Light
Dark
Bas/Haut

Le pion du progrès.

Le pion du progrès. Brandw10
Lun 30 Sep - 20:27


Le pion du progrès

Ex Deus machina



Opale. Jadis lumineuse. Aujourd’hui vacillante flammèche. Les lampions éclairent les rues où errent les citadins désoeuvrés. Les perspectives sont mauvaises. L’agriculture est menacée par l’avancée de la brume. En état de siège, c’est tout leur paysage et leur modèle culturel qui est malmené. L’anxiété et la méfiance crèvent le plafond, avec les crimes de droit commun, les bousculades, crises de paniques, prêches de rue… c’est une nouvelle cité claire-obscure.

Le diamant noir brille toujours. Mais pour combien de temps ? La robe verte d’Ellendrine frôle une paysanne réfugiée des faubourgs.

-« Mon lopin a disparu dans la brume à la campagne. Mes enfants n’ont plus assez à manger. C’est la faute des Sept ! » crie-t-elle en pointant un doigt accusateur vers l’aristocrate.

A son grand déplaisir, on la reconnaît encore. Faire partie des grandes familles n’a plus aussi bonne presse que par le passé, le désespoir grimpant.

-« Je suis désolée du malheur de votre famille. » l’écarte-t-elle poliment d’une main.
« Vous devez savoir que je ne suis depuis longtemps qu’une invité étrangère assez peu désirée, même si je porte encore le nom de Brightwidge. »

Elle laisse la maraude à ses reniements tout en fuyant dignement les regards attirés par cet esclandre fâcheux.

Ses préoccupations vont au-delà d’Opale. La fièvre de l’âge de Vérité n’attend pas que vous soyez prêts. Seuls les premiers arrivés sur la ligne du savoir seront récompensés, si quelqu’un l’est seulement pour son mérite et n’est pas étouffé ou plagié. Le sort d’Opale est consolidé par la digue de balises du Magistère. L’investigation sur l’Arbre-dieu sera bientôt lancée. En attendant, elle fera ce qu’elle fait de mieux : son travail.

Dans son hôtel particulier, elle a convié Farouk et Nostell pour une réunion resserrée. Ils sont en partance pour la ville de Cicada. Alors même que leur survie pose question suite à cette aventure, la lady anticipe déjà son prochain coup, politique cette fois. Il concerne Aramila.

-« Puisque vous m’avait assuré de votre motivation et de votre loyauté, il est temps de vous préparer pour votre prochaine grande mission à tous les deux… » entonna-t-elle en servant le thé, assise dans un fauteuil beige à oreille faisant face à Nostell et Farouk dans un grand canapé en velours cardinal.

Chacun put se saisir librement de son verre en porcelaine xandrienne ou des petits fours élégamment disposés par la gouvernante, Miss Figes.

-« Dernièrement, la Tribune d’Aramila s’est réunie pour une audience extraordinaire sous l’impulsion de l’archevêque d’Aramila : Sylas Edralden. Farouk est moi étions présents. Je vous clarifie ici les enjeux, Nostell. Les Aramilans ont pour tradition la démocratie, ce qui est très respectable, mais font malheureusement des salamalecs quand il s’agit d’acter le changement… désolé Farouk. Je dis cela sans offense. »
« Non, c’est bon, continue. » dit l’homme noir sans se formaliser. S’il fallait tourner quinze fois la langue dans sa bouche pour ne vexer personne, le débrief ne finirait jamais.
« En bref, l’archevêque voulait proposer une loi d’immigration pour inviter un nombre très restreints de scientifiques étrangers aider à la modernisation du pays, afin de faire face aux enjeux les plus criants : sécheresse, famine, fin du monde… tout en respectant les valeurs aramilanes et la foi… les fondamentalistes et les Renonais ont complètement dévié le débat… tout ce qui a été obtenu est un péleninage de la foi téléguidé par la chef de file des Fondamentalistes : Mo’agarah…
Ses yeux verts se déposent pour marquer l'instant, alors qu'elle étire un soupir fatigué en repensant à ces circonvolutions.
Elle va bientôt débuter un tour de tous les fiefs et village avec une caravane à sa suite en quête d’un miracle envoyé part les Douze… me voyez-vous venir dans mes chaussons feutrés ? » plaisanta-t-elle.
-« Je respecte beaucoup les us et coutumes… des fois, cependant, une main doit guider le destin… peut-être sommes nous sans le savoir les instruments d’une volonté supérieure ? Il se trouve que je connais le candidat idéal pour que pèlerinage ne soit pas vain et qu’Aramila puisse accepter selon ses termes le meilleur axe de développement pour répondre elle-même à ses défis... Si nous réussissons,  l'issue que j'espérais dès le départ sera consolidée. Aramila entrera sur sa propre voie du progrès. »

D’une chemise en cuir qu’elle ouvrit en deux, elle tandis à Nostell et Farouk la présentation de l’heureux élu des Douze :
-« Victorien Vance, le pion du progrès. »

Il allait visiblement y avoir du travail. Le curriculum était celui d’une petite frappe des hautes sphères, lâche maître chanteur, pas assez talentueux pour évanter les accusations à sa charge… il avait fui piteusement et se cachait à Aramila depuis. Le rapport présentait les dernières conclusions fournies à Ellendrine par la Guilde des espions sur sa localisation actuelle supposée, dans un mouchoir de poche, dans la région d’Adriane.

