Astrebrume

Horreur et humanité.
Partie inférieure monstrueuse, partie supérieure qui n’aspire qu’à la normalité.

Tel est le destin et la souffrance de tous les mutants qui ne tombent pas par fatalisme et protection de l’esprit dans une folie inhérente à celles de leurs créateurs.

La partie haute est elle celle d’une femme à l’allure svelte et sportive. Les courbes de son corps dévoilant les traits de ses muscles, signe d’une condition physique impeccable bien que néanmoins inférieure à sa partie basse. Sa facette humaine sur le plan de la corpulence est pour le reste assez banal, d’une beauté tout aussi banale avec une mâchoire quelque peu carré. Il en reste toutefois que ce corps humain n’est au final pas  totalement humain à travers quelques traits bestiaux ayant décidé de passer outre la ligne entre l’homme et le monstre.

Le plus visible d’entre eux est bien évidemment les deux cornes qui lui percent sa longue chevelure argentée, peu de gens savent vraiment leur utilité pour la mutante, elle-même ne sait pas non plus dans quel but son créateur a décidé de lui placer ses cornes sur son crâne, si ce n’est pour bénéficier potentiellement d’une arme de plus.

Le deuxième trait, plus discret, est celui de sa dentition effilée et prédatrice, typique d’un animal carnivore, ce qu’elle est. C’est par ailleurs cela qui explique pourquoi sa mâchoire est si développée, elle est faite pour pouvoir agripper la chair et briser des os.

Le troisième et dernier de ses traits va avec le second, les griffes dont elle dispose en lieu et place des ongles. Griffes dont la fonction est bien évidemment de trancher et de lacérer.

Ensuite, il serait difficile de parler d’une arachnée sans bien évidemment parler de sa partie inférieure, celle d’une araignée. Celle-ci a été créée à partir de plusieurs espèces d’araignées afin d’en prélever les propriétés pour les combiner en une seule entité. Corps massif, celui-ci dispose toutefois d'éléments encore dysfonctionnels et inactifs par absence d’intégration des pouvoirs compatibles notamment pour tout ce qui concerne le domaine du vénéneux. Néanmoins sur le long terme, Galatée est censée pouvoir disposer un jour de venin et de poils violemment urticants.

Le corps ressemble plus ou moins à celui d’une grande tarentule où est intégré sur sa tête celui de la demoiselle. Un corps solide doté d’un exosquelette résistant et de pattes puissantes auxquelles s’ajoutent 6 yeux, la plupart ayant une qualité toutefois inférieure à celle de ses yeux d’humain. Ils sont donc en réalité peu utilisés par la mutante, les humains ayant un sens de la vue bien plus développé et efficace que les araignées.

Niveau personnalité, Galatée est une mutante qui ne s'accepte pas. Son rêve à toujours été de pouvoir être humaine, de pouvoir être comme tout le monde, d’avoir une famille, des relations. Malheureusement étant une araignée géante, les choses sont quelque peu compliquées. Après plusieurs tentatives de socialisation qui ont malencontreusement mal fonctionné, la mutante a dû se résigner à subir sa condition d’araignée dans les ombres de la cité des milles lumières.

C’est toutefois, malgré son apparence et la raison pour laquelle elle a été conçue, une personne profondément gentille. L’expression d’un parfait décalage entre le corps prédateur et l’esprit encore jeune fille. Ce qui ne l'empêche pas toutefois de quelquefois subir les instincts encore très présents en elle de l’araignée.

Un ensemble de causes et de circonstances qui font que Galatée a profondément honte d’elle, et surtout de son corps arachnide qu’elle tente de cacher dans la pénombre par tous les moyens.

Mutant créée à partir d'une espèce d'araignée géante, Galatée dispose ainsi d'une bonne partie des traits de son espèce parente.

Elle dispose ainsi premièrement du pouvoir de Glandes séricigènes vivifiée, ce qui lui permet de pouvoir marcher sur quasiment n'importe quelle surface indépendamment du sens mais aussi des tisser des toiles plus résistante que l'acier mais très inflammables.

