela qu'elle s'emploie. Constamment. À tout instant. Alors oui, il comprenait l'inquiétude dans ton regard, il comprenait aussi qu'il avait à faire à plus que ton apparence le laissait supposer: Cela faisait bien longtemps que tu n'étais plus un jeune homme. Même si la réalité ne t'avait jamais épargné, ton coeur restait peut-être toujours tendre lui. Cela seul Maelström le savait, et encore.
«Nous allons partir en expédition en terres opaliennes afin d'aller soigner, si cela nous est possible, l'Arbre-Dieu. Nous sommes déjà entrain de monter une équipe de nombreux scientifiques.» Les choses s'étaient décidées rapidement. Il fallait dire qu'avant de quitter Dame Ellendrine, ils avaient eu temps d'échanger et ils oeuvraient chacun de leurs côtés à ce moment-même pour espérer partir dans les délais les plus brefs.
Tout cela c'était leur histoire connue. À Maelström et à lui-même. Alors oui, l'expression de tous les deux fut expressives, quand tu énonças la présence d'un cristal divin. Seraphah comprit d'autant plus les lourds interrogatoires qui ont suivi l'arrivée de Kesha et des autres. Quelqu'un a dérobé un cristal divin...et les autorités se devaient de voir s'il y avait un complice qui était resté sur place. Mais il n'apprécia pas que la pression ait été en particulier sur Kesha. Du moins, dans la façon dont tu exprimais tout cela, c'est ce qu'il en déduisait.
Quand tu mentionnas la scientifique de l'Alliance, Seraphah demanda si son prénom n'était pas "Marianne"...Plusieurs dans l'Alliance avait un côté humaniste, mais c'était une femme qu'il avait déjà rencontré et dont l'intelligence et le coeur étaient plus fins que la moyenne. Maelström quant à lui, posa une sur ta cuisse pour te montrer son soutien pendant ta narration de ces moments de souffrance face à l'inconnu et l'injustice de la situation. Il la retira toutefois quand tu revins sur l'expédition en tant que telle.
Les deux se trouvaient absorbés par tes paroles. Seraphah retenait la moindre information, les monstres autant que les obstacles que vous aviez croisé. Mais il ne s'était pas attendu à ce qu'il y ait un observatoire et qu'il puisse grâce à l'holographe avoir un aperçu d'un des endroits où tu t'étais trouvé. Il reconnut sans mal Lewën, ayant par le passé été en expédition ensemble. Puis il perçut Ryker avant que la vidéo ne se coupe en raison des élémentaires de glace. Il ne put intérieurement que penser qu'il aurait été d'une utilité terrible face à ces derniers. Pour le reste, il ne pouvait qu'enregistrer les scènes d'horreur qui défilaient.
Au-delà de la nebula qui sévissait désormais à l'intérieur de toi, il y avait ces images, ce vécu, ancré dans ton corps. Un silence se posa. Ce fut la main de l'élémentaire qui le brisa en venant saisir en douceur ton menton pour demander, ton regard ne pouvant échapper au sien: «Je ne voulais pas ça pour vous Kesha'rem. Et malgré l'horreur de tout ça, je suis fier de vous.» Il fallait le nommer. L'artiste qu'il voyait uniquement en toi initialement, revêtait une autre facette qu'il souhaitait encouragé. Il avait vu bien sûr, tes compétences au sein des pyramides...mais cela était beaucoup plus intense.
Maelström resta silencieux. Il désirait connaître le moindre détail de ce qu'il s'était produit, mais sans forcé le rythme qui serait le tien.
«Qui a volé le cristal? Avez-vous un nom, une description? Et quel genre de cristal cela était? Le Magistère doit être fou de rage...Et pourquoi avoir dit que le cristal revenait à Lewën? Comment les choses se sont déroulées? Vous ne nous avez pas encore tout dit.»
Ton histoire était beaucoup plus impactante que ce qui leur était arrivé...Après tout, ils avaient malgré eux suivit la diversion du 13eme siècle...il n'avait pas été comme toi, acteur d'un changement majeur en terme de pouvoir global...
Mer 10 Juil - 17:36
Retrouvailles hasardeuses
Ft. Seraphah Von Arendt / Maëlstrom
-« J’espère sincèrement que vous réussirez. »
Il y avait dans sa voix un aveu d’échec. A ne même pas tenter de se faire inviter dans l’expédition, il se reconnaissait lui-même comme totalement incapacité envers le monde extérieur. Sa nébula, mais aussi les terribles souvenirs qu’il rapportait d’Yfe, le laissaient tremblant. Par miracle, il avait brandi le sabre aramilan que Maëlstrom lui avait confié sans s’évanouir et était parvenu à avancer au pas de charge à travers la mêlée d’obstacles dressés sur leurs chemins.
