Mer 28 Déc - 22:12
L'aube pointait à peine. La cavale venait de s’arrêter, ils pouvaient enfin souffler. Le souffle court, ils avaient attendu, interdits devant leur butin… avant de se mettre à le fouiller tels de vulgaires pillards. Mais… s'étaient là bien ce qu'ils étaient avant tout. La révolution n'était qu'un prétexte pour plus d'un d'entre eux. Un moyen de le tenir ; lui qui souhaitait plus que tout y prétendre, lui qui clamait des discours inspirant – bien que souvent contradictoire – lui qui menait, s'élançant extatique même contre les trains, sans préparation aucune.
Juste un prétexte… et une direction tout de même ; un semblant d'éthique pour couvrir l'opprobre de la clandestinité. Ou peut-être juste un rêve lointain qu'ils espéraient tous sans vouloir céder aux illusions…
Alors, ils fouillaient. Ils retournaient les attachés-cases, les poches, les simples serviettes. Ils sortaient quelques joailleries de leurs écrins, ils brasaient ordonnances et injonctions – bien souvent sans même les lire – ils goûtaient au plaisir du coup à succès.
… Jusqu'à ce que Cricbolg lève un coffret scellé bien haut au dessus de la micro-mêlée.
- Le sceau des monétaristes ?
- Qu'est-ce que ça fait là ?
- Ils ont des bails avec les opaleux ?
- Ça se sait !
- Qui dit intérêt économique…
- Reskg vaalkr !
- Des fielleux à la solde d'Opale en somme ! Abjectes, misérables… Mais ne-serait-ce pas parfait ? Non ?
- Pour ?
- Hé bien ! Chopper des plans, des contacts, se rendre des services pardi !
Ce n'était pas exactement ce à quoi l'épistote avait pensé, mais pourquoi pas après tout… bien plus raisonnable. Une moue contrariée s'étirait sur son visage. Le fait que cette découverte soit parfaitement imprévue était tout ce qui réussissait à le satisfaire dans son dépit. Merveilleux !
- Une nouvelle amitié à inaugurer ! Aux heureux hasards, il faut écrire pour sceller l'union !
- Un brin trop d'emportement…
Mais l'ancien acteur était déjà lancé dans une rédaction endiablée.
Une plume à la main, le papier filant sous ses doigts métalliques. Saccade et staccato huilé,
une machine à écrire,
un empattement régulier…
Aucune personnalité dans les traits.
La commissure des lèvres faussée, il se mit à relire son œuvre.
Avant qu'il ne puisse la déclamer, la porte du vieil entrepôt s'ouvrit avec fracas avant de claquer aussi sec. Les sursauts, les cœurs et les mains aux gardes se calmèrent aussi rapidement que l'angoisse était venue. La mine fière, la petite dernière de la bande agita le journal du jour, avant de se mettre à lire à haute voix.
- Hé, écoutez ça :
Elle s'était arrêtée en cours de lecture et le journal avait tourné entre toutes les mains – ne faisant que passer dans certaines. C'était déjà à la une… le temps du profil bas était donc révolu. Tout était aller trop vite. Il n'avait fallut qu'une rumeur, il n'avait fallut qu'un horaire, qu'une indication pour une fois précise, ils étaient arrivés les premiers sur place et les voilà sur le devant de la scène. Étrange tout de même qu'il n'y ait eu plus de concurrence, l'affaire avait été rondement mené, sans incident ni surprise.
Ils s’avisaient silencieusement, les uns réjouis, les autres clairement soucieux. Et maintenant, que faire ?
- Bon… on est tous d'accords pour la lettre ?
- Quelle lettre ?
Le cyborg relisait le journal. Si longtemps qu'il n'avait pas lu de critique sur une de ses performances. La rédaction était avare en éloge, mais il s'en satisfaisait. Il n'avait peut-être simplement pas entendu la question, mais personne n'insista pour l'avis de leur ''chef''.
*Soupire*
- “Avons retrouver votre colis, si vous souhaitez le récupérer, nous vous attendrons ce soir Porte de Sancta. Jugez vous même de l’intérêt et de la taille d'une escorte selon l'importance que vous accordez à ce colis.”
- Bien plus sobre que je n'aurais cru…
- Non, c'est ma propre proposition.
Serisse, une brune a l'air patibulaire, acheva la discussion en écrasant le tissu de délire manique qui s’étalait sur le parchemin avant de rédiger par elle même une version acceptable pour un premier contact avec de potentiels associés… ou du moins des clients occasionnels pour leur recel.
