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Un plan aqueux sans tête | Pamyfja & Jessamy

Un plan aqueux sans tête | Pamyfja & Jessamy Brandw10
Mar 11 Juil - 20:13
Une garde à vue n'avait jamais été aussi chaotique.

-…Bien évidemment, vous comprenez bien que les informations concernant les armes de destruction massive epistotes ne peuvent "tomber dans l'oreille" de n'importe qui.

-Cela n'est pas à toi d'en décider, répondit un gradé du guet. Si ce que tu dis est exacte et que tu es véritablement au service de notre patrie, alors tu nous dois une obéissance absolue.

-Oui mais…

-Non ! Si nous sommes dans cette situation, c'est uniquement parce que nous espérons en tirer profits. T'as docilité jusqu'à maintenant à certainement joué en ta faveur, mais cela va bientôt prendre fin. Il y a quelqu'un qui "sait". Son jugement sera le nôtre.

Je n'ai aucune idée de ce que je suis en train de faire et je ne présage rien de bon pour la suite…

-Quand arrivera-t-il ?

-Il est déjà là.

La porte s'ouvrit en grand comme si on lui avait donné un coup de pied sans pour autant qu'elle ne s'éclate contre le mur. L'homme qui se tenait sur son porche était tout ce qu'il y avait de plus quelconque. Tellement banal d'ailleurs que cela le sortait de l'ordinaire. Un monsieur tout le monde par excellence. Il pourrait faire ses courses dans la supérette du coin, ou alors se trouver au milieu d'une réunion officiel d'importance, jamais on imaginerait qu'il n'y avait pas sa place. Dans son style vestimentaire on voyait de l'élégance à bas prix, un sobre fade ; et le tout criait une personnalité effacée. L'automate étudia ce paradoxe avec excitation.

Le gradé laissa sa place à celui qui "savait" et s'en alla rejoindre la foule à l'extérieur, car oui, cet événement était une première et tout le monde se demandait ce qui allait bien se produire, un café à la main. On chuchota tout de même à monsieur tout le monde quelques mots.

-On la marinée pendant des heures avec des questions réponses, pas une seule faute. Aucun signe flagrant de mensonge, mis à part… un entrain décalé.

-Je vois, marmonna celui qui "savait".

Il dirigea son attention sur la machine armée d'un sourire. À force de demande, Pamyfja avait retrouvé son visage et avait obtenu le droit de faire une courte maintenance sur son épaule abîmée.

-Tu mens, commença-t-il.

-Mais je n'ai encore rien dit, se défendit-elle.

-Je sais que tu mens, car il n'existe aucun automate sous notre contrôle.

-Il faudra viser un peu plus haut dans la hiérarchie dans ce cas.

-Il n'y a pas plus haut.

-Ah.

C'est tout ? Ce bluff s'arrêtait-il vraiment là ?

Sans prévenir, cet homme qui avait paru absolument serein jusqu'à maintenant explosa dans une fureur inouïe et se mit à hurler des questions sans s'arrêter. Pamyfja, recevant le premier jumpscare de son existence, poussa un cri particulièrement strident qui eut le mérite de vriller les tympans de toute l'assemblée.

-Sortez-moi d'ici, il est fou !

Personne ne répondit à son appel à part les hurlements qui inondaient la petite pièce.

L'exercice dura cinq longues, très longues, minutes. On en venait à se demander s'il restait de l'air dans les poumons du fou furieux, ou encore comment ses cordes vocales n'avaient pas rompues. N'importe qui aurait eu une extinction de voix après un tel éclat. L'automate avait fini par se recroqueviller sur le sol, dans une sorte de position fœtal. Durant ce temps, on remarquait que la température avait drastiquement augmentée.

-Assez, assez ! Je vous en supplie, arrêtez. Je suis désolée, je vais tout avouer.

L'ouragan s'arrêta net. Monsieur tout le monde se redressa, ajusta sa cravate, remit la table - qui avait été projetée à un moment donné - sur ses pieds et invita l'automate à s'assoir. Terrifiée, elle s'assit sur sa chaise tout en essayant de se tenir le plus loin possible de cet énergumène.

