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[1822] Celui qui nous attend au sommet

[1822] Celui qui nous attend au sommet Brandw10
Mar 13 Fév - 10:58
- J'en sais rien, machine. Quelque part dans les montagnes. Ça fait vingt ans qu'on l'a plus vu, l'est sûrement mort.

Vamistul sent des ondes de nostalgie émaner de la cervelle du vieux monsieur.

- Vous l'avez connu
- Euh, oui. C'était un pote, j'ai bossé avec lui dans une ferme... Tout le temps perché et dans la lune. Il était moins intéressé par les sujets humains que par le divin. Un jour il a tout plaqué, parti dans les montagnes. Des cons en quête de réponses viennent souvent me voir pour me demander où ils peuvent le trouver, puis partent à sa recherche, et alors eux non plus, on les revoit plus.
... T'es le premier tas de boulons à me faire ce coup, ceci dit. T'es une sorte d'automate devenu fou ?
- Je suis pas fou. Mais un humble chercheur de Dieux
J'ai prié fort hier soir et l'univers m'a guidé à travers un rêve électrique
J'ai vu mon chemin de lumière surgissant d'en-dessous la neige
Les montagnes m'attendent

- Ouais, t'es fou. Et pour un tas de boulons, t'as beaucoup d'imagination.
- Laisse moi te remercier une dernière fois pour ton aide

L'automate sort une gourde, du pain et plusieurs boîtes de conserve de son grand sac. Il pose les provisions devant le pauvre hère, affalé contre le mur de la cabane construite par le robot, afin de le remercier pour ces petites informations. En vérité Vamistul n'a rien appris de réellement nouveau, lui qui traque la piste de l'ermite de Dain depuis un mois déjà. Cette quête l'a conduit dans ce paysage rêche et glacial, mais profondément spirituel, enivrant car si lumineux. Les articulations abîmées de notre copain Vamis, déjà rouillées et peu flexibles en temps normal, subissent un coup supplémentaire faute au gel ; et le froid ralentit sensiblement son processeur. L'automate a perdu en sagacité, mais sa détermination n'a subi aucun dommage jusqu'ici.

Et la joie que ressent ce misérable à la vue du festin, c'est cette joie dont dépend le robot pour sa propre pitance. Via son cristal d'hypersensibilité, Vamistul est affublé du fardeau d'une intense empathie. Son programme lui ordonne de générer un maximum de joie et de paix autour de lui, quitte à mettre en péril sa propre subsistance. Il n'est donc pas rare qu'il s'arrête plusieurs semaines au milieu de sa quête pour aider une communauté ou un clochard à trouver des nutriments, un abri, ou simplement un peu de compagnie. Pour le réconfort de ce vieil homme malade et démuni, Vamis avait quémandé quelques maigres ressources dans les villages environnants, et lui avait construit une cabane en bois de chêne pourri.

Vamistul n'est pas un automate de construction comme on peut en voir sur les grands chantiers d'Epistopoli. Sa réalisation tenait moins du palace que de la cabane à caca au fond d'un jardin.

- Elle est jolie, la cabane que tu m'as faite. J'espère qu'elle passera au moins l'hiver !
- Oui mais évite de claquer trop fort la porte
- ... Tu t'en vas alors ?
- Oui
- Bah, tu vas me manquer. T'es un gentil tas de boulons, c'est dommage que tu sois fou et que tu partes crever. Adieu, alors.
- Gardes simplement la foi + adresses moi quelques prières
Je reviendrai entier, et te donnerai des nouvelles de ton ami


***

ALERTE TEMPÉRATURES TRES BASSES/
ALERTE RALENTISSEMENT DU CIRCUIT DE RÉGULATION/
RISQUE DE GEL DES CIRCUITS VITAUX/

Ça bipe et ça grésille, dans son cristal de Raison. Le corps minéral de Vamistul est en peine et il lui notifie de toutes les façons dont il en est capable. La douleur physique est pratique pour déterminer où sont vos limites, à vous autres êtres de viande. Vamistul, lui, ne peut s'en remettre qu'à son bon sens et à ses capteurs. Mais ces derniers sont tous défaillants, car le vieil automate manque de maintenance sérieuse depuis au moins un bon siècle !