Mais toute agitation paraissait en ce jour insoutenable. Le balai des voitures continuait dehors sur les grands boulevards, comme si le monde n’avait jamais arrêté de tourner. Son monde a lui s’était arrêté, saisi par une violente gifle, dans un long sifflement, dont il n’était pas encore ressorti. En fait, il était même soulagé que personne ne lui propose de les accompagner. Il faudrait bien sortir de son trou et faire quelque chose, une fois qu’ils seraient partis pour visiter cet « Arbre-dieu ». Un jour.
A l’interrogation de Seraphah sur la médecin de l’Alliance, Keshâ’rem ne put qu’avouer son ignorance. Il avait déduit son nom de famille par un étrange contact télépathique initié dans ses rêves. Mais il ne connaissait pas son prénom. La main de Maëlstrom sur sa cuisse lui fit du bien. Une part de lui se disait presque que ça valait le coup d’avoir souffert si cela permettait de lui rendre Maëlstrom aujourd’hui.
La main de Seraphah vint à nouveau capturer son menton. Un geste paternaliste qui devenait une habitude. Keshâ se laissait faire. Il n’arrivait pas à cligner des yeux, tout en se sentant submergé par la vivacité du regard de l’élémentaire. Aussi ne dit-il rien quand Seraphah se dit fier de lui, s’en remettant au magma chaotique de ses émotions inconscientes.
L’orphelin ne put réprimer un sourire en coin, transformé en éclat de rire, sous la mitraille de questions très sérieuses de Seraphah. Rarement, il voyait de le sapiarque perdre sa composition tranquille et succomber à la fièvre, le faisant presque passer pour un brasier avide de curiosité.
-« J’ai les réponses à toutes ces questions… et je vais vous les donner. » répondit-il avec un air espiègle en regardant tour à tour Maëlstrom et Seraphah. Sa satisfaction à détenir des informations aussi capitales était évidente. C’est pourquoi, il ne tenait à dilapider ses effets et voulait narrer les faits correctement.
« Avant que je vous révèle le nœud de cette intrigue… il y a d’autres choses que vous mourrez d’envie de savoir sur cette tour… Plus loin dans les étages, nous sommes arrivés dans une immense salle circulaire avec un plancher fait de grilles. Et une fosse. Un charnier. Des centaines de corps complètement démembrés y pourrissaient. Nous avons eu une minute pour reprendre haleine et nous soigner avant que le plus terrible des prédateur nous assaille. »
S’ils croyaient avoir tout entendu, ils n’étaient pas au bout de leurs appétits. Les yeux d’améthyste intimèrent le calme au Flamboyant, d’une fausse sévérité.
« Une créature volante s’en est prise à nous. Il était difficile de comprendre ce que c’était. Mais elle pouvait léviter et ses plumes étaient comme des lames de rasoir. En plus, elle pouvait les lancer et ses ailes pouvaient se tordre et pivoter dans des angles surnaturels, parce qu’il s’agissait en fait d’un robot… personne n’a pu lui faire la moindre rayure, même avec les armes du Magistère. Ryker et Artémis ont failli mourir. En fait, nous avons tous failli nous faire écraser comme des insectes les uns à la suite des autres. Seule ma gargouille est parvenue à gagner un peu de temps et à endommager l’une de ses ailes. »
Voyant que ses amis n’y tenaient plus, il s’accorda une gorgée d’eau avant de leur livrer le résultat de l’affrontement.
-« Cet être ne pouvait être vaincu. Mais les autres ont réussi à l’arrêter en parlant quelques mots de vieil Urhois. "
"Apparemment, c’est une scientifique grigori qui aurait été transformé en machine. Son nom est Ezra. Les anciens Yféens l’appelaient l’Astronome et elle manie tous les outils de la tour qui sont d’une valeur scientifiques incommensurable. Je suis sûr que ça peut vous intéresser, avant qu’Opale s’approprie les lieux ! Ca et les yeux noirs d’êtres malféfiques qui sont apparus dans l’Observatoire. On aurait dit qu’ils n’étaient pas de ce monde. »
En tant que médecin, Keshâ’rem se serait attendu à ce que Seraphah reviennent sur la peste cristalline. Son brillant cerveau devait être entré en fusion devant tant de pistes d’approfondissements et ses pensées vriller comme des balles de flipper.
« Maintenant, Ezra est pacifiée. Et elle reprend son travail. Ce qui veut dire qu’elle serait un atout précieux pour la science… mais je vois que vous ne voulez pas lâcher ce cristal divin… qui dit cristal divin dit… dieu. Nous avons fait la rencontre de Demephor. Le dieu de la connaissance. Son cristal était donc celui d’Omniscience. »
Une main pressante, Keshâ tentait de juguler la flamme de l’élémentaire, qui semblait lutter pour ne pas extraire l’information directement de ses veines. Le jeune homme cherchait en Maëlstrom un allié de tempérance le temps de pouvoir délivrer son histoire.
-« Une minute. Donc… j’ai des extraits sur l’holographe qui pourront répondre à votre curiosité, sur les dernières paroles d’Ezra, qui était devenu le Fléau. Et sur les derniers enseignements de Déméphor. Vous verrez que c’était d’une tristesse infinie. »
Il eut un égard pour la sensibilité de Maëlstrom, dont l’âme aramilane allait devoir vivre l’apocalypse d’un mythe. Sa main se posa sur la sienne par compassion.
