Ven 23 Juin - 14:59
Maël Mahk’bah
Ombre et lumièreContade / Noble
- Millénaire
- Grigori / Masculin
- Monts Alcalins
- Demisexuel / Il/Lui
- Diplomate de l’Alliance
- Feat Diesel2b
Description
Maël présente l'apparence que l'on prêterait à un ange. Sa silhouette pâle, telle l'éclat de la nue, tranche avec les foules bigarrées qui l'entourent. Son corps délicat respire le calme et la pureté, alors que ses cheveux, longs ou courts selon les époques et les modes, sont d'une blancheur parfaite. Parfois, au gré de son pouvoir de jouvence, une barbe fine recouvre la courbe délicate de sa mâchoire. Presque transparente sous les rayons du soleil, sa chevelure, couplée à cette peau satinée, le rapproche beaucoup de l'albinos. Son nez retroussé et ses grands yeux lui donnent un aspect juvénile, si bien qu'on le prend parfois pour un enfant. Pourtant, son regard, d'une profondeur surprenante, change d'un coup l'image qu'il projette. Ses reflets dorés révèlent malgré lui la maturité qui se cache sous ce corps frêle, et son regard, englobant tout autour de lui, dévoile une expérience qu'on ne prêterait pas à un enfant. Malgré une attitude nonchalante et joviale, il se cache derrière ce visage infantile un homme troublé.Doté d’un cristal d’hypermnésie, le grigori millénaire est un être doté de connaissances démesurées et d’une folie toute aussi insondable. Forcé de quitter les siens alors qu’il n’était qu’un jeune oisillon, ayant vécu une vie de solitude et de tragédies, l’erelim est parfois frappé d’instants de frénésie durant lesquels il se met en danger, convaincu d’être l’être le plus puissant qui existe. Plus rares dans l’enclave, ces crises ont pourtant rythmé sa vie de Veilleur et les siècles qu’il a passés sous la Brume. Est-ce cette dernière qui a ainsi détraqué sa psyché ? Peut-être est-ce la question à laquelle l’ancien héritier des Mahk’bah cherche tant à répondre... Ce qui est sûr, c’est que ce fut cette fascination pour la Brume et son origine qui le mena un jour vers Uhr. Ainsi, porteur d'un bagage ancestral qui obstrue son jugement, l’érudit laisse parfois échapper des brides de ses vastes connaissances. Il est toutefois prudent : les peuples de l'enclave sont bien ignorants de leur histoire, et il y a sans doute de bonnes raisons à cela.
Il a donc vu, Maël. Il a vécu, aussi. Et il le sait. Parfois un peu trop bien. Il s’enorgueillit d’en savoir plus que les autres, laissant des sourires mystérieux et des paroles sibyllines agrémenter ses conversations, s’accordant le droit de diriger même lorsque ce n’est pas sa place. Malgré tout d'un naturel à la fois jovial et détendu, il traite les autres avec gentillesse et considère toujours leur point de vue si celui-ci a un sens et est exprimé intelligemment. Il fait également preuve d’une grande tolérance et d’une curiosité sans borne pour tout ce qu’il ne connaît pas. En effet, il se fascine pour le beau comme pour l’horrible, s’intéressant de près à des études parfois sordides et possédant un sens moral qui semble étranger à ceux de ce monde. Si cela est dur à croire lorsqu’on observe son visage candide et son aura lumineuse, le déploiement de ses ailes, immenses et sombres, a tendance à changer la perception qu’on a de lui. Habituellement camouflées, retenues par une cape sombre, elles imposent le respect par leur envergure démesurée. Épée en main, ses traits prennent une dureté qui tranche avec ses airs enfantins et qui dévoilent un peu de ce qu’il est vraiment : un grigori millénaire, doté à la fois d’une sagesse insensée et d’une profonde aliénation.
Habiletés et pouvoirs
Pouvoir racial : JouvenceMaël possède un pouvoir de jouvence inné qui lui permet de choisir l’âge de son corps. S’il affiche le plus souvent une apparence correspondant au début de l’âge adulte, Maël s’adapte constamment aux situations et à ses interlocuteurs. Ainsi, il pourra adopter une apparence plus âgée s’il a besoin qu’on le prenne davantage au sérieux, ou encore pour s’adapter aux groupes avec lesquels il voyage. Il prend également parfois l’apparence d’un enfant lorsqu’il souhaite passer inaperçu ou pour se mêler à leurs jeux pour glaner des informations.
Ailes :
En tant qu’erelim, Maël possède une paire d’ailes sombres qui offrent un contraste saisissant avec son corps pâle. Faisant plusieurs mètres d’envergure, il ne les déploie que rarement, les cachant le plus souvent sous une cape. Solides et puissantes, possédant une endurance acquise grâce à ses incessantes pérégrinations, il les considère un peu comme son arme secrète, élément de surprise indiscutable et outils précieux lors de ses combats.
Cristal élémentaire : Ténèbres
Ce cristal a appartenu au chef du clan triton qui a sauvé Maël après son départ catastrophique du royaume grigori. Grâce à ce cristal, Maël peut se fondre dans les ombres, ce qui lui est particulièrement utile lorsqu’il veut passer inaperçu. C’est également grâce à ce cristal qu’il a pu passer autant de temps dans le monde souterrain et en sortir (quasi) indemne.
Cristal élémentaire : Lumière
Ce cristal lui a été offert en cadeau par un groupe d’élémentaires d’Andoria après qu’il eut sauvé leur groupe, prisonnier des marais des Terres brulées. Grâce à lui, Maël peut rapidement voyager d’un bout à l’autre d’Uhr, ce qui fait en sorte qu’il utilise beaucoup moins ses ailes qu’avant. Il lui permet également de faire toujours ses rapports en personne au Chancelier, évitant ainsi que des informations se perdent ou soient mal interprétées.
Érudition
L’éducation erelim de Maël lui a donné des bases solides sur lesquelles il n’a cessé de bâtir un vaste éventail de savoirs. Grâce à cela, il connait, entre autres choses, l’histoire du monde, la géographie, les mathématiques et la rhétorique. Il possède une connaissance aiguë du fonctionnement de la nature, connait des informations sur les anciennes civilisations et maîtrise une histoire depuis longtemps oubliée par les humains. Depuis son arrivée sur Uhr, il n’a eu de cesse d’étendre ses connaissances à propos de l’étrange société des humains, notamment en voyageant continuellement à travers l’enclave et en poursuivant des études dans divers domaines à Epistopoli et Opale. Au niveau des langues, Maël parle évidemment le grigorien, mais aussi plusieurs langues tritonnes, gobelines ou naniques ainsi que l’uhrois et ses dérivés, sans oublier l’ancien uhrois et plusieurs autres patois régionaux. Cependant, le plus gros de son érudition vient des centaines d’années qu’il a passées à déambuler dans tous les coins d’Astrebrume. Confronté à l’ignorance des hommes, il choisit aujourd’hui de ne pas dévoiler l’étendue de ses connaissances et prétend souvent ne pas en savoir plus que les autres, même si certaines paroles sibyllines lui échappent parfois.