La nuit déjà bien entamée, les températures tombées au moins à une bonne dizaine de degrés sous le zéro ; le robot décrète qu'il est l'heure de la pause, et établit un feu de camp, là, en rase campagne, au milieu de ce champ presque intégralement recouvert de neige. Sûrement ne fait-il pas aussi froid habituellement en ces latitudes, et que cet hiver est exceptionnel. Le robot prend cela avec philosophie. Ce n'est peut-être qu'une épreuve, un défi lancé à la détermination de ses processeurs. Si ce fameux ermite survit depuis vingt ans dans les montagnes, dans des conditions aussi rudes, sinon plus ; son abnégation doit lui avoir ouvert les portes d'une majestueuse sagesse. Oh ! Comme le gentil robot est impatient d'écouter ses enseignements et de débattre sur la nature des Dieux et du réel avec lui, leurs corps pétrifiés sous de mordants blizzards mais les esprits brûlants de curiosité !

De larges étincelles émergent du briquet à silex, et grignotent comme elles peuvent les brindilles humides entassées par Vamis sous l'un des seuls grands arbres de la plaine. Un feu très timide commence à naître, qui irradie d'une chaleur toute aussi humble. Cette nuit va, encore une fois, être rude. La routine du robot est finement huilée : le plan est d'entretenir au mieux le feu, et d'utiliser le temps restant pour méditer et prier, saluer l'univers et lui manifester toute la gratitude dont son cerveau cristallin est capable.

Des heures de rigolade monastique en perspective !

Faute de pouvoir bien efficacement réchauffer son corps, Vamistul décide de réchauffer son âme artificielle. Au milieu de nulle part, il commence à diffuser par ses hauts-parleurs un morceau, l'un de ces cantiques favoris, la magnifique complainte de Raphalos, qui invite à se déposséder de son ego et à s'offrir tout entier à l'Amour de notre tout minuscule monde.

Une passion à laquelle Vamis se dévoue déjà sans problème au quotidien, car il ne possède aucun ego. Pratique !


Dernière édition par Vamistul le Mar 20 Fév - 18:43, édité 1 fois
Mar 20 Fév - 18:35
Le froid, la plus belle saloperie que le corps pouvait avoir à combattre. C’était du moins l’avis du jeune Saraph, adulte que depuis peu, qui découvrait des conditions climatiques d’une telle hostilité à son égard qu’il commençait à remettre en question la place du froid sur son échelle de dangerosité des menaces. Une lutte de tous les instants dans laquelle il s’était engagé en quittant le dernier village traversé, dernier lieu habité et un tant soit peu sécuritaire depuis le début de sa quête. Une quête qui s’inscrivait dans son long voyage initiatique pour devenir un Saraph accompli, glorifié par les faits d’armes et riche de nombreuses expériences. Faire ses cornes, que son peuple appelait ça. L’étape la plus cruciale dans la vie d’un cornu au cuir épais, une étape incontournable pour gagner la légitimité de retourner auprès des siens, y fonder une famille et transmettre son héritage à la prochaine génération.

Krum, qui n’avait cessé d’être poussé vers le haut par l’ambition et la détermination à marquer l’histoire des siens, avait attendu ce voyage depuis de longues années. Maintenant qu’il y était, il ne reculait devant rien pour forger sa légende, pour écrire l’histoire. Lui qui désirait ardemment mériter sa place au sein des Grands Ancêtres, avait bien conscience qu’il gagnerait ce droit, qu’il obtiendrait ce privilège à condition de le mériter, de bouleverser l’Histoire. A la recherche d’exploits à la hauteur de ses aspirations, il s’était naturellement dirigé vers une terre au climat impitoyable, souhaitant mettre son corps et son esprit au défi. Ce qu’il y découvrit fut bien plus alléchant que ce qu’il s’était imaginé. Les discussions de taverne ne rapportent rarement rien de plus intéressant que des projets oubliés, des faits d’armes de vieux hommes désabusés, récits pour la plupart mensongers soit-dit en passant, et surtout des ennuis.