"Demephor était un Ulule. Il a fait confiance aux hommes quand ils sont arrivés sur le territoire de son peuple il y a très longtemps. Mais les hommes, peut-être aussi l’Eglise l’ont trahi et l’ont torturé pour violer son esprit et accéder à la bibliothèque universelle qu’il renfermait. Comme Ezra, ils l’ont fusionné avec une machine et cloué sur un portail à moitié éventré… le pauvre a vécu ce calvaire deux millénaires. Quand nous sommes arrivés, ce n’était plus qu’une coquille épuisée et lasle. Il nous a supplié de le libérer son sort."
A ce moment Keshâ avança le dessin de Nemeth, illustrant le chant du dernier repos de Demephor, alors que Keshâ’rem chantait pour la divinité mourante, entouré du reste des aventuriers. Il avait cru plus humain d’expliquer le contexte et leurs intentions, avant de montrer directement les images assez choquantes… mais il allait falloir expliquer juste après la bataille pour le cristal divin, alors que le dieu n’avait même pas encore rendu son dernier soupire.
Il laissa l’holographe prouver ses dires, bien conscient que son histoire était ahurissante. La valeur de ce témoignage était inestimable, c'était le seul existant qui prouve l'histoire du dieu défunt et du Fléau.
Il y avait dans sa voix un aveu d’échec. A ne même pas tenter de se faire inviter dans l’expédition, il se reconnaissait lui-même comme totalement incapacité envers le monde extérieur. Sa nébula, mais aussi les terribles souvenirs qu’il rapportait d’Yfe, le laissaient tremblant. Par miracle, il avait brandi le sabre aramilan que Maëlstrom lui avait confié sans s’évanouir et était parvenu à avancer au pas de charge à travers la mêlée d’obstacles dressés sur leurs chemins.
Mais toute agitation paraissait en ce jour insoutenable. Le balai des voitures continuait dehors sur les grands boulevards, comme si le monde n’avait jamais arrêté de tourner. Son monde a lui s’était arrêté, saisi par une violente gifle, dans un long sifflement, dont il n’était pas encore ressorti. En fait, il était même soulagé que personne ne lui propose de les accompagner. Il faudrait bien sortir de son trou et faire quelque chose, une fois qu’ils seraient partis pour visiter cet « Arbre-dieu ». Un jour.
A l’interrogation de Seraphah sur la médecin de l’Alliance, Keshâ’rem ne put qu’avouer son ignorance. Il avait déduit son nom de famille par un étrange contact télépathique initié dans ses rêves. Mais il ne connaissait pas son prénom. La main de Maëlstrom sur sa cuisse lui fit du bien. Une part de lui se disait presque que ça valait le coup d’avoir souffert si cela permettait de lui rendre Maëlstrom aujourd’hui.
La main de Seraphah vint à nouveau capturer son menton. Un geste paternaliste qui devenait une habitude. Keshâ se laissait faire. Il n’arrivait pas à cligner des yeux, tout en se sentant submergé par la vivacité du regard de l’élémentaire. Aussi ne dit-il rien quand Seraphah se dit fier de lui, s’en remettant au magma chaotique de ses émotions inconscientes.
L’orphelin ne put réprimer un sourire en coin, transformé en éclat de rire, sous la mitraille de questions très sérieuses de Seraphah. Rarement, il voyait de le sapiarque perdre sa composition tranquille et succomber à la fièvre, le faisant presque passer pour un brasier avide de curiosité.
-« J’ai les réponses à toutes ces questions… et je vais vous les donner. » répondit-il avec un air espiègle en regardant tour à tour Maëlstrom et Seraphah. Sa satisfaction à détenir des informations aussi capitales était évidente. C’est pourquoi, il ne tenait à dilapider ses effets et voulait narrer les faits correctement.
« Avant que je vous révèle le nœud de cette intrigue… il y a d’autres choses que vous mourrez d’envie de savoir sur cette tour… Plus loin dans les étages, nous sommes arrivés dans une immense salle circulaire avec un plancher fait de grilles. Et une fosse. Un charnier. Des centaines de corps complètement démembrés y pourrissaient. Nous avons eu une minute pour reprendre haleine et nous soigner avant que le plus terrible des prédateur nous assaille. »
S’ils croyaient avoir tout entendu, ils n’étaient pas au bout de leurs appétits. Les yeux d’améthyste intimèrent le calme au Flamboyant, d’une fausse sévérité.
« Une créature volante s’en est prise à nous. Il était difficile de comprendre ce que c’était. Mais elle pouvait léviter et ses plumes étaient comme des lames de rasoir. En plus, elle pouvait les lancer et ses ailes pouvaient se tordre et pivoter dans des angles surnaturels, parce qu’il s’agissait en fait d’un robot… personne n’a pu lui faire la moindre rayure, même avec les armes du Magistère. Ryker et Artémis ont failli mourir. En fait, nous avons tous failli nous faire écraser comme des insectes les uns à la suite des autres. Seule ma gargouille est parvenue à gagner un peu de temps et à endommager l’une de ses ailes. »
Voyant que ses amis n’y tenaient plus, il s’accorda une gorgée d’eau avant de leur livrer le résultat de l’affrontement.