Indépendamment de ce pouvoir, et sans aller jusqu'au niveau des pouvoirs contre qui ses avantages entrent en concurrence, elle dispose également d'une force et d'une résistance nettement supérieure à un humain normal, la faute à son corps massif dans la partie inférieure est pourvu de muscles imposant et d'un exosquelette qui rends toutefois difficile certaines manœuvres.

Enfin, ses sens d'araignée sont également assez développé, les poils de ses pattes lui permettant de pouvoir sentir les mouvements dans l'air.

Qui suis je ?

Question ample qui peut signifier beaucoup de choses. Pour certains, elle exprime une quête d’identité, pour d'autres, une quête de ses origines. Peu importe, elle peut souvent signifier les deux.

A cette question à double sens, Galatée n’avait pendant longtemps jamais été en mesure de répondre. Son plus vieux souvenir, c’étaient les lumières du laboratoire, le son, la vue et l’odeur des scientifiques qui l’entouraient. Elle n’avait aucun souvenir ni de sa naissance, ni de sa transformation en tant que mutante. Rien. Le début de sa vie commençait avec les néons de sa chambre et avait pour vocation à se terminer entre ses mêmes lumières.

Ainsi à l’inverse de bien d’autres expériences de mutant, la perception de Galatée de sa propre captivité n’était pas particulièrement terrible et difficile à vivre.

Ne se souvenant pas de tout ce qui précédait sa vie de mutante, elle n’avait rien à regretter, personne qui ne pouvait lui manquer, aucun traumatisme de recevoir un corps difforme comme l’était celui d’une arachnide. Presque heureusement pour elle, elle avait subi sa transition à un âge où la mémoire était encore volatile.

A cette absence de choc, pouvaient également s’ajouter les méthodes de questions des sujets d’expérience de cette section de la recherche biologique du magistère. Bien qu’elle ne connaissait pas son nom, celui qu’elle appelait sous le nom de père avait en effet des méthodes particulières de gestion de ses chimères. Là où nombre de scientifique opalin, encore plus dans le domaine des chimères et des mutations biologiques avaient pour trait des posture implacables, inhumaines, obsessionnelles ou encore sadiques, Père lui avait constaté que face à une race avec une conscience humaine et un corps qui en l’absence de toute question de pouvoir accordé par les cristaux ou la brume restait parmis les plus puissants dans le monde d’Uhr, il était souhaitable de ne pas s’antagoniser avec ses propres sujets d’expériences.

Qu’importe la puissance d’un être, la faiblesse reste toujours la même, son cœur, ses affects. Ainsi à défaut de pouvoir se soucier uniquement que l’emprisonnement du corps, il était également possible d'enchaîner une âme. Tout cela à travers l’amour, l’admiration, la dépendance affective… Tant de possibilités bien plus efficaces que la simple cage de prison…

Ainsi, c’est dans cette atmosphère presque bienveillante en surface que Galatée fut élevée, d’abord en tant que mutante juvénile puis presque jeune adulte. C’était une chose presque curieuse que de voir une arachnée en état de semi-liberté dans une zone toutefois fermée qui communiquait presque normalement et amicalement avec l’ensemble du personnel autorisé à l’approcher et à l’étudier.

Il y avait toutefois bien entendu quelques risques à l’approcher car monstre hybride, si elle avait une attitude assez humaine, les instincts de l’araignée restaient présents en elle et il fallait tout de même rester prudent au même titre que tout individu désirant domestiquer depuis la naissance un animal prédateur. Fort heureusement, elle avait développé un caractère assez docile, ce qui était bien pratique quand par la volonté des supérieurs du laboratoire, Galatée avait tout autant été conçu comme un sujet de recherche qu’un projet hypothétique de soldat biologique dotée de traits et avantages d’un animal précis, le premier d’une longue série.

Cette méthode de formatage avait bien entendu quelques conséquences sur la jeune mutante en développement. Éduquée comme une enfant humaine au point d’en avoir la première caractéristique, à savoir le mimétisme par rapport à son entourage direct, la mutante en a acquis la volonté d’être elle-même humaine. Malheureusement pour elle il lui suffisait de baisser un peu le regard vers tout ce qui était en dessous de sa ceinture pour constater sa différence, d’autant que de la volonté de Père, elle n’avait jamais côtoyé d’autres mutants, d’autres personnes dans sa situation, restant ainsi uniquement aux contacts d’humain qui ne pouvaient que constater sa monstrueuse différence. De plus, à l’exception de quelques personnes pour qui la vue des arachnides et des insectoïdes ne faisait pas grand-chose, il suffisait d’un minimum de sens d’observation pour constater le doute, le dégoût ou la peur dans les yeux de quelqu’un.