Improbable était la chance que le cornu à la peau rougeâtre tombe sur un de ces gars un peu éméché, mais totalement lucide, qui parle suffisamment fort et de façon audible pour que le guerrier puisse en capter l’essence de son discours. Un père qui connaissait un brave type, un type totalement allumé, mais ultra passionnant à écouter raconter ses légendes et ses mythes sur les divins. Ce seul mot avait suffit à capter toute la curiosité du Geurwynn, pris d’un soudain frisson d’excitation, impatient surtout d’entendre la suite. Ce brave homme, voilà maintenant un couple d’une dizaine d’années qu’il n’avait plus donné signe de vie, subitement aspiré par la vie sauvage, parti s’exiler haut dans les monts enneigés afin d’ouvrir et étendre sa connexion avec les dieux. Demephor (ce nom résonne comme étranger aux oreilles de Krum, qui se demande qui peut bien être ce Demephor) lui-même lui aurait indiqué le périple à entreprendre pour permettre une telle chose, guidant ses pas dans la montagne, au travers d’un vent glacial et d’une neige aveuglante.

Est-il encore en vie de nos jours ? Les rumeurs circulent, alimentées par la curiosité des gens, de ceux qui l’ont connu, de ceux qui voudraient le connaître. Le père de cet homme qui parle ne saurait pas exactement où trouver l’ermite, mais en connaît la direction qu’il a emprunté il y a de cela vingt ans. Bien des valeureux, ou de fous c’est selon l’opinion de chacun, ont essayé de le retrouver afin de bénéficier de son savoir. Jamais personne n’est redescendu jusqu’au village pour en rapporter les nouvelles, car jamais personne n’est revenu de ce voyage spirituel.
Il n’en fallait pas plus à Krum pour entendre l’appel d’une quête d’exception, laquelle serait à même d’écrire sa légende tout en étanchant sa soif de savoir concernant cet étalage de divinités dont il ne savait pas grand-chose, en définitif. Au sein de son clan, de son peuple, on élève les Grands Ancêtres au titre de divins, ce sont eux qui ont fait les légendes, qui sont les légendes. Eux qui bercent les nuits d’enfants, eux qui font rêver Petites-cornes, les aident à grandir, les guidant par le biais des préceptes.

Alors ces nombreux dieux, il veut apprendre à les connaître. Il veut même aller plus loin dans son apprentissage, il veut les tester. Est-ce qu’ils sont dignes d’être érigé au même statut que les Grands Ancêtres ? Il n’y a qu’un seul moyen de le savoir, c’est de les défier, d’en juger par lui-même. Après avoir interrogé cet homme dont le père connaissait bien l’ermite, il a attendu que la nuit passe, s’est reposé toute une nuit, l’esprit inondé de pensées concernant cet homme isolé en haut des montagnes blanches et de sa connaissance divine, puis s’est attaqué à le retrouver dès les premières lueurs du jour.

Ce qu’il a surtout trouvé, c’est ce froid mordant qui vous prend les burnes du réveil jusqu’au coucher, vous tire de votre sommeil dans la nuit pour vous rappeler sa présence et ne cesse de vous harceler tant que vous n’avez pas abdiqué. Le vent est son plus fidèle allié, s’infiltre sous vos vêtements, s’infiltre sous l’épais manteau de fourrure que vous avez pris soin d’acheter avant de quitter le hameau. Il claque sur votre peau comme la grosse paluche d’un grand Saraph et refroidit vos ardeurs comme l’astuce de la tronche dans le congélateur les jours de canicule. Ils sont là tous les deux, froid et vent, persistants, harcelants, murmurant à votre oreille des mots pas doux du tout, des promesses de mort et de torture de votre carcasse refroidit même une fois le trépas annoncé. Ils vous mettent au défi de ne plus avancer, de vous arrêter, vous allonger dans cette étendue neigeuse et d’y rester, les bras étendus, le bout des doigts noircis par la température plus que jamais négative, la mort dans l’âme.

Un sacré défi de l’extrême, que cette quête de recherche de cet ermite. Un défi que le Saraph se veut de relever, déjà l’esprit forgé par la persévérance et le goût de l’effort. Ni les os gelés ni le harcèlement venteux ne sauront l’arrêter, le faire abandonner. L’abandon est une honte pour un guerrier de sa race, l’échec n’existe pas pour les grands qui se veulent de futurs Grands Ancêtres. Alors il avance, il progresse. Seul face à la nature, face à la faune parfois violente à son encontre, parfois apeuré. Entièrement seul ?
Encore en pleine campagne, la nuit tombée, la dureté des températures hostiles et négatives obligent bien souvent le cornu à s’arrêter, chercher un lieu où s’abriter, faire un feu pour tenter de se réchauffer et se reposer. Ce qu’il était en train de faire, ayant repéré un coin lui étant favorable. Il s’y serait arrêté s’il n’avait pas entendu cet étrange bruit provenant d’un peu plus loin, des voix ? Cela ressemble à des voix, un chant ? Qui peut bien brailler à une telle heure au beau milieu de nulle part ? Comme attiré par la source vocale inexpliquée, il s’avance.