Épée grigorienne
Malgré qu’il ait depuis longtemps abandonné toute trace de son appartenance au peuple des monts Alcalins, Maël n’a jamais pu se résoudre à se débarrasser de son arme favorite, une grande épée à double tranchant. Forgée par le peuple nain avant d’arriver entre les mains de sa famille, l’arme est d’une durabilité exceptionnelle. Elle est marquée du sceau des Mahk’Bah et la devise familiale a été finement gravée sur la lame (Puritate Volamus). Cadeau de son père, elle a été une fidèle amie pendant toutes ces années et sa principale alliée contre les dangers de la Brume.
Habiletés martiales
Bien qu’il n’en ait pas l’air, Maël est un combattant d’exception. Bretteur de talent, il n’a pas une grande force, mais possède une technique particulière héritée de son éducation erelim. Utilisant ses ailes comme balancier pour augmenter la puissance de ses coups, il est agile, rapide et particulièrement surprenant, lui qui a l’air si inoffensif au premier abord. Il sait utiliser la force de ses adversaires pour esquiver et contrôler ses opposants. Il possède également une expérience millénaire contre les créatures de la Brume.
Pistolet
Lors de son dernier passage à Epistopoli, il s’est procuré un pistolet de dernière génération : léger, résistant, fiable et possédant un chargeur de pas moins de quinze balles. Maël est un tireur correct, suffisamment expérimenté pour ne pas être une gêne en situation réelle, mais sans plus.
Habitation
Depuis qu’il est devenu membre de l’Alliance, Maël profite d’un magnifique appartement épuré dans les hauts quartiers d’Andoria. Souvent en déplacement, il profite le plus souvent de l’hospitalité de ceux qu’il conseille ou des hébergements payés par l’Alliance. En cas de besoin, il peut demeurer chez des amis et possède suffisamment d’Astras pour ne jamais avoir à dormir dans la rue. Il lui arrive toutefois de dormir dans la nature lors de missions.
Aisance financière
Habitué de vivre dans la simplicité, de se nourrir de ses trouvailles et de dormir à même le sol, Maël a toujours été quelqu’un d’économe. Pendant des années, il s’est contenté du minimum, jusqu’à ce que ses obligations au sein de l’Alliance l’amènent à devoir dépenser davantage (vêtements, bijoux, auberges...). Malgré cela, il a accumulé beaucoup d’Astras depuis son arrivée sur Uhr et continue aujourd’hui d’augmenter sa fortune grâce à son faramineux salaire de diplomate.
Biographie
- Résumé:
- Les Monts Alcalins
Maël est un grigori né à Zaravoda, dans les Monts Alcalins. Malgré une apparence totalement immaculée et une aura lumineuse, ses ailes sont noires, ce qui fait de lui un erelim. Noble par son plumage, il a eu une éducation stricte et exigeante, mais une enfance globalement tranquille et heureuse. Cependant, il ne s’est jamais senti totalement intégré. Ses pairs le tenaient à l’écart en raison de son aura, différente des autres erelims. À l’adolescence, il tombe follement amoureux d’une jeune femme : une eshim. Lorsque sa famille le découvre, ils font tuer la jeune femme pour éviter que cette liaison se sache. Détruit, Maël quitte alors à jamais la cité grigori.
Errance & tritons
Il ère longuement à travers le monde, se laissant dépérir, détruit par la mort de sa bien-aimée. Un jour, il est retrouvé évanoui sur une plage par un clan triton nomade. Ceux-ci l’aideront en l’intégrant à leur communauté. Pendant quelques générations, il parcourra avec eux les côtes de Mal’kuwth, dans l’océan grigorien, se déplaçant avec eux au fil des saisons. Retrouvant sa joie de vivre, il devient un membre important de la petite communauté, surveillant des airs pendant que les tritons se déplaçaient sous l’eau. Malgré tout un peu à l’écart, il passera de longs moments à méditer et à observer les animaux. Un jour, cependant, une catastrophe arrive : alors que le clan décide de descendre vers la Mer des Oubliés, ils se confrontent à un Charybde. Tout le clan meurt et c’est de justesse que Maël s’échappe.
Voyages et Brume
De nouveau seul, Maël arpentera longuement les terres et les mers du monde. Malgré sa tristesse, il surmontera plus facilement cette épreuve que celle de la perte de sa bien-aimée. Il observera longuement les animaux, leurs migrations, le cycle de la vie, s'imprégnant de la nature, mais aussi de la Brume. Il parcourera le monde, voyageant dans les ruines anciennes et les sursauts de civilisation. Effrayé par l’effervescence d’Uhr, il s’en tiendra loin. Il rencontrera gobelins et saraphs, trouvant gnome et ayllus, se faisant des amis parmi les tritons. Jamais il ne nouera de relations importantes, même s’il développera plusieurs amitiés.
Uhr
Pour Maël, le plus grand mystère demeurera celui de la Brume. Vers l’an 1800, il se rend finalement sur Uhr, descendant de la région d’Ox. Il se dit (non sans raison) que cette étrange enclave protégée de la Brume doit cacher des réponses. Grâce à l’aide qu’il apporte à un groupe d’andorians en mission dans les marais des Terres Brûlées, Maël découvre la cité des élémentaires. Elle ne lui ouvrira que peu de secrets, mais il nouera des liens qui lui seront importants à l’avenir.
Il descendra alors vers une Epistopoli en pleine révolution industrielle. Intrigué par l’ignorance des hommes, il apprendra à connaître leur nature changeante en se joignant à l’armée épistote et se prendra d’affection pour eux.
Se détachant de l’armée à l’approche de la Guerre du Renon, il parcourt librement les différentes factions afin d’en apprendre le plus possible sur Uhr. Il se penchera sur le panthéisme pour tenter d’y trouver des traces de vérités. Présent à Dainsbourg lors de la catastrophe, il s’en sort de justesse et devient l’un des premiers membres de l’Alliance.
