Mar 30 Avr - 16:36
1880
« Est-ce vraiment nécessaire ? »
La question du jeune archevêque resta en suspens, alors qu’il releva la tête.
Un soleil de plomb gouvernait l’illustre cité d’Aramila ce jour-là. Sylas, secondé de plusieurs soldats de la Garde Sacrée, il progressait le long des ruelles principales de la ville. Sa présence ne passait, pour ainsi dire, pas inaperçue. Si des autochtones, qui stationnaient çà et là en terrasse ou au abords de la chaussée, suivaient d’un regard ébahi la figure d’autorité, d’autres individus, qui marchaient en sens inverse, s’écartaient naturellement lorsque l’escorte frayait un passage pour Sylas. Ce dernier, malgré la chaleur, arborait un visage radieux et énergique. Naturellement, lorsqu’il croisait un regard, il offrait un sourire, comme si ses zygomatiques se figeaient dans cet instant critique où il réussissait à oublier les maux passés comme les responsabilités. Quoi de plus facile lorsqu’il croisait un faciès innocent et juvénile ; ou encore celui d’un Triton qui exprimait quelque reconnaissance. Il sentit, l’espace d’un instant, le pouls de son cœur accélérer et la sueur de commencer à perler sur son front. Le brouhaha devenant insistant, il reprit contenance en frottant son visage d’un bref revers de manche pour éponger la poisse, ignorant le sable rude qui se glissait sous ses sandales.
En ce jour particulier, l’héritier des Edralden avait revêtu des habits amples, clairs, qui rappelaient son allégeance au Panthéisme. Il portait une ample tunique claire aux broderies dorées. Il avait soigneusement domestiqué ses longs cheveux en une queue de cheval et avait apporté un soin particulier à sa barbe ce jour-là.
Sa progression se fit sans encombre jusqu’à une place bien occupée. Des dévôts avaient pris place pour cette messe en plein air. Les bruits de foule s’intensifièrent alors que le prédicateur montait les marches d’une estrade en bois qui gémissait à chacun de ses pas.
Sylas fit face à la foule. Son regard parvint à se figer sur certains visages ; radieux pour la plupart, inquiets pour d’autres, mais un faciès, au loin, retint brièvement son attention. Il ouvrit la bouche comme pour exprimer une surprise, mais se ravisa.
Il offrit un sourire confiant à la foule et s’éclaircit la gorge, avant de prononcer d’une voix grave, lente et posée :
« Louée soit Keladron qui, dans sa grande mansuétude, apprit aux Êtres humains à apprécier l’œuvre des dieux pour la façonner à leur image… »
Il entonna un chant, bientôt suivi par un chœur complice, les barytons au devant accompagnant le psaume qui berçait la foule. L’espace d’un instant, Sylas oublia le temps présent, comme s’il eut été seul, fermant les yeux. Les visages de ses suivants, encore imprégnés sur ses rétines, lui procuraient la force nécessaire pour transporter son auditoire lors de cette prière faite pour apaiser les cœurs. Il ressentit un frisson, fugace, qui lui rappela sa condition cachée, comme si ce symbiote, qui s’était amouraché de son hôte humain, lui rappelait sa présence, sa propension à le posséder tout entier.
Mais il ne fléchirait pas aujourd’hui. Marquant une pause, il observa de nouveau les adeptes ; ces mêmes visages aux émotions multiples. Malgré la chaleur et l’ineffable lourdeur qui semblait vouloir affaisser son esprit, il poursuivit sa procession.
La messe se déroula sans encombre et, alors que Sylas redescendit de son piédestal, il croisa ce même visage, ce même regard qui semblait l’avoir perturbé au moment de sa démonstration.
Il darda un regard autoritaire sur les hommes responsables de sa sécurité pour leur intimer de lui laisser de l’espace et prit de la distance pour s’approcher d’une silhouette inconnue, humanoïde à première vue. Son visage se détendit.
« Bonjour. Vous m’avez l’air perturbée. Y a-t-il quelque chose que je puis faire ? »
Il rentra ses mains sous ses manches, la mine amicale.