-« Cet être ne pouvait être vaincu. Mais les autres ont réussi à l’arrêter en parlant quelques mots de vieil Urhois. "
"Apparemment, c’est une scientifique grigori qui aurait été transformé en machine. Son nom est Ezra. Les anciens Yféens l’appelaient l’Astronome et elle manie tous les outils de la tour qui sont d’une valeur scientifiques incommensurable. Je suis sûr que ça peut vous intéresser, avant qu’Opale s’approprie les lieux ! Ca et les yeux noirs d’êtres malféfiques qui sont apparus dans l’Observatoire. On aurait dit qu’ils n’étaient pas de ce monde. »
En tant que médecin, Keshâ’rem se serait attendu à ce que Seraphah reviennent sur la peste cristalline. Son brillant cerveau devait être entré en fusion devant tant de pistes d’approfondissements et ses pensées vriller comme des balles de flipper.
« Maintenant, Ezra est pacifiée. Et elle reprend son travail. Ce qui veut dire qu’elle serait un atout précieux pour la science… mais je vois que vous ne voulez pas lâcher ce cristal divin… qui dit cristal divin dit… dieu. Nous avons fait la rencontre de Demephor. Le dieu de la connaissance. Son cristal était donc celui d’Omniscience. »
Une main pressante, Keshâ tentait de juguler la flamme de l’élémentaire, qui semblait lutter pour ne pas extraire l’information directement de ses veines. Le jeune homme cherchait en Maëlstrom un allié de tempérance le temps de pouvoir délivrer son histoire.
-« Une minute. Donc… j’ai des extraits sur l’holographe qui pourront répondre à votre curiosité, sur les dernières paroles d’Ezra, qui était devenu le Fléau. Et sur les derniers enseignements de Déméphor. Vous verrez que c’était d’une tristesse infinie. »
Il eut un égard pour la sensibilité de Maëlstrom, dont l’âme aramilane allait devoir vivre l’apocalypse d’un mythe. Sa main se posa sur la sienne par compassion.
"Demephor était un Ulule. Il a fait confiance aux hommes quand ils sont arrivés sur le territoire de son peuple il y a très longtemps. Mais les hommes, peut-être aussi l’Eglise l’ont trahi et l’ont torturé pour violer son esprit et accéder à la bibliothèque universelle qu’il renfermait. Comme Ezra, ils l’ont fusionné avec une machine et cloué sur un portail à moitié éventré… le pauvre a vécu ce calvaire deux millénaires. Quand nous sommes arrivés, ce n’était plus qu’une coquille épuisée et lasle. Il nous a supplié de le libérer son sort."
A ce moment Keshâ avança le dessin de Nemeth, illustrant le chant du dernier repos de Demephor, alors que Keshâ’rem chantait pour la divinité mourante, entouré du reste des aventuriers. Il avait cru plus humain d’expliquer le contexte et leurs intentions, avant de montrer directement les images assez choquantes… mais il allait falloir expliquer juste après la bataille pour le cristal divin, alors que le dieu n’avait même pas encore rendu son dernier soupire.
Il laissa l’holographe prouver ses dires, bien conscient que son histoire était ahurissante. La valeur de ce témoignage était inestimable, c'était le seul existant qui prouve l'histoire du dieu défunt et du Fléau.
Ven 2 Aoû - 22:00
Retrouvailles hasardeuses
Ft. Keshâ'rem Evangelisto
Il y avait toujours eu une infinie douceur au sein de Maelström. L'élémentaire l'avait déjà vu à l'oeuvre, notamment quand il s'agissait de certaines personnes. Mais aucune d'entre elles n'avaient élues domicile au Marquis, par conséquent c'était la première fois qu'il voyait ces gestes se perpétuer au-delà des oeillades devenues plus sombres depuis les pyramides. Il notait également comme cela venait te détendre, comment tu réagissais favorablement à ses gestes. Il devinait l'amour qui vous liait, sans que ce dernier ne vous emprisonne. Vous n'étiez pas de cette trempe là, parce que cette trempe-là éteindrait vos coeurs tôt ou tard.
Il fronça légèrement les sourcils quand tu t'exclaffas de rire. Il n'avait pas remarqué que sa volonté de savoir avait pu être perçue comme intense. Il savait qu'il l'était - à dire vrai, c'est dans sa nature - mais les années lui avaient permis de se montrer plus doux, du moins à priori. Peu de personnes, à part les hommes qui l'accompagnaient dans la brume ou d'autres chercheurs, n'avaient eu le privilège de le voir ainsi s'enflammer.