Malgré tout, Maël conserve énormément de secrets. Il cache les connaissances qu’il a acquises durant ses voyages et par son éducation d’erelim. Il s’implique dans la politique uhroise, mais son but est de percer les secrets de la Brume. Les découvertes faites à Dainsbourg seront déterminantes pour lui.
La famille Mahk’Bah pouvait se vanter d'un lignage particulièrement pur qui, selon les légendes familiales, remontait jusqu'à l'époque du Roi des Rois. Enoch, l'héritier de la famille, chercha donc avec une minutie toute particulière celle qui serait sa partenaire. Cependant, grande était la cité des grigoris. Les prétendantes furent nombreuses et défilèrent longuement pour avoir une chance de s'entretenir avec le noble erelim et, peut-être, récolter un rendez-vous avec lui. Derrière son épaule, ses parents veillaient avec attention sur les tentatives de leur fils unique. Lorsque son choix s'arrêta, ce fut sur une femme d'une beauté inégalée. Sa peau sombre était auréolée d'une obscurité purifiée qui absorbait la lumière, la plongeant dans une royale noirceur. Rien ne venait perturber cette unité totale : ni sa longue chevelure de jais, ni le charbon de ses pupilles, ni les ténèbres de ses plumes. C'était cependant, contre toute attente, l'amour qui avait conduit son choix. Adah était originaire d'une famille d'eshim. Tel que le voulait la tradition, elle avait été enlevée à sa famille et confiée à un couple d'erelim, qui l'avait élevée et aimée comme si elle était leur fille de chair. Cependant, malgré sa grande beauté, elle n'avait jamais été totalement acceptée par la haute société en raison de ses origines impures.
Ce fut donc une surprise lorsque l'héritier de la famille la choisit, elle. Il lui fit longuement la cour, celle-ci rebutée par le nom et les responsabilités, celui-ci totalement envoûté par sa vivacité d'esprit. Après plusieurs années - une cour normale, pour ce peuple millénaire - elle accepta finalement de s'unir à lui et elle intégra officiellement la famille. Dès lors, son intelligence vive et sa logique implacable ne cessèrent d'impressionner l'antique famille et elle forma avec son compagnon une équipe inébranlable. La seule tache au tableau, c'était l'affection qu'elle portait aux eshims. Elle avait parfois été surprise entourée de certains d'entre eux, s'amusant comme si elle faisait partie de leur groupe. Dans la sphère privée, on savait que la dame de la maison était une femme solide, mais humaine. Elle traitait leurs serviteurs avec une gentillesse inhabituelle pour quelqu'un de son rang, ce qui entretenait les rumeurs sur sa personne. Un jour vint pour le couple le désir d'avoir un enfant. Après plusieurs centaines d'années, ils choisirent de fonder une famille et ainsi d'assurer la pérennité des Mahk’Bah. Adah tomba rapidement enceinte et après une gestation qui plongea toute la famille dans la félicité, le jeune Maël vint enfin au monde.
Le temps s'était arrêté.
Il semblait à Adah avoir traversé mille déserts et avoir été piétinée par des centaines de pégases. Elle avait mal à chacune des cellules de son corps, souffrait des heures et des heures de travail acharné qu'elle avait dû fournir. Pourtant, rien de tout cela n'avait d'importance. Tout son être tendait vers ce petit être qu'elle venait d'enfanter. Oh ! Il lui semblait que sa conscience changeait de forme, que son cœur explosait dans tous les sens, que son esprit s'étendait !
"Montrez-le-moi !" souffla-t-elle d'une voix fatiguée.
À ses pieds, le monde s'était arrêté. Le médecin tenait l'enfant, figé dans une expression interdite qui força Enoch à s'approcher pour comprendre ce qui se passait. Cependant, dès qu'il vit l'enfant, il se figea à son tour, le visage décomposé. Après un moment, il montra l'enfant à sa mère. Personne ne vit la beauté pure qui était apparue en ce monde. Personne ne s'extasia de sa peau de neige, de ses cheveux translucides et de ses yeux d'or. Non. Ce fut l'horreur qui peignit les traits de la pauvre mère qui, en sueur, contemplait son nouveau-né avec une stupéfaction horrifiée.
Un Eshim. Elle avait mis au monde un eshim.
C'était impossible. Inimaginable.
Elle tendit des bras tremblants vers l'enfant, le recueillant contre son sein. Pourquoi le Céleste leur imposait-il une telle épreuve ? Avaient-ils tant à se faire pardonner de leurs vies antérieures ? Elle observa son enfant et ne put s'empêcher de toucher sa peau de lait. D'un doigt délicat, elle caressa le nez pâle du petit, qui ouvrit les yeux. Happée par l'éclat doré de ses pupilles, elle cessa de respirer. Malgré l'apparence immaculée de l'enfant, un lien inéluctable se forgea entre la mère et son petit. Elle l'examina lentement, tout en douceur, comptant ses doigts, cherchant des marques de naissance. Et son plumage... son plumage ? Interdite, elle déplia délicatement l'une des ailes de l'enfant. Noire. Ses ailes étaient noires. Autrement, il était d'une blancheur inégalée, aussi pâle que sa mère était sombre.
Elle lança un regard plein d'espoir à son mari qui était demeuré de marbre depuis la naissance de l'enfant. Soudain, il sembla s'animer et il s'approcha précipitamment de sa femme, se jetant à genoux pour admirer les ailes de son petit garçon. Le couple pleura en se rendant compte qu'on ne leur enlèverait pas leur enfant.
Son plumage était bien sombre, d'une noirceur profonde et pleine.
Peu importe que sa lueur ne fût pas aussi obscure que la leur. Peu importe qu'il soit plus blanc que le plus pur des eshims. Ses ailes étaient noires. Il était donc, comme eux, un erelim.
Maël grandit dans l’abondance de la noblesse grigorienne, étudiant sous l’œil attentif du Céleste les sciences et les arts de son peuple. Sa naissance avait certes causé un émoi sans nom, et l’on s’était assuré plus fréquemment que nécessaire que ses ailes n’étaient pas teintes, mais aujourd’hui, il avait été accepté comme erelim. Cependant, il ne lui fut pas si facile de vaincre les préjugés des autres jeunes et il ne put s’intégrer aux cercles sociaux fermés que formait la dernière génération aux ailes sombres. Il noua plutôt ses premières amitiés avec un groupe hétéroclite d’eshims de son âge. Ils se rassemblaient parfois dans ce vieil entrepôt désaffecté, au fond d’un quartier à moitié abandonné de Zaravoda. Ainsi, son adolescence se déroula, le laissant naviguer entre la vie scolaire stricte qu’il poursuivait à la maison et ses sorties nocturnes de plus en plus fréquentes. Malgré tout, Adah protégea toujours son enfant, justifiant ses balades et couvrant ses arrières lorsqu’elle apprenait ses escapades. Elle croyait ainsi le protéger de la méchanceté de ses camarades, sans voir que celui-ci s’écartait de plus en plus de l’héritier influent et respecté qu’il était destiné à devenir.