-« Il va y avoir du travail… tout un plan à mettre en œuvre. A ce stade, avez-vous des remarques, des questions ?"


Dernière édition par Ellendrine Brightwidge le Dim 13 Oct - 5:07, édité 1 fois
Sam 12 Oct - 19:28


Le pion du progrès

Avec Ellendrine (et Farouk).



Son employeuse l'avait fait mander, Nostell n'avait pas hésité à la retrouver dans cet hôtel, en présence du puissant Farouk. La strigoi s'était rapidement habituée à la présence de cet homme à la peau sombre. Il ne quittait que très rarement la brillante lady. Un garde du corps fiable. Un assistant à qui l'on ne pouvait rien reprocher. En leur compagnie, l'ex-Ombre ressentait presque l'envie de se détendre.
Or, c'est ici que commencent les affaires.
Naturellement, la mercenaire s'était installée dans ce grand canapé, face à l'archéologue, juste après avoir discrètement sondé les alentours. Une habitude dont elle ne pourrait sans doute jamais se passer. Mais également une habitude susceptible de lui épargner, un jour sombre, de regrettables dégâts.
Le thé qu'on lui proposait n'était bien sûr point empoisonné. La strigoi avait tout de même attendu un peu avant de ne serait-ce qu'y tremper les lèvres. Ses yeux aux reflets d'améthyste avaient vaguement étudié les petits fours disposés sur la table, à même un coquet petit plateau, avant de se fixer sans émotion aucune sur le visage de lady Brightwidge.
Cette dernière l'informa qu'une importante réunion avait eu lieu sur la décision de l’archevêque d’Aramila, Sylas Edralden, pour évoquer la proposition d'une loi d'immigration dans le but d'assurer la modernisation et, par extension, le futur de la nation.
Mais ?
Le sujet avait fini par dévié à cause des Fondamentalistes, avec en tête de groupe une certaine Mo’agarah.
Je ne m'attends pas du tout à devoir assassiner cette figure politique, non. Le regard de mon employeuse n'est pas celui d'une froide commanditaire.
Elle était soucieuse, certes, mais prévoyait tout autre chose pour cette importante gêneuse...
Un long tour terrain, sous escorte, parmi la plèbe, dans l'espoir que la solution à tous leurs problèmes lui tombe miraculeusement sur la tête... ou dans la tête ?
La mercenaire réprima une vilaine grimace. Comme pour mieux dissimuler son scepticisme quant à la notion de foi dans son ensemble, elle porta la tasse à son bec et but une simple gorgée. Nostell ne croyait pas aux miracles. De son vivant, elle n'avait encore jamais croisé de grand esprit ou de divinité quelconque. A ce que ses yeux étaient incapables d'analyser, la strigoi n'accordait que très peu de crédit.
Et non : je n'ai pas choisi de rejoindre Aramila pour son atmosphère religieuse. A l'époque, il me fallait une bonne cachette. Pour dissimuler un grain de sable, quoi de mieux adapté qu'un désert ?
Cessant très vite de songer à sa déserteuse de petite personne, l'ex-tueuse se recentra aussitôt sur le briefing.
Lady Brightwidge envisageait donc de forcer les choses tout en faisant bien attention à ne pas se mouiller les doigts. Pour cela, elle envisageait d'avoir recourt à un intermédiaire. Un "candidat", comme elle l'appelait. Victorien Vance, alias le pion du progrès.
Nostell ignorait tout de cet individu jusqu'à ce que son employeuse leur tende, à Farouk et elle, une documentation fidèle au personnage. Un homme haut placé, peu scrupuleux, avec quelques casseroles aux fesses. Un fuyard qui s'était réfugié en Aramila.
Ce qui nous fait au moins un point en commun.
Mais leurs "talents" différaient radicalement.
Entre un maître chanteur et une tueuse à gages, il y avait tout un monde.
Après avoir étudié le dossier - toujours en silence, oui -, Nostell fit remonter lentement son regard placide sur le visage de la lady.
Ces informations ne lui sont pas parvenues toutes seules. Elle a dû engager du monde pour les amasser.
Un bref coup d'œil en direction de Farouk.
Non, ce n'est clairement pas de son fait. A l'inverse, il n'aurait pas eu besoin de lire ces documents. Le bras de notre employeuse est probablement plus long que je ne le pense.
Une bonne chose, dans le cas présent.
Nostell se garda de songer à l'avenir. Ce n'était pas le moment de se laisser déstabiliser par le réseau de l'aristocrate.
Et sinon, des questions concernant tout ça ?

- Vous souhaitez faire de cet homme votre vecteur de miracle, comprit-elle. Ce qui signifie que nous allons devoir entrer en contact avec afin qu'il devienne votre précieuse marionnette. (Elle se permit une modeste gorgée de thé.) Je présume que nous n'arriverons pas à le faire adhérer à notre cause sans devoir préalablement l'enlever. Sachant que l'abîmer pendant le processus nuirait sans doute à la réussite de votre projet...

Croisant les jambes, elle s'adossa plus confortablement contre le moelleux dossier. Cela lui semblait tout à fait naturel. Comme de boire ce thé, oui.

- S'est-il reconstitué un entourage, avec le temps ? Que doit-on attendre de lui, exactement ?