-Parle, lâcha-t-il.

Pamyfja y vit la menace d'un nouveau mauvais moment.

-D'accord, mais avant ça, j'ai besoin d'un verre d'eau.

-Les automates ne boivent pas.

Elle répondit du tac au tac avec la première chose qui lui était venu à l'esprit pour n'éveiller aucun soupçon.

-J'ai envie de pleurer, mais je ne peux générer mes larmes toute seule.

Ce qui était absolument vrai sur toute la ligne.

-Allez lui en chercher un.

Avec un pouvoir frôlant l'omniscience, il sut qu'on ne l'avait pas immédiatement obéit et il lança un regard courroucé vers la vitre teintée. On se bousculait maintenant à la fontaine à eau.

Le verre d'eau arriva très vite. L'homme qui "savait" desserra sa cravate et battit l'air d'une main pour tenter de se rafraichir. Depuis quand faisait-il si chaud ? Pamyfja se saisit du gobelet avec espoir.

-Merci beaucoup.

Elle ouvrit la porte de son torse et jeta le liquide sur ses processeurs qui tournaient à plein régimes, avec le système de refroidissement éteint, depuis maintenant dix minutes. La machine infernale cracha une vapeur brûlante qui inonda la pièce, transformant les individus en silhouettes sombres.

Ce fut à ce moment-là qu'elle engloutit la potion d'invisibilité et força le passage à coups d'épaules. On compte depuis cet accident huit portes mortes et six blessées.

RÉSUMÉ : Pamyfja s'enfuit du guet en consommant la potion que lui avait donné Lilie !

- - -

Elle courait, puis elle s'arrêtait et enfin on la retrouvait. Le cycle se répéta une dizaine de fois.

-Je commence à en avoir marre. D'accord je ne me fatigue pas, mais ça n'empêche pas que j'ai envie de faire autre chose de mon temps, se plaignit-t-elle en forçant le passage d'un énième barrage.

Curieusement, ils avaient reçu l'ordre de ne pas la blesser tant qu'elle ne mettait la vie de personne en danger. Cela ne facilitait la tâche à personne.

Après avoir une nouvelle fois semée ses poursuivants, elle arriva dans une ruelle sombre et déserte. Le mot désert dans ces circonstances était très rare à Xandrie au vu de la densité de la population.

-Une ruelle obscure ? Voilà ma chance !

Elle se racla, faussement, la gorge.

-Frères et sœurs de la nuit, du monde illicite et excitant, votre compagnon de toujours, Fauchon Ivre est de retour et a besoin d'un coup de main !

Sa voix ne fit même pas écho pour se moquer d'elle.

-Allez quoi ! S'impatienta l'automate. J'en ai "ma claque" moi des courses poursuites. C'était marrant au début mais je crois que je suis écœurée maintenant…
Jeu 20 Juil - 17:00
Qu'il est bon de revenir à Xandrie.
Les rues exhalent fragrances d'épices, musc humain et poussière. Un cocktail bien trop irritant pour son museau sensible. Rassurant, pourtant. Familier. Tout comme ce bouillonnement de vie qui s'agite en tout sens, et dans lequel il faut se plonger pour espérer atteindre l'autre bout de la cité. Peaux, fourrures, écailles se heurtent au corps frêle de la mutante. Elle frôle leurs cuirs en louvoyant difficilement, sa canne lui ouvrant le chemin. Sa poitrine se creuse dans un souffle, tandis qu'elle trouve refuge auprès d'un mur. Elle s'appuie sur la pierre froide de la Juste, pestant un peu contre ses effusions. Tout de même : elle préfère cela aux couloirs froids de Dainsbourg, à leurs cadavres et à leurs secrets. Xandrie, elle, est bien vivante. Éclectique. Et, surtout, surprenante.

Les pas de Jessamy la mènent dans les boyaux moins fréquentés du ventre de la Juste. Ceux qui recrachent les révolutionnaires à la petite semaine, les enfants-chiendent, les petites frappes, sœurs et frères de galère. Les yeux et les oreilles de la Blanche.