Puis, un jour, alors que son adolescence laissait peu à peu place à l’âge adulte, quelque chose changea sa vie. Maël ne comprit pas tout de suite, lui qui apprenait encore à appréhender la richesse infinie des émotions qu’offre la vie. Il ne comprit pas pourquoi il avait si hâte de la rejoindre. Pourquoi le temps lui semblait si long lorsqu’elle était loin. Pourquoi son cœur l’élançait aussi douloureusement lorsqu’elle lui souriait. Il ne comprenait pas, ne voulait pas comprendre pourquoi cette jeune eshim le bouleversait autant. Plus le temps avançait, et moins il arrivait à se concentrer sur ses études. Il pensait à elle, tout le temps, sans possibilité de se changer les idées. Elle les occupait toutes jusqu’à envahir le moindre de ses songes. Ensemble, ils jouaient au chat et à la souris, s’échappant chacun à leur tour sans jamais se lasser.
– Couche avec tous les eshims que tu veux, mon fils, lui dit un jour Enoch en constatant que Maël devenait un homme, mais ne t’éprends jamais de l’un d’entre eux.
Sauf qu’il était trop tard. Beaucoup trop tard. Il s’y refusa d’abord, fuyant de toutes ses forces ses sentiments, allant même jusqu’à l’éviter, elle, pour éviter d’être soumis à la tentation. Mais tout le poussait vers elle, tout la ramenait à lui. Il sut qu’il ne pouvait plus lutter lorsqu’elle fut acquise par son père, qui avait besoin d’une nouvelle couturière aux doigts de fée. Incapable de se tenir loin, il se rendit plus souvent que nécessaire dans la salle de couture, discutant avec une fausse légèreté avec elle, sentant son cœur s’arrêter chaque fois que son rire cristallin résonnait dans la pièce. Il s’humilia souvent, s’offensa parfois, argumenta avec elle pour le simple plaisir de voir son visage devenir rouge et ses yeux lancer des éclairs. Elle était belle, si belle, de tout son être, peu importe si elle portait une vieille robe ou ses plus beaux tissus. Il aimait ce nez en trompette, ses pommettes hautes, ses mèches lourdes. Il connaissait ses traits par cœur, la dessinait partout, sur un coin de parchemin ou sur une toile immense.
C’en était fini.
Il était amoureux.
Il crut mourir de bonheur en constatant qu’elle partageait ses sentiments. Malgré la peur que l’on apprenne la relation qu’ils entretenaient, jamais Maël n’avait vécu de tels moments de félicité. Dans les bras de sa belle, il vivait un rêve éveillé. À l’abri des regards, ils riaient et se disputaient, victime d’une complicité inexplicable. C’est l’un dans l’autre qu’ils trouvaient refuge, victimes innocentes de cet amour clandestin. Mille avenirs impossibles se dessinaient sous les discussions passionnées du jeune couple qui rêvait, contre toute convention, d’un avenir commun, fait de paix et d’amour. Que pouvait-il mal se passer ?
Ça semblait évident.
Tout pouvait mal se passer.
Lorsque son père la découvrit pour la première fois dans les bras de son fils, il ne s’en soucia pas vraiment. Il était commun, pour les jeunes erelims, d’assouvir leurs sens avec de jeunes eshims et même s’il lui semblait étonnant que son garçon se livre à de telles pratiques, il ne trouva pas la situation anormale pour autant. Sa mère, beaucoup plus intuitive, mit cependant bien peu de temps pour découvrir le pot aux roses. Elle le somma de mettre fin à cette relation, se maudit de ne pas avoir fait preuve de plus de discipline lorsqu’il était encore temps. Elle le punit, contrôla ses allées et venues, renvoya la jeune eshim qui, pleine d’infamie, ne put se trouver de nouveau travail et se retrouva à la rue. Rien, pourtant, ne semblait pouvoir mettre fin à cette histoire d’amour. En secret, les tourtereaux se rejoignaient, se promettant monts et merveilles.
Lorsqu’il se rendit à leur lieu de rendez-vous habituel, ce jour-là, Maël ne remarqua pas le ciel sombre. Il ne se soucia pas de cette soudaine déchirure dans la toile de sa belle qui ornait sa chambre, du miroir qui lui cassa entre les doigts, ni du vautour qu’il croisa lors de son vol routinier. La joie débordait de son cœur qui enflait à l’idée de la retrouver. Se fréquenter devenait de plus en plus ardu, mais le jeune ange était convaincu qu’ils trouveraient une solution pour vivre ensemble leur amour. Il se posa sur le toit de l’entrepôt, cherchant des yeux la lueur pâle des ailes de la jeune femme. Enfin, un sentiment nouveau s’empara de lui. Un sentiment sinistre, comme une ombre qui suivait ses pas. Lentement, il traversa le toit, parcouru de frissons lugubres qui lui faisaient craindre le pire. Le pire ?
C’est à ce moment qu’il trouva son cadavre.
C’est à ce moment que Maël se brisa.
Il s’effondra aux côtés de ce corps désormais sans vie. Il la prit dans ses bras, poussant un hurlement qui déchira vent et orage. Rien, pas même la pluie drue ne le fit partir de la dépouille de la jeune eshim et bien vite, la nouvelle se répandit. Sa mère fut la première à tenter de le ramener à la maison. Son père, puis ses amis s’y essayèrent ensuite à leur tour. Cependant, rien ne semblait pouvoir briser l’écrin de douleur et de tristesse dans lequel le jeune ange s’était enfermé. Il pleura sa belle sans boire ni manger, laissant s’alterner les jours et les nuits sans vraiment marquer de différence. La douleur était telle ! Une douleur sourde, inimaginable, physiquement tangible. Les souvenirs des moments partagés, des sourires échangés et des promesses d’amour éternel se heurtaient violemment à la dure réalité de sa soudaine absence. Le silence de sa mort était assourdissant, l’engloutissant dans une marée dévastatrice. Les nuits étaient pires, la solitude amplifiée par l’obscurité ambiante. Il ne pouvait plus respirer. Il ne pouvait plus vivre. Et sans doute aurait-il été encore longtemps dans cet état s’il n’avait pas entendu le murmure de son père à ce moment précis.