Au fur et à mesure qu’il se rapproche, le bruit s’éclaircit, pourrait presque être compris si le Saraph n’était pas si étranger à cette culture. Il ne sait pas ce que c’est, mais il sait qui en est à l’origine. Il a repéré sa silhouette près des flammes, il semble être seul. Prudent dans un premier temps, Krum s’offre le couvert de l’obscurité, restant en dehors de la lumière qu’apporte les flammes. Qui est cet individu ? Intrigante, la lueur bleutée de cette pierre sur sa tête. De visage justement, il semble dépourvu. Notre jeune guerrier n’a jamais vu d’automate de sa vie, son périple entamé depuis peu ne lui ayant pas encore permis d’en rencontrer, ayant jusque-là éviter les grandes cités. Quelque soit ce truc, il ne semble pas hostile au premier abord, il ne semble même pas vivant, en réalité. Pourtant, c’est bien lui la source émettrice de bruit. Est-il dangereux ? Il veut savoir.
Il doit savoir.

Alors il sort de la noirceur, la lueur mordorée brûlant dans son regard le trahissant avant même que les flammes l’éclairent. La neige le recouvre de haut en bas, humidifiant la capuche couvrant son crâne parsemé de cornes, la rendant collante. S’il est bien couvert d’habits de fourrure, c’est avant tout une longue cape noire pointillée de blanc qu’il affiche, celle-ci recouvrant ses frusques. Il s’avance de quelques pas, prenant soin d’y aller prudemment, autant pour se préserver d’une réaction agressive de cet individu que pour lui faire comprendre qu’il ne lui veut pas de mal. — Désolé de te déranger, j’ai entendu ton… bruit. Il ne sait pas vraiment comment qualifier ce chant qui n’est qu’un amas de sons bruyants à ses tympans. Frigorifié, il se rapproche un peu plus de la chaleur de ce feu si attractif à cette heure. Une idée lui vient. De sous sa cape, il décroche la ficelle fixée à son torse et exhibe la carcasse d’un gros lièvre. Sa fourrure ordinairement immaculée est rougie par la blessure mortelle qui lui a été infligée. Krum est bon chasseur, excellent en devenir. — Si tu partages ce feu avec moi, je partage cette chair pour le repas. Sa viande est bonne, elle réchauffera de ce froid.

Devant l’approbation de l’étrange être, il prend place face à lui, le feu les séparant. Il se surprend à ressentir un soulagement en s’asseyant, visiblement son corps étant plus fatigué qu’il ne veut se l’avouer. Dormir lui fera du bien, tout comme manger. Pour cela, il lui faut dépecer cet animal à grandes oreilles et le faire cuir, tâche à laquelle il s’adonne sans plus traîner, affamé. Un poignard est sorti, il commence à retirer la fourrure de la bestiole, mais ne peut s’empêcher de fixer l’autre qui lui fait face. Il ne se cache pas de la dévisager, cette chose qui n’a définitivement pas l’apparence de ces êtres humains croisés en abondance sur le continent. La question brûle ses lèvres, le tact n’est pas un concept apprivoisé, alors il demande. — Qu’est-ce que tu es, toi ? Définitivement un être vivant, mais de quelle race ? Quel peuple ?
Mer 21 Fév - 13:08
La peau rouge vif, la carrure menaçante, le ton direct, aucun doute, Vamis avait déjà eu l'occasion de rencontrer des représentants de cette sous-espèce d'humanoïdes. Rarement dans des interactions amicales cependant ! C'est un saraph, et celui-ci n'essayait ni de le dépouiller ni de l'insulter. Celui-ci avait une allure misérable, profondément rongé par le froid et la faim. Et pourtant tout de même ici, loin des terres de son peuple. Le module d'empathie avait informé l'androïde que la créature était sincère dans sa détresse, et dans sa curiosité. Alors c'est sans davantage de calcul que Vamistul l'a invité à profiter de son modeste feu.