La mutante atterrit dans son boui-boui préféré, L'aile de requin. Troquet plus ou moins officieux, fréquenté par des bestioles aux dents longues, qui se charge la nuit de cris furieux et d'uppercuts fracassants. Le jour, ses murs ressemblent à ceux de n'importe quel bar un peu miteux ; sur l'enseigne en bois fraîchement repeint, des vaguelettes noires laissent percer un aileron. En entrant, Jessamy salue les piliers déjà présents. L'un d'eux, un zoan au regard de corbeau, s'approche d'elle, le nez froncé. Un sourire éclaire son visage maigre, mais son attention semble ailleurs.

« Salut, la Blanche. Ça fait un moment qu'on t'a pas vue. Long courrier ?
— J'ai été occupée, fait-elle, sibylline. T'as pas l'air dans ton assiette. Il s'est passé quelque chose ?
Le garçon de cuisine se tourne vers la porte qui donne sur l'arrière-cour, là où s'entassent d'habitude les poubelles et les ivrognes. Son expression polie s'affadit, rattrapée par l'inquiétude déjà présente. Il passe un doigt dans son col comme pour éviter de s'étouffer.
— Y a un drôle de spécimen qui se balade, dehors. Tu me diras, c'est normal par ici, sauf que le Guet et un type que je connais pas la cherchent partout. Elle va vraiment attirer l'attention avec ses bricoles.
La mutante lève un sourcil circonspect. Les mots sont soigneusement choisis, et la crainte légitime. Les autorités ont L'aile de requin dans le viseur depuis longtemps, sans être parvenues à dénicher l'illicite. Elle emprunte le sourire carnassier à l'animal qui a donné son nom au bar.
— Les drôles de spécimens, c'est mon truc. Je la fais passer par la cave ?
— Traîne pas trop. Merci, Jessamy.
— Ça te laisse le temps de me préparer une assiette de viande gratuite. Merci à toi ! », qu'elle lui lance en poussant la porte de derrière.
Une fois dehors, petite silhouette diaphane découpée dans l'obscurité, elle se fige aux syllabes qui parviennent jusqu'à elle.

« … votre compagnon de toujours, Fauchon Ivre est de retour et a besoin d'un coup de main ! »

Sa tête se tourne aussi vite que celle d'un oiseau curieux. Sa main resserre un peu son emprise sur la poignée de sa canne. Fauchon Ivre…? Elle détaille de haut en bas la silhouette fugitive. Elle est (très) grande, en plus d'être (très) bruyante. Aux morceaux de métal qui ornent son faciès et aux sabots qui prolongent ses jambes, Jessamy devine qu'elle n'est pas humaine. Et à ses mots, elle comprend qu'elle n'est pas non plus habituée au côté sulfureux de la Juste. Une cible idéale.

Jessamy sort de la pénombre comme un insecte, sa présence précédée par le frappement léger de sa canne sur le sol. Ses yeux s'étrécissent un peu, jaugeant l'inconnue de la tête aux pieds. Sourire en coin, elle se fait grinçante :

« Salut. On peut t'aider, ou t'as encore un truc à déclarer bien fort histoire que le Guet t'entende ? »

De sa main libre, elle fait signe à la fuyarde de la suivre, avant de glisser par-dessus son épaule :

« Au fait, personne ne parle comme ça ici… Fauchon Ivre. »

Étouffant à peine un ricanement dans les plumes de son bras, Jessamy lui ouvre à nouveau la porte de l'arrière-salle, l'invitant à entrer de la pointe de sa canne. Elle penche un peu la tête sur le côté, songeuse. Décidément, Xandrie n'a pas fini de l'étonner. Qu'il est bon d'y revenir.
Lun 24 Juil - 17:25
La porte arrière d'un bouiboui fréquenté par des filous s'ouvrit et laissa passer une femme à l'apparence singulière. Il était difficile de la croire humaine ; son teint blafard et ses yeux rouges témoignaient d'une origine exotique, mais c'était surtout ses quelques plumes qui mettaient la puce à l'oreille de l'automate. Grâce à son "stage" dans le département de biologie du pôle, elle avait appris à reconnaitre la plupart des races à la simple vue d'un organe, voir même d'un tissu organique d'une quelconque partie. L'esprit de Pamyfja cocha la case "Banshee", mais cette conclusion ne la satisfaisait pas complètement. Quelque chose clochait.