« Est-ce vraiment nécessaire ? »
La question du jeune archevêque resta en suspens, alors qu’il releva la tête.
Un soleil de plomb gouvernait l’illustre cité d’Aramila ce jour-là. Sylas, secondé de plusieurs soldats de la Garde Sacrée, il progressait le long des ruelles principales de la ville. Sa présence ne passait, pour ainsi dire, pas inaperçue. Si des autochtones, qui stationnaient çà et là en terrasse ou au abords de la chaussée, suivaient d’un regard ébahi la figure d’autorité, d’autres individus, qui marchaient en sens inverse, s’écartaient naturellement lorsque l’escorte frayait un passage pour Sylas. Ce dernier, malgré la chaleur, arborait un visage radieux et énergique. Naturellement, lorsqu’il croisait un regard, il offrait un sourire, comme si ses zygomatiques se figeaient dans cet instant critique où il réussissait à oublier les maux passés comme les responsabilités. Quoi de plus facile lorsqu’il croisait un faciès innocent et juvénile ; ou encore celui d’un Triton qui exprimait quelque reconnaissance. Il sentit, l’espace d’un instant, le pouls de son cœur accélérer et la sueur de commencer à perler sur son front. Le brouhaha devenant insistant, il reprit contenance en frottant son visage d’un bref revers de manche pour éponger la poisse, ignorant le sable rude qui se glissait sous ses sandales.
En ce jour particulier, l’héritier des Edralden avait revêtu des habits amples, clairs, qui rappelaient son allégeance au Panthéisme. Il portait une ample tunique claire aux broderies dorées. Il avait soigneusement domestiqué ses longs cheveux en une queue de cheval et avait apporté un soin particulier à sa barbe ce jour-là.
Sa progression se fit sans encombre jusqu’à une place bien occupée. Des dévôts avaient pris place pour cette messe en plein air. Les bruits de foule s’intensifièrent alors que le prédicateur montait les marches d’une estrade en bois qui gémissait à chacun de ses pas.
Sylas fit face à la foule. Son regard parvint à se figer sur certains visages ; radieux pour la plupart, inquiets pour d’autres, mais un faciès, au loin, retint brièvement son attention. Il ouvrit la bouche comme pour exprimer une surprise, mais se ravisa.
Il offrit un sourire confiant à la foule et s’éclaircit la gorge, avant de prononcer d’une voix grave, lente et posée :
« Louée soit Keladron qui, dans sa grande mansuétude, apprit aux Êtres humains à apprécier l’œuvre des dieux pour la façonner à leur image… »
Il entonna un chant, bientôt suivi par un chœur complice, les barytons au devant accompagnant le psaume qui berçait la foule. L’espace d’un instant, Sylas oublia le temps présent, comme s’il eut été seul, fermant les yeux. Les visages de ses suivants, encore imprégnés sur ses rétines, lui procuraient la force nécessaire pour transporter son auditoire lors de cette prière faite pour apaiser les cœurs. Il ressentit un frisson, fugace, qui lui rappela sa condition cachée, comme si ce symbiote, qui s’était amouraché de son hôte humain, lui rappelait sa présence, sa propension à le posséder tout entier.
Mais il ne fléchirait pas aujourd’hui. Marquant une pause, il observa de nouveau les adeptes ; ces mêmes visages aux émotions multiples. Malgré la chaleur et l’ineffable lourdeur qui semblait vouloir affaisser son esprit, il poursuivit sa procession.
La messe se déroula sans encombre et, alors que Sylas redescendit de son piédestal, il croisa ce même visage, ce même regard qui semblait l’avoir perturbé au moment de sa démonstration.
Il darda un regard autoritaire sur les hommes responsables de sa sécurité pour leur intimer de lui laisser de l’espace et prit de la distance pour s’approcher d’une silhouette inconnue, humanoïde à première vue. Son visage se détendit.
« Bonjour. Vous m’avez l’air perturbée. Y a-t-il quelque chose que je puis faire ? »
Il rentra ses mains sous ses manches, la mine amicale.