* * *
La Gamine avançait dans la rue, les mains dans les poches, un galurin visé sur le crâne. Vive dans les rues passantes, déambulant parmi les badauds là où la foule s'égrainait.
Du lot, elle était celle qui faisait le moins sensation lorsqu'elle sortait de leur planque dans les bas-quartiers. Car la vie n'avait pas eu le temps de l'amoché ? Comme si elle en avait besoin, du temps… mais soit, elle l'avait épargné physiquement. La Brume n'avait pas détruit ses nuits, les coups ne l'avaient pas marquée, les rencontres l'avait laissé entière et sa gueule était même agréable, paraissait-il. Au moins assez pour ne pas retenir l'attention si elle ne le cherchait pas.
Elle arriva devant la porte de la guilde, s'y faufila dans l'ombre d'un employé. Même lorsqu'elle n'y prêtait attention, son naturel filou s'exprimait. L'expérience forgeait les postures, les démarches, le bagout également si il fallait briser le silence. Elle n'en aurait pas besoin aujourd'hui. Quelques regards circulaires et elle était déjà ressortie. Ne laissant derrière elle qu'un pli à l'estampille douteuse glissée dans la pile de courrier adressé à la cheffe des lieux. Si les rumeurs qui circulaient sur elle étaient vraies, nul doute qu'elle serait intriguée par la lettre et l'article qui avait été joint. Une précaution probablement inutile. Si le contenu du coffret était sien, nul doute que la cheffe de guilde devait avoir été mise au courant de l'incident avant même l'impression du journal.
La Gamine sautillait dans la rue, relisant d'un œil – dans cette semi-étourderie qui permettait de chiper une bourse en passant – le premier article qui parlait d'eux.
Qui parlait d'elle.
Juste un prétexte… et une direction tout de même ; un semblant d'éthique pour couvrir l'opprobre de la clandestinité. Ou peut-être juste un rêve lointain qu'ils espéraient tous sans vouloir céder aux illusions…
Alors, ils fouillaient. Ils retournaient les attachés-cases, les poches, les simples serviettes. Ils sortaient quelques joailleries de leurs écrins, ils brasaient ordonnances et injonctions – bien souvent sans même les lire – ils goûtaient au plaisir du coup à succès.
… Jusqu'à ce que Cricbolg lève un coffret scellé bien haut au dessus de la micro-mêlée.
- Le sceau des monétaristes ?
- Qu'est-ce que ça fait là ?
- Ils ont des bails avec les opaleux ?
- Ça se sait !
- Qui dit intérêt économique…
- Reskg vaalkr !
- Des fielleux à la solde d'Opale en somme ! Abjectes, misérables… Mais ne-serait-ce pas parfait ? Non ?
- Pour ?
- Hé bien ! Chopper des plans, des contacts, se rendre des services pardi !
Ce n'était pas exactement ce à quoi l'épistote avait pensé, mais pourquoi pas après tout… bien plus raisonnable. Une moue contrariée s'étirait sur son visage. Le fait que cette découverte soit parfaitement imprévue était tout ce qui réussissait à le satisfaire dans son dépit. Merveilleux !
- Une nouvelle amitié à inaugurer ! Aux heureux hasards, il faut écrire pour sceller l'union !
- Un brin trop d'emportement…
Mais l'ancien acteur était déjà lancé dans une rédaction endiablée.
Une plume à la main, le papier filant sous ses doigts métalliques. Saccade et staccato huilé,
une machine à écrire,
un empattement régulier…
Aucune personnalité dans les traits.
La commissure des lèvres faussée, il se mit à relire son œuvre.
Avant qu'il ne puisse la déclamer, la porte du vieil entrepôt s'ouvrit avec fracas avant de claquer aussi sec. Les sursauts, les cœurs et les mains aux gardes se calmèrent aussi rapidement que l'angoisse était venue. La mine fière, la petite dernière de la bande agita le journal du jour, avant de se mettre à lire à haute voix.
- Hé, écoutez ça :
Sabotage sur la voie express Xandrie-Opale
Dans la nuit du 11 au 12 avril, le Rubis Pourpre a été victime d'un attentat supposé. De la vingtaine de notables opalins enregistrés à l'embarcation du train, n'ont été retrouvés que des corps, a priori tués sur le coup. Les recherches d'éventuels survivants sont toujours en cours.
Il semblerait qu'une explosion ayant eut lieu au niveau des dénivelés ouest du Mesnon soit la cause de l'incident. La locomotive a été retrouvée partiellement immergée dans l'Argenté. Le réservoir de Myste perforé, la substance dégoulinant dans l'eau, s'en allant souiller un peu plus le Lac Xandrie. Les wagons éventrés et leurs contenus disparus, éventuellement dérobés étant donné que des preuves de passage ait été relevés.