Tu semblais alors apprécier voir les deux hommes pendus à tes lèvres. Mais ils auraient été fous ou idiots face à tant de révélations qui continuèrent de se déverser de ton être. Seraphah ne pouvait que visualiser cet instrument de mort en cette Ezra. La mort aurait pu te faucher cette fois-ci, et malgré l'expertise plus avancée de ceux t'ayant accompagné, c'est toi qui leur permis de s'en sortir. Il notait tout cela, autant pour te glorifier si le sujet venait à être abordé sur la scène sociale, que pour ta bravoure. «Il y a l'Arbre-Dieu qui nous attend, mais cette tour mériterait à ce qu'on y retourne...malheureusement je crains que le Magistère ait plus de ressources que nous pour y dépêcher des hommes dans la minute.» Ce qu'il ne dit pas, c'était qu'Opale perdait de sa brillance...allaient-ils envoyer des scientifiques ou des hommes importants pour cette nouvelle conquête? Tout restait possible.
«Omniscience?!» Seraphah se leva, commençant à marcher de droite et de gauche, de plus en plus énervé en son centre. «Et dire qu'on m'a obligé à me tenir à Opale au lieu de me rendre dans cette tour!» Tu étais loin de la fin de ton discours, qu'il avait identifié plusieurs moments où son aide aurait été plus que précieuse. Même s'il était animé, et que son impatience face à Demephor restait palpable, il posa ses mains sur la table et se pencha, son regard se pointant dans le tien. «Continuez Kesha'rem» Sa voix était posée. Il faisait preuve d'une grande retenue en cet instant. Maelström de son côté ressentait ton trouble, mais rien d'inhabituel de son côté.
La première chose qui tomba fut ta main sur celle de l'aramilan. Il ne comprit pas ce geste, jusqu'à ce que tes paroles fassent surface. L'histoire de Demephor, ce qu'il a subit pour que les hommes profitent de lui et proclament un pouvoir qu'ils ne méritaient pas, étreignit le coeur de celui qui avait été éduqué parmi un respect immense des dieux.
De son côté, Seraphah serra les poings à la vue des images. Il n'avait jamais compris pourquoi l'humain était si avide de pouvoir. Pourquoi il ne pouvait y avoir de conscience, là où ce dernier se trouvait. C'était incompréhensible et en même temps il était devenu diplomate pour être au plus proche de ce qu'il jugeait comme l'une des pires défaillances de l'humanité. Il entendit les propos de Demephor et pendant un bref instant, un éclair passa dans son regard . Il se réinstalla, son regard se perdant sur la table un long moment après le visionnage. Le silence était devenu l'unique chose palpable. Il était entrain d'intégrer que ce qu'il voyait comme une divinité n'était rien d'autre qu'une création de l'humain. Encore lui. Une expérience qui avait mal tournée. Une expérience qui permettait d'avoir un pouvoir immense.
Maelström souleva sa main pour la porter sur celle de l'élémentaire. Ce dernier leva alors les yeux sur lui. Il ne pouvait conscientiser que sa quête était entrain de s'arrêter. Que ce qu'il a toujours pris sommes sa Mère ou son Père...n'est que de la Brume. Et que lui-même, proviendrait d'une expérience non voulue, non maitrisée...Qu'il était néant. L'aramilan en avait conscience, et si Kesha osait s'aventurer dans son esprit à cet instant, c'est ce qu'il lui dirait.
«Je suis heureux que vous ayez réussi à le libérer. Personne ne mérite un tel sort...deux millénaires, c'est tellement immense.» Premières paroles...Légère confusion intérieure. Il se redressa sur son siège: «Que s'est-il produit ensuite?» En finir avec cette histoire...il aurait bien besoin de dormir, de trouver le moyen de faire un reset. Et il comptait bien le faire à sa façon, même si le temps était compté avant leur prochaine expédition.
Ven 2 Aoû - 22:54
Retrouvailles hasardeuses
Ft. Seraphah Von Arendt / Maëlstrom
Comme un diable sautant hors de sa boîte à manivelle, Seraphah fut comme catapulté hors de sa chaise à l’évocation du nom du pouvoir divin. Celui qui leur avait glissé entre les doigts. Ses pas nerveux martelaient la moquette avec une telle opiniâtreté. Keshâ ne pouvait que le suivre des yeux de droite à gauche tel le balancier d’une pendule en attendant que la vapeur redescende.
Cela le laissait un peu désemparé. Droit comme un I, il mit du temps à se rappeler que Maëlstrom se tenait à ses côtés pour partager son infortune. Il chercha alors à rencontrer son sublime regard pour s’assurer que la situation restait sous contrôle.
-« Je comprends que vous soyez très énervés. Ce n’était vraiment pas une décision juste… On dirait qu’ils n’ont envoyés que des solitaires ou des marginaux, même si beaucoup semblaient compétents dans leurs factions. »
Cela n’avait pas empêché Amir de mourir. Avec toute cette agitation, la question de l’Arbre-dieu était temporairement chassé de son esprit. Une fois rassis, l’élémentaire entrait en fusion, d’une chaleur contenue, rentrée vers l’intérieur, Keshâ ne s’y trompait pas. C’était l’œil d’un dragon qui le couvait d’intensité en l’incitant à continuer avec gravité. Ses amis l’écoutaient, presque dans une ambiance de ferveur religieuse, si palpable que les serveurs n’osèrent pas une œillade en leur direction. Le personnel maintenait un cocon autour de leur aile du restaurant, encore désert à cette heure.