– Je crois que nous avons fait une erreur en la faisant tuer, murmura celui-ci d’un air préoccupé.
Il n’était plus triste. Non. Ses yeux s’écartillèrent et son teint devint encore plus blafard. Lorsqu’il se redressa, la moindre de ses cellules tremblait d’une rage contenue. D’un bon ailé, il fut aux côtés de son père. Ses yeux brillants d’une lueur de folie, il demanda d’une voix aussi calme qu’inquiétante qu’il répète ce qu’il venait de dire. Ce dernier, pris au dépourvu, bégaya une explication sur la pureté de leur lignée et leur devoir céleste des erelims. La colère s’empara de Maël, une force implacable qui ne cessa de grandir. En proie à un ouragan intérieur, il s’anima pour la première fois depuis le départ de sa belle. Le cri de son âme en deuil, l’écho de ses souvenirs brisés résonnèrent dans la nuit. Il hurla sa colère, son désespoir, sa tristesse. Trahi par son père, par le destin, par l’univers lui-même, il saisit le corps de sa belle et s’envola. À jamais.
Il vola longtemps. Plus encore que cela ne semblait physiquement possible. Portant dans ses bras le corps sans vie de l’eshim, il vola pour oublier, pour ne plus penser, pour ne plus ressentir. Dans les recoins sombres de son âme, un vide s’était installé. Comme une éclipse qui engloutit la lumière, Sa disparition avait laissé derrière elle un néant insupportable, une absence déchirante, une apathie cuisante. Il la garda près de lui, mais vola pour fuir, fuir les grigoris, la douleur, la perte. Un jour, inévitablement, il s’effondra. Sur la magnifique et solitaire plage de galets, il rendit enfin le corps de sa belle à la mer. Puis, il s’envola à nouveau, sans but ni repères. Le monde extérieur semblait flou, lointain, son cœur plongé dans une obscurité épaisse. Il erra longuement, sans but, mangeant à peine assez pour survivre. Les jours se succédaient, les saisons changeaient, mais le vide persistait, dévorant tout ce qui avait composé la personnalité du grigori. Il survola des ruines d’un temps oublié, se confronta à une Brume retorse et perverse qui alimenta longtemps sa douleur. Loin de la protection des monts Alcalins, le brouillard entrait dans chacun de ses pores, se nourrissant de cette détresse infinie.
Un jour, à nouveau, il s’effondra. Il n’avait plus mangé depuis des jours, ne savait pas où trouver de l’eau, ne trouvait plus de but à sa vie. Loin de chez lui, il était devenu un paria, un Veilleur, et avait sans aucun doute apporté une honte éternelle sur sa famille. Désormais, sa vie serait sombre et solitaire, loin des enseignements du Céleste et de l’espoir de la Cité Perpétuelle. Il avait peur, d’une peur si profondément entrelacée avec la tristesse profonde qu’il n’en voyait plus la lumière. Pourquoi vivre, alors ? Pourquoi tenter de survivre à ce monde sauvage ? Que la Brume l’absorbe, comme elle l’avait fait de cet ancien royaume ! Disparaître, ne plus ressentir, ne plus souffrir. Pourquoi ne s’abandonnait-il pas à la mer ? Rien n’en valait plus le coup, maintenant. Ainsi, il survola longuement l’océan grigorien, si longtemps qu’il perdit toute force. À quoi bon ? Pourquoi résister ? Ses ailes ne le supportaient plus, et il finit par s’abîmer dans les flots, laissant la noirceur des profondeurs prendre le dessus sur son âme.
Lorsqu’il ouvrit les yeux en crachant une gerbe d’eau impressionnante, il ne comprit pas tout de suite ce qu’il faisait là. Au-dessus de lui, la Brume s’était presque dissipée, permettant aux rayons de soleil de réchauffer son corps transi. Il leva les yeux vers le ciel, ébloui par la beauté pure du bleu céleste. Il ne vit pas tout de suite qu’il n’était pas seul. Ce fut lorsqu’il se mit à tousser et que des mains le supportèrent qu’il s’aperçut qu’il était en fait entouré d’une dizaine d’individus aux apparences aussi diverses qu’étranges. Les mains d’une vieille tritonne le tâtèrent avec minutie, comme si elle cherchait une blessure. Il la laissa faire, interdit, incapable de comprendre l’étrange langage utilisé par ce peuple. Après un examen sommaire, la tritonne lança quelque chose dans sa langue et on lui apporta rapidement eau douce et nourriture. Encore confus, Maël accepta la nourriture et but un peu d’eau. Puis, fatigué, il retomba dans le sommeil.
Lorsqu’il ouvrit à nouveau les yeux, son esprit était beaucoup plus clair. Plus clair qu’il ne l’avait jamais été depuis qu’il avait quitté les grigoris. Alerte, il constata que les tritons qui l’avait recueilli étaient toujours là, autour de lui, assoupi. Sous l’éclat des étoiles, seul un jeune individu était toujours debout, montant probablement la garde. Prudemment, il s’approcha de lui. Aussitôt qu’il le vit, le triton lui sourit et l’invita d’un geste à le rejoindre. Il partagea avec lui le poisson qu’il avait fait griller plus tôt. Ils ne parlaient pas la même langue, mais ils échangèrent beaucoup, cette nuit-là, dessinant dans le sable quand les gestes étaient insuffisants. Dès que le jour se leva, le clan triton l’accueillit avec chaleur. Il raconta son histoire autant qu’il le pouvait. La vieille dame connaissait quelques mots de grigorien et put lui enseigner à son tour quelques mots de leur langage. Avec eux, Maël entama sa guérison. Ils l’accueillirent parmi eux à bras ouvert, heureux de le compter parmi eux, lui permettant de se reconstruire.
Il s’agissait d’un clan triton nomade qui parcourait chaque année presque toute la côte du continent grigorien, de l’océan du même nom à l’océan Alrunique, suivant les bancs de poissons et le gré des saisons. C’est avec une étonnante facilité que Maël s’intégra à cette nouvelle famille. Pendant les déplacements, il surveillait les flots depuis les airs, guidant la famille lorsque de nouveaux obstacles se dressaient, repérant les aires de chasse et les haltes où le clan s’arrêtait pour la nuit. Le soir venu, profitant des habitudes mi-aquatiques, mi-terrestres du clan, il apprenait leur langue et leur enseignait la sienne. Que le monde était vaste ! Que de beauté se cachait sous la Brume ! Sans qu’il ne s’en rendre compte, il reprit goût à la vie, espaçant de plus en plus les moments de mélancolie qui l’envahissait encore parfois. En plus de leur langue, ils lui apprirent à survivre et lui offrirent la philosophie de leur clan.