A vrai dire, à force, tout cela tournait dans son esprit. Comment être humaine quand on est différent, qu’on dispose des traits d’une espèce que le commun des mortels méprise. Le questionnement laisse aussi place au doute, lui-même prémisse de la honte et des complexes.

D’habitude plus sociable, l’araignée finissait par s’isoler, se terrer et rester de son coin. D’une certaine manière déçue par la manière dont la voyait les autres, qu’importe ce qu’elle faisait, condamnée à la monstruosité et la solitude par une apparence qui ne reflétait aucunement sa propre âme. Un repli sur soi presque strictement banal pour une araignée.

Être comme les autres, une ambition contrariée. Un rêve qui contrairement à d’autres de sa race n’était pas le fait d’un regret mais plutôt d’un rejet.

A mesure que ce problème triturait son esprit, le constat était sans appel. Galatée était une personne positive quelque peu idéaliste sur les bords. La notion de fatalisme ou encore de pessimisme ne faisait pas partie de son caractère. Or, si jamais elle restait ici, elle serait condamnée à toujours vivre la même vie.

Ainsi, ce n’était pas par haine d’Opale, de la science ou de qui que ce soit que l’araignée désirait alors s’échapper. Non, c’était simplement guidé par le simple souhait de changer, ce qui ne pourrait arriver qu’une fois qu’elle pourrait obtenir sa liberté.

Il devait y avoir une solution, elle l’espérait. Toutefois quand bien même elle appréciait les gens ici, elle savait que jamais il ne lui la donnerait. Ils restaient des chercheurs après tout, l’humanisation des chimères n’était pas dans leurs intérêts.

Elle devait partir quitte à devoir s’échapper. Besoin de changer, besoin de devenir quelqu’un d’autres.

Enfin bon, une évasion encore plus d’Opale cela se devait d’être préparé. Galatée n’en avait malheureusement absolument pas ni les compétences ni l’expérience, si bien qu’avant même de tenter quoi que ce soit durant une nuit profonde qu’elle tomba sur Père qui de son côté, souriant, ne semblait absolument pas surpris.


Presque surprise de voir Père devant elle, Galatée reculait de plusieurs pas.

Je…


Père continuait de sourire, confortablement posée sur son fauteuil.

Ce n’est rien, tu n’as pas à te justifier plus que davantage… Après tout le propre de la conscience est d’abattre les barrières de ce qui le retient. Une quête de liberté… face au monde, face à la mort… face à l’existence entière…

Galatée restait silencieuse, elle n’avait pas vraiment peur, elle connaissait Père et ses habitudes. Non, elle avait juste honte d'elle-même.

Galatée. Pourquoi veux-tu fuir ?


L’araignée tournait le regard, réfléchissant de manière hésitante. C’est vrai ça. Pourquoi ? Au fond tout ce qu’elle faisait n’était battu que de ses pulsions et des hypothèses. Il n’y avait rien de défini dans ce qu’elle cherchait à faire, tout autant dans ses méthodes que son objectif.

Un désir sans véritable réflexion. Classique.

Je ne saurai pas vraiment dire pourquoi.. J’ai l’impression qu’en restant ici je resterai toujours la même personne. Que je ne changerai jamais.

Hum… Je vois…

Il n’y avait pas besoin de plus de mots pour lui. Il savait depuis bien longtemps ce qui torturait l’esprit. À quel point il considérait ceci, c’était une autre histoire.

Vouloir changer et sortir des sentiers battus. C’est profondément humain. Un animal n’aime pas l’inconnu et sortir de ses habitudes.

Presque timidement, Galatée souriait.

Si tu veux pouvoir sortir, je peux t’aider à le faire. Après tout, j'ai les autorisations.

L’araignée releva la tête, surprise. Avant qu’elle ne puisse dire quoi que ce soit, Père continua.