  Observant sa future amie avec curiosité alors qu'elle lui parlait, la machine bruyante agita sa main en signe d'apaisement.

  -Oh non ne vous en faites pas. Il me reste encore trente-deux secondes d'avance sur mes poursuivant, ils ne sont pas à portée de voix et OUI ! Je vous en supplie, aidez-moi.

  L'automate suivit docilement sa sauveuse sans douter un seul instant de sa bienveillance

  -Je dois paraitre désagréable pour vous, je suis désolée. Tout ceci est nouveau pour moi et je ne sais pas encore comment m'adresser aux gens sans les perturber…

  Ça, ou le fait qu'elle était une jeune femme de deux mètres de haut qui se comportait comme une gamine. Qu'importe le choix de mot qu'elle ferait à l'avenir, elle finirait toujours par malheureusement faire tourner les têtes. Mais qu'entendait-elle par, "tout ceci est nouveau pour moi" ? Évoquait-elle sa nouvelle existence à l'extérieur du pôle ? Son statut de fugitive ? S'adresser à autre chose que des scientifiques ?

  On l'entraina dans une cave en passant par un escalier étroit au plafond bas. Le pauvre automate dû se plier en deux pour progresser, mais cela ne semblait pas la déranger plus que ça vu que l'expérience avait l'air de véritablement la réjouir. À l'extérieur, les trente-deux secondes s'étaient écoulés et une petite troupe débarqua dans la ruelle et chercha de ses regards la fugitive, voir un témoin oculaire. Traquer leur cible n'avait pas été difficile jusqu'à maintenant, après tout, sa description rafraichissait très vite la mémoire de ceux qui l'avaient croisé. Tout naturellement, leur attention se tourna vers l'établissement pittoresque qu'était L'aile du requin et ils bouclèrent rapidement les environs en interrogeant la populace réticente des environs.

  Dans l'obscurité du sous terrain, des yeux bleus intenses se rivaient dans ceux de la femme à plumes. Le plus perturbant dans tout ça, c'était que Pamyfja avait l'air comblée.

  -Un passage secret, se glissant sous la ville et abritant la deuxième Xandrie, celle qui est sombre et qui s'accroche à la vie malgré les aléas de la vie… On se croirait dans un film !

  Mais à quel moment eu-t-elle le temps d'assimiler toutes ces références ? Les soirées canapés et popcorn n'avaient jamais fait partie de son emploi du temps. Aurait-elle consultée des flux vidéos égarés dans la base de donnée du pôle ? Qui était l'imbécile qui glandait au bureau au lieu de taffer !?

  L'automate risqua un zoom sur la peau de sa compagne pour tenter de satisfaire sa curiosité. Sans prévenir, elle étouffa un cri poussé dans un sursaut et cacha ses yeux d'une main en pointant le poignet presque transparent de la banshee. Un de ses yeux perçait tout de même leur protection, certainement d'une manière volontaire.

  -Vous exposer comme ça ! Je n'oserais jamais, c'est trop… C'est trop ! Qu'elle assurance vous avez à vous révéler à ce point…

  On aurait cru qu'elle parlait de la tenue de la jeune femme. Mais non, elle pointait belle et bien sa peau laiteuse qui laissait transparaitre ses vaisseaux sanguins. Bien que différente, les automates possédaient aussi une notion de la pudeur.
Mer 23 Aoû - 13:05
Jessamy saisit au vol chaque note de l’étrangeté de la rescapée. Ses mots, sa façon d’être, ont une saveur particulière. Familière. Une forme de naïveté qu’elle se souvient avoir expérimenté, il y a de cela des années. Elle se demande si celle qui enclenche la voix artificielle est la même. Si elle aussi est un engin de mort fugitif, découvrant à peine la complexité du dehors. Elle lui répond d’un timbre posé :

« Parle-moi comme tu veux. T’as l’air paumée, en plus d’être coursée par le Guet. On va te sortir de là. »

La mutante devance l’immense architecture de métal, intriguée par les sabots qui la portent. Elle n’avait jamais rien vu de pareil. Son ventre se comprime d’une curiosité mêlée de dégoût pour ceux qui ont fabriqué cet être trop grand et trop crédule. Dans quel but cette automate a-t-elle été conçue ? Quels crimes lui a-t-on fait commettre pour que le Guet la poursuive, si ce n’est celui d’être automate sans maître ?