Atteint par une immense tristesse qui raviva des larmes aux bords de ses yeux, Keshâ’rem ressentit aussi la honte propre au genre humain, auteur de ces exactions. Il n’était pas là. Il n’était même pas né, quand tout cela était arrivé. Et ces atrocités étaient principalement du fait de l’Église. Cela ne réduisait en rien l’horreur étouffante qu’il ressentait encore en repensant à l’agonie froide du dieu, qui n’avait plus de larmes à verser. Dans un second temps, une peur irrationnelle le saisit, à l’idée que Maëlstrom l’accable comme tueur de dieu.
Mais il ne pouvait garder aucun des détails de cette apocalypse. Le silence qui suivit l’extrait de l’holographe était un gouffre de néant. Telle une forêt d’arbres abattus par la tempête, ils étaient tous soufflés par la vérité. En son for intérieur, Keshâ’rem adressa une courte prière à l’âme de Demephor. Dieu ou pas, il méritait un mot de réconfort pour ses nombreux tourments. L’ordre cosmique ne tournait peut-être pas selon les lois édictées par le panthéïsme, mais le jeune homme avait une foi naïve en quelque chose de plus grand. Ce quelque chose reliait les êtres à travers le temps et les dimensions.
Tout comme Maëlstrom, sa main s’empara de la main libre de Seraphah. Leurs corps formaient en cette minute un étrange triangle de douleur et de compassion.
-« Je suis désolé. » dit-il avec intention.
Seraphah ne donnait jamais l'impression d'être vulnérable. Rien ne semblait capable de l'abattre. Pourtant, Keshâ ressentait soudainement l'envie de le prendre dans ses bras et de le serrer très fort, quand bien même cela aurait pu sembler un peu dramatique. Pour lui, Seraphah restait une créature magique, qu'aucune explication à l'emporte-pièce ne pourrait banaliser.
« Je sais que beaucoup de votre quête reposait sur une certaine vision du monde… ces faits ne changent rien. Mettre en lumière une origine, n’enlève rien à la nature de ce qui évolue à sa suite. Je suis sûre que la Brume elle-même a du d’une certaine façon se sentir confuse et déracinée en arrivant dans ce monde… cela peut paraître fou d’en parler ainsi, quand on sait qu’elle a presque entièrement détruit notre monde. Mais, elle n’a pas choisi. Peut-être aussi que sa nature s’est transmutée en arrivant ici. Qu’elle est devenue autre chose que dans son monde. Une nouvelle forme d’être. »
Cela dit, Seraphah avait fait germé en lui un certain mysticisme en lien à la grande Entité. En pénétrant ses frontières, il avait pu voir qu’elle était moins bienveillante que ce qu’on lui avait laissé penser. L’élémentaire jouissait de certains privilèges grâce à sa nature.
Mais Seraphah contenait son émotion. Il savait que Keshâ avait encore des mètres de fil à dérouler avant d’arriver au bout de sa pelote de secrets.
-« Vous savez maintenant les ressorts les plus dramatiques de l’histoire. Ceux qui fracasseraient les consciences du monde… reste à vous parler du plus intéressant. Les acteurs de cette pièce de théâtre. »
Leur groupe n’était pas avare en métaphores scéniques, en préparation perpétuelle de numéro de cirque, d’opéra ou de théâtre au Marquis sous la férule du puissant mécène qu’était Seraphah, en plus de toutes ses facettes politiques et aventureuses.
« Tout ce que voulait Demephor, c’était éteindre la lumière. Il se moquait de ce qui adviendrait du cristal qui avait été cause de son malheur. Et de la race qui l’avait tahie… Assez rapidement, une fièvre est montée pour s’emparer du pouvoir suprême… »
Dans son esprit, Keshâ’rem revoyait encore la scène comme s’il y était, avec sa tension et son urgence.
-« Le plus avide fut Jeremiah, l’Opalien du Magistère. Tout le monde a voulu l’arrêter d’un même mouvement. Il était prêt à tuer tous ceux qui se dresseraient sur son passage, dans sa frénésie. Artémis et Ryker ont fait front avec noblesse. Un consensus semblait se dégager pour ne pas laisser l’Omniscience aux mains du Magistère. J’ai utilisé ma voix et le pouvoir de télépathie tout en me cachant avec une potion d’invisibilité pour rester hors d’atteinte… »
Seraphah et Maëlstrom avaient-il besoin de tant de détails ? Lui en avait besoin. Cela lui permettait d’acter la réalité de ces événements au-delà de sa tête. A se perdre dans les Ruelles et ses dédales oniriques, assiégé par une nébula, la trame de la réalité se détricotait de plus en plus. Il avait besoin que ses amis partagent ses souvenirs et le confrontent à ses incohérences s’ils en trouvaient. En tout cas, il voulait partager avec eux ce moment tragique et leur donner les clefs d’interprétation sur chacun des acteurs, en vue de rencontres à venir.