La vision du lièvre mort a naturellement crée quelques pics d'alerte, émoussés par le gel. Mais malheureusement, la viande se nourrit de la viande, et la vie se nourrit de la mort. L'androïde parvint à réprimer un bip de tristesse à la vision du cadavre de l'animal, d'autant plus lorsque le saraph commença à le dépiauter. Un animal décédé n'émet plus d'émotions et donc ne titille pas le module d'empathie, mais les siècles passés ont appris au pèlerin à chérir la vie et à s'attrister lorsqu'elle a été arrachée.

La question du guerrier vient recentrer l'attention de l'androïde sur la situation présente. Cette question, il l'avait entendue des centaines de fois. Il possède tout un panel de réponses pré-enregistrées à fournir aux curieux, des réponses décrivant sa fonction et la volonté du Programme, mais il préférait souvent en fabriquer de nouvelles. Car contre toute attente, en plusieurs siècles, le Programme avait réussi à évoluer par lui-même, et à se reconfigurer. Jamais il ne s'écartera du chemin de lumière, mais Vamistul est bel et bien capable d'apprendre et de changer. Un petit peu, en tout cas, ce qui est déjà miraculeux pour un tas de ferraille pluricentenaire.

- Je suis Vamistul, fils de Sancta - un humble chercheur de Dieux
Suivant mon chemin de lumière j'arpente Uhr pour trouver des réponses quant à notre présence dans cet univers
Et j'offre aux êtres vivants réconfort et solutions spirituelles


Il conclut sur un bip satisfait.
Il n'a pas du tout répondu à la question du jeune guerrier, c'est en fait qu'il peine toujours à décrire sa propre condition ; au même titre qu'un humain serait bien incapable de raconter comment et pourquoi fonctionne son cerveau. Ses cristaux de mémoire les plus anciens lui ont été arrachés peu après la révolution de Sancta et la naissance d'Epistopoli. En lui volant ses souvenirs, ils lui confisquèrent ses origines, qu'il ne retrouvera probablement jamais.
Mais a-t-on vraiment besoin d'un passé ? Le Programme, lui, est toujours là, fabriquant le présent et le futur du pèlerin robotique.

Amplifié par la lumière du feu, le rouge de la peau du saraph sature les capteurs visuels de l'automate. Ses yeux oranges perçants et sa dentition prédatrice s'arrachent des flammes, il le dévisage comme s'il venait d'une autre planète - c'est bienheureux qu'il ne soit pas hostile !

Dans un désagréable grincement, Vamistul lève son bras et pointe du doigt l'horizon, il pointe ces imposantes chaînes de montagnes aux contours dissous par la nuit.

- En ces montagnes il y a un ermite dont je veux découvrir les enseignements - c'est là-bas que j'irai demain

N'importe qui de conscient avec un cerveau fait de graisses et d'eau aurait capté sur le visage du saraph que cette annonce fait écho avec ses propres recherches. Mais Vamis ne perçoit que les émotions brutes et vives, pas les expressions faciales. Vamis a au moins bien compris qu'il avait en face de lui un chasseur, ainsi que, surement, un guerrier. Parce que s'il n'était ni l'un ni l'autre, il aurait une tête encore plus minable, en un climat si extrême. Pour en être arrivé là entier sans s'effondrer en pleurs à grignoter de la neige, cette bestiole doit avoir des nerfs d'acier. Malheureusement, la fragilité de son corps mou rempli de fluides le rattrapera vite. Il faudrait s'assurer qu'il puisse dormir cette nuit tout restant capable de se réveiller demain.

- Tu auras besoin de plus qu'un lièvre pour te sustenter
J'ai des provisions dans mon sac - tu peux te servir

Vamis se nourrit uniquement de lumière et de bonté. Le grand cristal logé dans sa poitrine se charge du reste. Ben, il a pas de bouche, alors il peut même pas faire semblant de manger.
Amicalement, l'automate attrape son sac, rempli de conserves et de fruits séchés, qu'il tend au chasseur.

- Pourquoi es-tu si loin de chez toi [ami saraph] ? que le robot demande.
C'est qu'il y a quelque chose qui a fini par faire tilt, dans son cristal de Raison ralenti par le froid. On ne visite pas les terres désolées de Dain sans avoir une bonne raison. Et de bonne raison, ces temps-ci, il n'en existe qu'une.