Maël demeura longuement avec eux, parcourant les océans et découvrant des paysages. Les tritons, toutefois, n’avaient pas la longévité des grigoriens et au fil des générations, le jeune ange fut confronté au deuil si souvent qu’il finit par s’en faire une raison. Après avoir failli mourir en solitaire, il se plaisait dans cette communauté si éloignée de ce qu’il avait connu. À leur côté, il affronta mille dangers et apprit à connaître l’océan. Il noua des dizaines d’amitiés, s’intégrant au clan comme s’il était lui-même un être aquatique, fit des centaines de rencontres et s’émerveilla tout autant. Pourtant, une distance demeurait entre lui et les autres. Il ne pouvait se joindre à leurs jeux aquatiques dans les profondeurs, s’envolant au-dessus les flots pendant que le groupe s’y immergeait. Le jour, il était habituellement seul, survolant dans le silence les routes de ses compagnons. Il était devenu une icône, reconnaissable entre mille parmi les clans tritons qu’ils rencontraient à l’occasion, connu même des gobelins avec lesquels ils échangeaient parfois.
Un été particulièrement chaud et sec suivi d'un hiver particulièrement rude amena un jour le clan à prendre la décision de franchir les récifs de Kharof qui les abritaient habituellement en cette saison pour traverser la mystérieuse Mer des Oubliés. Cette étendue aquatique avait une réputation sinistre, mais les gobelins qu'ils avaient rencontrés sur la côte de Kharof leur avaient vanté la richesse incroyable de Roam. Souffrant d'un manque de nourriture, il ne fallut pas beaucoup de temps au chef pour prendre la décision de partir. Les premiers jours de voyage furent riches en émotions pour ce clan qui s'aventurait pour la première fois en ces mers, mais le calme paisible de l'océan les rassura. Comme d'habitude, Maël veillait sur ses compagnons du haut des airs. Pourtant, même lui ne put prédire l'imprévisible tragédie qui guettait le clan.
Ce fut comme si la nuit était tombée d'un coup : les nuages se rassemblèrent à une vitesse effroyable, recouvrant en quelques secondes l'horizon d'un voile sombre. La Brume s'était soudainement épaissie, si profonde que Maël arrivait à peine à voir devant lui. Tout aussi soudainement, un vent puissant se leva, déchaînant les flots, forçant Maël à user de toute son énergie pour lutter contre les courants aériens et l'empêchant de prévenir ses compagnons du soudain changement qui s'opérait à la surface. Il se rapprocha néanmoins des flots et ne put que constater l'horreur qui s'y déroulait. L'eau avait commencé à tournoyer, formant un maelstrom si imposant qu'il n'arrivait pas à en percevoir l'étendue. L'air autour de lui vibra avec force et il n'eut d'autre choix que de reprendre rapidement de l'altitude, condamné à observer sans pouvoir agir. De là-haut, impuissant, il ne put qu'être spectateur du terrifiant repas de Charybde, la terreur des mers.
La tempête se dissipa aussi rapidement qu'elle était apparue, entraînant la Brume avec elle qui s'éclaircit à nouveau, reprenant une densité habituelle. Piètre nageur, Maël se rendit malgré tout sous les flots pour tenter de trouver des survivants. En vain. Aucun membre du clan n'avait survécu. Personne, pas même les enfants. Même le chef, triton puissant et vigoureux, avait disparu avec les flots. Rien ne subsistait de l'existence de ce clan de plusieurs centaines d'individus. Seul l'artéfact ténébreux du chef, que Maël trouva à dériver à l'horizon, lui permit de faire son deuil de ce peuple incroyable qui l'avait accueilli des générations durant comme un véritable frère. Serrant le cristal dans son poing, il se promit de rendre honneur à ceux qui l'avaient accueilli et de continuer sa route, peu importe les difficultés qu'il serait amené à vivre.
Porté par la volonté du clan, il poursuivit sa route jusqu'à atteindre la baie de Roam, y trouvant toutes les richesses naturelles que ceux qui avaient été son peuple avaient recherchées. Recueillant des coraux colorés et des fleurs exotiques, il dressa un autel en leur mémoire, puis médita longuement sur la vie, la mort et la suite de sa propre existence. Il se questionna sur un possible retour dans les Monts Alcalins, mais leur vision lointaine le fit changer d'avis. Jamais plus il ne serait le bienvenu au sein de la communauté de Zaravoda. Malgré son intense besoin de revoir les lieux qu'il avait partagés avec sa défunte bien-aimée, malgré son innommable envie de pouvoir à nouveau discuter avec sa mère, il rebroussa chemin et partit sans se retourner, là où aucun grigori ne pourrait le retrouver.
L'ange passa de longues années à méditer sur la nature. Curieux, il apprit la solitude et la contemplation, suivant des animaux dans leurs migrations. Il accompagna un long vol de grues à travers les montagnes, observa la quête d'un grand félin pour se trouver un territoire, assista au combat des mères et des pères du règne animal pour assurer la survie de leurs petits. Au fil de ses pérégrinations, il apprit les lois de la nature, comprit l'entrelacement inimitable de toute forme de vie. Il survola des ruines de tous âges, découvrant des villes fantômes aussi grandes que des pays, des monuments incroyablement préservés et d'autres presque entièrement détruits. Il suivit les routes des hommes, explorant chaque recoin des trois continents, plongeant profondément dans les secrets de la planète. Il s'enfonça dans les sous-sols du monde en se fondant dans les ombres, y rencontrant des gnomes, des gobelins et des saraphs, faisant face à d'inquiétantes créatures et aux dangers des profondeurs.
Je me suis endormi dans les profondeurs, peu rassuré. Je n'ai pas réussi à atteindre l'endroit dont provient cette étrange lueur. Les gobelins qui m'ont accompagné ne sont pas très bavards, aussi la plupart de mes boutades sont tombées à plat. Heureusement, Xorag, le jeune saraph venu faire ses preuves, est beaucoup plus enthousiaste. J'aurais aimé que ce ne soit pas par hâte d'un combat à venir.
Il a fallu plusieurs jours avant de voir les premiers cristaux. Cependant, dès les premiers tunnels, il était possible de remarquer les traces qu'une magie ancienne avait laissées en ces lieux. Les chemins sont réguliers et droits, trop pour que cet endroit ait été creusé à la pioche. Par endroits, des inscriptions ou des gravures se devinent, mais rien de tout cela n'est compréhensible. J'ai tout de même pris le temps de les reproduire, espérant pouvoir trouver des réponses à leur sujet.