La trappe s’ouvre sur de longs couloirs bardés de tuyaux et de fils électriques, nimbés d’un doux halo bleuté. L’étrange tandem se glisse avec aisance dans l’échappatoire, juste à temps pour échapper au regard des officiers. La mutante lève son regard rougeoyant, aussitôt accroché par les iris électriques de la fuyarde. Elle en profite pour détaille son visage, son ersatz d’humanité tranchée par les bandes de métal qui le ceignent. Une peau lisse et immaculée, creusée par un sourire éclatant. Un mince rictus creuse les joues de Jessamy, lorsqu’à nouveau la candeur de l’automate se manifeste.

« Pas vraiment. La Xandrie dont tu parles, elle est au-dessus de nous. Ici, c’est le réseau de Myste ! »

Une Xandrie de l’envers dans un souterrain, ou la meilleure façon de se retrouver dans un piège à rats. Au mieux, ses corridors en clair-obscur servent de points de passage, accessibles via des trappes comme celle de L’aile de requin. Dissimulée dans le bar, facile pour disparaître comme l’assistante d’un prestidigitateur. Un tour de magie déjà expérimenté, encore jamais découvert. Elle sait, en son for intérieur, que cela ne saurait tarder.

Alors qu’elle s’apprête à faire volte-face, son attention trébuche sur les mots de l’automate, qui pointe du doigt son… poignet ? Confuse, la mutante fixe elle-même le réseau veineux qui pulse doucement sous le linceul de sa peau. Une prouesse du Magistère : le sang mêlé de Myste s’écoule sous la soie comme le fluide vital de tout être dépourvu de mutation. Ses mots à elle s’entrechoquent, hésitants.

« Ah… Bah, c’est ma peau. C’est pas ça qui choque les gens d’habitude, t’es une marrante toi. »

Un rire nerveux secoue ses frêles épaules. Les minutes s’écoulent vite, surtout s’il faut déplacer l’immense carcasse dans les souterrains. Son index tapote le bec de sa canne, alors qu’elle réfléchit à leur porte de sortie. Ses yeux fixent le couloir qui s’allonge devant elle, et les fils grésillants qui serpentent aux murs, au plafond et même au sol.

« J’adorerais qu’on discute de mon audace, mais on n’a pas trop le temps. Pendant qu’on te sort de ce bourbier, ça te dirait de me raconter un peu comment t’en es arrivée là ? »

Les automates sont pour elle encore un mystère d’acier et de fer, pourtant elle les sait proches des mutants. Fabriqués pour faciliter la tâche des êtres de chair qui les façonnent, des êtres impavides et dociles, nés pour servir. Certains finissent pourtant par exprimer leur libre-arbitre et par se rebeller. Son invitée en fait-elle partie ? Posant sa main libre sur son thorax, la mutante poursuit :

« Allons-y. Moi, c’est Jessamy. J’imagine que Fauchon Ivre n’est pas ton vrai nom ? »
Sam 26 Aoû - 17:30
Un véritable passage secret pour les contrebandiers chevronnés ! Ou pas. Tout ceci n'était finalement que des longs tunnels de maintenance pour alimenter La Juste du délicieux myste qui provenait d'Opale. L'automate n'avait été que rarement mis en contact avec cette source d'énergie surnaturelle et il observait avec méfiance les tuyaux qui, dans son esprit, pouvaient exploser à tout moment. Pour une machine qui fonctionnait à l'essence, l'utilisation d'une telle substance lui semblait parfaitement incongru difficilement explicable. Transformer ainsi la brume mystique et ésotérique d'Uhr finirait bien par avoir des conséquences, non ?