« Une fois la brute hors de combat, nous avons continué à nous battre pour la possession du cristal, mais de manière plus civilisée. Nous avons tenu conseil, en quelque sorte. Chacun a plaidé sa cause. Artémis a défendu sa neutralité, Ryker son dévouement à l’Alliance, Lewen sont altruisme et sa répugnance à porter ce fardeau… j’ai moi-même succombé à l’appel du cristal et défendu qu’aucune nation ou institution moderne n’était digne, ni même capable de le garder. C’était peut-être arrogant, mais j’ai dit que ma jeunesse me donnait assez d’innocence pour en être le gardien jusqu’à Andoria, où le conseil des anciens élémentaires pourrait le mettre sous scellé. »
Il prenait son temps pour parler. Car le résultat n’était pas un détail de l’histoire. Les circonvolutions avaient été nombreuses et les tensions palpables.
« Enfin, Nemeth s’est confrontée à moi. L’Aramilane est restée civile, mais était de loin la plus zélée. Elle récusait l’idée de confier le cristal à un Epistote, arguant que nous étions aussi dans une religion fanatique appelée Progrès. Effondrée dans sa foi, elle a voulu défendre une Église et une humanité meilleure, où nous serions ses gardiens du secret au sein d’une confrérie unie par la mort du dieu… la charge a été violente contre elle. L’athéisme de Ryker ne l’a pas épargné, en rapport aux atrocités commises par l’Eglise. Personne ne voulait croire que le cristal ne finirait pas comme instrument du fanatisme, encore une fois… »
En disant cela, ses yeux se voilèrent de tristesse. L’assaut avait été inutilement dure contre Nemeth.
« Finalement, tout le monde s’est ravisé. Et nous avons décidé de confier le cristal à Lewen, qui semblait être celui qui en voulait le moins. Nous devions nous retrouver plus tard… »
Cela le laissait un peu désemparé. Droit comme un I, il mit du temps à se rappeler que Maëlstrom se tenait à ses côtés pour partager son infortune. Il chercha alors à rencontrer son sublime regard pour s’assurer que la situation restait sous contrôle.
-« Je comprends que vous soyez très énervés. Ce n’était vraiment pas une décision juste… On dirait qu’ils n’ont envoyés que des solitaires ou des marginaux, même si beaucoup semblaient compétents dans leurs factions. »
Cela n’avait pas empêché Amir de mourir. Avec toute cette agitation, la question de l’Arbre-dieu était temporairement chassé de son esprit. Une fois rassis, l’élémentaire entrait en fusion, d’une chaleur contenue, rentrée vers l’intérieur, Keshâ ne s’y trompait pas. C’était l’œil d’un dragon qui le couvait d’intensité en l’incitant à continuer avec gravité. Ses amis l’écoutaient, presque dans une ambiance de ferveur religieuse, si palpable que les serveurs n’osèrent pas une œillade en leur direction. Le personnel maintenait un cocon autour de leur aile du restaurant, encore désert à cette heure.
Atteint par une immense tristesse qui raviva des larmes aux bords de ses yeux, Keshâ’rem ressentit aussi la honte propre au genre humain, auteur de ces exactions. Il n’était pas là. Il n’était même pas né, quand tout cela était arrivé. Et ces atrocités étaient principalement du fait de l’Église. Cela ne réduisait en rien l’horreur étouffante qu’il ressentait encore en repensant à l’agonie froide du dieu, qui n’avait plus de larmes à verser. Dans un second temps, une peur irrationnelle le saisit, à l’idée que Maëlstrom l’accable comme tueur de dieu.
Mais il ne pouvait garder aucun des détails de cette apocalypse. Le silence qui suivit l’extrait de l’holographe était un gouffre de néant. Telle une forêt d’arbres abattus par la tempête, ils étaient tous soufflés par la vérité. En son for intérieur, Keshâ’rem adressa une courte prière à l’âme de Demephor. Dieu ou pas, il méritait un mot de réconfort pour ses nombreux tourments. L’ordre cosmique ne tournait peut-être pas selon les lois édictées par le panthéïsme, mais le jeune homme avait une foi naïve en quelque chose de plus grand. Ce quelque chose reliait les êtres à travers le temps et les dimensions.
Tout comme Maëlstrom, sa main s’empara de la main libre de Seraphah. Leurs corps formaient en cette minute un étrange triangle de douleur et de compassion.
-« Je suis désolé. » dit-il avec intention.
Seraphah ne donnait jamais l'impression d'être vulnérable. Rien ne semblait capable de l'abattre. Pourtant, Keshâ ressentait soudainement l'envie de le prendre dans ses bras et de le serrer très fort, quand bien même cela aurait pu sembler un peu dramatique. Pour lui, Seraphah restait une créature magique, qu'aucune explication à l'emporte-pièce ne pourrait banaliser.