Ce choix, c’était précisément celui que je voulais que tu fasses, et puis cela m’arrange de le faire maintenant. J’ai obtenu ce que je voulais ici, si je deviens trop ambitieux le renseignement finira par me rendre visite.. Je vais devoir disparaître et puis… j’ai affaire à Xandrie.

Ce que je devais faire ? Pourquoi ? Ce n’est pas dans l'intérêt d’Opale que de relâcher leurs créations..

Galatée… Je suis un scientifique… Je n’ai que faire de nationalisme, de politique. Faire des armes, des soldats… Oui je peux le faire mais cela n’a jamais été mon propre objectif.

Posant son regard sur les outils non loin de là.

En tant que chercheur, notre but n’est pas de faire de la politique ou de servir de vains intérêts. C’est de chercher, de découvrir, de comprendre, d’analyser. Le désir de connaissance est la seule chose qui nous anime.

Et quel rapport avec moi ? En quoi mon départ peut y faire quoi que ce soit.

Tu te considères comme humaine n’est ce pas ? Tu désires redevenir humaine à cause du regard des autres. Enfin… encore faut-il que le terme redevenu soit le plus proche de ta situation. Cette hypothèse n'est en effet valable que si… tu étais anciennement une humaine sur laquelle ont été greffés des éléments de monstres arachnides.

Tu…

Effectivement… Je suis un biologiste, mon domaine de recherche est le corps, mais aussi l’âme est l’esprit. Le corps est lui-même est déjà un mécanisme naturel qui fait passer toute forme de technologie pour quelque chose de pitoyable. Mais quand est il de l’esprit ? Cette force insondable dont personne n’est capable de ne serait ce qu’approcher de la compréhension de sa nature. L’âme et le corps. Sont ils un ou sont ils deux ? Qu’est-ce qui explique que certaines créatures disposent d’une conscience et d’un libre-arbitre tandis que d’autres ont un esprit minimaliste.

Est-il possible de renforcer un esprit jusqu’à lui donner une conscience… humaine…

Il souriait de plus en plus.

Si jamais on greffe à un monstre instinctif, des fragments de corps humains jusqu’à lui donner une double nature. Est ce que l’entité principale de la chimère peut elle finir par développer un esprit similaire à celui d’un humain.

Non… c’est impossible…

Galatée. Lorsque je te servais deux plats. Un de nourriture humaine, un de nourriture pour araignée. Vers lequel vas-tu toujours instinctivement en premier.

Il avait raison. Depuis le départ il avait toujours été plus naturel pour elle de manger comme une araignée.

L’arachnée était dépitée. Elle n’était pas humaine… pire, elle ne l’avait jamais été. Normal qu’elle ne se souvienne de rien avant sa chimérisation et la greffe de neurones humains à travers sa partie supérieure. Elle n’avait pas le même état de conscience.

La mutante baissait la tête.

Ah désolé… Je ne voulais pas te decevoir…

Il s’approchait du monstre. De celle qui n’était pas au final, un humain devenu monstre mais un monstre qui devenait humain. Touchant ses joues de ses paumes comme pour la consoler, il continuait.

Qu’est ce qu’être humain ? Une question dont la réponse semble simple pour ceux qui ne réfléchissent jamais ou bien refusent par paresse intellectuelle de le faire. A cette question, tu trouveras une des réponses pour avancer dans ta vie. Galatée… je ne t’ai pas créé pour être un monstre… Je l’ai fait pour que tu tentes d’avancer vers l’humanité que tu souhaites..

Les larmes aux yeux, la mutante répondait faiblement.

Vu comme ça…

C’est ma nature.. Après tout, je suis relativiste.

Quand pourrais-je te revoir après ça…

Qui sait ? Peut être un jour, peut être jamais. Qui sait comment est fait la vie. Concentre toi tout d’abord sur toi-même. La voie que tu as choisie est bien dangereuse.

Évasion sans être évasion. Le même jour disparaît d’un centre de recherche, une mutante et un cadre du département scientifique.

Un an plus tard, il semble rôder dans les fonds de la cité aux mille lumières un curieux animal. Dissimulée dans une pénombre qu’il ne semble pas avoir envie de quitter.