Les réparations de la voie ferrée sont déjà entamés et devraient être achevés sous peu. « D'ici jeudi midi les trains aux Mystes pourront de nouveau circuler » à promis l'adjoint délégué à la supervision des travaux de la guilde des réparateurs avant d'ajouter « de toute façon ils explosent déjà très bien tout seuls, je sais pas pourquoi on se ferait chier à les saboter… c'est juste un accident technique… c'est toujours technique, mais on crie au complot ! Ah, je les connais bien les opalins, moi, ma femme y a de la famille… ». Mettons de coté ces allégations étranges au vu de la scène d'accident, mais rappelons tout de même que l'enquête officiel du guet n'a pas été rendu public. Quoi qu'il en soit, des réparations d'urgences ont d'ores et déjà été effectuées et un trafic ralenti s'est mit en place dans l'intervalle afin de préserver les intérêts économiques de nos deux nations au mieux. La sécurité a de nouveau été renforcée le long de la voie afin d'éviter tout acte de récidive.La voix de Xandrie, édition du 12 avril 1900
Elle s'était arrêtée en cours de lecture et le journal avait tourné entre toutes les mains – ne faisant que passer dans certaines. C'était déjà à la une… le temps du profil bas était donc révolu. Tout était aller trop vite. Il n'avait fallut qu'une rumeur, il n'avait fallut qu'un horaire, qu'une indication pour une fois précise, ils étaient arrivés les premiers sur place et les voilà sur le devant de la scène. Étrange tout de même qu'il n'y ait eu plus de concurrence, l'affaire avait été rondement mené, sans incident ni surprise.
Ils s’avisaient silencieusement, les uns réjouis, les autres clairement soucieux. Et maintenant, que faire ?
- Bon… on est tous d'accords pour la lettre ?
- Quelle lettre ?
Le cyborg relisait le journal. Si longtemps qu'il n'avait pas lu de critique sur une de ses performances. La rédaction était avare en éloge, mais il s'en satisfaisait. Il n'avait peut-être simplement pas entendu la question, mais personne n'insista pour l'avis de leur ''chef''.
*Soupire*
- “Avons retrouver votre colis, si vous souhaitez le récupérer, nous vous attendrons ce soir Porte de Sancta. Jugez vous même de l’intérêt et de la taille d'une escorte selon l'importance que vous accordez à ce colis.”
- Bien plus sobre que je n'aurais cru…
- Non, c'est ma propre proposition.
Serisse, une brune a l'air patibulaire, acheva la discussion en écrasant le tissu de délire manique qui s’étalait sur le parchemin avant de rédiger par elle même une version acceptable pour un premier contact avec de potentiels associés… ou du moins des clients occasionnels pour leur recel.
La Gamine avançait dans la rue, les mains dans les poches, un galurin visé sur le crâne. Vive dans les rues passantes, déambulant parmi les badauds là où la foule s'égrainait.
Du lot, elle était celle qui faisait le moins sensation lorsqu'elle sortait de leur planque dans les bas-quartiers. Car la vie n'avait pas eu le temps de l'amoché ? Comme si elle en avait besoin, du temps… mais soit, elle l'avait épargné physiquement. La Brume n'avait pas détruit ses nuits, les coups ne l'avaient pas marquée, les rencontres l'avait laissé entière et sa gueule était même agréable, paraissait-il. Au moins assez pour ne pas retenir l'attention si elle ne le cherchait pas.
Elle arriva devant la porte de la guilde, s'y faufila dans l'ombre d'un employé. Même lorsqu'elle n'y prêtait attention, son naturel filou s'exprimait. L'expérience forgeait les postures, les démarches, le bagout également si il fallait briser le silence. Elle n'en aurait pas besoin aujourd'hui. Quelques regards circulaires et elle était déjà ressortie. Ne laissant derrière elle qu'un pli à l'estampille douteuse glissée dans la pile de courrier adressé à la cheffe des lieux. Si les rumeurs qui circulaient sur elle étaient vraies, nul doute qu'elle serait intriguée par la lettre et l'article qui avait été joint. Une précaution probablement inutile. Si le contenu du coffret était sien, nul doute que la cheffe de guilde devait avoir été mise au courant de l'incident avant même l'impression du journal.
La Gamine sautillait dans la rue, relisant d'un œil – dans cette semi-étourderie qui permettait de chiper une bourse en passant – le premier article qui parlait d'eux.
Qui parlait d'elle.