  Alors qu'elle eut un mouvement de recul envers la tuyauterie pourtant innocente, Pamyfja se souvint qu'elle aurait bientôt besoin de faire le plein. On pourrait dire que cette course poursuite lui avait creusé l'estomac.

  -Je trouve difficile à croire que ce réseau de maintenance ne bénéficie d'aucune surveillance. C'est bien le dernier endroit où je me serais cachée, dit-elle avec un sérieux soudain.

  Elle était à l'étroit. Même après avoir terminé leur descentes, l'automate se devait toujours de faire attention à ne pas fracasser un tuyau avec son crâne, et non l'inverse. Cela les ralentissaient considérablement et ils y avaient quelques passages encore plus étroits sur lesquels elles devaient faire une croix avant de faire un détour. Heureusement pour la fuyarde, la banshee semblait patiente.

  Comme Pamyfja l'avait imaginé, la femme balaya le commentaire sur sa peau avec simplicité et sans aucune gêne. La marque des audacieux, assurément, pensa-t-elle. Ou peut être qu'un autre sujet aurait bel et bien finit par la mettre mal à l'aise, mais essayons de ne pas en arriver là. Heureusement que le manque de tact de la jeune femme était totalement contre balancé par sa capacité à être systématiquement à côté de la plaque. Désormais, elle luttait contre sa curiosité pour ne pas reluquer la peau de sa sauveuse ; un phénomène que l'on pourrait observer dans bien d'autres situations.

  -Je m'étais dit que j'avais certainement besoin d'un surnom si je devais commencer à vivre de manière illicite. Après tout je suis recherchée, donner mon vrai nom ou mon numéro de série ne serait pas très malin. Mais comme vous m'aidez, vous aurez l'immense privilège de connaître l'identité du Fauchon Ivre.

  Tout en arpentant ce couloir interminable, elle fit une pirouette magistrale et s'inclina comme pour saluer le public d'un théâtre.

  -Vous pouvez m'appeler Pamyfja, ravie de vous connaître !

  L'automate lui tendit ensuite une petite affiche qu'elle avait chapardée au guet avant de s'enfuir. C'était un avis de recherche officieux dirigé à l'intention des truands et des chasseurs de primes, mais aussi pour les voisins d'Espitopoli. Comme c'était cocasse. On pouvait lire au sommet de la feuille froissée "Recherché - PAMFA-00".

  -Je peux même vous signer un autographe ! Il me faudrait un crayon cependant.

  Elle pivota à nouveau sur elle-même pour regarder où elle allait, mais ses sabots se prirent dans des câbles et elle trébucha sur plusieurs mettre avant de se figer au-dessus du sol dans une position qui défiait férocement la gravité. En douceur, elle se redressa et reprit son chemin comme si de rien n'était.

  -Il n'est pas long de résumé comment je me suis retrouvée dans cette situation, même s'il y a bien un sujet que j'aimerais éviter si ça ne vous dérange pas.

  Elle frissonna et grimaçait en faisant face aux souvenirs.

  -J'ai été conçue au pôle d'Espitopoli et j'y ai passé la majeure partie de mon temps. Ça n'était pas agréable, mais au moins à l'époque il ne cherchait pas à me mettre en pièce. Durant une de mes assignations, j'ai eu… une malfonction, comme ils disent. Ça a mis un sacré bazar, c'était amusant à observer maintenant que j'y pense. Après ça, on m'a aidé à fuir et j'ai quitté Epistopoli avant qu'ils ne se rendent compte de mon absence. Enfin, j'ai été arrêtée sur la frontière de Xandrie et ils m'ont amenée au guet.

  Sans s'adresser à qui que ce soit elle souffla.

  -J'espère qu'Elle va bien.
Lun 18 Sep - 16:06
La présentation fantasque de la femme de fer lui inspire un sourire. Pamyfja, donc. La mutante se saisit doucement de l’avis de recherche tendu par sa comparse. Elle déglutit en lisant le matricule sans âme, puis les mots froids et taillés au scalpel des cadors qui ont lâché la meute sur l’automate. Manipulatrice. Dangereuse. Inhumaine. Une créature jugée défaillante pour s’être révoltée contre ses geôliers. Jessamy a rarement rencontré quelqu’un qui lui ressemble autant. Sa révolte bouillonne dans son ventre et remonte jusque dans sa poitrine. Sa mâchoire se durcit. Elle lui rend pourtant la feuille avec une expression rayonnante.