Les grottes étaient, en elles-mêmes, parmi les plus étranges que je n'avais jamais observées. J'avais pourtant des amis chez les gnomes et plusieurs contacts chez les gobelins, mais jamais je n'avais vu quelque chose de semblable. La pierre elle-même irradiait avec force d'une lueur froide et dure. Partout, d'étranges cristaux émergeaient à la façon de stalactites et de stalagmites. Peut-être pensez-vous que c'était magnifique. Ça l'aurait sans doute été si une ambiance aussi sinistre n'avait pas régné dans les tunnels. Les cristaux semblaient pousser comme des mauvaises herbes, comme des parasites.
Le soir venu, le saraph partagea avec nous les légendes de son peuple à propos de ces cavernes. Selon lui, des monstres cristallisés se tapissaient dans l'ombre des cristaux. Ces créatures mi-homme, mi-cristal déambulaient calmement dans les cavernes... tant qu'elles ne voyaient personne. J'ai insisté pour en savoir plus, mais il a plutôt commencé à narrer les exploits de son ancêtre. Bien que déçu, j'ai tout de même noté son histoire. Il a même agrémenté celle-ci d'une illustration magnifique de l'arme de son clan. Il était surprenant qu'un être avec de si grandes mains sache si bien manier la plume !
Je ne sais pas si j'ai hâte de savoir ce que la journée nous réservera. Les gobelins sont visiblement aussi nerveux qu'irritables et le saraph garde maintenant en permanence sa main sur la garde de l'immense pioche de sa famille. Quant à moi, je ne suis pas très rassuré. Il m'est toujours difficile d'être loin du ciel et de ne pas pouvoir dégourdir mes ailes. Mais il y a autre chose : j'ai le sentiment que ces grottes ne veulent pas de nous.x x x x x
Je suis parvenu à m'échapper. Je dois ma survie inespérée à Tad et à son cristal. Les créatures dont parlait Xorag sont réelles. Ce sont des êtres cristallisés à la peau encore plus pâle que la mienne et aussi agressives qu'un gobelin en colère. Dès que nous avons débouché dans cette grande salle recouverte de cristaux, elles se sont jetées sur nous.
Nous avions aperçu des mouvements, nous étions sur nos gardes, mais cela n'a pas suffi. Nous étions tous des combattants expérimentés, et pourtant, elles ont rapidement fait une bouchée des trois gobelins qui nous accompagnaient. Elles n'allaient pas tarder à nous faucher, le saraph et moi. Tranchant avec ma lame les étranges créatures, je fus rapidement submergé, tout comme mon compagnon à la peau violacée.
Dans la vallée qui s'étendait plus bas, nous avons alors vu d'autres créatures débouler. Elles étaient des centaines, des milliers ! Xorag m'a alors sommé de partir. Il m'a confié son arme, l'héritage de sa famille, et m'a ordonné d'une courte phrase de rapporter ses exploits à son clan. Ensuite, il a sauté à pieds joints dans la foule compacte de ces créatures, et je me suis transformé en ombre pour m'échapper de ces tunnels.
Je n'ai pas trouvé les réponses que je cherchais. Pourtant, j'en suis convaincu : ces créatures protègent quelque chose. Mais quoi ? Ce mystère devra attendre encore un peu. Pour l'instant, je dois me rendre à la Crevasse pour raconter l'horrible destin de ce jeune saraph. Le reste attendra.
Maël apprit aussi à connaître la Brume, même s'il semblait impossible de l'apprivoiser. Il parcourut terres et océans, se forgeant une âme de penseur. La Brume, cependant, résistait à sa philosophie. Elle ne suivait aucune logique, s'épaississait ou se dissipait sans raison. Elle corrompait sans but, aliénant la nature des choses, perturbant les migrations d'animaux millénaires. Partout dans les ruines du monde, il chercha une origine à ce phénomène incompréhensible qui échappait même à la compréhension du peuple grigori qui, s'il avait soigneusement daté son apparition, n'avait pu expliquer son origine. Lors de longues méditations, il la laissait s'infiltrer dans son esprit, tentant de comprendre les étranges phénomènes qu'elle causait. Il questionna l'histoire des peuples qu'il croisait, s'intéressant à tous... Et pourtant, encore à cette époque, il demeura loin des hommes, se refusant à entrer en contact avec eux. Cette entrave, Uhr, était étrange, contre-nature, et le grigori se refusait de l'approcher.
Cependant, plus il cherchait des réponses et plus ses pas le rapprochaient du dernier bastion des hommes. Les humains, ces créatures éphémères et prolifiques, pouvaient-ils vraiment posséder la clé de ses recherches ? C'est cent ans avant notre ère que le grigori à l'apparence juvénile franchit la frontière de la Brume, descendant par la région d'Ox pour rejoindre l'enclave. Malgré les conditions horribles des Terres Brûlées, il ressentit un véritable soulagement d'être libéré du poids de la Brume, qu'il n'avait plus quitté depuis des centaines d'années. C'était une sensation étrange, comme s'il quittait un univers pour entrer dans un autre, totalement différent, coupé de ce que pouvait être le reste d'Astrebrume. Ici, même sous la fatigue ou la faim, il n'y avait rien pour influencer son esprit. Pourtant, ici aussi, d'anciennes ruines étranges subsistaient. Colossales, elles émergeaient de la terre sèche, symbole de temps oubliés de tous. Curieux, Maël les explora longuement, tentant d'y trouver une logique, un sens.
Il y avait également, un peu plus loin, une zone marécageuse particulièrement dangereuse. Maël avait trouvé une vieille ruine et n'avait pas eu beaucoup de mal à se débarrasser de ses habitants, qui étaient partis à tire-d'aile sans demander leur reste. Perché dans cette tour dont l'accès était depuis longtemps devenu inaccessible depuis le sol, Maël observa la vie évoluer autour de lui. Il y avait ici un nombre impressionnant d'élémentaires, une concentration plus grande que tout ce qu'il avait pu connaître jusqu'à maintenant. Il passa un long moment à essayer de comprendre ce phénomène lorsqu'un groupe d'humanoïdes hétéroclites s'invita sur le territoire. Ils avaient l'air humain, et pourtant quelque chose en eux était différent. Celui-ci venait-il vraiment d'allumer un feu juste en touchant le bois ? Quelle était cette étrange construction végétale qui semblait avoir poussé de nulle part ? Curieux, Maël les observa pendant plusieurs jours, restant à l'écart pour les observer sans se faire voir.