« Je sais que beaucoup de votre quête reposait sur une certaine vision du monde… ces faits ne changent rien. Mettre en lumière une origine, n’enlève rien à la nature de ce qui évolue à sa suite. Je suis sûre que la Brume elle-même a du d’une certaine façon se sentir confuse et déracinée en arrivant dans ce monde… cela peut paraître fou d’en parler ainsi, quand on sait qu’elle a presque entièrement détruit notre monde. Mais, elle n’a pas choisi. Peut-être aussi que sa nature s’est transmutée en arrivant ici. Qu’elle est devenue autre chose que dans son monde. Une nouvelle forme d’être. »
Cela dit, Seraphah avait fait germé en lui un certain mysticisme en lien à la grande Entité. En pénétrant ses frontières, il avait pu voir qu’elle était moins bienveillante que ce qu’on lui avait laissé penser. L’élémentaire jouissait de certains privilèges grâce à sa nature.
Mais Seraphah contenait son émotion. Il savait que Keshâ avait encore des mètres de fil à dérouler avant d’arriver au bout de sa pelote de secrets.
-« Vous savez maintenant les ressorts les plus dramatiques de l’histoire. Ceux qui fracasseraient les consciences du monde… reste à vous parler du plus intéressant. Les acteurs de cette pièce de théâtre. »
Leur groupe n’était pas avare en métaphores scéniques, en préparation perpétuelle de numéro de cirque, d’opéra ou de théâtre au Marquis sous la férule du puissant mécène qu’était Seraphah, en plus de toutes ses facettes politiques et aventureuses.
« Tout ce que voulait Demephor, c’était éteindre la lumière. Il se moquait de ce qui adviendrait du cristal qui avait été cause de son malheur. Et de la race qui l’avait tahie… Assez rapidement, une fièvre est montée pour s’emparer du pouvoir suprême… »
Dans son esprit, Keshâ’rem revoyait encore la scène comme s’il y était, avec sa tension et son urgence.
-« Le plus avide fut Jeremiah, l’Opalien du Magistère. Tout le monde a voulu l’arrêter d’un même mouvement. Il était prêt à tuer tous ceux qui se dresseraient sur son passage, dans sa frénésie. Artémis et Ryker ont fait front avec noblesse. Un consensus semblait se dégager pour ne pas laisser l’Omniscience aux mains du Magistère. J’ai utilisé ma voix et le pouvoir de télépathie tout en me cachant avec une potion d’invisibilité pour rester hors d’atteinte… »
Seraphah et Maëlstrom avaient-il besoin de tant de détails ? Lui en avait besoin. Cela lui permettait d’acter la réalité de ces événements au-delà de sa tête. A se perdre dans les Ruelles et ses dédales oniriques, assiégé par une nébula, la trame de la réalité se détricotait de plus en plus. Il avait besoin que ses amis partagent ses souvenirs et le confrontent à ses incohérences s’ils en trouvaient. En tout cas, il voulait partager avec eux ce moment tragique et leur donner les clefs d’interprétation sur chacun des acteurs, en vue de rencontres à venir.
« Une fois la brute hors de combat, nous avons continué à nous battre pour la possession du cristal, mais de manière plus civilisée. Nous avons tenu conseil, en quelque sorte. Chacun a plaidé sa cause. Artémis a défendu sa neutralité, Ryker son dévouement à l’Alliance, Lewen sont altruisme et sa répugnance à porter ce fardeau… j’ai moi-même succombé à l’appel du cristal et défendu qu’aucune nation ou institution moderne n’était digne, ni même capable de le garder. C’était peut-être arrogant, mais j’ai dit que ma jeunesse me donnait assez d’innocence pour en être le gardien jusqu’à Andoria, où le conseil des anciens élémentaires pourrait le mettre sous scellé. »
Il prenait son temps pour parler. Car le résultat n’était pas un détail de l’histoire. Les circonvolutions avaient été nombreuses et les tensions palpables.
« Enfin, Nemeth s’est confrontée à moi. L’Aramilane est restée civile, mais était de loin la plus zélée. Elle récusait l’idée de confier le cristal à un Epistote, arguant que nous étions aussi dans une religion fanatique appelée Progrès. Effondrée dans sa foi, elle a voulu défendre une Église et une humanité meilleure, où nous serions ses gardiens du secret au sein d’une confrérie unie par la mort du dieu… la charge a été violente contre elle. L’athéisme de Ryker ne l’a pas épargné, en rapport aux atrocités commises par l’Eglise. Personne ne voulait croire que le cristal ne finirait pas comme instrument du fanatisme, encore une fois… »
En disant cela, ses yeux se voilèrent de tristesse. L’assaut avait été inutilement dure contre Nemeth.
« Finalement, tout le monde s’est ravisé. Et nous avons décidé de confier le cristal à Lewen, qui semblait être celui qui en voulait le moins. Nous devions nous retrouver plus tard… »
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