« 800 Astras, hein ? T’es une vedette ! Dommage qu’on n’ait pas de crayon ! »

L’étroitesse des couloirs et les fils entremêlés pardonnent peu la maladresse. Pamyfja se démène comme un faon venant de naître dans le dédale gorgé de Myste, dont les trésors ne sont accessibles qu’aux puissants de Xandrie. Jessamy l’observe avec une pointe de compassion. Il y a quelques années, elle aurait été tout aussi perdue. Elle ne savait rien de la vie en société ; pour elle, il lui fallait manger ou être mangée. Les Banshees de la Juste lui ont appris à s’apprivoiser, à être plus gentille avec la bête qu’elle est.

L’automate retombe sur ses deux pattes. Deux coups qui résonnent dans les corridors, et sonnent le début de son récit. Jessamy écoute. Ses yeux rouges se couvrent d’un voile humide. Sa gorge se serre. Elle vient à peine de rencontrer Pamyfja. Pourtant, ses mots la ferrent avec une puissance inattendue. Elle aurait pu les prononcer elle-même, à quelques détails près. Ses phalanges blanchissent alors qu’elle renforce la pression de sa poigne sur sa canne. Elle contemple l’automate comme un reflet déformé. Le miroitement de deux vies de chair et de fer, acculées. Sa joie factice s’affadit ; seule sa détermination sincère redessine ses traits. Le bris dans sa voix trahit le mélange d’émotions qui macère dans ses tripes.

« La suite va pas être facile. Mais t’es pas seule. Pour le moment, faut te sortir de la ville. Le Guet aura plus de mal à te trouver dehors. »

Jessamy se faufile comme une petite bête pour passer devant Pamyfja. Ses ailes effleurent à peine l’architecture vivante à ses côtés. Son immense présence ne l’effraie pas. Pas après lui avoir montré tant de vulnérabilité, tant de confiance, alors que leurs existences viennent tout juste de s’entrechoquer.

« À Xandrie, y a que les maisons des plus riches qui s’alimentent avec le Myste. Même s’il vient de nos mines. Du coup, les trappes que tu vois au-dessus de nous mènent chez eux. Elles sont bloquées. Mais y en a qui sont planquées et qui sont pas sur les cartes. C’est par là qu’on va s’échapper. »

Sa main griffue parcourt les lignes irrégulières du mur comme celui d’un labyrinthe. Elle louvoie avec prudence entre les boyaux gorgés de l’or opalescent. Le même carburant qui circule dans ses veines, qui alimente chacun de ses gestes. De l’automate, elle n’est pas si différente.

« On y est. »

La mutante s’arrête et lève les yeux au plafond. Son regard trébuche sur les lignes fines, presque imperceptibles, qui dessinent une forme rectangulaire au-dessus de leurs têtes. Elle donne un coup de canne une première fois, faisant tomber un peu de poussière sur ses épaules. Elle attend deux secondes. Deuxième coup. Trois secondes. Troisième coup.

Un cliquetis résonne de l’autre côté, et la trappe s’ouvre sur la silhouette androgyne d’un zoan. Ses yeux d’un fauve intense, aux cils longs et blancs, s’illuminent. Des ridules se creusent en rayons de soleil autour de ses orbites, alors que les lèvres noircies s’étirent sur les joues couvertes de petites écailles. Sa langue bifide passe entre ses dents lorsqu’il se met à parler.

« Mes ressspects, la Blanche. Il paraît qu’il y a du grabuge à L’aile du requin ?
Jessamy hoche la tête devant l’ophidien.
— Oui, on a un problème avec le Guet. On doit faire sortir quelqu’un.
— Je vois, je vois. Et ce quelqu’un, c’est… (Le regard fendu du zoan dévie rapidement vers Pamyfja.) Oh. Oh. Çsssa par exemple. Entrez, entrez, vite ! »

La mutante opine du chef à nouveau, avant de se tourner vers Pamyfja.