Il n'avait pas eu l'intention de les aborder. En fait, il n'avait jamais vraiment eu l'intention de se mêler des affaires des hommes. Il avait seulement pour objectif d'explorer les terres les plus méridionales du continent yféen. Cependant, lorsqu'il vit le petit groupe en aussi mauvaise posture, il ne put s'empêcher d'intervenir. S'étant levé beaucoup plus tôt qu'à l'habitude pour tenter d'atteindre de nouvelles ruines, le groupe s'était aventuré dans une zone particulièrement dangereuse où les marais devenaient acides et où les élémentaires sauvages semblaient parfois perdre la tête. Maël mit un moment à se rendre compte qu'ils étaient partis par là, visiblement sans savoir dans quoi ils s'embarquaient. C'est alors qu'il volait d'une ruine à l'autre pour les trouver qu'il entendit soudainement un cri déchirant retentir à l'ouest. L'un des membres du groupe était enfoncé jusqu'à la taille dans l'un des bassins d'acide et semblait lentement se dissoudre dans le liquide. L'autre n'avait que les pieds dans le bassin et semblait tirer de toutes ses forces sur l'autre, qui disparaissait lentement mais sûrement.
Des airs, Maël plongea vivement, arrachant un cri de surprise aux autres membres du groupe qui regardaient depuis la rive. Il en manquait trois, remarqua aussitôt le grigori, avant de se concentrer sur ce qu'il semblait être le seul à pouvoir faire : il saisit les bras de celui que tous pensaient condamné et, poussant avec force sur ses ailes, réussit à s'envoler avec lui. Sans tenir compte des protestations exprimées dans une langue qui lui était totalement inconnue, il plongea rapidement à nouveau pour ramener le malheureux parmi les siens. Il eut un choc en le posant sur le sol : l'homme semblait ne plus avoir de jambes, mais il ne semblait nullement en souffrir. En fait, on aurait dit qu'elles repoussaient : ses jambes à moitié fondues se régénéraient comme l'auraient fait des plantes. Bientôt, il n'y eut plus aucune trace des dommages qu'il avait subis. Étonné, Maël ne se rendit pas compte tout de suite qu'il était maintenant encerclé. Lorsqu'il leva les yeux, il fit aussitôt un pas en arrière, mettant brièvement la main sur son épée avant de percevoir l'ambiance et de lever aussitôt les mains dans les airs. Aussi rapidement que possible, il rajeunit légèrement ses traits, laissant croire qu'il était plus adolescent qu'adulte.
– Bonjour ! dit-il d'un ton clair et amical en leur adressant un sourire.
Tout de suite, le groupe se détendit. Si ce petit bonhomme n'avait rien à faire là, il avait quand même sauvé la vie de leur chef et semblait maintenant disposé à discuter. L'ange prononça ce simple mot en grigorien, en gobleork et en nanique, avant que cette dernière langue n'éveille soudain une lueur dans les yeux de l'un d'entre eux. Il lui répondit dans une expression si hésitante que Maël doutait qu'il soit capable de tenir une conversation. Malgré tout, ils purent échanger quelques mots, mais cette langue convenait peu à Maël : il n'avait jamais vécu parmi les nains et n'avait eu avec eux que des échanges commerciaux, ce qui faisait qu'il ne maîtrisait pas bien la langue, et encore moins les mots nécessaires aux questions qu'il avait envie de poser. L'autre lui mima alors des ailes, et Maël rougit soudainement, acquiesçant avec gêne. Lentement, tout en s'assurant qu'il ne renverrait personne dans l'acide d'un coup d'aile, il les déploya brièvement. Lorsqu'il sentit quelqu'un les toucher, toutefois, il les rabattit dans un réflexe incontrôlé qui faillit faire basculer une femme vers le bassin. Ayant pressenti la situation, Maël réussit à lui saisir la main. Il s'inclina précipitamment pour présenter ses excuses dans un grigorien doux et chantant. Elle lui répondit dans sa propre langue et lui adressa un sourire amical. Maël sourit à son tour.
Il tenta de convaincre le groupe de faire demi-tour, mais ceux-ci refusèrent. Ils lui expliquèrent qu'ils étaient à la recherche de ruines qui pourraient leur apporter des réponses. Expliquant qu'il explorait lui-même l'endroit depuis plusieurs semaines, il leur proposa de se joindre à eux. Malgré la suspicion que cela entraîna chez le groupe, ils acceptèrent finalement. Comme le grigori l'avait constaté depuis les airs, certains avaient péri dans les bassins d'acide et ils ne pouvaient pas se permettre que ça arrive à nouveau. Ils n'étaient qu'un petit groupe, et la mort de trois d'entre eux apportait une ambiance sombre parmi les membres. Sensible à l'énergie qui l'entourait, Maël demeura en retrait, préférant ne pas trop s'imposer. Il discuta longuement à voix basse avec l'élémentaire d'air, tentant de comprendre ce qu'il connaissait de l'endroit. Au fil des jours, Maël parvint à prononcer quelques mots en uhrois. Après quelques semaines, il avait gagné la confiance du groupe et était capable d'avoir une conversation simple dans leur langue.
Si l'expédition prit fin sans permettre de trouver de nouvelles réponses aux éternelles questions des andorians (lesquels étaient demeurés très évasifs sur le sujet), le groupe décida malgré tout de rebrousser chemin pour regagner la Citadelle Immaculée, et ils invitèrent Maël à les suivre. Contrairement à ce groupe élémentaire, le corps du grigori était en plutôt mauvais état et il y avait une éternité qu'il n'avait pas pu profiter d'une réelle baignoire. Il traversa donc les Terres Brûlées en leur compagnie sans savoir à quoi pouvait bien ressembler une ville conçue par des élémentaires. Malgré les descriptions de ses compagnons, il était incapable de se l'imaginer autrement qu'ayant l'apparence de la magnifique Cité Perpétuelle qui était peinte sur le grand mur de la maison familiale des Mahk'Bah. Curieux, Maël posa mille questions à ses compagnons. Ceux-ci, enthousiastes à l'idée de rentrer chez eux, étaient chaque jour de meilleure humeur, permettant à l'ange de nouer des liens avec chacun d'eux.
Nous marchons seuls / Elle
Hello, c’est Elizawelle !
J’espère que vous apprécierez ce nouveau DC :D
Dernière édition par Maël le Ven 21 Juil - 17:03, édité 3 fois