Mar 19 Nov - 17:25
Chat alors, encore toi ?
ft. Anoula
La fonte des glaces, enfin… L’hiver infernal a fini par céder, vaincu par le printemps. Et franchement, c’était pas trop tôt. Je commençais à me demander si je n’allais pas finir transformée en glaçon permanent. Maintenant, les premiers éclats de rouge, de jaune et de vert envahissent la nature, et même moi, j’arrive à ressentir un soupçon de joie. Pas de quoi pleurer de bonheur, mais bon. Ça fait du bien.
Après des semaines à marcher dans le froid mordant, je me suis réfugiée dans un petit village niché entre la forêt et un amas de montagnes. Un détour, certes, mais nécessaire. Je n’aurais pas tenu jusqu’à Opale sans un vrai repos. Et je dois avouer que la tranquillité des lieux a fini par me séduire. Les petites maisons en pierre, les ruelles étroites, les gens simples… ça sonne comme le réconfort et la sécurité d’une petites grottes imbriquées dans un mastodonte de granites et de roches.
Je crèche dans une auberge minuscule qui ressemble à une maison de nains, avec ses portants trop bas et ses tables trop grandes. Les propriétaires, un couple de petits vieux adorables mais un peu collants, ont l’air de galérer à attirer des clients. pas grand monde qui passe, aussi. Alors je me laisse choyer. Et eux, ils s’accrochent comme si j’étais leur fille prodigue revenue à la maison.
Bref. J’aurais pu rester là encore un moment à flemmarder, mais Pincher, mon fidèle compagnon (et un emmerdeur de premier ordre), a sonné le gong du départ. Littéralement. Il a grogné, agité ses pattes et fait comprendre que le printemps est là et que je n’ai plus d’excuse pour procrastiner. Merci, Pincher.
Sentant mon départ arrivé, la petite mémé m’interpelle. Si je récapitule, une étrange petite fille qui irait à l’école du coin, semblerait habiter seule quelque part dans le coin. Mémé qui a l’habitude de donner des gâteaux aux enfants de cette école, s’inquiète. Comme quoi, y’a toujours une petite contrepartie derrière la chaleur d’un sourire... Je promets d’enquêter rapidement avant mon départ et déguerpis pour la journée.
Les rues sont dégagées. Le village est petit, tranquille. Trop tranquille, même. Alors je me balade un peu, histoire de tromper l’ennui. J'atterris devant chez le boucher qui ouvre. C’est un gibier de graisse maigre, taillé en rectangle. Il ne sourit pas beaucoup, mais nourrit les animaux errants avec les os et les viandes de la veille (ou de la pré-veille quand on observe la tête de certains morceaux…) Mais ce ne sont pas ces clients là qui lui feront la tête.
C’est là que je le vois. Encore. Dans un attroupement de chats qui rôdent autour du boucher, et parmi eux, il y a cette silhouette. Un chat gris, avec un pelage zébré de reflets argentés. Il est perché sur un muret, ses yeux fixés sur moi. Et là, comme à chaque fois, j’ai cette sensation étrange, comme un souvenir qui refuse de remonter à la surface. Je le connais, ce chat. Enfin, je crois. Quand je fais un pas vers lui, il grogne. Sérieusement ? Puis il feule et s’enfuit d’un bond. Eh bien, charmant. J’ai l’impression de le croiser tous les deux jours, encore et encore, tapis dans une ruelle, perché sur un arbre, feulant sur un rebord… toujours à me fixer avant de disparaître…
Il commence à me faire chier.
Je soupire, caresse un chat plus amical et échange quelques mots avec le boucher, un homme à la carrure de rectangle et au sourire rare. Bon, direction la maison fantôme maintenant.
Je tourne, ratisse, pour un signe de chemin, d’habitations. Quelques-unes sont abandonnées et il n’y a pas grand chose. J’en profite pour me promener, mais au bout de deux petites heures, néanmoins, je trouve une baraque qui n’a pas l’air délabrée… Je fais un petit tour du regard et tente de toquer. S’il n’y a pas de réponse, je ferai un rapide tour ou reviendrai un autre jour…