« Moi aussi, j’ai un petit nom, souffle-t-elle dans un demi-sourire. Lui, c’est Mordante. On va avoir un peu de temps pour discuter de tes options avant de t’aider à sortir. »

D’un signe de tête, elle l’invite à monter dans le nid du serpent.
Sam 23 Sep - 21:02
Une vedette ? Pourquoi pas carrément un ovni dans le domaine de la délinquance, un véritable phénomène dans les commissariats ! Si elle continuait sur cette lancée, il était sûr qu'elle finirait par ce faire nom. Après, restait à voir si celui-ci finissait par être sujet à des moqueries ou des injures. En tout cas, on pouvait deviner une chose aisément. Suite au pitoyable spectacle qu'avait offert le guet dans cette course poursuite qu'ils ne pouvaient achever, ils étaient certainement remontés et avaient déjà levés les moyens d'immobiliser l'engin une bonne fois pour toute. Dix hommes pouvaient la plaquer au sol, mais elle les enverrait valser. On pouvait bien lui passer les menottes, mais il en fallait des spéciales si vous ne vouliez pas qu'elle les brises avec nonchalance. Non, ce qui leur fallait, c'était des pièges et des armes Epistotes ou alors se résoudre à utiliser des forces létales. Rien ne les empêchaient d'employer les deux à la fois d'ailleurs…

Finit de jouer. Pamyfja avait cruellement besoin d'aide et elle ne s'en rendit compte qu'à mi-chemin dans les tunnels gorgés de Myste.

Elle fut triste d'apprendre que le mieux pour elle serait de quitter la ville au plus vite. Cela était parfaitement logique, l'automate ne pouvait en aucun cas contre dire ça, mais en appliquant ça partout, où est ce qu'elle pourrait bien rester ? Elle ne put qu'hocher la tête sans réel conviction.

Dépassée par la banshee et guidée à bon port, la jeune femme l'écouta avec attention et assimila ces nouvelles informations. Ce ne fut qu'après, un, deux et trois coups contre la trappe qu'elle s'ouvrit. Un change-peaux se tenait au-dessus d'elles, un zoanthropes avec un lien étroit avec les reptiles pour être précis. Derrière sa protectrice, on pouvait voir l'automate faire coucou avec un grand sourire.

-Il vous va bien, j'aime beaucoup ! Dit-elle à l'intention de la "Blanche", puis elle se tourna vers "Mordante". Je suis "Fauchon Ivre", enchantée !

C'était ridicule, tout simplement ridicule, et il n'existait personne dans la pègre pour le lui faire savoir car ils étaient tous aussi ridicules qu'elle. Pourquoi tombait-ils tous autant dans le cliché ? Le petit robot voit dans un film que ça marchait ainsi, et donc, elle avait automatiquement raison ? Mais où va le monde ! De ses deux bras, elle se hissa en passant devant Jessamy, faisant ainsi craquer dangereusement le plancher qui n'avait jamais rien éprouvé de plus lourd qu'une petite centaine de kilos. Sans autre incident notable, elle se dressa de toute sa hauteur et apprécia de ne plus à avoir arpenter d'étroits tunnels.

-Je comprend bien que, dans ma situation actuelle, quitter la ville le plus rapidement possible semble être une bonne idée. Cependant, je ne peux m'engager loin de la civilisation sans trouver de quoi faire du carburant.

Elle lui restait encore une bonne quantité d'additif, mais le gasoil en lui-même était ce qu'elle brûlait le plus vite. Après deux pleins, Pamyfja devrait se trainer au sol, terrassée par un mode "économie d'énergie" particulièrement dégradant.

-Oh ! J'aimerais trouver "Elles" aussi si c'est possible ? Elle m'a aidé à la frontière et je n'ai pas encore eu l'occasion de la remercier…

En espérant qu'un énième pseudonyme leur évoque quelque chose.

-Et vous aussi bien sûr ! Si je peux faire la moindre chose pour vous aider, demandez-moi !